Une bien étrange situation oubliée depuis des lustres. Apaisante, calme, silencieuse - si l'on oubliait le brouhaha extérieur - et nostalgique. Une sorte de retour dans le passé. Chose qu’il ne souhaitât pas. Tout puait la trahison, l'hypocrisie,... le complot. Mais une chose particulière attira son regard rougeoyant. Blaze venait de poser son arme de prédilection à portée du mercenaire sanguinaire. Il fut bien le premier à agir aussi sottement, aux yeux du vengeur. Il ne lui faudrait que quelques secondes pour s'en emparer, la brandir suivant un geste ample et trancher la tête du marqué. Néanmoins, ce mouvement assassin ne rimerait à rien. Raison pour laquelle il dé-serra les poings et prit une grande inspiration. Il écouta la proposition de l'héritier des loups en n'affichant aucune expression, le regard ancré dans les yeux de son interlocuteur. Ces derniers étant très souvent révélateurs.

- Eh bien, je pense personnellement que tu as plus que juste une prime sur ta tête. Tu cherches quelque chose, et ça te consume, tu me parais pas bête comme homme, donc ça doit clairement valoir le coup d'y jeter sa vie. Parle si tu veux, mon avis est déjà fait. Tu as mon épée si ça t'intéresse. Enfin, si un membre de la garde de Nailah te convient.

Compréhensif et généreux. Il ajouta "optimiste" à la liste. Comme sa sœur, encore une fois. Une pensée assez troublante qui lui valut un sourire en coin. En outre, il pouvait compter sur le bras armé de Blaze. Une bonne nouvelle après son échec dans la taverne. Il aurait dû suivre attentivement les conseils d'Agnan Daeroth, au lieu de sombrer dans une folie meurtrière. Non désireux de s'abîmer dans un nouveau gouffre de désespoir, il balaya cette sinistre pensée au profit d'un avenir un peu moins sombre. Il l'espérait, du moins. Que ferait sa lame, par contre ? Un autre massacre ? A éviter. Il y avait déjà assez de grabuge aux alentours.
En écoutant le bretteur à la lame céleste dialoguer avec cet étrange vieillard, Burnagore comprit l'origine des capacités de son compagnon d'infortune. Notamment sa vélocité et sa souplesse. Un potentiel allié de poids, en somme.

- Tu imagines qu'être d'Hatary confère certains... privilèges, je peux t'aider si tu le souhaites, le choix est tien. Mais si je peux poser une seule question... Que cherches-tu? Qu'est-ce qui peut rendre un être habité par l'esprit de la justice si impitoyable ?

Avant même de répondre, Burnagore s'empara de l'épée de Blaze et la lui tendit d'une poigne de fer. Le geste fut plus ou moins rapide, assez pour surprendre son nouveau compère roux. Tandis que le vengeur maintenait fermement son Ignifer tâché de sang à bout de bras. Il entonna une réponse d'une voix légèrement grave mais fière. Petit à petit, le mercenaire récupérait de son ardeur. Espérons juste que ça lame ne foute pas le feu dans la maison suite à un excès de confiance en ses capacités...

- "Tu avais le droit à trois questions, il me semble. Nul besoin de me demander l’autorisation pour les poser. Tu te demandes ce qui m'a rendu aussi farouche ? Le passé. Les êtres qui te sont chers... six-pieds sous terre; une vie de mercenaire anéantie par la conspiration, par la trahison; une sœur entre les mains de mon meilleur ennemi; un monde rempli de fumiers. Cela fait bien longtemps que l'horizon s'est imprégné du rouge sanglant de mes victimes, au même titre que le soleil levant. Je ne puis revenir en arrière et ma voie restera la même, quoi que je fasse. En résumé, c'est le passé qui m'a avili", conclut-il sans ciller.

Froid en apparence, il rectifia le tir au dernier moment en esquissant un sourire en coin. Peut-être que l'homme qui se tenait en face de lui méritait bel et bien sa confiance ? Effectivement, il se devait de suivre les conseils du vieillard, pour cette fois au moins. La sagesse n'est pas dans une seule tête. Exactement les mêmes propos que sa sœur cultivée. Elle lui manquait terriblement, et chaque pensée le torturait. Mais il devait s'y faire. Le chaos l'attendait dehors. Pour lui, mais aussi pour son nouveau coéquipier. Eskhàrion allait de nouveau fendre l'air. Certaines choses ne changent jamais.

- "J'accepte ton aide. Je te confère la mienne par la même occasion. Néanmoins, nous avons besoin d'un plan, et vite. Ça s'agite considérablement, dehors. Il n'est pas à exclure que la matière grise responsable du contrôle des morts fasse de nouveau des siennes. Pour nous avoir débusqué dans la taverne, il devait obligatoirement savoir que j'allais m'y rendre au préalable. Je ne crois pas au hasard. De plus, nous aurons certainement toute la garde de la ville à nos trousses. Cette maison ne va pas tarder à finir en cendres. La porte risque de voler en éclats, et si ce n'est pas le cas, nos ennemis n'hésiteront pas à nous rendre là pareil en nous enfumant. Ton vieil ami risque d'en pâtir", expliqua le mercenaire, désormais debout, tout en posant son regard sur le vieux Laguz.

Un beau merdier, en effet. Il fallait s'attendre au pire du pire. De quoi les occuper pendant un bon moment. Cela lui faisait du bien de parler comme sa sœur le ferait. Avec des mots, au lieu de faire usage de sa lame. Sa mère en serait extrêmement fière, et son père suivrait certainement la marche...
De quoi le réconforter un peu. Il serra le pendentif de son paternel dissimulé sous sa veste de cuir.

Une être déchu, dont l'innocence a été arraché. Blaze pouvait voir dans ses yeux les scènes de son passé tragique, comme si on avait prit son cœur et que son pire ennemi le mangeait devant lui. Une douleur sourde et sombre sortait de son corps, ses paroles étaient glaçantes comme la mort, aspect qu'il semblait avoir complétement embrassé... Et pourtant, durant le bar, il semblerait qu'un fond d'homme, d'être aimant enfuis en lui était ressortit. Comme si, à force de polir un morceau de fer rouillé, l'acier encore sain était à nouveau exposé à l'air frais. Suivant cette idée, Blaze se fit la promesse de redonner le plus possible à Burnagore son aspect d'origine. Il retirera toute la rouille, mais conservera le mordant et le tranchant de la lame de l'âme de Burnagore. Comme la sienne.

Son âme... Sa Lame. Fine. Souple. Tranchante et aiguisé comme un rasoir. Inébranlable. Il aimerait être tout cela à la fois, mais il s'en rapprocherait le plus qui l'est permis. Avec ses yeux pénétrants, il observa Burnagore avant que celui-ci lui redonne rapidement son épée d'une main de fer. Assez rapidement pour le surprendre, mais la foi de Blaze était forte, très forte. Et il savait pourquoi. Burnagore est plus proche de lui qu'il ne souhaite le dire. Devenir fou et assoiffé de sang était une aberration pour le jeune Marqué Hatarien, mais c'est une possibilité... Il avait ce que Burnagore avait en lui. Le sombre dessin de la vengeance, la poigne froide de la Mort... La rage pourrait déformer sa justice, rendre toute sa légèreté d'esprit bonne à jeter et plus jamais il n'esquisserait un sourire, l'alcool aura le goût du sang, comme tout le reste, et jamais il ne regardera le monde de la même manière. Jamais il ne retournera à cet état si... bestial et primaire. Car si cela arriverait... Blaze se rendit compte qu'il ne serrait rien de plus que son père, et l'ombre de sa mère. Comme son compagnon d'infortune, Blaze deviendrait un fantôme.

- (Quand j'avais 14 ans, j'étais comme toi. J'ai perdu ma mère, mais je savais qu'elle ne reviendrait jamais. C'est ça qui m'a permis de panser cette plaie. Contrairement à moi, tu as encore quelque chose à perdre mon frère... Oui, il n'est pas trop tard, et c'est pourquoi tu t'es abandonné, tu es devenu un émissaire de la Mort pour reprendre et protéger ce qui peut encore l'être. Ta quête est noble, mais si tu continues... C'est la main d'un tueur que ta sœur serrera, pas celle de son frère.)

Burnagore récupérait. Le feu de la volonté dans ses yeux se ravivait à chaque seconde. Mais cette fois, avec une sorte de contrôle, comme s'il avait retrouvé un vieil ami qu'il pouvait respecter et accorder sa confiance. Blaze sourit, heureux de voir que ses mots ne furent pas vain. Il sentit la force retourner au corps de Burnagore, au point où la température de la salle semblait avoir légèrement augmenter. Et elle ne diminuera probablement pas, cet endroit sûr ne le sera plus dans quelque temps, et sans plan, ils se feraient tuer immédiatement. Blaze réfléchit aux options possibles. Il commença avec la plus évidente, la fuite, hélas, la maison est mal placé pour tenter une échappatoire discrète. Trop près de la rue marchande, avec très peu de couverture. L'option offensive est à proscrire, les adversaires seraient trop nombreux sans compter la blessure de Burnagore. Quand à l'approche diplomatique... Les mots d'un membre de la garde royale pèsent peu ici...

"Nous ne sommes pas dans une bonne situation. Tu es blessé, et même si tu penses que c'est pas grand chose, tu subiras ses effets au moment le plus important. Un vertige durant une valse d'épée et... Le feu les a probablement tous rendu irritables à souhait. Malgré mon rang, personne ne m'écoutera."

Blaze raccrocha son sabre à la hanche, s'assurant qu'il était placé correctement. Il prit sa gourde et mit une grande quantité d'alcool dans sa bouche avant de tirer sa lame, puis de cracher le contenue sur le tranchant de son sabre. Son esprit fit une carte en 3D du village, celui-ci avait 2 points de sorties ou d'entrées, mais il est plus que probable qu'il soit garder en ce moment même. Rester et attendre que le tout se calme est inutile, deux bretteurs roux sont le genre de personne facile à identifier. En soupirant, il expliqua à Burnagore.

"Nos options sont très limités. On peut faire une sortie en force, car on ne nous a pas encore suivit jusqu'ici, mais ca sera vite le cas si on reste plus longtemps. L'objectif sera de rejoindre la rue marchande et de s'enfuir dans les petits couloirs, plus propices pour des bretteurs comme nous. Ils ont des archers, donc les toits sont à proscrire... Monsieur, vous devriez rester à l'abri le temps que tout ceci se calme. Je ne peux que vous remerciez pour votre générosité, mais nous devons partir, ou vous risquez d'en subir les conséquences."

"J'ai d'ailleurs une excellente idée, jeune Hatarien. Je dirais que vous m'avez agressé et que je ne pouvais rien faire avec une lame sur la gorge. Ahahaha."

Un bon point fait par le vieux Laguz, ceci pourra détourner l'attention durant un temps, et du moins, il serra en sécurité. Blaze regarde Burnagore et hocha la tête. Le temps jouait contre eux. En quelque pas rapide, il se rapprocha de la porte et retira son bras gauche de son manteau, lui permettant de faire de grands et amples mouvements sans contrainte. Il effectua quelques tics nerveux avant de retrouver sa concentration optimale. Il porta sa main au fourreau et soupira longuement, se raidissant pour la bataille à venir.

"On évite le combat, on risque vite se faire encercler. On devrait pouvoir se faufiler jusqu'à la rue commerçante, c'est la que ca se complique. Et surtout, on reste côte à côte. Si jamais tu ressens un malaise, ou n'importe quoi, tu me le dis!

Je n'aime pas tuer Burnagore. Au fait, j'adore me battre, mais je hais faire couler le sang. Mais ce que je hais encore plus, c'est laisser des hommes bons mourir... Et il y en a de chaque côté... Voici mon idée. Ils vont se concentrer sur celui qui a mit le feu à la taverne, donc dès que nos épées seront sortis, il serra facile de nous identifier. Si jamais une telle éventualité arrive, nous échangerons de sabre. Je suis plus frais et plus en forme que toi, je pourrais plus facilement les retenir et captiver leurs attention sur moi. Enfin... Si cela arrive."

Blaze esquissa son fameux sourire insolant et arrogant, chargé d'adrénaline et de force pour la suite. Il avait hâte de voir ce que l'avenir lui réservait avec Burnagore. Encore devait-il survivre pour voir la suite, mais ca, c'est ce qu'il fait de mieux.

Il n'avait pas travaillé en équipe depuis bien longtemps. La boucherie ayant eu lieu dans le village de son oncle aux côtés de Redeye ne rentrait certainement pas dans ce domaine d'action. Ils n'avaient fait que se battre dos à dos, et encore. Ce coup-ci, tout allait changer. Une nouvelle organisation avec un nouvel allié. Un autre retour dans le passé, mais sous un autre jour. Une époque passée sous la lumière flamboyante du soleil de midi, lorsque le mercenaire portant le nom de Burnagore réglait les conflits en versant le moins de sang possible. Une période quasiment oubliée et un objectif bien plus noble que de tuer pour assouvir son constant désir de vengeance reporté sur l'ensemble des êtres vils.
Se retenir de tuer. Un sacré challenge.

- Nous ne sommes pas dans une bonne situation. Tu es blessé, et même si tu penses que c'est pas grand chose, tu subiras ses effets au moment le plus important. Un vertige durant une valse d'épée et... Le feu les a probablement tous rendu irritables à souhait. Malgré mon rang, personne ne m'écoutera.

Burnagore tâta sa blessure à la tête. Son interlocuteur prévenant ne manquait pas de jugeote. Ce genre de blessure, pas fatale en soi, pouvait très bien le devenir en effectuant des gestes trop brusques. Or, un combat à l'épée - et encore plus face à des lances - suscite maints efforts considérablement éprouvants, même pour le plus chevronné des combattants... ou des tueurs en l’occurrence. Un vertige et l'enfer se profilerait très vite sous ses yeux de sang.
En outre, plus la moindre place pour la diplomatie. Un pas dehors impliquerait très certainement un affrontement majeur, et une mort prématurée, sauf dans certaines conditions...
Burnagore en profita pour balayer la pièce du regard tout en écoutant Blaze d'une oreille attentive.

- Nos options sont très limités. On peut faire une sortie en force, car on ne nous a pas encore suivit jusqu'ici, mais ça sera vite le cas si on reste plus longtemps. L'objectif sera de rejoindre la rue marchande et de s'enfuir dans les petits couloirs, plus propices pour des bretteurs comme nous. Ils ont des archers, donc les toits sont à proscrire... Monsieur, vous devriez rester à l'abri le temps que tout ceci se calme. Je ne peux que vous remerciez pour votre générosité, mais nous devons partir, ou vous risquez d'en subir les conséquences.

Effectivement, exploiter les ruelles perpendiculaires à l’avenue et profiter de l'espace restreint pour progresser en ville leur conférerait un avantage indéniable. Quoi de plus pratique pour éviter de laisser toute une flopée de cadavres dans leur sillage ? Tout en évitant de finir empaler au bout d'une lance bien affilée. Surtout ça, évidemment. Les gardes brûleraient très certainement le cadavre du mercenaire sanguinaire pour lui faire payer sa pyromanie, tout en le dénonçant au grand public comme un démon destiné à rejoindre son domaine de prédilection : la terre des Démons.
Une fin à éviter, de préférence.
Le vieux laguz proposa de créer une diversion à ses risques et périls; Burnagore salua son intention d'un hochement de tête. Difficile de rechigner quand il s'agit de sa propre vie.
Le vengeur fit craquer machinalement son cou et se prépara mentalement en expirant un bon coup. Ce qui allait suivre pouvait aisément être comparé à la charge d'une cavalerie. Une situation hâtive, dangereuse et bourrée d'embuches en tout genre. Imprévisible, ininterrompue et peut-être même chaotique.
En voyant Blaze libérer son bras gauche afin de ne pas être gêné par sa tenue lors de la future cavalcade, Burnagore entama la même procédure mas en retroussant ses manches. Allaient-ils vraiment parvenir à se frayer un chemin à travers les allées de ce village tortueux sans prendre une seule vie ? Cela tenait du rêve, mais l'espoir fait vivre. Sa sœur aurait très certainement espéré que cette histoire finisse ainsi...

"On évite le combat, on risque vite se faire encercler. On devrait pouvoir se faufiler jusqu'à la rue commerçante, c'est la que ça se complique. Et surtout, on reste côte à côte. Si jamais tu ressens un malaise, ou n'importe quoi, tu me le dis!
Je n'aime pas tuer Burnagore. Au fait, j'adore me battre, mais je hais faire couler le sang. Mais ce que je hais encore plus, c'est laisser des hommes bons mourir... Et il y en a de chaque côté... Voici mon idée. Ils vont se concentrer sur celui qui a mit le feu à la taverne, donc dès que nos épées seront sortis, il serra facile de nous identifier. Si jamais une telle éventualité arrive, nous échangerons de sabre. Je suis plus frais et plus en forme que toi, je pourrais plus facilement les retenir et captiver leurs attention sur moi. Enfin... Si cela arrive."

Burnagore baissa sa capuche jusqu’au niveau de ses yeux rouges. Une brève lueur de la même teinte s'en échappa inconsciemment, éclairant brièvement l'ombre produite par ledit capuchon. Une main sur le fourreau et l'autre serrée en un poing semblable à une pierre terriblement compacte, il leva la tête et répondit d'une voix de stentor.

- "Soit. Tout en faisant le moins de morts possible, nous nous élancerons en direction de bois en passant par les ruelles les plus étroites. Tiens-toi prêt, car nous allons prendre directement à droite. J’entends les gardes s'approcher d'ici et ces derniers proviennent de gauche. Nous n'aurons pas le luxe de tergiverser en chemin.", dit-il en approchant à son tour de la porte.



Il tourna la tête vers le vieux laguz, le regarda dans le blanc des yeux, et inspira profondément encore une fois. D'un geste vif, il lui lança une pièce. Le descendant des félins la rattrapa au vol en affichant un air d'incompréhension.

- Je n'ai pas fait ça pour l'argent, vous savez...

- "Vous n'y êtes pas"
, répliqua le mercenaire en reculant d'un pas devant le seuil de la porte.
"Je compte bien payer les pots cassés."

- Je ne vois pas de quoi vous voulez parl-

D'un chassé explosif, le vengeur fit voler la porte d'entrée en éclats et les débris se propulsèrent à l'extérieur de la pièce, au beau milieu de l'avenue bondée.
Il parlait de ça, tout simplement.
Ni une ni deux, les gardes se retournèrent en trombe en direction du bruit, leurs armures cliquetant en raison d'un sursaut pour certains et d'un brusque mouvement de recul pour d'autres. Ils se mirent aussitôt à vociférer, pointant leurs lances en direction des deux bretteurs. Bunagore bondit dans la rue et bouscula quelques passants dans sa hâte. Toutefois, il garda un œil sur Blaze, histoire de ne pas le perdre de vue. Derrière lui, il entendit Evan proférait des ordres à quelques gardes situés en retrait. Tout cela sentait le complot à plein nez, l'embuscade. Après tout, Evan devait connaître cette petite ville comme sa poche. Non seulement ça, mais la honte et la frustration ressenties dans la taverne calcinée envenimaient très certainement les choses, renforçant sa hargne et son mépris envers le duo.
En tournant à droite comme convenu, afin de se faufiler dans une ruelle pour bénéficier d'une protection durable, Burnagore entendit le son caractéristique d'un carreau fendant l'air. Le projectile frôla l'oreille gauche de Blaze, heurta quelque chose de mou et un cri de douleur strident attira l'attention de la foule entière. Une femme venait de recevoir le tir au niveau de son épaule droite, et celle-ci s'effondra contre un mur en hurlant à la mort.
Le mercenaire sanguinaire n'en croyait pas ses yeux, assistant à la scène en pleine course, du coin de l’œil sous son sinistre capuchon.

- "Quelle bande de salopards !", cracha ce dernier sans pour autant s'arrêter dans la foulée, progressant inévitablement dans la ruelle qui ne tarda guère à devenir une bifurcation dotée d'un angle mort peu rassurant.

Morts ou vifs, de toute évidence. Peu importe les conséquences, peu importe les victimes; Evan et sa clique souhaitaient impérativement la mort de Blaze et de Burnagore.
Comme quoi, méchant ou gentil... les rôles s'inversent à une vitesse faramineuse, de temps à autres.

A proximité du fameux angle mort propice à une éventuelle agression, Burnagore avisa les gardes entrain d'enjamber la femme blessée en toute hâte, vers l'entrée de la ruelle étroite. De plus, ces idiots provoquaient un sacré boucan avec leurs cuirasses. L'un d'eux piétina la jambe de la femme affalée contre un mur, en pleurs. Elle poussa un cri perçant semblable à celui d'une Banshee, si fort que le garde désolé dut se tenir les oreilles au passage. Cela dit, il ne s'en préoccupa pas davantage et rejoignit promptement ses collègues stressés.
Un véritable conglomérat de bâtards sans-cœur.
Le vengeur parvint à comprendre les paroles de Blaze à travers les multiples injures des gardes en approche.

- Je passe devant et j'ouvre le passage !

Si ce dernier y tenait tant que ça... du moment, qu'il ne prenne pas tout son temps, le mercenaire sanguinaire paraissait d'accord. Son bref hochement de tête prouva ce fait.
Après quelques secondes de délai comptées minutieusement dans son esprit étrangement calme malgré les circonstances, Burnagore rattrapa Blaze en enjambant le corps du garde assommé. D'ailleurs, il ne se gêna pas pour poser un pied sur son casque, histoire de laisser une marque humiliante. Le bougre affalé dans la ruelle deviendra très certainement la risée de son équipe de bouseux lors de chacune de ses pauses. Tous se souviendront de ce jour où une marque de botte boueuse maculait le casque du garde en question. Il obtiendrait peut-être même un surnom ridicule, qui sait ?
Mais l'heure n'était pas à la plaisanterie.
La continuité de la ruelle devenait de plus en plus sombre, de plus en plus lugubre, et de moins en moins sécurisante. Une sorte de tunnel disposant d'une unique issue rectiligne. De quoi se prendre une arme de lancer en pleine tête, ou en plein torse pour les plus chanceux. Cela dit, il ne leur restait qu'un seule option viable. A peu-près...

- Et maintenant ?

- "On continue !", répondit-il sans s'arrêter.

Burnagore passa devant, cette fois-ci. Il entama une foulée bien plus rapide, plus bruyante aussi en raison des échos produits par la zone couverte.
Une curieuse silhouette encapuchonnée fit son apparition à l'autre bout du tunnel. Lentement, l'intriguant personnage écarta un pan de sa toge pour décrocher une hachette de sa ceinture. Une saloperie de hache de jet drôlement bien aiguisée.
Comme par hasard.
Le vengeur ne ralentit en rien sa course. Il devait traverser les quelques mètres qui le séparaient de son objectif en un temps record. De ce fait, il balaya la douleur lancinante au niveau de ses tempes en serrant les dents.

- "Crimson Rush !", hurla le mercenaire dans un nouvel excès de fureur.

D'après la peau grisâtre de son ennemi, il devait forcément s'agir d'un autre cadavre animé par un mystérieux nécromant. Ou alors - chose peu probable -, Burnagore s’apprêtait à charger un simple tocard ne faisant visiblement pas bon ménage avec le soleil.
Dans l'instant, peu lui importait. Pas autant que sa survie, du moins.
La course du vengeur produisit des volutes de vapeur rouge dans son sillage et sa vitesse augmenta graduellement, si bien que Blaze ne put le suivre pendant cette soudaine accélération. En même temps, étant donné l'étroitesse des lieux, mieux valait ne pas chercher à savoir qui avait la plus grosse. Ce serait dommage de se retrouver coincer dans le tunnel, épaule contre épaule, et de rencontrer de trop près le tranchant d'une arme de jet. Dommage et assurément ridicule.
Le damné au visage inexpressif leva son bras déformé - en grande partie recouvert par sa manche noire bien trop ample - et entreprit de mettre un terme à cette course effrénée. Même mort, son geste respirait la confiance.
Dommage pour lui, et surtout pour son possesseur. Un jouet en moins.
Le vengeur se jeta les pieds joints en avant sur son ennemi déchu; un craquement sec résonna à l'intérieur du tunnel. Le torse défoncé du cadavre drapé bascula violemment en arrière, lâcha sa hachette - bien trop tôt au point de la faire voltiger dans les airs à quelque mètres d'altitude - et traversa la largeur de la rue commerçante en terminant sa course dans une échoppe remplie de fruits. Burnagore, entre temps, effectua un salto juste après l'impact et retomba accroupi, une main en guise d'appui posée contre le sol recouvert de pavés. Ses yeux rouges et sa balafre luisants de rouges s’éteignirent aussitôt et les volutes sinueuses abandonnées dans son sillage firent de même.
Malheureusement, il remarqua bien vite les gardes se rapprocher de lui en courant, alertés par les villageois hystériques. En même temps, il fallait s'y attendre. Le charivari résultant de l'échoppe ravagée pouvait difficilement interpeller moins de monde. Le responsable martela le crâne du cadavre croulant sous les décombres et les fruits avec une planche brisée de son ancienne échoppe, tout en proférant évidemment une pluie d'injures à son encontre.
La tête de Burnagore se mit à tourner. Comme disait Blaze, il risquait fortement de subir ce genre de désagréments. Là encore, dommage de ne pas y avoir pensé plus tôt.
Il entraperçut la pointe d'une lance projetée dans sa direction. Dans son état, il ne parviendra pas à l'éviter. A vrai dire, il ne pourrait même pas prendre le temps de pousser un soupir avant de rendre l'âme. Son compagnon de route allait-il lui faire défaut ? Le contraire était envisageable.
Le travail d'équipe revêt parfois quelques surprises, après tout...

Une réponse simple qui laissa le bretteur sur sa faim. Mais bon, à quoi il s'attendait! Il continua sa course à allure modéré, il ne voulait pas s'épuiser trop vite, juste assez pour être à côté de Burnagore. Il se rendit vite compte que sa vitesse allait devenir un problème. Blaze n'était pas le plus rapide, il était souple, fluide, particulière difficile à toucher, mais pas une force de la nature en vitesse! Son compagnon semblait en revanche être capable de pic de vitesse plus élevé que lui, une ironie plutôt fatale… Mais chacun ses forces et ses faiblesses, il sait courir sur les murs et est plus que capable de faire preuve d'une grande mobilité dans les lieux restreints. Si ceci sont moins confortable pour son style d'épée ample, il convienne parfaitement pour le combat à main nue et au couteau.

 

Une hache refléta la lumière du soleil devant lui, ajoutant un nouveau spot de lumière dans cette ruelle sombre, ce qui alerta immédiatement Blaze. Alors qu’il souhaitait prévenir Burnagore, celui-ci accéléra en transformant son chemin en fournaise, ses cicatrices semblaient renfermés une flamme qui brillait. Il venait de repérer un autre des zombies, cadavres, ou peu importe ce que c’était. Étrangement, il ne dégaina pas, il frappa avec ses jambes le corps pour l’envoyer volé au loin avant de reprendre sa course. Blaze retint un rire devant l’efficacité simple et net d’un tel coup. Il ne fallait pas combattre et c’est exactement ce que fit son allié. Il pouvait sentir que l'urgence de la course y était pour quelque chose, mais également une sorte de force intérieur. Tout comme lui, il semblait bien voir que combattre n'est pas la seule manière de survivre.

 

Le chaos devenait oppressant, les cris, la colère, la rage, la tension. Et Kaze restait sagement dans son fourreau, le rendant nerveux. Les villageois avaient du mal à réaliser que les gardes provoquaient plus de problème qu’eux, mais cette forme de racisme n’est que compréhensible. L’incendie, la femme blessée, un roux qui court sur les murs et l’autre qui frappe assez fort un cadavre pour le faire voler. Dans un mouvement gracieux et propre, Burnagore atterrit après un salto et continua la course effrénée. En revanche, le brouhaha et les hurlements se firent plus colérique avec l’arrivé de soldat, ceux-ci venait d’un des côtés de la ruelle, un autre angle mort qu’il était difficile d’apercevoir avec le manque de visibilité. Et soudainement, Burnagore ralentit, voir, s’arrêta. Il semblait subir les revers de sa blessure.

(Non non non non NON !!! Je t'interdis de me lâcher maintenant!!!)

Inquiet, Blaze se rua et put apercevoir une lance être brandit vers Burnagore. Son esprit n’hésita pas une seule seconde et d’un mouvement net et précis, il dégaina sa lame. Kaze fendit l’air et détourna la lance portée contre le bretteur roux. Une fois ceci fait, Blaze se rua sur le soldat assez fou pour avoir tenté de tuer son allié. D’un mouvement sec, il trancha la main de l’homme pour le forcer à lâcher son arme, il se rapprocha pour mieux voir une expression d’horreur sur le visage du soldat, se rendant compte qu’il était mort. Blaze frappa d’un uppercut le coude de l’homme, le brisant dans un horrible craquement. Dans le même mouvement, il plaqua le torse de l’homme contre son dos et utilisa toute son inertie ainsi qu’un coup de jambe pour faire une projection par-dessus son épaule.

 

« TCYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA ! »

 

Dans un fracas assourdissant, couvert par le cri de douleur du soldat au coude réduit en miette, le soldat fut allongé sur le sol, agonisant. Blaze se rengaina sa lame en voyant les soldats esquissé un semblant de peur envers lui. Cette démonstration de force lui donna l’occasion de retourner voir Burnagore. Ils devaient continuer, peu importe le prix. S’ils restaient dans cette ruelle, plus rien ne pourrait les sauver ! Les soldats se remirent à charger, mais Blaze ne l’entendit pas cette oreille. Il prit un couteau et le jeta sur une corde retenant un empilement de barils de marchant, qui se firent un plaisir de retenir les soldats. Quitte à être détester par les villageois, autant utilisé tout les outils à disposition. Souriant par cette utilisation intelligente de son environnement, il prit alors la tête de Burnagore entre ses mains et le força à regarder ses yeux. Il respira un grand coup et tenta d'infuser le calme et la sérénité dans l'esprit troublé du bretteur roux. 

 

« Du calme, respire. Concentre-toi sur ta foulée, tes jambes et rien d’autres. On va y arriver ! »

Blaze entraina Burnagore au début de sa course pour lui fournir l’élan nécessaire pour reprendre leur fuite, il ne pouvait pas le traîner hélas. Le fin de la ruelle était si proche, après, ils pourraient rejoindre en quelques foulées la sortie du village… Si proche du but !

Burnagore sentit son cœur battre à tout rompre, à l'instar de ses tempes vibrantes au même rythme. Les mâchoires serrées, il fit un effort colossal pour se dépêtrer de cette situation inconfortable dans le but de mettre fin à cette maudite inertie forcée.
Dans l'instant, cela ne suffit en rien.
Heureusement que Blaze interrompit promptement cette violente estocade et s'affaira à mettre à mal les nuisances environnantes. Le vengeur entendit à moitié les bruits émis lors de la confrontation. Même les cris semblaient devenir des murmures, étouffées par un horrible sifflement suraigu. En outre, sa vision jonglait de flou à parfaitement clair. Comme une sorte de zoom défectueux extrêmement déstabilisant. Impossible de brandir une épée dans ce genre de circonstances, ou encore de se lever, tout simplement.
Le visage tourné vers le sol, les yeux écarquillés, il vit quelques gouttes de sueur éclater sur les pavés. Les ombres dansaient sur le sol irrégulier, synonymes d'un combat particulièrement agité auquel il ne put se joindre. Ses mains positionnées ne guise de soutien se crispèrent de rage et de frustration.
Comment diable pouvait-il faiblir ici ? Au beau milieu d'une telle cavalcade ? Il poussa un grognement et sentit son visage se détourner du sol, soulevé deux mains vives.
Blaze l'observait dans le blanc des yeux.

- Du calme, respire. Concentre-toi sur ta foulée, tes jambes et rien d’autres. On va y arriver !

Plus facile à dire qu'à faire. Néanmoins, il n'avait pas trop le choix. Donc, il courut, emporté par l'élan de Blaze. Sa vision reprit peu à peu sa clarté d'antan, ses oreilles cessèrent de bourdonner mais son crâne continua de le marteler à outrance. Brûlant de rage et non pas aussi sage que l'escomptait son partenaire empreint de compassion, le mercenaire entreprit une foulée déraisonnable. Du moins, si l'on ne prenait pas en compte le nouvel arrivant belliqueux tapi dans l'ombre d'une perpendiculaire à la rue.
Un poignard siffla le long de sa joue balafré, frôlant la plaie cicatrisée et la laissant filer à l'opposé de la rue sous le regard apeuré des badauds. Burnagore plaqua sa poigne infernale sur le visage du responsable de cet outrage, lui écrasa la tête dans un mur malgré ses protestations inutiles et lui infligea une balayette soudaine pour l'expédier promptement au sol. Son adversaire parfaitement humain tenta de se redresser, mais le vengeur n'était visiblement pas de cette avis. Et d'ailleurs, le temps jouait contre lui et son camarade d'infortune. Du talon de sa botte, il piétina farouchement la rotule du malheureux, cette dernière produisit un horrible craquement sourd très éloquent. Par la même occasion, cette puissante foulée permit au vengeur de continuer sa route en laissant un soldat estropié affalé sur le chemin. Un obstacle de plus, en quelque sorte. Et bien plus bruyant sur le long terme en raison de ses cris de douleur incessants.
Burnagore ne se gêne pas pour propulser un spectateur sur son chemin via une violente charge d'épaule. Il jeta ensuite un regard en coin en direction de Blaze pour s'informer de l'arrière-garde, tout en analysant la réaction du bretteur en question.

- "Nous sommes loin d'être tirés d'affaire", dit-il en diminuant la cadence de sa course. "Regarde..."

En pointant l'autre côté de l'artère principale, il désigna une masse de silhouettes en armures luisantes se frayant un chemin à coups d'épaule parmi la foule abondante. Évidemment, il leur suffisait de boucher les deux dernières issues pour mettre un terme à cette poursuite effrénée.
Burnagore indiqua une ruelle perpendiculaire d'un geste de la tête, tout en jetant un bref regard au niveau des toits. Si la terre représentait une option inenvisageable, il ne restait plus que la voie des airs.

- "J’imagine que tu sais ce qu'il nous reste à faire ? Gare aux flèches."

Sans plus tarder, il se glissa dans ladite ruelle en repérant les points d'appuis susceptibles de lui permettre d'atteindre la toiture d'une maison.

Il semblerait que leur tentative fut vaine, lorsqu'une armée de soldat en armure bloquèrent toutes les issues de rue, rendant toute fuite impossible. Burnagore fut trop lent, ou peu être que cette idée était destinée à échouer? Peu importe, son allié fit preuve de clarté d'esprit et semblait avoir reprit une bonne lancée. La voix de la terre était malheureusement condamnée, mais cela laissait Blaze retrouver son élément, les airs et le vent. Même si tout les avantages tactiques semblaient contre eux, il ne pouvait qu'esquisser un sourire en pensant à remonter à l'air libre. Loin des couloirs oppressants, du chaos, et de ses cliquetis insupportables. C'est par les toits qu'ils devaient fuir, et pas d'une quelconque autre manière. Aucun soldat ne serait assez rapide pour les atteindre, mais cela les laisseraient vulnérables aux flèches et autres projectiles. Ce que Burnagore crut important de rappeler.

- "J’imagine que tu sais ce qu'il nous reste à faire ? Gare aux flèches."

- "Alors prenons ce combat dans les airs! Le sol, ca a jamais été mon truc de toute façon."

Blaze l'accompagna dans une petite ruelle pour chercher des points d'appuis pour monter et atteindre les toitures des maisons. Hélas, peu d'options étaient présentes, et la blessure de son compagnon l'inquiétait. Il se rendit compte qu'il pouvait facilement utiliser les murs pour sauter de droite à gauche pour remonter. Les briques offraient des appuis mauvais, mais suffisant pour un instant afin qu'il puisse régler son tempo. C'est en revanche particulièrement épuisant à faire, et la plaie de Burnagore lui interdisait une telle prouesse. Un vertige durant l'enchainement, et il tomberait, pour s'écraser la tête contre le sol. Ainsi, Blaze regarda d'abord le coin le plus bas, et le fond de la ruelle lui semblait le plus approprier pour un saut assisté. Il se rua devant le mercenaire pour se mettre contre un mur, puis calla ses bras en marche pied pour donner une propulsion à son ami.

"Aller! SAUTE!!!"

Blaze sentit douloureusement les bottes de Burnagore sur ses mains, puis utilisa toute sa force pour l'envoyer le plus haut possible. Le résultat fut satisfaisant. Le jeune Marqué recula un peu pour prendre son élan, une lance siffla sur sa droite, mais il ne se laissa pas distraire. Il sauta le plus haut possible et s'agrippa sur un mur à la force de ses doigts. Il plaça ses jambes pour se lancer à nouveau, et reproduisit une seconde fois le mouvement pour agripper maladroitement au toit sur lequel était Burnagore. Il le remonta péniblement pour laisser des halètements inquiétants. Blaze reprit son souffle et balaya tout signe de fatigue, mais malgré sa capacité à cacher sa fatigue, celle-ci le rattrapait, doucement, saut par saut, pas par pas, mouvement par mouvement. Il ne tiendrait plus très longtemps.

"Je crains que j'approche mes limites, mon frère. Il ne faut pas trainer, ligne droite vers la sortie!"

Il grimaça de douleur avant de se relancer dans une course, sentant des éclats de verre dans ses côtés et un feu dans sa poitrine. Les gardes hurlaient des ordres impliquant flèches, hachettes, javelot, et presque tout ce qui pouvait être lancer...

Le vengeur poussa un grognement de frustration quand il se rendit compte de la difficulté que représentait l'application de sa solution de secours. Il baissa les yeux pour observer l'attitude de Blaze. Lui paraissait confiant. En même temps, après sa délicate et discrète prestation exécutée avec brio dans le dernier angle mort de la première ruelle délaissée, cela se comprenait parfaitement. Néanmoins, pas le temps de cogiter. Burnagore tourna la tête en direction de la rue principale et entendit très clairement les gardes se rameuter en vociférant des ordres ou des injures à moitié compréhensibles à cause d'un brouhaha étouffant de la foule paniquée. Véritable flot chaotique dans lequel leurs poursuivants nageaient à contre-courant.
Un précieux gain de temps, de toute évidence.
En outre, Blaze ne se fit pas attendre davantage.

- Allez ! SAUTE !!!

Le mercenaire agit comme convenu et se servit des mains bienvenues de son coéquipier pour s'élancer proprement dans les airs. Le bras tendu vers la bordure du toit, il l'agrippa sèchement pour se hisser sans grande peine, habitué aux entraînements intensifs et notamment aux tractions à une main.
Des bras et des dorsaux en béton, effectivement.
De nouveau sur ses deux jambes, il rehaussa son regard pourpre en esquissant un sourire satisfait. Une ombre assombrit son visage, et ce même rictus s'éclipsa dans la seconde.

- "Put-...!", lâcha-t-il dans la hâte avant de recevoir un coup de poing dans le creux de l'estomac.

En expectorant un peu de sang accompagné d'un bref couinement de douleur, il se plia en deux. Une silhouette sombre portant une épaulière unique se dressait au-dessus de lui. Du coin de l’œil, Burnagore vit une botte se lever pour lui asséner un second coup débordant de ressentiment.
Pas cette fois.
Une lueur assassine dans le regard, le mercenaire sanguinaire laissa exploser sa haine à cet instant précis, agrippa la botte du salopard dont il ne s'attarda pas à identifier comme vivant ou non-mort. En roulant sur le sol, il se servit du poids de son corps pour faire basculer son agresseur en contrebas. Ce dernier poussa un hurlement de terreur avant de s'écraser parmi les gardes.
Et pendant ce temps, Blaze se hissait. Il ne remarqua même pas le corps chuter. Tout ce qu'il restait de cette scène complètement imprévisible se mélangeait aux cliquetis incessants des armures crasseuses de leurs poursuivants ainsi qu'aux insultes répétés et aux divers cris de surprise suite à ladite chute. A les écouter, le bonhomme s'était brisé une jambe en atterrissant, et avait assommé un garde au point d'impact.
Dans une autre vie, Burnagore aurait pu faire carrière dans le bowling.

- Je crains que j'approche mes limites, mon frère. Il ne faut pas trainer, ligne droite vers la sortie!

Vraiment ? Lui, au moins, n'avait pas fait la rencontre d'une botte à l'arrivée. Il pouvait s'estimer heureux, même s'il haletait après l'effort. Ce putain de coup persistait dans les entrailles du vengeur et lui donnait la nausée. Un goût aussi amer que son précédent échec dans la taverne au beau milieu du brasier vindicatif.
Le regard blasé malgré les traits de son visage crispés par une colère fraîchement exhumée de son esprit meurtri, Burnagore épousseta la poussière qui jonchait sa toge sale. Puis, en voyant Blaze débuter une autre foulée, il emboîta le pas en se tenant le ventre. En sautant par-dessus l'écart situé entre les deux bâtiments voisins, il jeta un regard chargé de mépris en contrebas. Les fourmis luisantes se séparaient pour tenter de boucher les extrémités du village avant de risquer de perdre leurs proies. Leurs armures les ralentiraient, un point fort défensif converti en un handicap de vitesse considérable.
Une brève lueur chatouilla son regard fouetté par la brise glacée des hauteurs, suivie d'un petit bruit énonçant la décoche d'un projectile filant. Une flèche. Une saloperie de putain de flèche.

- "Ecarte-toi !", hurla le vengeur en bondissant en avant, les bras en guise de protection au niveau de son visage balafré.

La pointe du carreau se logea dans son épaulière dissimulée sous sa toge, au niveau de son épaule droite. Un picotement désagréable et une sensation de chaleur inquiétante s'exfiltra de la blessure. Le bâtonnet restait pertinemment planté dans sa cible.
Ça faisait mal. Très mal.
Désireux de se venger - pour ne pas changer -, il arracha le projectile de sa plaie d'une traite en poussant un cri de rage déchirant.
Cela faisait encore plus mal. Atrocement mal.
Tout en se fiant à l'inclinaison de la flèche et à sa trajectoire, il n'eut aucun mal à trouver la cachette de l'archer. Ce fourbe se dissimulait derrière une cheminée, au niveau du prochain toit. Leur prochaine destination, justement.
Tandis que le chasseur de tête encochait sa flèche et s’apprêtait à lever une nouvelle fois son arc, le vengeur se rua sur lui en dégainant son Ignifer au dernier moment. La flèche s'envola tout de même, mais à quelques centimètres du visage de Burnagore.
Par contre, sa lame fit mouche.
Une botte efficace et sanglante; la pointe dorée souillée par un rouge sombre de son sabre dépassait du dos de sa victime. Mu par une fureur maladive, Burnagore souleva l'archer qui hoquetait de douleur et le propulsa dans la ruelle principale via une violente charge de l'épaule, tout en extirpant sa précieuse lame de la carcasse impudente.
Un boum caractéristique de cette chute vertigineuse s'ensuivit; une multitude de cris de peur et d'hystérie résonna de concert.
Sur le coup, il venait tout juste de tuer. Cela ne lui fit ni chaud ni froid, contrairement au désastre de la taverne. Les yeux assombris par sa mauvaise humeur habituelle, le ventre et l'épaule entravés par la douleur, il jeta un regard en coin vers Blaze.

- "Si tu comptes me faire une remarque, nous en reparlerons plus tard", déclara-t-il en continuant son chemin sur les chapeaux de roue.

La sortie se profilait à l'horizon, après tout. Une dernière ligne droite potentiellement à risque. D'autres archers pourraient très bien sortir du néant et jouer aux fléchettes avec le duo. Dans tous les cas, ralentir représentait le pire des choix possibles. Il fallait tout simplement s'attendre à tout et anticiper le pire comme le meilleur.
Cela lui allait bien de penser ça... surtout en voyant un projectile encore plus brillant, bruyant et long se diriger dans leur direction. Un javelot, supposait-il.
Merveilleux, vraiment. Hors de question, cette fois, de se servir de sa seule épaule valide pour contrer un objet de cette dangerosité. Par conséquent, Blaze devait agir vite pour ne pas finir empaler et contempler le ciel azuré pour l'éternité.

Survolant la ville à grands pas, le duo s’engageait dans un terrain sur lequel aucune armure ne pourrait les atteindre. En revanche, ils devenaient de véritables cibles de chasse, attirant les flèches et les projectiles en tout genre. Le Marqué se sentait un peu fatigué, de par son endurance plutôt médiocre, et en plus la pression mentale de devoir faire attention à son prochain. Son regard se focalisait sur sa trajectoire uniquement, une erreur dont il allait faire les frais, ou plutôt, Burnagore allait faire les frais. Bondissant tel un héros en armure brillante, le mercenaire sanguinaire subit la flèche en pleine épaule, lui rappelant sa fragilité native à son armure de cuivre. Si malgré cette protection il hurlait de douleur, Blaze imaginait en déglutissant difficilement la douleur d’une flèche sur sa peau à nue.

Il tenta de calmer le vengeur mais compris la futilité d’une telle tentative quand il regarda les joyaux rouges chatoyants dans ses yeux. Il voulait se venger, et il ne pouvait que comprendre son attitude. Il avait déjà fait beaucoup pour se retenir, mais même Blaze était prêt à tuer désormais. La situation était trop critique pour qu’une quelconque morale empiète sur leur survie. Pour l’archer assez fou pour avoir décocher une flèche, il n’était pas très malin de rester sur le chemin des deux Marqués, Burnagore le prit de vitesse et n’hésita pas à fendre l’air avec son épée pour perforer le corps de son adversaire sans pitié. Celui-ci tomba mollement du toit, avant de s’écraser sans vie dans la rue, arrachant un chaos encore en expansion dans le village. Blaze rattrapa finalement le vengeur et ne prêta aucune attention à ses paroles. Il n’avait pas besoin de se justifier, l’archer était sur le chemin, et n’a pas hésité à tirer. Ils étaient désormais trop en danger pour ce défi d’épargner le plus possible.

 

La sortie se profilait au loin. Enfin. Pour ne pas changer, il continua sa course vers la sortie, seulement pour apercevoir un autre projectile, un javelot, plus gros, plus massif, et plus facile à voir. Cette fois, il ne pouvait compter sur son alliée déjà très mal en point. Hélas, Blaze était dans un état de fatigue, et ses mouvements furent plus lents que prévue. Ce javelot lui trancha la côte sur le passage lorsqu’il esquiva sur le côté. Ce n’était ni profond ni dangereux, mais c’était un mémo sur sa mortalité et l’éventualité de mourir ici. Cette pensée assombrit Blaze au point de le faire changer d’attitude. Il s’arrêta une seconde pour poser sa main sur son flanc, seulement pour sentir un liquide chaud et rouge en sortir. La plaie était fraiche et une douleur vive lui arracha un soupire. Il n’aimait pas être touché, mais c’était un bon moyen de dissiper la fatigue temporairement.

-Franchement, je l’aime ce vêtement ! Pourquoi il faut toujours que mes ennemies le réduisent en lambeaux ?

Blaze laissa un soupçon de sourire lui traverser le visage, son humour était toujours la du moins. En revanche, ce qui n’était plus là, est la tête de l’homme qui avait lancé ce javelot. D’un sprint à grandes foulées suivit d’un saut, Blaze coupa la distance avec une vitesse extrême entre lui et le soldat qui se mettait en travers lui et la sortit. Kaze fendit l’air pour trancher au niveau du coup, avec une précision incroyable. La tête resta en place alors que Blaze continua sa course, seulement pour tomber à genou devant Burnagore et laisser la tête glisser doucement sur le côté. Celle-ci roula du toit et tomba au sol juste devant Evan, lui arrachant un hurlement de rage. La haine appelle la haine, mais il faut dire qu’il n’aide pas ! Dans sa course, Blaze fit un grand mouvement avec Kaze pour retirer le sang dessus avant de la rengainer avec sa classe habituelle.

 

La fin du leur course aérienne arriva, encore quelques pas, et ils devraient redescendre au sol pour atteindre la porte du village. Blaze ralentit pour se mettre à hauteur de Burnagore, en cas de besoin. Car il accumulait les blessures et un soutien ne serait pas de refus. D’un clin d’œil confiant, Blaze tenta de cacher ses émotions plus… colériques dans le fond de son âme. S’il restait encore un gamin sympathique et un peu arrogant à l’extérieur, une voie emplie de haine résonnait à la vision de son compagnon se tenant l’épaule douloureusement. Cette flèche lui était destinée, et cette pensée le rendait malade. La fin du toit arriva et les deux bretteurs s’arrêtèrent devant le vide. Le jeune Marqué agrippa sa bouteille d’alcool et prit une grosse gorgée, laissant ses joues rougir par l’alcool, avant d’en proposer à Burnagore.

-Un ptit coup ? On va en avoir besoin.

Ce maudit javelot manqua de peu sa cible, l'effleurant avec un bruissement aigu de tissu déchiré. Burnagore suivit naïvement la fin de course du projectile affilé. Ce dernier se planta sur le toit opposé tel un piqué gâché. Un éclair de douleur lui saisit l'épaule, rappel quant à sa folie récente menée à bien pour sauver un gars qu'il ne connaissait que depuis quelques heures tout au plus. Après tout, n'avait-il pas une dette envers Blaze ? Le considérait-il déjà comme un frère d'arme ? Il expulsa cette pensée de son esprit en avisant sa main maculée de son propre sang chaud, tout en grimaçant de colère.
En levant les yeux, le mercenaire sanguinaire aperçut le travail d'orfèvre de son coéquipier. De même, il entendit Evan agonir le duo d'injures depuis la rue principale. ce crétin annonçait sa position dans un excès de fureur totalement irréfléchie. Pour le coup, Burnagore regrettait amèrement de ne pas s'en être débarrassé à la taverne. Ce salopard vociférateur méritait bien plus qu'une simple lame dans le ventre. Il devenait exagérément saoulant, fatiguant, trop ambitieux et ivre de violence.
Tout ça pour une ou deux humiliations ainsi qu'une taverne malfamée réduite en cendres.
Le vengeur secoua la tête en reprenant sa course, une main plaquée sur sa plaie à l'épaule. Le sang ruissela le long de ses doigts crispés, accentuant la fureur qui le saisissait à la gorge.
Le duo s'arrêta devant une pente qui se terminait en chute libre. A l'autre bout, en contrebas, se trouvait l'enseigne branlante renseignant sur le nom de ce village miteux clouée sur une arche assaillie par le temps et par le lierre dévorant. Quelques barrières en bois garnissaient la pelouse délabrée, séparant la forêt de ce semblant de civilisation.
Dans une chasse à l'homme, il ne restait plus grand chose de la civilisation, à vrai dire... Juste un troupeau d'hommes excités prêts à trancher deux têtes dans le but de prôner la notion de justice, ou de faire d'eux des exemples de cruauté châtiées.
Pathétique, pensa-t-il, en détournant le regard vers Blaze qui lui tendait sa précieuse flasque. Burnagore haussa un sourcil en sentant son contact froid dans le creux de sa main valide. Il apposa son Ignifer en équilibre sur le sol, contre sa cuisse travaillée par les efforts répétés.

- Un p'tit coup ? On va en avoir besoin.

Le vengeur secoua la tête en songeant au futur désastre en prévision. Néanmoins...

- "Je pense en avoir besoin pour quelque chose de plus... sensible. Prépare-toi, je risque d'être 'légèrement' bruyant", déclara-t-il entre ses dents serrées avant de vider un peu de la flasque sur sa plaie. "Putain ! Cette merde me brûle jusqu'aux entrailles !", vociféra le vengeur en jetant la flasque à son compagnon, l'épaule en feu.

Il se mit à haleter comme une bête acculée, luttant farouchement contre la désinfection affreusement douloureuse et tyrannique de sa blessure arrosée. Sa colère grimpait les échelons, toujours de plus en plus haut ! Dans la seconde, il s'empara de son Ignifer et en serra férocement la poignée. En quelques pas précipités mains habilement calculés, il dévala la pente pour se laisse ensuite glisser contre un mur de l'établissement proche de la sortie. En atterrissant au sol, accroupi suite à la hauteur descendue d'une traite, son épaule et sa tête l'élancèrent comme jamais. Il crevait d'envie de découper une tête ou deux pour se changer les esprits et reporter sa souffrance sur ses ennemis.
En tournant la tête, il avisa un garde en armure qui pointait un doigt énonciateur dans sa direction. Un autre bonhomme cuirassé répondit à son interpellation, l'air peu commode. Ces salauds se proliféraient comme des cafards. Un autre suivit, puis un suivant et encore un autre bâtard de lancier jaillit d'une ruelle adjacente. de l'autre côté ? Même chose.
Cela sentait le roussi à plein nez.
Le vengeur entendit même une corde se tendre et entraperçut le visage de l'archer esquisser un sourire carnassier. Il le tenait en joue et semblait particulièrement ravi de sa visée.

- "Cela semble te faire plaisir. J'ai bien mieux pour toi, salaud !", hurla Burnagore en s'emparant du couvercle en bois d'un tonneau collé au mur.

Le bougre audacieux décocha sa flèche sans ciller et le carreau fendit l'air dans un sifflement caractéristique. Dommage, car le projectile se logea dans le couvercle soulevé par le vengeur enragé. Après tout, il suffisait juste de prendre en compte l'angle de tir.
D'un geste de la hanche, Burnagore tendit son bras en arrière et balança son bouclier de fortune tel un frisbee dans le crâne de l'archer. Il esquissa un sourire malsain en voyant le garde qui se tenait la moitié du visage s'écrouler sur le sol, son arc chutant au sol comme un vulgaire bout de bois sans la moindre valeur.

- "On récolte ce que l'on sème. Apprends-donc à apprécier le goût de l'amertume, connard !", ragea le mercenaire.

Nouvelle piqûre de rappel quant à sa blessure lancinante au niveau de son épaule.
Il poussa un grognement de frustration proche du couinement plutôt qu'autre chose. Pas le temps pour les atermoiements, le vengeur fila en ligne droite en luttant contre les petites vertiges intempestifs, séquelles de sa blessure à la tête.
En jetant un regard derrière lui, il vit les gardes accourir dans sa direction. Malgré le poids de leur armure, ils gagnaient inexorablement du terrain tandis que lui se sentait de plus en plus lourd. Evan courait comme un dément, la lance à la main et la rage au ventre.

Une fois de plus, un alcool si délicieux était rabaissé au rang de désinfectant. Il ne s'attendait pas vraiment à autre chose venant d'un mec aussi... fou que Burnagore, mais tout de même, un peu de considération bon sang! Déjà une fois de sa main, puis encore une autre fois! Il avait des herbes pour cela, et encore, désinfecté en plein combat est le meilleur moyen de finir à court de sang. Burnagore allait lâcher, ce n'était qu'une question de temps. Blaze lâcha un soupir et ne retint pas ses répliques flagrantes en récupérant sa flasque jeter comme un objet sans valeur.

"Aucun respect pour les bonnes choses, jte jure."

Hélas, les limites du bretteur étaient à sa portée. L'alcool l'aiderait à lui donner le dernier coup de fouet avant la sortie du village, mais ca serait tout. Il suivit le vengeur en glissant sur la pente avant d'atterrir, mais contrairement à la haine se dégageant de son compagnon, Blaze analysa rapidement son environnement. La sortie était en ligne droite, mais ils avaient quitter l'espace fermé des rues pour l'ouverture de l'entrée du village. Les soldats convergeaient vers leurs positions, arrivant des rues par paquet, impossible de les arrêter à la force brute. Blaze réagit rapidement en sprintant pour rattraper Burnagore, qui avait déjà libérer une partie du chemin en attaquant un archer qui s'était positionner sur le toit. Une idée germa dans sa tête. C'était risqué, très même, mais ca allait peu être donner les dernières secondes nécessaires pour fuir. Il se détourna du vengeur, laissant les soldats le poursuivre sans se rendre compte qu'un homme était sur le point de les rejoindre.

(Prêt Kaze? Ca va être difficile...)

D'un mouvement, il coupa la route des soldats. Evan ralentit un instant avant de tenter de reprendre sa course frénétique, réalisant l'identité de Blaze. Mais avant que tout ceci soit possible. Blaze hurla de toutes ses forces, assez pour faire trembler le cœur de n'importe combattant, arrêtant net les soldats, Burnagore y compris. Tous tentèrent de reprendre consistance avant de voir le vent se matérialiser autour du jeune bretteur. D'un mouvement sec, il prit son sabre à l'horizontale et le présenta devant ses adversaires, sortant la lame de son fourreau dans un crissement suffisamment intimidant pour faire reculer d'un pas les moins sur d'eux. D'un pas sûr et confiant, Blaze adopta une posture offensive, prêt à bondir sur ses assaillants.

Evan brisa soudainement la confusion, tentant de rappeler la supériorité numérique évidente du groupe. Sauf qu'il ne finit pas sa phrase, couper devant la vitesse inhumaine du jeune Marqué. Dans un simple mouvement de jambe, il trancha la distance entre lui et Evan, et mis la pointe de son épée sur son armure.

"Tempest Blade!!!!"

Une explosion de vent projeta violemment Evan en arrière, reversant plusieurs soldats par effet domino. Un sourire narquois se dessina sur le visage du bretteur quand il entendit les jurons d'Evan devant la puissance de l'explosion de vent. Certes, il ne l'avait pas blesser, et probablement foutu encore plus en rogne, mais il avait subit un gros coup à son égo déjà meurtrie. Blaze tenta de fuir mais se rendit compte qu'il s'était fait encercler, certes, par des Beorcs incertains et apeurés, mais armés et potentiellement dangereux. Burnagore était en dehors de ce cercle à son grand soulagement, mais cela ne le privait de s'inquiéter pour lui! Il venait de bruler ses 2 bottes secrètes, le laissant particulièrement vulnérable. En y ajoutant la fatigue, seul la peur sur le visage de ses adversaires était une arme avec laquelle il pouvait jouer. Cette idée le frappa et il tenta un bluff de dernière minute. Il braqua son sabre vers les soldats qui tentèrent de cacher leurs nervosités


"Un autre candidat?"

Une goutte de sueur tomba doucement de la tempe de Blaze. Il marcha, sabre braqué et prêt à trancher vers la sortie, la où la concentration de soldat était la plus faible. Un autre juron d'Evan força la main de Blaze qui s'élança et sauta mollement sur un soldat, prenant appuie sur son armure pour sauter au dessus du cercle formé. Il entreprit de sprinter pour rejoindre Burnagore. Il était désormais dans un état de faiblesse extrême et ses pas montraient une force défaillante. Il fit un signe de tête au vengueur pour lui signaler qu'il allait bien et qu'il pouvait continuer. Blaze tenta de regarder devant lui mes sa vision se troublait, l'empêchant de voir trop loin. Il se concentra sur sa foulée et celle de Burnagore, calquant ses mouvement au timing près.

La situation prenait une tournure ô combien détestable. Tandis que Blaze se donnait à cœur joie sans verser la moindre goutte de sang, tout en envoyant valser Evan au passage via une de ses bottes secrètes, son hurlement résonnait encore dans l'esprit du vengeur. Son mal de crâne le tiraillait bien assez comme ça, en rajouter une couche rendait la souffrance proprement insoutenable.
Mais Burnagore serra les dents et crispa les poings, comme à son habitude, depuis des mois déjà. Le monde tournoyait autour de lui; il courait en ligne droite en soufflant comme un bœuf à l'agonie. Chaque respiration lui donnait l'impression de se faire poignarder à de multiples reprises en plein poitrine. Par conséquent, il ne pouvait pas se permettre de surveiller son coéquipier très certainement aussi éreinté que lui.
Il arriva donc devant ladite petite arche en bois miteuse symbolisant l'entrée et la sortie de ce maudit village. Le vent lui cingla le visage et se tut mystérieusement. Ce phénomène associé à la tension dans l'air éveilla sa curiosité, et lui permit accessoirement de récupérer plus facilement son souffle. Malheureusement, les soldats n'étaient pas de cet avis. Il s'agissait néanmoins d'un bien comme d'un mal, car derrière eux surgissait un fauve au pelage brillant. Une sorte de loup argenté d'une taille assez impressionnante. Un laguz transformé, de toute évidence.
En chargeant tout en tournant sur elle-même, la bête colossale balaya quelques soldats comme de vulgaire quilles, finissant sa course au milieu d'un groupe de gardes revêches munis de lances bien affilés.

- "Que diable fait-il ici ? Il aurait dû rester terrer chez lui en pleurant sa porte, pas venir nous... ?!", entonna le vengeur avant d’entrapercevoir une ombre s'abattre sur son visage en sueur.

Evan avait soigneusement dissimulé des sous-fifres à l'entrée du village, des sentinelles prêtes à frapper au bon moment. La dernière ligne dans le cas échéant.
Maudit salopard revanchard.
Burnagore reçut un coup au niveau de la tempe qui lui fit voir trente-six chandelles. Du même coup, son bandage s'effilocha et se décomposa en lambeaux jaunâtres déchirés. Le sang ne tarda pas à compléter le tableau, aveuglant son œil balafré.
Son regard meurtrier pointa en direction du bourreau de secours commandité par Evan. La pointe de sa lance fendit l'air dans un bruit vif et manqua de lui perforer le torse. Effectivement, il esquiva l'empalement d'une brusque contorsion du torse en serrant sa prise sur la poignée de son arme, malgré le nouveau trait sanglant qui maculait sa poitrine meurtrie. Son ardeur fut étouffée par un violent coup de pied s'enfonçant dans son flanc avec la vivacité d'un coup de bélier employé pour défoncer une porte barricadée. Le vengeur se plia en deux tout en chuintant quelque chose de parfaitement inaudible.
Des jurons, sûrement.
Pendant que les deux gardes muselaient Blaze et Burnagore, le loup argenté sombra dans une colère noire, infligeant des coups de pattes arrières aux audacieux qui visaient le postérieur de la bête, et déchiquetant les plus téméraires qui espéraient lui crever les yeux ou lui fendre le crâne. Bien sûr, quelques pointes de lance touchèrent leur cible, mais le loup se débattait avec une férocité exemplaire et repoussait les assaillants pour tenter de rattraper les deux fuyards roux.
Evan n'osait pas s'approcher, une main sur son plastron bosselé et le visage crispé par un curieux mélange de colère et de frustration.

- Qu'est-ce que vous attendez, putain ?! Tuez-les ! Ils ne sont que trois !! Appelez les archers en renfort ! Je veux que toute la garde se rassemble et crible ces démons de flèches enflammées !, hurla ce dernier avec hardiesse.

Des démons, hein.
Burnagore se redressait cahin-caha de sa récente humiliation, les paupières lourdes. L'un des deux gardes se dirigea vers Blaze pour l'achever à une distance raisonnable, profitant habilement de la longueur de son arme. L'autre ricanait en empoignant la hampe de sa lance comme il le ferait d'un javelot. Un homme précautionneux face à une "bête acculée". Le vengeur prévoyait le pire, comme une lance plantée dans ses entrailles. Mais du même temps, les hurlements sauvages du loup argenté résonnaient dans son esprit blasé. Ils s'associaient au derniers échos du cri soudain de Blaze. Mélange de fureur combiné à la petite voix malsaine nichée dans ses pensées les plus sombres.
Le tout forma une unité de conscience absolument lugubre et exagérée.
"Vas-tu vraiment laisser ces tocards t'empêcher de rejoindre ta si précieuse sœur délaissée jusqu'ici ? Tu en as encore à revendre, Burnagore ! Tu vaux bien mieux que ça. Tout ce que tu dois faire, c'est laisser ta haine.... EXPLOSER !", brailla l'incarnation des ténèbres de son esprit macabre !
Une autre vision carmine étouffa la douleur lancinante de ses cottes, de son crâne sanguinolent et de son épaule blessée. Il entendit le rire narquois de Céasar percer ses tympans et cet évènement dérangeant lui hérissa les cheveux. Une lueur assassine dans le regard, vision carmine et démoniaque reflétant son traumatisme passé, Burnagore se leva en chargeant violemment son opposant prêt à infliger son ultime coup. La lance effleura l'oreille droite du vengeur et son propriétaire poussa un cri étouffé en espérant vaguement tenir la charge du vengeur via le poids de sa propre armure.

- "Va... Te... FAIRE !!!", hurla Burnagore en s'extirpant au dernier moment et en en profitant pour déséquilibrer son ennemi d'un coup de pied lancé entre les clavicules.

Le garde chancela en effectuant deux pas maladroits vers l'arrière pour ne pas chuter sur le dos, son armure devenant un point faible plutôt qu'autre chose. Par réflexe, il utilisa le long manche de sa lance pour se retenir.
Grave erreur.
En fondant tel un rapace sur sa proie, les pieds décrochés du sol, le mercenaire sanguinaire balança la pointe de son Ignifer, le bras tendu à l'extrême, à travers la bouche ouverte de son ennemi caparaçonné. Le dangereux bout doré souillé par un rouge écarlate s'exfiltra du casque perforé. Burnagore retira sa lame du malheureux déchu en dégageant le corps d'un violent coup de latte totalement irrespectueux.
Le sang appelle le sang.
Mu par cette colère persistante et par sa vision infernale maquillée d'un camaïeu de rouges démoniaques, il tourna la tête vers l'ensemble de la garde de la ville en prise avec le loup. Ce dernier, déjà essoufflé avec le poil tâché de sang, ne tarda pas à s'approcher des barrières en bois caractérisant la limite du village.
Si Blaze parvint à se débarrasser de son ennemi, la voie vers la forêt serait grande ouverte. En attendant, Burnagore et le laguz transformé balayèrent la troupe de guerriers caparaçonnés du regard.
L'Oiseau de Sang à côté d'un loup de cendre.
Ce duo sinistre en fit déglutir plus d'un, mais le nombre comblait aisément cette sensation d'effroi. Evan agitait ses bras pour hurler aux archers de se manifester. La foule paniquée du village représentait apparemment un obstacle de taille... quelle aubaine.

Le vengeur affichait une expression satanique, un sourire dément aux lèvres déformant sa balafre rougeoyante parmi les ombres de son visage recouvert de sang. Ignifer perlait de sang et chaque goutte qui heurtait le sol ordonnait à Burnagore de faire couler davantage de ce liquide vital.

"Oui !... Tue !... Tue, Tue, Tue, Tue !! Laisse-le grandir ! Que croisse l'impitoyable courroux du démon !", conseilla "Haine" en son for intérieur.

Les conseils d'Agnan volaient radicalement en éclats. Burnagore pensait à peine à s'enfuir, même si la douleur désirait le rappeler à l'ordre. Il n'écoutait plus rien. Comment cela allait-il se terminer ? Il risquait bien plus que la mort.
Pourvu que Blaze se détache de son assaillant au plus vite...

- "Ramassis d'ordures... Je vais me repaître de vos entrailles et donner ce qu’il restera de vous à mes fidèles pourvoyeurs de la mort", lança le mercenaire sanguinaire tout en prenant une pose assurée, le dos de son Ignifer posé contre son avant-bras tendu vers ses ennemis, les jambes fléchies prêtes à charger.

Des vilains croassements se firent entendre parmi les cliquetis bruyants des armures poussiéreuses de la garde. La forêt elle-même semblait se rebeller, préludes d'un nouveau bain de sang.

Sa vision reprenait une certaine consistance, seulement pour apercevoir la dernière ligne de défense. Évidemment, comme s'il n'était pas déjà assez fatigué comme ça, et il venait de rengainer sa lame en plus... Il continua sa course jusqu'à ce qu'une odeur agisse comme un véritable coup de fouet. Un loup!!! Ici? Cela ne pouvait être que le vieux, il semblerait que son hurlement avait été... trop expressif pour lui. Il est vrai qu'il est parfaitement capable de comprendre le langage des Loups, de par les grognements et autres mimiques du visages. Ces hurlements avaient aussi une connotation pour les Loups, et celui-ci avait répondu à son appel, qui était de désespoir. Tel un animal poussé au pied du mur. Le loup argenté sauta et coupa net la route des soldats, incapables de comprendre la situation. Le Loup parla à son tour, même si en vérité, n'importe quel autre personne aurait reculer de peur.

"J'ai cru entendre ton appel, jeune Marqué."

Les yeux du Loup parlaient pour lui, et de la même manière, Blaze exprima sa reconnaissance, il n'était pas la pour cracher sur de l'aide, pas dans un moment pareil, il fallait se serrer les coudes, même si l'intervention de ce vieux Loup argenté était la preuve de sa faiblesse. Il lui laissa retenir le torrent de soldat, et le Marqué continua sa course avec une motivation renforcée. Seulement pour se faire prendre à parti par une des sentinelles prêtes à intervenir. Celui-ci tenta de lui bloquer les mouvements par sa taille énorme. Blaze se faufila mollement derrière l'homme seulement pour prendre un violent coup de coude, le repoussant sur quelques pas. Soudainement, la lance du soldat arriva et trancha sa jambe, lui arrachant une grimace de douleur. Il posa un genou à terre, il n'avait même pas eu le temps de dégainer à nouveau sa lame.

Le soldat laissa un sourire malsain se dessiner sur son visage alors qu'il s'approcha du Marqué, impuissant. La vue du sabre rengainé mettait en confiance le Beorc, à son défaut. Animé par son instinct de Loup, Blaze se releva et lança un nuage de sable au visage du soldat, lui retirant sa vue suffisamment longtemps pour qu'il finisse de se relever, couteau à la main. Plus rapide, plus précis, et moins gourmand en force, le couteau fendit l'air, il avait une vision claire sur le cou de l'homme. Alors que le petit ustensile d'acier se précipita en pointe vers la gorge du soldat qui tentait de retirer le sable de ses yeux au lieu de se remettre en garde, une vision lui apparut. Le temps était comme arrêté, stoppé net. Voulait-il vraiment tuer cet homme? Oui, son sourire montrait son mépris envers lui et Burnagore. La survie était sa première priorité après tout. Mais d'un autre côté... Il sentit la main de l'enfant du désert sur la sienne, son innocence qui ne voulait pas le mal. Blaze planta son couteau dans la gorge de l'homme, et trancha celle-ci dans la continuité de son mouvement, l'aspergeant de sang et harmonisant la couleur de sa peau avec celle de ces cheveux... Rouge sang. Aucune expression sur son visage, un vide, une absence de joie. Il n'était pas heureux, juste froid. Contrairement à la colère de Burnagore et le plaisir malsain de Redeye, lui, ne trouvait que la tristesse dans ce meurtre. Certes, nécessaire à sa survie, et c'est la seule chose qui pouvait le justifier. Il aurait pu tuer par colère, par mépris, et peut être qu'il avait ceci au fond de lui, mais il savait qu'il y avait une raison derrière son acte.

Blaze respirait difficilement, mais il avait encore un peu de force pour entendre Burnagore... Ses paroles animèrent une rage sourde sans son cœur. Le Loup argenté reculait inexorablement, couvert de flèches et de lances. Blaze se retourna pour voir que les soldats continuaient d'avancer, encore un peu méfiant du Laguz qui avait fait un carnage. Mais le souffle du Loup ne trompait pas les sens du Marqué, il était mourant. Il comprit dans son souffle qu'il souhaitait les mettre à l'abri, quitte à les mettre sur son dos.Toute cette souffrance, toute cette haine, tout ce sang!!! Blaze regarda le visage dément de Burnagore.

*SHLACK*

Une baffe d'une ampleur colossale, assez pour sonné le fou. La visage de Blaze était celui d'un sage énervé, poussé à bout par un élève capricieux. Une sorte de leçon qu'il ne devrait pas faire oublier. Tuer tout ces gens? Comment en serait-il capable? Il redeviendrait poussière, et sa sœur moisirait dans un donjon. Et tout ces efforts seraient vains. Il poussa avec colère Burnagore sur le dos du Loup, avant de se prendre une flèche dans la hanche.

"ARGH!!! Tssk! Moi? Touché?... Im... possible. URGH!!"

Blaze arracha la flèche avec rage, pendant un instant, son esprit fut embué par la haine et la douleur. Blaze tenta de rejoindre le Loup qui lui incitait par couinement de faire vite. Une seconde flèche lui arriva dans l'épaule gauche, le faisant tomber sur le dos du Loup qui démarra immédiatement sa course à la sensation de Blaze. Il entendit les jurons, les cris, et le vent qui lui susurrait encore quelques encouragements. Il se remit en position et retira avec un cri de douleur la dernière flèche. Ses yeux se firent lourd, et il se laissa porter par le Loup, il ressentait sa douleur, sa difficulté, les objets de bois et d'acier dans son corps lui arrachant des gémissements de douleur, et pourtant. Le village s'éloignait, le calme de la forêt revenait, et seul l'état terrible du Loup força Blaze à rester conscient. Il fut projeter violemment au sol quand celui-ci s'écrasa, à bout de force. Burnagore et lui étaient complètement hors d'état, mais le vieux Laguz approchait de sa dernière heure. Blaze trouva la force de se relever pour approcher le Loup qui reprenait son apparence humain, couvert de blessures, mais avec un sourire sur le visage.

"Vieux... fou... Pourquoi? Nous n'étions pas taille... Vous ne méritez pas de... mourir pour ma faiblesse."

"Allons. Un pour deux? Ca me semble un échange honnête. Vous avez la vie devant vous, j'ai kuf kuf... Fait mon temps. Mes enfants, mes petits enfants vont bien, alors je ne m'inquiète pas... Korf... Vous devez aider votre ami, il a... plus besoin d'aide que moi...

Dans un effort incommensurable, le Laguz se releva, et laissa les deux Marqués. Blaze se releva à son tour pour tenter de l'arrêter. Trop douloureux.

"Vous m'avez offert ma mort de guerrier... Merci."

Le Laguz disparut dans la forêt, pour y trouver le repos éternel. Blaze repensa amèrement à sa mère avant de tomber au sol et se laisser dormir, il était si fatigué...

Il soufflait dans son esprit. Courant d'air de haine et ouragan de rage. Gigantesque et terrible tornade pourtant compacte à laquelle s'ajoutait les brasier intense d'une colère froide. Il ne raisonnait plus comme un guerrier prédisposé à se faire la malle après avoir faire flambé une taverne et ses quelques occupants enivrés par une dose excessive d'alcool. Burnagore se comportait comme un pourvoyeur de la mort accompagné de son imposante milice de charognards à plumage sombre. Leurs vilains croassements accentuaient la douleur de son crâne ensanglanté et offraient à sa vision maculée de rouge un désir de destruction palpable.
Le monde n'était désormais plus fait que de morts en devenir.
Peu lui importaient les lances brandies dans sa direction, peu lui importaient les vociférations de cette mer de lames et de pointes affilées, ni même la venue des archers en trombe. Mis à part les ténèbres apportées par l'incarnation de son ressentiment sous la forme d'une voix sépulcrale, plus rien de sensé ne demeurait.
Il voulait trancher dans le vif au moindre mouvement brusque de ses ennemis, la rage nichée dans sa gorge brûlante et le cœur électrifié par une irrépressible poussée d'adrénaline.
Avec sa main crispée sur la poignée de son épée et sa voisine tendue, une charge violente lui permettrait de-

*SHLACK*

Une violente frappe du plat de la main lui cingla la joue et le désarçonna dans la seconde. Tout son visage en fut secoué et ses pensées sombres se désagrégèrent comme un feu de paille.
Il avait manifestement oublié la présence de Blaze, comme toutes les belles paroles glanées lors de ses précédentes conversations.
Avant même de pousser le moindre grognement réprobateur, il se sentit bousculer sur le dos du loup au pelage scintillant. Quelques secondes après, des flèches fusaient et parvinrent à atteindre son coéquipier dans la foulée. Ironie du sort, il fut lui-aussi atteint à l'épaule.
Parmi les innombrables insultes et menaces proférées par la garde, le bruissement aigu des carreaux fendant l'air et les cliquetis bruyants de l'acier, Burnagore entendit le vent s'engouffrer dans son ouïe à grande vitesse. Il décampait sans courir pour autant. Ses opposants devenaient aussi petits que des fourmis, et finirent par devenir des points scintillants découpés par les barrières en bois du village en alerte. Le sol défilait lui-aussi tandis que le loup cendré transportait sur son dos blessé le duo de bretteurs fatigués.
Une fois à distance du tumulte malintentionné laissé dans leur sillage, Burnagore heurta le sol et s'affala comme une vulgaire poupée de chiffon tachée de rouge. Il percevait à peine les rayons du soleil qui perforaient les épaisses branches feuillues des arbres environnants. Les vertiges jouaient complètement en sa défaveur et la retombée de l'adrénaline engendra une fatigue colossale.
Les ténèbres le gagnèrent et ses yeux se fermèrent peu à peu, de nouveau plongé dans l'obscurité apaisante de l'inconscience.


La main en visière, haletant comme une bête enragée, le regard lointain, Evan tremblait de tout son long. Ce putain de loup venait de sauver le duo de racailles aux cheveux de feu. Il n'avait pas prévu ce genre de folie. Même ses archers, qu'il scruta d'un sale œil, ne lui inspiraient plus qu'un profond dédain. Il s'aperçut que sa bouche était entre-ouverte et la referma aussitôt. Du moins, il la rouvrit très vite pour gronder comme le tonnerre auprès de ses collègues incompétents.

- Putain ! Putain de putain ! Foutus archers ! Comment avez-vous pu louper vos cibles, bande de tocards ineptes ! Et vous, les lanciers, vous me faites honte, PUTAIN !, ragea-t-il en secouant les mains au-dessus de sa tête.

Un garde se contenta d'hausser les épaules, un autre se mit à bailler, un collègue plus avisé et attentionné inspecta prudemment les dépouilles des victimes en armure. Le reste surveillait la forêt et discutait en évitant de croiser le regard du réprobateur fou de rage et de frustration.

- Pfff ! Ignorez-moi donc, bande de salauds. Si cela ne tenait qu'à moi, je vous foutrais tous au feu, marmonna ce dernier dans sa barbe.



Il s'avança sous l'arche miteuse symbolisant l'entrée du village et croisa les bras. Un plan commença déjà à affleurer de ses sinistres pensées vindicatives.
Décidément, la vengeance contaminait bien des personnes. Merci, Burnagore.
Il frémit en sentant une main se poser sur son épaule et se retourna aussitôt, prêt à cracher toute sa haine au visage de l'audacieux désireux de déranger sa méditation.
Derrière-lui se tenait un homme de taille raisonnable, le crâne hérissé de cheveux blonds mi-longs et raides. L'intéressé n'esquissa pas le moindre sourire et son air sérieux calma Evan. Il s'agissait de Dunkel, le frère cadet de Céasar Vulturès, le meilleur archer parmi les ex-compagnons de Burnagore. Il arborait fièrement le blason de "L'Ordre de la Lame" au niveau de son cœur, sur sa veste d'un jaune clinquant.
Que pouvait-il bien foutre ici ?

- Inutile de tenter de les poursuivre. Nous avons déjà pris nos précautions.

Son regard glacial scrutait calmement le garde, et sa voix débordait de confiance. Non seulement il ne semblait pas craindre le courroux d'Evan, mais en plus de cela ce dernier donnait l'impression de le jauger avec un air supérieur.
Evan poussa un grognement sourd en secouant la tête.

- Vous ? Des précautions ? Et en quoi sont-elles capables d'apaiser ma colère, vos putains de précautions ? J'ai une taverne flambée sur les bras et une humiliation qui a entaché ma conscience. Je vais retrouver ces deux connards et les foutre au bûcher sur la place publique. Peu importe si v-

Dunkel leva le dos de la main droite devant le visage d'Evan et e daigna même pas le regarder du coin de l’œil en le dépassant. Le calme de l'individu parut oppressant, d'un seul coup.

- J'ai daigné vous laisser faire pendant que j'analysais soigneusement notre ennemi commun. A vrai dire, j'avais pour mission d'enquêter sur l'identité de ce tueur aux multiples titres extravagants et hautement exagérés. L'Oiseau de sang est Burnagore. Il nous incombe à nous, membres de l'Ordre de la Lame, de nous débarrasser définitivement de ce fauteur de trouble. Il risque d'entacher bien plus que votre misérable fierté et de souiller note prestigieuse renommée. Ce félon n'en a plus pour longtemps à vivre. Lui et son ami.

Dunkel ne paraissait pas du coup convaincu. Pas le moindre enthousiasme à l'égard de cette déclaration.

- Vous êtes resté les bras croisés en assistant à la fuite de ces deux ordures et vous osez me dire ce que je dois faire ? Comment pourriez-vous me convaincre de vous laisser reprendre le flambeau ? Jusqu'ici, votre "Ordre" n'a servi à rien.

L'archer haussa les épaules en faisant signe à quelqu'un de s'approcher depuis les lignes arrières désertées par la garde. D’innombrables paires d'yeux horrifiées se tournèrent vers l'origine d'un boucan produit à intermittence. Des bruits de pas de plus en plus forts, de plus en plus lourds. Le sol en tremblait et les quelques cailloux sur le chemin poussiéreux où se situait Dunkel et Evan se soulevaient à chaque secousse. Une immense ombre d'une taille semblable à celle de Redeye assombrit le visage blafard d'un Evan stupéfait.
Dunkel claqua des doigts devant son visage figé.

- Satisfait ? Nous avons le bras plus long que vous ne pouvez l'imaginer. Laissez-nous faire et cette affaire sera close en moins de deux.

Un sourire de dément fendit le visage levé du garde, son regard fasciné admirait la hauteur du spécimen. Une leur d'espoir attisa le braséro de sa vengeance laissée en suspend.

- ...Parfait. Faites-donc ! Veillez à ce que leur mort soient atroces., répondit Evan en s'écartant du chemin et en faisant signe à ses collègues de déblayer le passage.

- Elles le seront. Considérez-les déjà comme déchus.

Les bruits de pas puissants résonnèrent dans l'avenue laissée par la garde terrifiée et Dunkel suivit au pas, sans trop de hâte, avec son calme habituel.

- Fin Du RP, la suite plus tard dans un autre topic -