Deux curieux chez les oiseaux [Pv : Nao]

Allongé sous un arbre, haletant, Kerorian récupérait lentement ses forces. Aucun combat n'avait été mené depuis qu'il avait pris ce bateau pour venir à Phoenicis, l'île des Laguz Faucons, lieu qu'il rêvait de visiter depuis un bon moment car si les us et coutumes, ainsi qu'architectures et autres trucs divers et variés des Beorcs le laissaient de glace, les hommes-bêtes en revanche faisaient brûler sa curiosité tel une flamme venue tout droit de l'Enfer : Comment fabriquaient-ils leur bâtiments ? Les faisaient-ils en fonction de leur forme animale ou humaine ? Quel angle utilisaient-ils ? Quelles techniques de construction ? Et est-ce qu'ils décoraient les murs ou le plafond ? Ou même tout court ! Il y avait-il des statues, des fresques ou quoique ce soit ou bien restaient-ils simples et laissaient les matériaux tels quels ?

Voila par exemple quelles questions le guerrier aux yeux écarlates se posait souvent...Il aurait adoré aller à Gallia pour étudier les bâtiments des Félins mais on lui avait dit que les Beorcs n'étaient pas tolérés sur leurs terres, sauf sur autorisation royale. Du coup il valait mieux y remettre à plus tard vu qu'il n'avait aucune idée de comment faire pour être simplement reçu par l'un des dirigeants d'un des royaumes de Tellius, alors obtenir une autorisation de voyager sur un territoire "hostile"...

Puis en cherchant dans quelques bouquins il avait fini par tomber sur des écrits parlant de Goldoa, la terre des Dragons ! Alors là ce fut l'hécatombe...Si l'intérêt du Rôdeur était un puissant brasier lorsqu'il s'agissait des Laguz, alors il fut l'Enfer lui-même lorsqu'il trouva ces textes : Quelle est leur espérance de vie ? Comment fonctionne leur souffle ? Ne mangent-ils que de la viande ou sont-ils omnivores ? Comment sont leur bâtiments ? Quelle est leur force maximale !? Quelles sont leurs spécialités ? Leur caractère général, leurs lois, leurs légendes et leurs habitudes ?

En revanche son ardente curiosité laissa place à la déprime lorsqu'on il apprit tristement que personne n'était toléré sur le territoire de ces Laguz légendaires, à moins d'en être un soi-même ou encore une fois d'avoir une autorisation signée de la main d'un roi...Faudra qu'il se débrouille pour obtenir une audience un jour, car il ne peut pas passer à coté d'un truc pareil...Enfin, il verra ça quand il aura fini de se noyer dans un verre...d'eau...Bah oui, on est un guerrier sérieux ou on l'est pas !

Kerorian "erra" ensuite entre différents livres traitant des Laguz et finit par tomber sur un document qui parlait des peuples oiseaux...Il en savait un peu sur eux grâce à une de ses rencontres, en errant un peu dans la forêt de Serenes il avait croisé un Corbeau si sa mémoire est bonne, tiens à propos ? Comment ils font leur pièces eux ? Est-ce qu'ils les font comme les Beorcs mais prévoient juste des sorties pour prendre leur envol ou bien sont-elles conçues de façons à pouvoir voler à l'intérieur ? C'est vrai que Jack lui avait cédé quelques informations, mais ce n'était décidément pas assez...Il fallait qu'il aille voir !

Rassemblant aussi vite que possible les documents traitant du peuple oiseau, il apprit que c'était en fait deux îles, l'une pour les Faucons : Phoenicis, et l'autre pour les Corbeaux : Kilvas. Après avoir recueilli d'autres éléments intéressants, il alla se renseigner sur le voyage et on lui dit que c'était, évidemment, par bateau qu'on les rejoignait et que là, miracle, l'autorisation royale n'est absolument pas nécessaire !

Dès lors le Rôdeur partit à toute vitesse pour obtenir une place sur le prochain passage et la traversée se passa à merveille : Pas d'attaques, pas d'incidents, pas de problèmes entre les voyageurs et/ou les matelots, pas de mauvais temps ni rien. Le voyage idéal ! ...Sauf pour le guerrier écarlate qui, prenant la mer pour la première fois, découvrit qu'il supportait aussi bien l'océan qu'une abeille n'aimait se baigner dans un volcan. Aussi si le paysage était magnifique, il n'en sut rien car il passa toute la traversée à cracher ses tripes par dessus-bord sous les éclats de rire de son épée maléfique.

C'est pourquoi il était maintenant sous un arbre, car dès que le navire accosta, la première chose à descendre du vaisseau fut une grande ombre aux cheveux flamboyants. Mais maintenant il était prêt ! Ça faisait quatre heures qu'il crevait sous ce pommier, avec une bosse sur le crâne en prime à cause d'une magnifique démonstration de la gravité, et il avait suffisamment récupéré.

Mais avant de se jeter à l'assaut des lieux et de prendre note de tout, Kerorian jugea plus intéressant de d'abord explorer un peu l'île : Savoir sa taille, sa forme, ses reliefs, comment sont ses côtes, son paysage et autres...Il recommença donc à vagabonder comme à son habitude, ayant réussi à faire taire son épée en la menaçant de la foutre à l'eau si elle l'ouvrait. Et il y avait pas à dire, se ruiner pour se payer la traversée et agoniser durant la route, ça avait valu le coup car c'était vraiment joli...Un tout autre horizon s'ouvrait à lui, un nouvel air et la mer...Lui qui était originaire des montagnes ne l'avait encore jamais vu, c'était vraiment très impressionnant, on se sent étrange quand on la regarde, et encore plus lorsqu'on se rend compte de sa taille et de tout ce qu'il y a dedans...

Tiens, d'ailleurs, qu'est ce qu'il y a dedans ? Des poissons, okay, mais de quel genre ? Combien il y en a t-il ? Quelle taille peuvent-ils avoir ? Quelle est la profondeur de l'océan ? Ah et est-ce qu'il y a des Laguz aquatiques ? ...Okay, on évite de s'imagine un Gallian avec des nageoires, ça fait un truc bizarre ! ...Bon, on évite tout court d'essayer d'imaginer un Laguz de la mer car un poisson avec un bec qui bat des nageoires en étant couvert d'écaille-plumes c'est...étrange.

Kerorian aurait continué ainsi sa route et ses...réflexions, si il n'avait pas aperçut quelque chose d'étrange sur une sorte de plage assez plate. À première vue c'est humanoïde, de taille normale et...vivant ! Mais qu'est ce qu'il fout là celui-là, ou celle-là, avec la distance c'est dur à dire, qu'est ce qu'il lui ait arrivé ? Le guerrier alla rapidement rejoindre le "corps" et confirma donc : C'est bien vivant, apparemment une femme, voir même une Laguz d'après ses oreilles, sans doute de Gallia vu que les Oiseaux ont des ailes dans le dos et que ce n'était pas son cas.

Le Rôdeur passa un bras derrière les épaules de l'inconnue et l'autre sous ses genoux pour la soulever en douceur et l'emporter dans un lieu plus adapté à une étude approfondie et surtout, à des soins. Elle était blessée, et c'était pas beau à voir...Rien de mortel en théorie mais rien d'agréable non plus. Il alla la déposer sur une parcelle de terre nue sous l'ombre d'un petit arbre, c'était toujours ça...Puis tenta d'entamer une conversation en lui tendant un peu d'eau, ne sachant pas trop si elle était consciente ou non :

"Vous m'entendez ? Comment vous appelez vous, que faîtes-vous ici ?"

Elle se sent partir, dériver dans un monde de ténèbres, tellement attirant. Elle n’a en faite qu’à tendre la main pour tout quitter, partir ailleurs, sombrer dans l’inconnu qui l’attends doux et chaud. Échappatoire salvateur au monde de douleur qui l’étreint de tous cotés. Dormir, et surtout ne pas se réveiller pour endurer encore d’innombrables souffrances prêtes à fondre sur elle. Elle cherche sa respiration, tente de remonter, mais chaque soupire lui déchire les côtes et annihile sa volonté. Vivre est si douloureux, lâcher prise si tentant. Se laisser aller vers cette obscurité chaude et reposante ; voila son souhait. Plonger dans un long repos, et dans les bras du coma ; elle sombre. Pourtant quelque chose ne veut pas la laisser en paix. Peut à peut, la lionne sent la porte se refermer ; ce courant qui la malmène la ramène vers l’existence qu’elle veut quitter. Un souffle glacial qui l’étreint de toute part réveillant la terminaison de chacun de ses nerfs pour la chauffer à blanc. Une explosion de pics de douleur se répercute dans chacun de ses membres, son tronc ainsi jusqu’à ce fracasser sous sa voute crânienne pour finir en divers échos restant pour lui vriller le cerveau.

Ouvrir grand les yeux,
Se retrouver volant, le sol à milles lieux,
Sur le dos d’un grand dragon, crocs acérés blanc écailleux,
Cracheur de feu, passe les eaux bleues,
Une île, un adieu.

Une légère impression.
Mouillé.
Nao Lyn Sha inspira goulument une bonne rasade d’air ce qui la fit trembler de tout ses os. Des courbatures étreignaient son corps d’une union passionnée, ne voulant le lâcher malgré les vives protestations de sa propriétaire. Tentant de retrouver son souffle au rythme du déchirement qui lui tenaillait les côtes, la lionne tourna la tête pour reprendre sa respiration juste au moment où une gerbe d’eau recouvrit son visage et tout le coté gauche de son corps. Le liquide salé coula dans ses poumons, provoquant une grande brulure sur son passage et la Laguz dût tousser et cracher pour l’en expulser, jusqu'à ce qu’une nouvelle gerbe vienne et la recouvre à nouveau, le tout accompagné d’un grondement assourdissant qu’elle n’avait pas perçu jusqu’alors. Où était-elle ? Que faisait-elle ? Comment était-elle arrivée là ? Qu’était-ce cette force mouvante qui la recouvrait et la découvrait alternativement avec un grondement de tonnerre, la laissant trempée et grelottante à chaque passages ? Elle ne se rappelait plus, elle ne savait peut-être pas. Qu’avait-il bien pu se passer pour en arriver là ? Pour que chacun de ses mouvements soit une véritable torture, et qu’un voile recouvre ses sens et donc le monde le gardant hors de porté ? Des formes ailées s’agitaient dans son esprit, voltigeant à travers les cieux, suivant des courbes compliquées et exécutant des figures abstraites. Mosaïque magnifique d’êtres n’ayant rien oniriques à travers laquelle une flèche blanche fondait évitant les jets de flamme et les griffes acérées, pour finalement parvenir à un ciel dégagé, survolant la plus grande étendu liquide que la lionne agonisante sur son dos n’avait jamais put observer. Les heures s’écoulaient infinies, coincées dans ce camaïeux de bleu, deux Laguzs fuyaient les fléaux de la mort, restant pourtant bien accrochés à la plus jeune d’entre elles. Puis un sol mou sous son corps et Nao reprenait connaissance lorsqu’une gigantesque bourrasque l’ébranla de toutes parts. Elle se souvenait vaguement d’une forme blanche chantant au dessus d’elle, grave, mais pourtant aussi riante que les étoiles, triste mais pétillante de vie semblant pouvoir se plier au grès du vent mais pourtant aussi solide qu’un diamant finement ciselé. Mais qui que se soit, ou quoi que se soit, la chose l’avait abandonnée, laissée seule avec cet engourdissement continu qui l’empêchait de penser.

La jeune lionne se hissa petit à petit hors de cette eau qui ne la laissait pas en paix, rampant sur un sol de sable dur et humide, elle enfonçait ses doigts pour remonter la plage. C’était si dur, tout son corps agité de frissons menaçait de la lâcher devant l’effort qu’elle lui imposait. Alors qu’elle atteignait un endroit sec où le haut de son corps s’enfonça allégrement sa volonté lâcha. Nao s’effondra sur le coté, haletant en serrant une main sur ses plaies qui s’étaient rouvertes. De nouveau, son sang venait tinter le sol, rependant avec lui la vie de la lionne sur le sable. Tant de choses à faire, mais si peut de temps pour les accomplir. En y réfléchissant bien, la lionne avait accomplit une bonne partie de son objectif : Découvrir des terres et des peuples inconnus, vivre sa vie jusqu’au bout, rencontrer des gens qui l’apprécierait pour ce qu’elle était et ne la détesterait pas en pensant à ce qu’elle aurait dût être. Mais tout à une fin. Dont certaine plus proches et rapides que d’autres. Et là elle se sentait à nouveau partir.

Dommage.
Il lui restait tant de choses à voir.
Vivre librement ; ce rêve que nous cherchons tous à approcher, elle, y avait gouté pleinement. Loin de toutes contraintes elle s’était pourtant faite rattrapée par cette dernière obligation à laquelle personne ne peut échapper.
Elle poussa un dernier soupire tout en regardant le ciel.

~~

"Vous m'entendez ? Comment vous appelez vous, que faîtes-vous ici ?"

Une voix ? Une voix d’homme de plus. Un homme ? Il ne fallait pas qu’il l’approche, il ne fallait pas qu’il la touche ! Elle était lionne et resterait lionne !! Personne ne la changerait ! Ceci dit… elle devait admettre qu’elle ne pouvait plus esquisser un geste. L’homme pouvait faire ce qu’il voulait d’elle. D’ailleurs depuis combien de temps était-elle inconsciente ? S’il l’avait voulu, il aurait agit bien avant. Peut-être qu’elle ne courrait plus aucun risque de rester en sa présence ? Peut-être l’avait-il tout compte fait sauvé de la faille à travers laquelle elle était tombée ? Elle ne savait toujours pas. Mais un liquide rafraichissant lui coula dans la gorge et elle entreprit de l’avaler à grand trait ce qui lui redonna un peu de vigueur et éclaircit ses pensées brouillées. La lionne souleva doucement les paupières et saisi l’image d’un garçon de feu penché au dessus d’elle. Du feu, du feu, feu qui l’entourait de toute part, marquant sa chaire tendit que la dragonne volait. Feu sortant de la gueule de Torak qui fondait sur elles ses yeux oranges colorés par sa haine brulante. Du feu tout autour… un mur de feu.
Et là, un homme de feu…

La lionne feula en voulant reculer le plus possible, mais un tronc bloqua son dos et la gourde qu’elle venait de faire voltiger par sa brutalité lui retomba sur la tête, lui rafraichissant l’esprit d’une belle rasade. La douleur de ses côtes revint et Nao partit dans une quinte de toux en crachant ses tripes dans l’herbe verte. Un peu de sang coula le long de son menton quand elle se tourna, sale, nauséeuse, blessée d’un peu partout et le regard flou vers le jeune homme… un Béorc… le combientième déjà ?

« Je… je ne veux pas mourir… aidez moi »

Un dernier marmonnement, puis le sol tourna et la lionne partit en avant, les yeux opaques, respirant faiblement, mais une chose était sure, elle voulait continuer sa route.

L'inconnue sembla commencer à boire l'eau qu'il lui tendait. C'était bon signe ! Premièrement ça signifiait qu'elle était vivante, même si de ce coté le Rôdeur n'était pas trop inquiet car si la Laguz était salement blessée, au moins ça n'avait pas l'air mortel dans l'immédiat... Mais dans un deuxième temps : Ça voulait dire qu'elle était consciente, et ça c'est presque que du positif : Si elle est réveillée, elle pourra lui dire ce qu'il s'est passé et l'informer de son état, au cas où il y ait des blessures qu'il ne voie pas. De plus, ça lui permettra de se restaurer un peu, rien de tel que manger un morceau et boire un coup pour aller déjà mieux !

La Gallianne sembla émerger un peu, ça aussi c'était un bon point car si on est épuisé au point de ne plus pouvoir ouvrir les yeux, c'est qu'on est vraiment en mauvais état, en revanche elle réagit étrangement après l'avoir vu : La Laguz se mit à lui feuler dessus en tentant de reculer, comme si elle voulait se protéger de lui mais se retrouva bloquée contre le tronc sur lequel Kerorian l'avait posé avant de reprendre la gourde qu'il lui avait donné sur la tête à cause de sa brutale réaction.

Il lui avait fait peur ? Pourtant il ne lui avait rien fait de mal, il n'était pas non plus menaçant, à peine l'a t-elle aperçu qu'elle eut ce brusque mouvement... Peut-être était-ce à cause de leurs races ? Le Rôdeur se souvenait d'avoir appris qu'autrefois les Beorc et les Laguz étaient en ardent conflit, une telle haine ne peut pas disparaître si facilement, oh bien sûr, certains des hommes-bêtes s'entendaient parfaitement bien avec les humains mais bon nombre d'entre eux alimentent encore les feux d'une rage farouche à leur encontre... Était-ce la raison de son sursaut ?

Ou bien ce réflexe avait-il eu lieu à cause de sa couleur ? Il est vrai que dans ses maigres connaissances en matière de Laguz, trop maigres à son goût, ce peuple est tellement formidable est passionnant...pourquoi les Beorcs ont-ils si peu de données sur eux ? Bref, chez les changeformes, Kerorian n'avait pas souvenir d'avoir entendu parler de quelqu'un avait des cheveux ou des yeux comme les siens. Était-il possible que ses flamboyantes couleurs rappelant le sang aient effrayé l'inconnue ? C'est sûr que si l'écarlate est mal-aimé chez les polymorphes...ça doit faire un choc au réveil.

La jeune femme se mit soudainement à tousser, c'est vrai que son état n'est pas enviable et cette réaction n'a pas dû arranger quoique ce soit. Kerorian grimaça légèrement en la voyant cracher un peu de sang : Quoiqu'il arrive, si le sang sort du corps, c'est pas bon, en particulier par la bouche car cela signifie qu'on possède normalement des blessures internes, et ça il ne peut pas les soigner... Le guerrier pesta contre son manque de connaissances médicales et regretta de n'avoir aucun talent curatif ou savoir-faire avec les bâtons. Si il en avait eu un, et qu'il avait su s'en servir, les blessures de la Laguz n'auraient été qu'un mauvais souvenir en peu de temps... Malheureusement, il est un combattant, la seule chose qu'il peut faire c'est donner les premiers soins, apposer un bandage pour une plaie ou une fracture ou utiliser quelques plantes...le problème c'est qu'ici il n'y en avait pas d'utiles.

L'inconnue sembla tenter de le regarder, cette simple action démontrait un état déplorable, elle semblait faible et malade... D'ailleurs elle l'était, ça se voyait à ses yeux qui paraissaient s'éteindre, à son corps meurtri d'un peu partout et à sa posture pour le moins chancelante malgré qu'elle soit assise. La Laguz parvint à ouvrir les lèvres pour marmonner quelque chose, pour un peu il aurait pu ne pas l'entendre, heureusement que les environs étaient parfaitement calmes si ce n'est l'océan et ses vagues qui apporter un léger bruit régulier...

« Je… je ne veux pas mourir… aidez moi »

Qui voudrait mourir ? Même les suicidaires ne peuvent renoncer joyeusement à la vie, pour beaucoup c'est la chose la plus précieuse qu'il soit, et pour quelques uns c'est celle des autres qui compte... Elle n'avait pas besoin de lui demander de l'aide, tant qu'elle sera encore vivante et qu'il sera conscient, il fera tout pour la sauver. Il n'est pas prêtre, ni guérisseur, ni médecin ou quoique ce soit, mais abandonner quelqu'un à un triste sort juste parce que c'est difficile ou qu'on ne connait pas cette personne est absolument impensable pour le Rôdeur.

Ses yeux semblèrent devenir opaques alors qu'elle s'effondrait en avant. Kerorian eut tout juste le temps de plaquer ses mains sous ses épaules pour lui éviter de s'affaler par terre, mieux vaut éviter au maximum des complications comme les bactéries, les petits cailloux ou bouts de terre dans les blessures et autres saletés. Par contre le problème c'est que si elle reste assise elle risque de tomber d'un coté ou d'un autre et d'aggraver son état...mais on ne peut pas non plus la mettre par terre à cause de ses plaies qui auraient de trop fortes chances d'empirer. Il faut réfléchir, trouver une solution, et vite. Soigner quelqu'un est une course contre le sablier, si il attend trop elle risque gros, déjà qu'il ne sait pas ce qu'il lui est arrivé avant ni combien de temps elle a traîné et où...

Un léger coup de vent souffla, la grande cape que portait le guerrier remua légèrement sous la douce respiration du monde. Cette fameuse cape qui ne le quittait plus depuis le début de son voyage, elle lui servait à s'abriter de la pluie, à dormir par terre en étant moins gêné par le sol qu'il ne le devrait, même si maintenant il lui arrive de se servir de son épée démoniaque pour ça dans les pires cas, où même à dissimuler son visage et surtout ses cheveux, trop reconnaissables à cause de leur éclat sanglant...

Cette même cape que le Rôdeur retira au plus vite d'une main, se servant de l'autre pour retenir l'inconnue et lui éviter une chute dangereuse, cette simple étoffe de tissu noir qu'il jeta comme il pouvait par terre pour y allonger doucement peu après sa "patiente". La face interne du vêtement n'était en contact qu'avec lui et permettait ainsi de diminuer significativement les risques d'infections et éliminait les possibilités que des petits trucs s'incrustent dans les plaies. Maintenant il allait pouvoir commencer les premiers soins, malheureusement très limité vu que sa trousse à "pharmacie" ne comportait que deux aiguilles, du fil et un rouleau de bandage déjà bien entamé, bien cachés sous ses livres. D'habitude il se désinfecte à coup de plantes ou de métal chauffé à blanc dans les cas extrêmes, mais là il n'a ni l'un ni l'autre...

Les bandages allaient d'ailleurs en prendre un sacré coup, il ne pouvait pas se permettre de refermer lui-même les blessures, ses connaissances et son expérience en ce domaine étaient bien trop limitées, donc il ne restait qu'à panser tout ça... Tant pis pour la pudeur, bien que ce ne soit pas encore trop grave de ce coté, le Rôdeur commença à relever les vêtements de la Laguz, sans pour autant porter atteinte à sa dignité, et entreprit de bander les plaies qu'il pouvait voir. C'était peut-être peu, mais c'était le minimum qu'il puisse faire...

Quoique...Kerorian pouvait peut-être faire un petit peu plus, du fait de son enfance retirée du monde et de ses voyages en solitaire il ne connaissait pas grand chose aux comportements sociaux, mais il avait souvenir d'avoir entendu dire quelque part que rassurer une personne en état de choc pouvait leur apporter une grande aide morale, comme ça il ne se sentent pas abandonnés... Bon, okay, si il y a quelqu'un qui ne sait pas comment faire, c'est bien lui. Mais dire quelques mots gentils suffit peut-être ? Bah, essayons, l'inconnue est potentiellement inconsciente, mais elle l'entend encore peut-être, et si ça peut l'aider...

Après quelques hésitations pour trouver une bonne phrase, maudissant son caractère froid et taciturne, le Rôdeur finit par parvenir à aligner quelques mots qu'il pensait "rassurants" et continua ses soins sans "attaquer" la pudeur de la Laguz :

"Je vais vous soigner, vous ne mourrez pas..."

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