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 Arthen le méchant dragon

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AuteurMessage
Arthen
ArthenLaguz


Messages : 69
Localisation : Pourrissant dans l'une des cellules de Goldoa

Feuille de personnage
Niveau:
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MessageSujet: Arthen le méchant dragon   Arthen le méchant dragon I_icon_minitimeVen 21 Mar - 21:02

o Informations générales :

Nom : Kelthera
Prénom : Arthen
Surnoms : Semi-dragon, Abomination de Goldoa, Dragon Fou, Tâche Rouge
Rang : Semi-dragon
Âge : 320 et des brouettes
Sexe : Masculin
Race : Laguz
Peuple : Dragon rouge
Pays d'origine : Goldoa

o Description du Personnage :

Le désert, une âme. Qui était quoi, et lequel était contenu dans l'autre? C'est compliqué à dire lorsque la seule optique qui se présente à vous se résume à un vaste drap fauve, déployé sous le voile bleu du ciel auquel est suspendu cette boule, tantôt blanche, tantôt jaune, tantôt divinité, tantôt objet des sciences. Sans rien pour guider sa destinée, l'âme se perd et dérive sur une mer agitée bien que sans vague, au milieu de nulle part, en dehors d'un quelconque repère chronologique, n'importe comment.
L'immensité du désert, la profondeur d'une détresse; la profondeur du désert, l'immensité d'une détresse. L'âme ne sait plus. Sans corps d'attache, sans esprit identitaire, l'âme ne discerne plus, n'est plus.
Alors l'âme avance, insatiablement, un pas devant l'autre, et trace son chemin linéaire vers un inconnu sans présage.

Titubant, une silhouette emmitouflée dans une cape d'ébène, malmenée par les vents violents et le sable corrosif, s'approche d'un village fait de maisons en terre. Choisissant la première habitation comme refuge, elle tape lentement et lourdement sur l'imposante porte en bois censée résister aux violentes rafales de ce pays reculé. Au sixième coup, la silhouette s'effondre de fatigue et tombe dans le sable. Inconsciente, elle est péniblement tirée à l'intérieur par un quelconque autochtone.

.


 « Où suis-je ? »

Alors qu'un corps se réveillait, une âme émergeait dans la réalité. Un vieux lit en bois, une petite table, un foyer pour les froides nuits du désert, un peu de nourriture séchée, et une armoire. Un abri de fortune en quelque sorte, de quoi survivre, sauf que les gens d'ici y vivaient tous les jours de l'année.

« Cet endroit n'a jamais eu de nom. D'un ancien avant-poste militaire, c'est devenu un petit village avec le temps. Personne ne veut donner de nom à cet endroit, car chacun pense qu'on est ici de manière temporaire... Mais force est de constater qu'on s'est habitué, et que nous n'avons plus la force pour retraverser le désert. D'ailleurs je me demande encore comment vous êtes arrivé jusqu'à ma porte... »

L'homme eut un moment de flottement, puis se rappela qui il était, et d'où il venait. Il porta une main à son visage mutilé.

« Vous n'avez pas... peur de moi?
- Oh vous savez j'ai vu pleins de choses horribles, bien pire que ce que je vois là.
- Pas sûr...
-Pardon ? Vous avez dit quelque chose?
- Non. Excusez-moi d'être si brusque, mais avez-vous quelque chose à manger ? Je meurs de faim...
-Bien sûr ! Je vais vous servir ce que j'ai préparé ce matin. Vous allez vous régaler! »

La femme se dirigea alors vers la cheminée et fit réchauffer une gamelle de nourriture. Des cris d'un enfant en bas âge se firent entendre. L'homme se leva et s'avança vers ce qui semblait être un petit lit, ou un berceau. Il y avait là un tout petit être, rond et rose, pleurant probablement à cause de la faim, jeune et innocent, qui doit encore tout apprendre de la vie.

« Oh ne vous en faites pas pour lui, il doit juste... »

Les cris cessèrent brusquement. La femme se retourna et vit l'inconnu qu'elle avait recueilli observant son bébé, son fils, la chair de sa chair, empalé sur ses griffes. Ses griffes. Il n'avait plus là un bras d'homme, mais à la place un énorme bras rouge sang, recouvert d'écailles et se terminant par une main monstrueuses, griffue, comme une wyverne. Cette même main transperçait de part en part le corps du pauvre petit au niveau du torse, s'il est encore légitime de parler de torse, car face à l'imposante main démoniaque, l'enfant n'a pas résisté longtemps. Physiquement parlant.

La femme laissa tomber la cuiller en bois qu'elle tenait avant de crier et de se précipiter vers la porte. L'homme jeta la progéniture ensanglantée contre la porte, juste devant sa mère, avant de rejoindre cette dernière d'un saut-glissé sur la table. De son bras « animal », il la plaqua contre le mur, avant de lui chuchoter à l'oreille :


 « Allons, on n'en n'a pas encore finit tous les deux... »

D'un geste il lui déchira les vêtements.

 « Bon ! Je crois que nous pouvons nous arrêter là!
- Dommage, vous ratez la partie la plus intéressante...
- Je n'en doute pas un instant M. Kelthera, bien que vous soyez un être répugnant... Si vous êtes ici c'est pour répondre à un certain nombre de questions, avant que vous ne répondiez de vos actes devant le roi et le peuple de Goldoa. Vous avez vous-même demandé entretien avant l’exécution de la sentence. Si vous ne respectez pas les règles du jeu, alors je pense que nous pouvons passer directement à la prochaine étape. Qu'en pensez-vous?
- Je pense que vous n'êtes qu'un sous-fifre, un exécutant non-pensant, pas capable de reconnaître que les « règles du jeu » comme vous dites, ne sont jamais les mêmes, et que le plus souvent c'est moi qui les fixe.
- Évidemment, et le fait que vous soyez attaché au fin fond de la prison royale à quelques jours, ou quelques heures dépendant de votre comportement, de votre mise à mort ne change absolument rien je présume?
- Vous ne trouvez pas bizarre que du jour au lendemain vous réussissiez à me capturer après avoir passé des années, des dizaines d'années à me pourchasser, en vain?
- ...
- Bien, je crois que vous commencez à saisir le concept.
- ...Ma présence ici découle de votre demande à avoir la possibilité de rédiger des mémoires. Je suis scribe et je suis là pour noter votre... récit. Mais ce que vous venez de me raconter ne me concerne en rien.
- Ah bon ? Que suis-je d'après vous?
- Un criminel, sans l'ombre d'un doute.
- Et que sont des mémoires ? D'après vous, toujours...
- Un recueil de souvenirs, une biographie, une sorte de rétrospective, le récit d'une vie.
- N'est-ce pas alors légitime de consigner dans les mémoires d'un criminel les crimes qu'il a commit?
- ...
- Bien ! Cette discussion ne mène à rien vu que vous ne semblez pas qualifié pour l'échange oral. Je vous prierai donc de bien noter.
- Attention ! Le roi, dans son infinie clémence, vous a accordé vos derniers vœux. Veuillez le respecter et faire honneur à sa décision, ainsi qu'à ma présence ici, ou votre dernier droit dans ce monde pourrait vous être retiré!
- Si le roi a accédé à ma demande, c'est pour l'avenir du continent. Il ne prendrait jamais le risque que je devienne une légende après ma mort, une figure du crime, la « Mythique Abomination de Goldoa ». Avec les textes que vous allez écrire, vous allez tuer dans l’œuf les rumeurs que me survivront et qui se disperseront à travers les frontières. On pourra utiliser ces textes, VOS textes, comme enseignement pour les plus jeunes, une trace matérielle à travers l'Histoire. Et vous, vous serez celui qui a recueilli les derniers mots du dragon fou, la tâche indélébile d'un pays entier. Oh croyez-moi, le roi ne renoncera pas à mon dernier souhait.
- Foutaises. Le roi n'a pas besoin de votre récit, il peut écrire les livres d'histoire comme il l'entend.
- Un roi qui modifie les textes historiques de son pays ? Oui, ça plaira beaucoup au peuple et aux autres nations, j'en suis sûr. Avec notre entretien, le roi pourra garantir la véracité de vos textes. Personne ne cherchera la vérité, vu que ça sera la vérité ; personne ne fouillera dans les recoins pour essayer de connaître les mythes oubliées ou volontairement effacés des bibliothèques, puisqu'il n'y en aura pas. La sécurité, ça vous parle ? De plus, petit bonus : votre roi aura ainsi l'image d'un roi juste et clément à travers tout le continent, le roi « qui accorde la dernière volonté des condamnés », similaire à la déesse pardonnant les péchés de celui qui veut se racheter. Vous voyez ? Votre vision se limite à ces petites lunettes rondes, vous ne savez même pas ce que vous êtes entrain de faire, aveuglés par vos préceptes, vos principes et vos axiomes débiles, indubitables. Maintenant faites votre boulot et laissez-moi parler.
- ...
- Bien. Par où commencer ? Par le jour où je suis venu au monde je suppose... »

Je pense qu'il y a beaucoup de rumeurs sur ma... provenance n'est-ce pas ? Je vais y mettre fin. Non, je ne suis pas né dans un volcan ; non je ne suis pas issu de l'imagination d'un sorcier ; non je ne suis pas né dans un asile lointain. Je suis né tout près d'ici, dans un village sans prétention. Ah ! Que c'est ennuyeux ! Le début de l'existence déjà remplie de lamentations. Notez que les premiers choix auraient été bien plus adéquats pour mon histoire. Un père et une mère aimant leur progéniture... C'est attendrissant, beau, mignon, tout ce que vous voulez. Si j'avais eu un fils comme moi, je l'aurai tué. Sans blague, vous avez vu ma gueule ? Blah ! Dégueulasse. Ce visage brûlé, cet œil noir empli de sang, cette marque bizarre sur le haut du crâne, crâne à moitié chauve d'ailleurs ! Ces cheveux rouges hirsutes... J'étais loin d'être le petit enfant rose et doux dont rêvent toutes les futures maman. Déjà une abomination, alors que mes poumons s'emplissaient pour la première fois d'air. Mais un parent c'est con. Enfin pas tous, je vous rassure, les espèces animales gardent encore une once d'intelligence dans ces cas-là : les faibles ou les malades sont tués peu après la naissance. Dans le pire des cas, ce sont les lois naturelles qui s'en chargent. Mais non, nous dans nos maisons de pierre, avec nos outils, nos vêtements et nos civilisations, nous prônons l'égalité pour tous et le droit de vivre universel... Tellement de conneries. Voyez où ça vous mène ça : moi, des meurtriers, des gros, des malades, des handicapés. Du temps, de l'argent, des ressources, même de la magie ! pour garder en vie ces gens qui ne le méritent pas. Ça vous apprendra tiens...

Où j'en étais ? Ah oui ! Mon enfance. Que voulez-vous que je vous dise ? J'ai grandi entouré d'amour, j'ai été éduqué dans le respect des traditions de notre magnifique pays, je me suis développé comme n'importe quel autre enfant. A ce détail près : de ma condition naturelle de Laguz je n'étais pas un moment capable de prendre forme animale, « draconique » pour nous autres lézards-ailés. On m'a réconforté en me disant « c'est pas grave, tu y arrivera un jour, ce n'est pas de ta faute, bla bla bla... ». Encore des conneries. Un Laguz qui ne sait pas, qui ne PEUT pas se transformer ? Sérieusement ? A 10 ans, ça peut encore passer. A 20 ans, on vous prend carrément pour un attardé, mais à 50 ans, vous êtes la risée du village, du royaume. On parlait de moi là où je n'étais jamais allé, on me donnait des surnoms, en ville on me crachait dessus. Forcément, le moche défiguré qui ne peut se transformer, ça pose des questions. D'un coup, ce fut la folie complète autour de moi. Les médecins, les mages, les religieux, tous y allaient de leur avis, de leur pronostic, de leurs conseils, de leurs remèdes. La plupart voulait me tuer, et ils avaient certainement raison, mais mes parents ne voulaient rien entendre. Une guérison ou rien. Qu'ils étaient naïfs. Ils ne le savaient pas encore, mais ils voulaient me guérir d'une malédiction.

Toujours est-il que j'avais une vie particulièrement houleuse, et je n'étais tranquille que chez moi, enfin chez mes parents. 60 ans, jamais entraîné, jamais transformé, même pas une fois, je n'avais jamais travaillé, je n'avais rien fait de ma vie, à part peut-être les quelques cours que mon père me donnaient chaque semaine pour m'instruire un minimum. Alors qu'ai-je fait tout ce temps ? C'est une question légitime. Je me suis construit figurez-vous, construit autour de moi-même, sans appui familial, sociétal ou culturel. J'ai développé mes idéaux, mes concepts, mes normes, ma morale, seul dans mon coin, face à ma propre réflexion. Je n'avais nullement besoin de ces abrutis ! Voyez par vous-même ce que je suis devenu ! Je me considère d'ailleurs bien plus éveillé sur le monde actuel que la majorité du peuple qui crie à vos fenêtres pour qu'on me coupe la tête ! Mêmes vos nobles et le clergé ne saurait voir complètement le monde tel qu'il est, et se l'avouer. Tous bercés d'illusions, tous enfermés dans des concepts terrestres, matériels, civilisés, empêchant d'accéder à votre instinct primaires, à vos réelles pensées, à vos propres démons. Ne dites rien, ce n'est pas utile, je sais que vous me contredirez, et ça ne ferait qu'illustrer mes propos de la manière la plus belle et la plus claire qui soit. La moindre pensée de remise en question est déjà un effort surhumain pour vous. Je vous en prie, restez donc là à croupir dans vos sociétés interdépendantes et instables, tout finira par s'effondrer, vous verrez. Vous tomberez alors de votre tour d'ivoire, de vos sièges dorés, de vos lits en marbre, vos murailles s'émietteront, vos espoirs se noieront dans les vagues de la guerre...

J'étais donc seul, et seul je me suis occupé. Dans l'innocence de l'enfance, dans la révolte de l'adolescence, dans la fougue de la jeunesse, dans le cynisme de ce qui a suivi... Naturellement, il y a des jours où ma pensée revenait sur des choses plus terre à terre et intimes, mon esprit se recentrait sur ma propre condition, sur moi-même. Pourquoi ce visage ? Pourquoi ce handicap ? Pourquoi ? Pourquoi MOI ?

Puis j'ai eu une réponse à ces questions, un beau jour. C'était d'ailleurs durant la nuit que j'ai compris. Vous savez sûrement, le fameux incident... Ce soir-là où on a retrouvé deux « corps » dévastés, littéralement découpés et carbonisés en pleine rue. Moi-même je ne m'en souviens pas, car une quelconque entité a peut-être pris possession de moi, ou alors j'ai succombé à la folie, la vraie cette fois. Je peux en revanche vous dire ce que j'ai pu entendre ici et là au fil des années sur cette histoire. Si je recoupe les informations, le plus probable serait que je me sois fait agresser par un petit groupe de vandale, insulté « d'Abomination », et que ça en soit vite venu aux poings. On dit que j'aurai d'abord convulsé, avant de hurler à la mort et de m'évanouir. Je me serai relevé quelques secondes après, puis je me serais transformé en dragon. Que j'aurai aimé me voir à ce moment là ! On ne tarit pas d'éloges sur mon apparence: « magnifique dragon rouge sang », « monstre ailé », « puissant comme la race rouge, l'aura de la race blanche », « des ailes plus puissantes que certains membres royaux » (ma préférée), et bien d'autres encore. Malheureusement, tout ceci ne fut que le fruit du hasard, et je ne peux recréer l'expérience, à mon plus grand désarroi...

Mon premier exploit, le crime qui débuta une vie. Naturellement, on m'enferma, on me jugea, et on m'enferme à nouveau. Je me souviens qu'un long débat s'en suivit, à savoir : peine de mort ou pas ? Les discussions durèrent longtemps, mais finalement on m'épargna. Pour m'enchaîner à un mur au fin fond d'un cachot dans lequel je pourrais subir toutes les expériences qui passaient par la tête des scientifiques. Ils voulaient « savoir », « comprendre », d'où me venait toutes ces caractéristiques qui faisaient que je ne me fondais évidemment pas dans la masse. Fou allié, maudit, d'un autre temps, encore une fois on me cracha à la gueule des réponses toutes aussi catapultés les unes que les autres, sans réel fondement. Des observations, des potions à la con qui me donnaient faim, trois notes sur un bout de papier, et ces génies à lunette pondaient une nouvelle théorie, une hypothèse, une volonté divine. Et ça a duré pas mal de temps. 3 ans c'est ça ? Ça doit être marqué quelque part sur l'un de vos registres de bureaucrates, vous n'aurez qu'à les vérifier.

Mais au fond de ma cellule, dans mon trou sombre et humide, je ne suis pas resté passif. Je n'ai cessé de me remémorer ma transformation. Je n'en n'avais aucun souvenir, mais c'était un fait, j'y étais arrivé. Et j'avais littéralement explosé deux gars. Explosé. Une puissance folle sommeillait en moi, et je pouvais y avoir accès. Je ne savais comment, mais je pouvais. J'y étais arrivé une fois, il n'y avais donc aucune raison que je ne puisse le faire une seconde fois. J'ai nourri cette avidité, cherchant par tous les moyens possibles et imaginables de ressortir cette force, ce dragon que j'étais.

Forcément, si je suis ici à vous raconter ça c'est que j'ai réussi à sortir de ce trou. Mais tout se n'est pas réellement passé comme je l'attendais. Au début, on pourrait comparer cela à ces histoires pour enfants, avec les beaux héros et les méchants moches, lorsque le vieux roi-sorcier s'énerve et se transforme en une bête hideuse que le personnage principal et sa bande de gais lurons iront pourfendre quelques pages plus loin. Je ne me rappelle pas m'être réellement énervé, non j'étais très lucide et posé, étonnement, aucune place pour les émotions là-dedans, pure et simple réflexion. Mais alors que je m'attendais à devenir un gros lézard, j'ai seulement ressenti une immense douleur dans mon bras droit, dans mon dos, et une brûlure sur la totalité de mon corps. Mon cœur battait au ralenti, j'avais alors la sensation que mes sens étaient décuplés et que ma perception s'en était retrouvé sublimée. Je me sentais puissant, vif, intouchable, immortel. Mes douleurs se sont intensifiées, c'est alors que j'ai entendu une chaîne se briser et un bruit sourd, comme un objet massif qui tombe à terre. C'était mon bras, qui avait bien triplé de volume, et qui n'était pas celui que je connaissais, le frêle morceau de chair rose. A la place j'avais un magnifique outil de destruction, qui ressemblait aux membres de vous autres lorsque vous êtes sous votre « véritable forme » ; sauf qu'il était encore plus beau, vu que c'était le mien. De la même manière, d'immenses ailes rouges sont apparues dans mon dos, et une longue queue a commencé à pousser. Les chaînes n'ont pas résisté longtemps, et je me suis effondré à terre. J'ai alors remarqué que je n'avais rien senti. De ma main gauche j'ai commencé à me toucher le visage, par réflexe. Des petites plaques dures, un peu partout, comme de petites écailles, éparpillées sur la totalité de mon corps.
Je me suis mis à rire.
C'était parfait, parfait, tout ce dont j'avais besoin, et tout ce que je n'aurais jamais dans ma vie, se retrouvait dans ce nouveau corps. J'ai pris mon envol, et après m'être cogné à plusieurs reprises contre les murs et le plafond, j'ai réussi à trouver un échappatoire. Malgré mon inexpérience, j'allais beaucoup plus vite que les gardes, car j'étais léger, et c'est ce qui me sauva la vie, sinon je ne serai aujourd'hui pas ici à vous raconter tout ça.

Après mon évasion, j'étais devenu euphorique. Presque 70 années à être la cible de moqueries, la risée d'un pays, humilié, vous ne savez pas ce que ça fait ? Évidemment non, vous êtes né avec une cuiller en argent dans la bouche. J'étais enfin libre d'aller où je voulais, comme je le voulais, et pas confiné dans ce pays qui ne voulait pas de moi. Je n'utilisais mes.... « pouvoirs » que lorsque j'étais absolument sûr d'être seul. Le reste du temps, je me baladait sur le continent comme n'importe quel autre Beorc. Si on me posait des questions sur mon visage, j'invoquais un accident de jeunesse, avec un incendie, et c'était réglé. Cette race est insensible à son environnement et ne sais pas différencier un Beorc d'un Laguz,  c'était un jeu d'enfant de me faire passer pour eux. Des fois, je croisais un autre Laguz, la plupart du temps un félin, mais ni lui ni moi ne disions mot sur l'identité de l'autre, car on savait tous comment ce genre de petites fêtes allaient se finir.

J'ai vécu comme un vagabond, d'amour et d'eau fraîche, pendant pas mal de temps, pendant plus de 200 ans. Aller à droite et à gauche, m'informer, découvrir... C'était une vie passionnante, j'avais tout mon temps pour faire tout ce que je voulais, et le plus souvent c'était préparer mon retour sur le devant de la scène. Il me fallait connaître par cœur les grandes routes, et les routes un peu moins grande, les villes principales des différents pays, les endroits où je pourrais me réfugier en sûreté, et en 200 ans, on a le temps de le faire, croyez-moi.
Je me suis aussi assuré de connaître suffisamment bien l'histoire de chaque pays, les dirigeants, me tenir au courant de l'actualité, des tenants et des aboutissants de chaque affaire, l'évolution à travers les ans. Plus j'en savais, plus j'étais en sécurité. Et plus j'étais en sécurité, plus j'ai pu passer du temps à rattraper le temps perdu, ces décennies enfermé dans un corps inutile. J'ai perfectionné des techniques, tirant parti de ma... particularité.

J'ai choisi l'année de mes 300 ans pour commencer à réellement frapper. Deux siècles de préparation, je trouve ça plutôt honorable. Surtout quand on ne vous attend pas au tournant. Qui serait assez fou pour retourner dans son pays après tout ça ? Sur les terres de ses ancêtres, là où il est connu, reconnu et recherché ? Pas grand monde. Presque personne en fait, car les gens tiennent à la vie et à leur liberté. Moi ? J'avais comme la sensation d'avoir quelque chose à accomplir. Pas une destinée ou autre connerie du genre, mais plutôt un message à faire passer, un peu d'huile à laquelle foutre le feu. Vous devez vous en souvenir encore, c'est certain. Vous savez, cette nuit où j'ai brûlé ma maison, cette nuit où j'ai dévoré le corps de mes parents, cette nuit où on a retrouvé deux têtes sur des piques au milieu de ruines calcinées. Oh mais attendez, laissez-moi raconter ce qui s'est passé...

Nostalgie de rentrer chez soi, mêlée à l'excitation de la surprise, l'accomplissement d'un projet, l'assouvissement d'une envie... Ce cœur de pierre était en proie aux émotions lorsque j'ai clandestinement passé les frontières de la terre des dragons. Croyez-moi, je reste un être vivant avec des sentiments, tout comme vous, bien que la plupart du temps ils vous sont inconcevables, même avec vos illustrations les plus détestables de forces maléfiques.
Rien n'avait changé, toujours cette politique de l'autruche, à rester dans son coin et ne pas se préoccuper de la détresse de ses voisins, le roi faisait la sourde oreille et le peuple se bouchait les siennes. Réveillez-vous bande d'inconscients ! Vous êtes les créatures les plus puissantes sur cette terre ! Levez-vous et répandez votre rage de conquête ! Arh ! C'était peine perdue. Les plus gros, les plus mous...

Je me souviens encore de ce soir-là, ce soir où j'ai revu mes parents. Je m'étais habillé pour l'occasion, une longue cape brune me recouvrant intégralement ; ils ne me reconnaîtraient pas jusqu'à ce que je veuille qu'ils ne me reconnaissent. L'effet théâtral voyez-vous. Je trouvais ça plus intéressant que de simples embrassades et un poignard planté dans le dos. Alors j'ai frappé à la porte de mon ancienne maison. C'était en été, l'une de ces chaudes nuits où la température ne chute pas une fois le soleil passé l'horizon, ces nuits-là où on tourne plusieurs fois dans son lit avant de trouver une position confortable pour dormir, ces nuits où l'on rêve d'eau, d'hiver et de fraîcheur.

Une fois, deux fois, trois fois... La porte s'ouvre. Hop ! Je fais bien attention de ne pas me faire remarquer. Intérieurement, je sautais de joie, je trépignais d'impatience, mais il ne fallait rien paraître, absolument rien. Malheureusement, je ne pu laisser échapper un léger sourire, mais je doute qu'elle ne l'ait vu. Oups ! Je crois être allé trop vite ! Si ça continues, je vais dire la fin trop tôt, et ça gâchera tout le récit.
C'était donc ma mère qui a ouvert la porte, et lorsqu'elle aperçu la silhouette que je représentais, elle eut un léger sursaut, puis elle ne broncha pas, immobile et calme. Après tout, ne dit-on pas « Quiet comme un Dragon ? ». Non ? Bon, laissez tomber.
Cependant, après quelques secondes, elle engagea la conversation, réaction naturelle, évidemment.


 « Bonsoir. Qui êtes-vous et que voulez-vous ?
- Allons, vous ne vous souvenez pas de moi?
- Si je vous voyais convenablement, alors peut-être que je pourrais répondre à cette question.
N'est-elle pas fantastique?
- C'est moi, votre fils.
Je lui ai dévoilé mon visage à ce moment là. Ce que j'ai vu vaudrait tout l'or du monde. D'abord de l'incompréhension. « Comment est-ce possible ? Depuis tout ce temps... Vivant ? Où ? Pourquoi ? Ai-je mis suffisamment de carottes dans ma soupe pour une troisième personne ? ». Puis, l'incompréhension a laissé place à la joie, la réjouissance, l'amour maternel. « Mais... ce visage... Cet œil noir, ces cheveux rouges... C'est mon fils ! Il est vivant ! Mon fils est vivant ! ». C'est la partie la moins intéressante, une mère aimant son fils, c'est du vu et du revu. En revanche la peur, ça c'est bien plus attirant. « Attends, cette personne est un criminel qui s'est enfui de prison ! Mon fils est un criminel ! Mon fils a tué des personnes ! ». S'en suivit alors une longue discussion interne, prenant place dans l'esprit de ma mère. Quelle part d'elle-même allait prendre le dessus ? Allait-elle m'accueillir ? Me rejeter ? Tenter de me tuer ?
« Le cœur a ses raisons que la raison ignore », n'est-ce pas ? Non ? Mais sortez un peu votre nez de vos bouquins ! Il y a une vie en dehors de ces murs !

Elle a donc, contre toute logique, décidé de me laisser entrer chez elle, chez moi. Je passe le seuil de la porte, je vois mon père, il me voit, retrouvailles larmoyantes, passons.
Ma mère va s'occuper du dîner. En 300 ans, les habitudes de maison n'ont toujours pas changé, le repas est toujours servi à la même heure.
Je prends donc une chaise, je m'installe à table, et je discute avec mes géniteurs sur le pourquoi du comment de ma visite.


 « Alors mon fils ? Qu'est-ce qui t'amènes ? Tout ce temps sans nouvelles... On s'est inquiété au début, puis on a fini par croire que tu étais mort. Au bout d'un moment on a accepté le fait que tu ne reviendrai jamais chez nous. Visiblement, nous avions tort.
- Eh bien père, c'est très simple. J'ai fait mon voyage autour du monde, j'ai découvert les autres peuples, j'ai vécu ce qu'il y avait à vivre de l'autre côté des frontières, mais à force j'en ai eu marre. Je me laissais de cette vie de bohème, de vagabonder à droite à gauche, de vivre de petits larcins, de la manche, de boulots payés à coup de pain et de fromage. Je ressentais un manque, à la fois physique et émotionnel, un manque affectif, un manque de moi-même. Je voulais revenir là où j'étais né, là où j'avais grandi, là où j'étais devenu moi-même, l'homme que je suis maintenant, celui dont je suis fier, celui que vous avez élevé avec tout votre cœur...
Entendez-vous ? Oui, gniouu...gniouuuuu... Les violons de l'embobinage!
- Mon chéri je...
Elle commence à verser une larme. C'était attendrissant en y repensant. Mon père aussi d'ailleurs. Ça par contre c'était pathétique.
- Pourquoi avoir attendu aussi longtemps ? Plus de deux siècles?
- J'avais peur, je l'admet, peur de la justice du pays qui me rattraperait, je serai sûrement mis à mort s'ils y arrivent un jour. D'ailleurs je pense que je resterai pas ici avec vous, c'est trop dangereux je...
- Ne dis pas n'importe quoi ! Tu peux rester ici autant de temps que tu le souhaites ! On t'as déjà perdu une fois, j'ai pas envie que ça recommence. Tu as fait des erreurs dans ta vie, apparemment tu es revenu sur le droit chemin, et je suis fière de toi pour ça. Malgré tout ce que tu as fait, tu restes notre fils, et nous t'aimons...
- Ta mère a raison, on a suffisamment de place ici pour trois, et ça te fera sûrement du bien de vivre sainement en famille, comme avant.

Écoutez bien, c'est là que ça devient intéressant.

- Décidément vous n'avez pas changé, toujours aussi pathétiques...
Je relève doucement la tête vers eux avec un large sourire pendant qu'il m'observent avec stupéfaction. Le théâtre ! La mise en scène ! C'est le plus important!
- Vous savez pertinemment que je suis un criminel recherché, que je me suis évadé de prison, que j'ai tué des gens, mais vous m'accueillez toujours avec votre amour débordant, dégoulinant de tendresse, dégueulasse. Vous n'êtes pas conscients du danger auquel vous vous exposez en voulant me recueillir. L'instinct de survie ! L'intelligence primaire et animale ! Tuez-moi ! Dénoncez-moi ! Pourquoi restez-vous là, à vouloir faire de moi le parfait fils de bonne famille ? N'avez-vous toujours pas compris ? Je suis dangereux ! Je ne suis pas comme VOUS ! Vous voulez une preuve ? J'ai tué des dizaines de gens ! J'ai bravé les lois de tous les pays du continent ! Je suis recherché partout, sous différents noms, avec différentes descriptions, à cause de méfaits bien différents, mais les faits sont là ! JE ! SUIS ! UN ! CRIMINEL ! Arrêtez de vouloir former une famille ! Vous ne comprenez rien ! Vous ne méritez pas de vivre si c'est pour gâcher ce don si futilement! »

Le drama ! Le jeu d'acteur ! Les troubadours et ménestrels peuvent aller se rhabiller ! Les danseuses et les bardes peuvent dès maintenant changer de métier !
Après cette magnifique tirade faussement dramatique, j'ai décidé de passer à l'action. Instantanément, je laisse le démon sommeillant en moi se réveiller pour revêtir cette apparence qui me plaît tant, celle d'une abomination, une erreur de la nature. De mon bras droit j'ai balancé la table en bois sur ma mère, pour me jeter l'instant d'après au cou de mon père. Je l'ai plaqué au mur, en le soulevant un peu du sol, avant de lui chuchoter quelques mots à l'oreille ; mots que je ne vous répéterai pas, car c'était un échange strictement père-fils. Je l'ai cogné plusieurs fois contre le mur, avant de le laisser tomber, sonné, pour m'approcher de ma mère qui se relevait à peine de sa fantastique rencontre avec la massive table en bois. Ne vous méprenez pas, bien que « fiers dragons », mes parents étaient comme beaucoup d'autres, en adéquation totale avec la politique du pays. Ainsi, n'étant pas eux-même militaires, ils ne se métamorphosaient jamais, et avec le temps avaient perdu la superbe de leur jeunesse, pour ne devenir que des incapables. Ils n'avaient aucune chance, et avec cet assaut, ils n'avaient plus assez de force pour tenter quoique ce soit. Ils étaient finis.

De l'instant où elle se redressa sur ses deux jambes, ma mère se prit un formidable coup de poing en pleine cage thoracique, ce qui, je crois, lui brisa quelques côtes. De toute façon, pour l'utilité qu'elle en aurait après ça.
J'ai alors posé délicatement mon pied là où je venais de la frapper, histoire de la maintenir à terre pour qu'elle ne puisse pas avoir l'occasion de s'enfuir, au cas où elle aurait l'idée de le faire. Petit à petit, faisant de plus en plus pression, je lui faisais de plus en plus mal, douleur qu'elle ne supportait évidemment pas. Un crac, du sang, un hurlement gargouillant. Ah ? Les os brisés auraient donc transpercé un quelconque organe, comme les poumons ou le cœur par exemple.
Sa résistance m'a déçu sur le coup, je pensais qu'elle tiendrait plus longtemps. Vu qu'elle agonisait, j'ai décidé d'en finir en beauté. La dernière image qu'elle a vue de sa vie n'a pas dû être des plus réjouissante : un monstre difforme, mi-humain, mi-dragon/démon, le corps écaillé, le visage à moitié brûlé, un œil, aveugle, rempli de sang, une large marque noire sur le crâne qui lui paraissait plus étendue que dans ses lointains souvenirs du jour où elle m'a donné la vie. Puis, une lumière rouge, provenant de l'intérieur du torse de la créature qui la tenait, un feu caché derrière les écailles rougeâtres et craquelées, un feu qui remontait et qui luisait dans les poumons, dans la gorge, puis dans la bouche parsemées de dents noires et pointues de son bourreau.
Lorsque les flammes vinrent lui lécher le visage, j'ai compris par les gargouillements qu'elle faisait et par les jets de sang qui étaient expulsés entre ses dents qu'elle tentait d'hurler, et donc qu'elle souffrait. Mais cela ne dura pas longtemps, car à peine quelques secondes après, je ne sentais plus aucune résistance sous mon pied.


 « Avez-vous déjà vu quelqu'un brûler?
- Pardon?
- Avez-vous déjà personnellement vu quelqu'un brûler ? Un corps se consumer devant vos yeux?
-Non je...
-Non, évidemment que non. Vous n'avez rien vu d'autre que vos livres et vos plumes, vous n'avez pas vécu la vie telle que moi je l'ai vécue là dehors. Je vais vous dire ce qu'il se passe lorsqu'une personne brûle. Certains pensent que les êtres vivants sont composés d'eau, c'est peut-être bien vrai, car brûler un corps prend du temps, même sous le feu d'un dragon, ou d'un démon. La personne, d'abord hurle à cause de la chaleur, comme lorsque vous vous approchez trop près du feu, ou lorsque que vous touchez une marmite qui arrive de cuisine. Puis la douleur franchit un nouveau palier : la destruction de la peau. La peau se consume, peu à peu, couche par couche, des petites plaques un peu partout sur le corps partent en fumée. Puis, c'est la chair qui commence à se noircir, comme un bon morceau de viande dans une poêle. La graisse fond et sort par là où elle le peut, le moindre trou suinte d'huile, et ça pue. Le visage de ressemble plus à rien sans la peau. Les cheveux sont la première chose à disparaître. Les yeux fondent lentement et se mélange à la bouillie qui se créée à l'intérieur. Les muscles noircis perdent tout leur jus, rétrécissent. Les organes ne ressemblent plus à rien non plus. A la poubelle les abats ! Y'a rien à prendre là ! Alors c'est le tour des os d'être incinérés. Un os ne brûle pas comme ça, même dans un très long feu. Lors d'incendies, on retrouve généralement les carcasses des victimes, les os, car tout le reste a servi  de repas aux flammes. Mais pour voir disparaître les os, il faut rester un bon moment. Vous ferez d'ailleurs le test ce soir pour le souper : essayer de faire brûler un os de porc ou de bœuf, vous viendrez me voir lorsque vous avez réussi.
Vous savez ce que je retiens de ces images ? C'est que nous ne sommes rien. De la chair, des os, assemblés de manière ingénieuse par je ne sais quelle entité, mais c'est tout. De la merde périssable, qui ne sert pas à grand chose et qui s'envole au moindre coup de vent. Alors vous me faites bien rire, avec vos grands airs, vos principes, votre politique de « on ne bouge pas un cil ». Vous ne servez à rien sur cette terre, vous comme tous les autres. Vous ne faites que prendre, prendre et détruire. Jamais vous ne rendez. Pensez-y : j'ai lutté à ma manière contre la surpopulation. Et contre la guerre aussi. Moins il y a de monde, moins il y a de chance qu'il y ait de conflits. Les corps doivent retourner à la terre, mais vous préférez les mettre dans des tombes, pour qu'ils ne servent encore à rien le reste de l'éternité. Moi je les brûle, je rends leur énergie à la nature, comme un animal qui meurt dans la forêt et qui se fait dévorer par les insectes. Vous ne vous en rendez pas compte, mais chacun, rien qu'en vivant, vous contribuez à détruire ce monde qu'est le nôtre.

-... Ne me faites pas croire que vous êtes motivé par des intentions écologiques, je ne vous croirai pas.
-... Non c'est vrai. En revanche, le passage sur le feu, c'est totalement véridique. »

Pendant ce temps, mon père s'était remis de son choc, mais il ne bougeait pas un cil. Il regardait stupéfait ce que son monstre de fils faisait à sa tendre épouse, la femme de sa vie, la personne avec qui il a tout partagé depuis des siècles, celle qu'il aimait. Il ne comprenait certainement pas pourquoi tout ça. Vous aussi d'ailleurs, vous vous demandez je suppose, « Pourquoi ? ». Je vais vous répondre, à vous ainsi qu'à tous les misérables qui vous liront : Et pourquoi pas ? Je l'ai fait, comme j'aurai pu ne pas le faire. Faut-il une raison valable pour justifier le moindre acte, la moindre action sur ces terres ? Dans ce cas, où fichtre est passée votre liberté ? J'avais envie de le faire, je l'ai fait, fin de la discussion.

 « Je pense que vous ne me dites pas tout et que tout n'est pas si simple. On parle là de tuer ses parents...
- Atatatata ! Si vous commencez à m'interrompre, on va jamais y arriver. »

Je me suis donc approché de lui, le regardant bien dans les yeux, pour qu'il me voit correctement, qu'il voit la personne que je suis, ce que je représente. Je l'ai pris au cou, levé suffisamment haut, et j'ai commencé à serrer le poing. Il gigotait, faisait des bruits bizarres, donnait des coups de pied dans le vide, essayant de m'atteindre. Lorsqu'il est question de survie, plus rien ne compte, la raison s'envole, le corps réagit de manière animale. Il ne voulait plus rien, ne pensait plus à rien, ne ressentait plus rien, il agissait simplement, une impulsion physique.
Puis j'ai serré plus fort. Juste un peu, pas beaucoup, mais plus fort. Encore un peu plus fort. Un peu plus. Encore. Encoooore. Crac. Ah ! Ça y est ! Les os cassent, la nuque lâche, le corps tout entier devient mou en une seconde. Je continue de serrer, j'augmente la pression graduellement. La peau commence à se déchirer, du sang ruisselle sur sa peau et sur mon bras. Nah, pas encore satisfaisant...
Je serre toujours plus, jusqu'au point critique, jusqu'au moment où... tout lâche, jusqu'au moment où le corps tombe littéralement par terre, jusqu'au moment où je tiens la tête de mon père dans ma main droite pendant que le reste de feu son corps gît sur le sol.
Je la tiens alors comme dans cette célèbre pièce de théâtre dont je ne me souviens plus, lorsque le personnage parle à un crâne comme pour se parler à lui-même... Non je sais plus. Un grand auteur de Daein ! Vous retrouverez son nom et vous l’inclurez quelque part par là.
Je lui tiens donc la tête, la regarde bien fixement, jusqu'à apercevoir dans ses yeux mon propre reflet. Puis je lui mords la joue et lui arrache un morceau de chair bien rouge, presque vivante, avant de l'avaler.


 « Non mais c'est pas possible ça ! Dites à vos gardes de dégager merde ! Y'en a un qui vient de vomir partout, après ça va sentir la mort par ici ! Même si je reste pas longtemps, je préférerai passer le séjour le plus agréable qu'il soit... »

Après ça, je fous le feu à la baraque. J'arrache deux planches en bois de la table-projectile que je taille rapidement en pique, je les plante devant la maison, et je les décore respectivement avec la tête de mes géniteurs. Histoire de. Juste histoire de.
Et je me casse du pays, pour ne plus y revenir. Sauf... Je pense que vous avez saisi.

J'avais décidé de prendre quelques semaines de vacances, de repos presque total, glaner la journée, dormir la nuit, manger et passer le temps en bonne compagnie entre les deux. Je ne faisais absolument rien de productif, et c'était absolument parfait. Vivre sur le dos des autres, du travail de la société, sans rien donner en retour.

Mais au bout d'un moment, je me lassais de tant de tranquillité, de tant de paix. Du coup, je me suis investi dans la vie criminelle à travers le continent. Tueur à gages, bandit des grands chemins, pirate... J'ai un peu tout fait. Je me baladais chaque jour avec une arme différente, pour faire croire que j'étais un mercenaire lambda, et je prenais soin de ne jamais me transformer devant témoin, du moins devant témoin vivant. Je ravageais des bateaux au lieu de les piller, je brûlais des maisons, je violais à droite, à gauche, créant probablement des futurs monstres à mon tour. Qu'il partagent donc ma folie ces petits garnements !

Alors rapidement, je me suis en quelque sorte créé un nom. Un nom différent selon les endroits, mais où que j'aille, j'étais connu. Enfin, on me reconnaissait, et on reconnaissait ce que j'avais fait de par le passé. Officiellement, à ce moment là, j'avais une trentaine d'année, originaire de Begnion, ancien forgeron reconverti après que l'impératrice ait fait fermé mon commerce car la garde croyait que j'y développais un marché noir. Bien entendu c'était faux, mais le monde y croyait, c'était le principal.

Puis est venue la guerre du roi Ashnard. La délivrance, la violence, le chaos, le feu. Je faisais ce que je voulais, sans craindre les forces de l'ordre car la quasi totalité des armées étaient occupées dans les conflits contre le roi-fou. Douce période que cette guerre, je ne sais pas si vous vous souvenez...
Suivie de près par la guerre de la déesse ! La belle alliance entre les petits humains et les gros sous-humains... C'était pas beau à voir ça ? Et la volonté de notre ancien roi de défendre une entité démoniaque ? Magnifique, du pur art. J'aurai tué pour me retrouver dans cette tour, malheureusement j'étais pas invité. Après tout ce que j'ai pu faire, bande d'ingrats...

Toujours est-il que ! j'étais partout, nulle part, vivant de crime, me cachant pendant quelques semaines ou mois, frappant pendant quelques autres. Le meurtre de mes parents avait attiré l'attention des autorités de Goldoa, j'en étais sûr. Ils ont certainement dû faire le lien rapidement, avec mon évasion plusieurs décennies auparavant. Mais croyaient-ils réellement que c'était moi ? Me pensaient-ils encore vivant ? Aucune idée. Et à ce moment-là je m'en foutais pas mal.

« Tout ça pour quoi ? Tu nous as habitué à plus intéressant ! ». J'entends vos interrogations,et je vois que vous commencez à apprécier, ce qui me fait grandement plaisir, c'est pourquoi je vais y remédier de ce pas ! Ce que je vais vous décrire maintenant est certainement l'expérience la plus importante, la plus intense qu'il m’ait été donné de vivre.

C'était il y a 2 ans exactement. Pas exactement « exactement », mais durant l'année deux ans auparavant. Un peu plus loin dans l'année. Du coup ça fait moins de deux ans, je sais, mais j'essaie de situer simplement et efficacement, alors arrêtez de vouloir me corriger sans cesse.
Je me trouvais quelque part dans Criméa, vers le sud, du côté de Gallia, dans une ville à la con dont je me souviens plus le nom mais de toute façon on s'en fout pas mal. La chose intéressante est qu'il y avait un détachement de l'armée, un bataillon complet, en ville. Il se trouvait que plusieurs corps de Laguz et de Beorcs ont été retrouvés sans vie durant la nuit en pleine rue. Les tensions entre les deux races devenaient de plus en plus palpables alors que la reine Elincia avait juré de faire de l'entente entre Beorcs et Laguz sa mission première lorsqu'elle est montée sur le trône, donc elle prenait toutes ces affaires au sérieux et n'hésitait pas à employer les gros moyens pour montrer qu'elle s'occupait de cela et pour rassurer le peuple qui se sentait chaque jour un peu plus menacé.

Il y avait de quoi calmer les plus hargneux : une cinquantaine de militaire entraînés, des cavaliers, quelques pégases, des mages, des archers, beaucoup de soldats... Magnifique. Vraiment.
Alors forcément, maintenant je pense que vous commencez à me connaître et savoir comment je fonctionne, une idée a vite germée dans mon esprit fou, et je me suis rapidement employé à sa mise en place. J'ai attendu le jour du marché, vers la mi-journée, histoire d'être au milieu de la foule. Les spectateurs... Les spectateurs font l'acteur, l'acteur fait le spectacle ; c'est comme ça que ça marche.

Je me suis mis alors à marcher tranquillement, enveloppé dans ma chère cape brune, au milieu des établis et des passants. Il y avait des gardes un peu partout, c'était parfait. J'ai bousculé quelqu'un au milieu de la foule. Aucune réaction. Dommage.
J'en ai bousculé un autre. Toujours rien. Bon, ça allait venir, il fallait juste tomber sur quelqu'un de chaud. Le troisième ? Ah ! Ça fait la tête ! Très bien!


 « Vous pouvez vous excuser quand même ! La politesse c'est pas pour les chiens!
- Pardon ? C'est à moi que tu parles?
-Oui c'est à vous que je parle ! Vous venez de me bousculer!
-Qu'est-ce que tu veux que ça me foute? Va voir ailleurs si j'y suis.
-Alors c'est comme ça maintenant ? On manque de respect aux gens dans la rue?
-Mais qu'est-ce qu'il me veut le bouseux ? Va ramasser tes carottes, et laisse-moi tranquille. »

Il leur en faut peu pour s'énerver, et pour ce gars-là, c'était apparemment suffisant vu qu'il m'a mis un bon coup de poing en pleine tête. La fête commence.

« Tu as choisi le mauvais jour pour emmerder la mauvaise personne. »

Je l'ai pris par le col de sa chemise souillée par la terre et la transpiration, avant de lui donner un coup de tête des familles. Quatre en fait... Quatre coup de boule. Ça l'a bien calmé, il s'est endormi. Forcément, un peu de sang, quelques coups, et ça se met à gueuler. Et vas-y que j'appelle la garde, que j'hurle à l'aide, bla bla bla... Mais bon, ce jour-là c'est ce que je voulais.
Le monde s'est rapidement écarté pour faire de la place autour de moi. Attention, faudrait surtout pas me toucher !
Un garde vient naturellement me voir pour me demander ce qui se passe, la routine en gros. Ni une, ni deux, je lui souffle quelques mots enflammés au visage avant de lui cracher dessus. C'est pas une image, je lui ai vraiment brûlé la face. Je peux vous dire qu'il a eut mal.

Le reste s'est enchaîné rapidement. D'autres gardes sont venus, ils m'ont menacé avec leurs couteaux et leurs fléchettes et m'ont ordonné de me rendre. J'ai rigolé. J'ai jeté mon manteau au loin tout en revêtant l'habit du gros lézard rouge. Surprise, peur, stupéfaction, réactions vives, hurlements, il y avait un peu de tout. Mais les soldats se sont vite ressaisis (c'est leur boulot en même temps) et ont commencé à attaquer. Je me suis mis à frapper ceux qui se rapprochaient de moi avec leurs belles armures histoire de leur enseigner un peu la vie. Boum. Paf ! Schlak. Ting ! Un beau vacarme. Ils ne suivaient pas le rythme de mes attaques, ils étaient à la masse.
Après quelques minutes, les archers s'y sont mis. C'était déjà plus dur à éviter, et DIEU que ça faisait mal ! On dirait pas mais ces conneries te transpercent la peau comme un rien ! Les écailles me protégeaient globalement, mais il arrivait qu'un flèche vienne se glisser entre deux plaques, ou dans un endroit nu et là ça filait direct dans la chair. J'en ai eu rapidement assez qu'ils jouent avec leurs aiguilles, alors j'ai décidé de cramer la zone. Des flammes bien rouges un peu partout, par terre, sur les établis, sur les maisons, sur les spectateurs un peu trop près, et surtout sur les archers.

Une corne se fit entendre. Tous les gardes se sont écartés de moi, d'un coup.  4 gars en robe sont apparus de derrière les soldats, tenant chacun un livre dans la main. Des putains de mages. Des putains de mages allaient m'attaquer. Ils avaient pas peur de détruire la ville pour en arriver là. Faut dire que je les comprend : voir un mec avec l'apparence d'un démon défoncer des militaires... ça fait tout de suite réagir.
Je les ai vu ouvrir leur bouquin et commencer à le lire. Ils commençaient à émettre tous une couleur différente, ce qui voulait probablement dire qu'ils avaient chacun leur domaine de prédilection. Quand on ne connaît pas l'ennemi, autant lui envoyer tout ce qu'on a en réserve, c'est logique.

C'est parti d'un coup, et je me suis tout pris en pleine tête. Du feu à te brûler les os (je pense que vous avez compris l'image), du vent à te découper la tronche, de la glace à te geler sur place, de la foudre à te... brûler ? Foudroyer ? Laissez tomber, vous avez saisi.
Tout ça en même temps, de plein fouet, lancé de toutes leurs putains de forces. Il y sont pas allé de main morte les salauds. Je me sentais harcelé de tous les côté, constamment, par des forces invisibles, j'étais balancé à droite et à gauche, j'avais du mal à bouger et à respirer, mon corps subissait des contraintes inimaginables pour le commun des mortels, des forces considérables sur chaque surface de ma peau. Je sentais mes écailles se fissurer peu à peu, mes cheveux se consumer, ma peau se durcir sous l'effort, mes ailes se transpercer par endroits. Je n'en pouvais plus, je n'en pouvais tout simplement plus. La raison m'a échappé, la motivation m'a échappé, je ne contrôlais plus rien, mon corps bougeait tout seul pour se sortir de là, mon instinct de survie avait pris les commandes.
Sous un effort incroyable, je me suis relevé, j'ai bondi et je me suis envolé. Endommagé comme j'étais, je ne ressemblais à rien et je n'étais pas capable de grand chose, mais il fallait que je me sorte de là, il fallait.
Je ne savais pas où je devais aller, tout ce qui comptait était d'aller le plus loin possible, et de me cacher.

A un moment, mes muscles ne répondaient plus, ma tête tournait, je suis tombé et j'ai atterri dans une forêt. Je me suis réveillé contorsionné sur une branche en hauteur, à l'abri des regards. Je n'ai su qu'un peu plus tard que j'avais dormi plusieurs jours en voyant les journaux relater ma petite apparition publique. A ce moment là, je m'étais rendu compte de ce que j'avais enduré, que j'avais réellement souffert, et je me sentais plus vivant que jamais, même si mon corps souffrait le martyr. J'avais tellement souffert que la mort serait préférable pour quiconque qui serait amené à subir cela. Mais pas pour moi. Souffrir, pour renaître, se relever plus fort, et continuer. Souffrir, sentir son corps sollicité de toutes parts par des contraintes incroyables, et malgré ça faire face.
A partir de ce moment-là je me suis senti comme faisant vraiment part de ce monde et du chaos constant qui régnait, je touchais enfin du doigt ce que je faisais subir aux autres, ce que les victimes ressentaient ; et c'est magnifique. On s'adapte. On avance, on tombe, on se relève, on se renforce, on tombe à nouveau... La souffrance fait partie du cycle de la vie, sans souffrance on se terre dans une monotonie complaisante, sans effort. C'est l'erreur que j'avais faite, je ne faisais que frapper, on ne me frappais pas. Depuis la découverte de mes capacités, je n'ai rencontré que des adversaires bien en deçà de mon niveau, je ne risquais rien. Mais ce jour-là, ce jour-là... J'ai pris une gifle de la vie appelée « réalité », j'ai dégusté, mais j'ai appris. Je me suis comme créé un but, une raison de vivre. Avant cela j'étais épars, j'allais, je venais, je faisais ce qui me chantais, je ne consacrais ma vie à rien de réellement intéressant. Le crime en soi n'existe que par le but qui le justifie. Je n'étais pas un criminel, j'étais un insatisfait de la vie qui cherchait des sensations nouvelles, qui se donnait une fausse raison pour continuer à vivre et ne pas réfléchir à sa propre condition. Ces années à piller, voler, détruire, violer, n'ont servies à rien. A pas grand chose on va dire, à part asseoir ma présence sur ce continent. Mais rien de réellement important. Rien de concret, rien de durable.

Maintenant je SAVAIS où j'allais, pourquoi, et comment.





A ce moment là, un silence lourd se faisait sentir. Des gouttes tombaient et faisaient résonner un cliquetis liquide et régulier entre les pierres des cellules royales. Personne ne bougeait, suspendu dans le temps,  regardant le prisonnier attendant qu'il dise quelque chose, l'intimant presque à poursuivre son récit. Alors qu'il faisait preuve d'excentricité jusque là, il ne disait mot, restait là, sans broncher, enchaîné au mur, mou, sans forces, la tête baissée, noir de crasse, les cheveux gras collant à son visage transpirant et humide. La marque noire qui avait commencée sur le haut de son crâne avait maintenant recouvert la totalité de son visage, ainsi que ses épaules, et le haut de son torse. La peau mourrait petit à petit aux endroits touchés, pelant et tombant comme s'il avait été touché par un violent coup de soleil, des veines ressortait de partout, les nombreuses blessures subites ont dessiné sur son corps un vaste réseau de cicatrices.
Il n'avait pas vécu sa vie, il avait subi celles des autres depuis le jour où il est né jusqu'au moment où le peuple obtiendra vengeance.



« … Et donc ? »

Le prisonnier releva la tête, arborant un large sourire, fixant le scribe dans les yeux:

 « Laissez-moi raconter la suite et ne faites pas preuve d'impatience, je ne faisais que reprendre mon souffle. »

Comment avez-vous connu le forum ? : Second personnage d''un certain assassin autiste.

Expérience du Rôle-Play: Elle est ce qu'elle est, vous connaissez mon niveau, il n'a pas beaucoup évolué.
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Allen
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MessageSujet: Re: Arthen le méchant dragon   Arthen le méchant dragon I_icon_minitimeJeu 27 Mar - 11:56

Bon, déjà: tu devrais rencontrer Gally, ce serait rigolo.

Ton histoire est très bonne: qualité, structure et vocabulaire. Je n'ai pas été choqué par les temps ou l’orthographe.
Juste par les discours de 15 lignes qui font un peu pompeux.

Sinon, la mise en page et les sauts de lignes sont complétements bâclés.

On a tout dans l'histoire: caractère et physique, développement et une plutôt bonne connaissance du monde des Dragons. Il est sympathique de voir l'évolution du personnage et de voir quelqu'un enfin ne pas jouer un beau gosse.

Note: 19/20
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