C’était une danse, un balai des sens, une course contre la montre, une respiration qui s’essoufflait doucement. C’étaient des pas qui martelaient violemment le sol, des hurlements après un voleur, des morceaux de fer qui rayaient le sol. C’était April, courant après un inconnu qui, furtivement, lui avait dérobé Destiny. Elle lui balançait de nombreuses injures mais une chose, parmi ces cris enragés, semblait plus forte que les autres : Les Menaces de Mort. Oh oui, ce petit être allait manger, une fois que la poupée serait récupérée. Cet enfoiré aurait très bien pu s’arrêter, lui planter un couteau sous la gorge et menacer April avec quelque chose du genre « Un pas et je lui tranche la tête. », ce qui l’arrêterait net mais, apparemment sans arme, il se contentait de courir à toutes jambes, fatiguant la blonde qui croyait bien lui ôter la tête une fois que tout s’arrêterait.

— Un petit retour en arrière pour vous éclairer. —

C’était dans la journée, alors que la demoiselle s’était décidée à quitter la contrée de Gallia depuis quelques jours pour aller ailleurs, voir d’autres horizons. Le voyage était sympa et les contrées semblaient un peu plus riches qu’à Gallia. Moins de verdure, plus de constructions humaines, après tout, il fallait s’y attendre, c’était la plus grande contrée … donc la plus habitée. Mais ce qui intriguait le plus notre nomade – euh … oui, oui, nomade – n’était autre que les croyances. Tout le monde savait, depuis le temps, que Begnion était la patrie la plus croyante de tout Tellius. Ce n’était pas « pourquoi » que voulait savoir April, mais bien « qui ». Qui régnait sur ce monde, à leurs yeux ? Ainsi, elle pourrait développer son savoir et peut-être mettre un nom sur … « quelque chose ».

En plus de ça, son voyage avait été entrepris pour une raison assez particulière : La forêt. Serenes, tout le monde en parlait … enfin ; tout le monde parlait du massacre et de la disparition de la race des hérons, finalement prisée depuis le temps par de nombreux êtres tous aussi vils les uns que les autres. En fait … April était une intéressée par tout, en fait … Pas si conne, pas si folle ? Excellente question, je vous l’avoue. Derrière cette belle image de folle à lier se cachait cette culture et cette intelligence plutôt développée. Mais vous le saviez, non ? Ah … Moi non plus, c’est vrai.

Puis, après tout un voyage à regarder un peu partout et à vivre seule – solitaire, c’était depuis longtemps –, elle arriva enfin dans un village, si petit village, aux allures de nid douillet. Comme dans beaucoup d’endroit, cependant, il y avait cette barrière entre les riches et les pauvres, quelques mioches traînant là avec de très beaux vêtements tandis que d’autres, moins « chanceux », se trimbalaient avec des haillons, regardant la voyageuse avec beaucoup d’intérêt. Un petit garçon semblait intrigué par la lance, sur son dos, mais aussi par son sourire démentiel et ses yeux violets. Une blonde aux yeux améthystes, d’où cela pouvait-il bien provenir ?

Haha, d’un endroit que tu ne connaîtras que si tu t’y rends un jour, mon enfant … Un sourire sur les lèvres, April s’approcha de lui et, du bout de ses doigts fins et graciles, caressa sa joue. Il en sourit, de manière adorable, laissant la demoiselle s’en aller. La démarche de la blonde était lente, fluide, elle regardait partout autour d’elle. Cette partie du village était du genre à accueillir les plus pauvres de la grande ville mais il semblait être le meilleur moyen de se rendre près de Sienne, zone la plus peuplée de Begnion – mais aussi lieu où se trouvait Sanaki, l’apôtre de cette patrie.

~ … ~ … ~ … ~

Après une longue marche, la nuit s’était décidée à tomber, recouvrant chaque parcelle de l’endroit par une couche violette, assez sombre, les seules lumières étant procurées par la lune et quelques lampadaires. C’était silencieux, il n’y avait … presque pas un rat. Il y avait April, toujours là, à marcher, visitant la plupart des villages, certains plus petits que d’autres …

Mais, alors qu’April se croyait totalement seule, un être, plus petit et fin qu’elle, arriva et, d’un coup, prit Destiny par la main et l’emporta. C’est ainsi que cette course folle débuta. La blonde, mise alors hors d’elle, s’était mise à lui courir après à une vitesse surprenante. Elle lui ôterait la vie, qui que ce soit. Pas touche à Destiny. Ni à Satsugai. Mais il y avait peu de chance que cette fidèle lance lui soit dérobée.

— Retour au Présent, non ? —

La course prit fin près d’un cul-de-sac, où le chapardeur n’eut d’autre choix que de s’arrêter. Il s’assit par terre, se blottissant contre le mur, Destiny serrée contre lui. Un sourire sadique aux lèvres, April se rapprocha de lui, lentement, la pointe de Satsugai plantée droit dans sa direction. Il se mit à sangloter, tremblant doucement.

— Je … Ne … Ne me … Ne me faites pas de mal !! Sinon … sinon … Sinon je le dis à … Je … S’il vous plait …

La blonde écarquilla les yeux. Un enfant ? Que faisait-il ici ? Si tard ? Elle s’en approcha, rangeant doucement sa lance. Sa main se porta sur sa tête, glissant jusqu’à sa joue pour lui relever le visage. Lorsqu’il la regarda, rapidement, elle le reconnut. C’était cet enfant, tout à l’heure. Il avait dû voir Destiny et voulait la récupérer ? Ou était-ce autre chose ? C’était un enfant … seul ? Elle le fixa et, beaucoup plus avenante, elle prit la parole.

— Ne t’en fais pas, je ne vais rien te faire. Par contre, j’aimerais que tu me rendes ma poupée. C’est important. Et … je peux te ramener à ta Maman, si tu veux.
— Je n’ai … pas de maman …

Ce serait plus compliqué. Mais April aviserait. Quant au gosse, il se calma et tendit la poupée, de manière lente, mais moins méfiante. Il se redressa et, d’un coup, se jeta sur elle. Il pleura, les sanglots laissant place à de vraies larmes. April, un peu surprise, décida de lui caresser doucement le dos, le gardant contre elle. Lâchant des mots incompréhensibles, il finit par lui demander tout bêtement de rester avec lui jusqu’à la tombée du jour et … qu’il avait peur. Peur d’être tout seul. Peur de se perdre. Peur, tout bêtement.

La main de la demoiselle s’empara de celle du petit garçon et elle se leva, Destiny d’un côté, lui de l’autre. Pendant le chemin, il lui glissa s’appeler Jun, un nom simple et facile à retenir. Sa petite main serrant bien celle d’April, il la suivait doucement. La blondinette l’amènerait jusqu’à l’apôtre.

Sur le chemin ils croisèrent un lapin, il y avait une femme, silencieuse, qui marchait lentement. Ils passèrent devant elle, quand le gosse tomba non loin d’elle. April le ramassa et s’excusa.

— Je suis désolée … Il est assez … maladroit.

C’est tout ce qu’il y avait à dire. Pourquoi parler ? Pourquoi en rajouter ? Elle ne la connaissait pas et … on ne faisait pas connaissance durant la nuit alors qu’il y avait des choses à faire. Si ?