❝ Yue ❞  
Messages : 244
Age : 30
Autre Indication : Grosse dalleuse
Feuille de personnage
Niveau:
    (3/20)
Points d\'Expérience:
(30/100)
 | Sujet: Mon meilleur ami...  Ven 29 Avr - 23:45 | |
| Mon meilleur ami
Le vent nocturne soufflait dans ses cheveux emportant avec elle les fraiches gouttes de pluie qui tombaient maintenant depuis un petit moment. Yue se dressait à la cime d’un arbre comme à son habitude et regardait les environs à la recherche de leur prochain repas, de leur prochaine proie.
Depuis qu’elle avait quitté Nevassa, elle avait préféré rester dans les forêts et les bois alentours pour éviter à Jaf la présence des Beorcs car même si ce dernier n’avait plus aussi peur des humains qu’avant, il semblait toujours mal à l’aise en leur présence. Ou du moins c’était ce qu’elle pensait au vu du comportement récent de son ami. Depuis quelques temps maintenant, elle avait remarqué qu’il se montrait distant même avec elle. Ils ne possédaient plus cette complicité qui faisait habituellement leur relation. Ils ne se battaient plus, le loup ne la contredisait plus… en un sens c’était une relation plutôt normal entre une bête et un humain mais pour Yue, Jaf avait toujours était plus qu’une bête, avec une compréhension hors du commun de son langage… c’était son compagnon. Désormais, quand elle lui parlait elle avait l’impression de se heurter à un mur comme si elle s’adressait à un simple chien ou à un inconnu. Peut être en avait-il marre de sa vie à ses cotés. Après tout Jaf restait un loup sauvage. Il avait certainement envie de retrouver sa liberté.
Elle s’était montrée bien égoïste en le gardant à ses cotés si longtemps alors qu’elle s’était promise de le rendre à la vie sauvage quand il serait de nouveau dans la capacité de survivre sans elle mais la donne avait quelque peu changé car désormais, Yue n’était plus sure de pouvoir se passer de son ami à poils roux.
Le vent redoubla de puissance la déséquilibrant mais ce qui la déstabilisa le plus fut une odeur quelque peu inquiétante que lui apportait le vent glacial. Une meute de loup s’approchait de leur position… Ce n’était certainement pas le moment le mieux choisi pour qu’ils apparaissent et Yue se sentait étrangement nerveuse en leur présence…
Et Si Jaf décidait de les suivre ?
Et s’ils le rejetaient à cause de son odeur Beorc ? Et si Yue avait complètement gâché sa vie… ?
Elle ne savait ce qui était le pire mais instinctivement, elle descendit de son arbre et d’un signe de la main, demanda à Jaf de la rejoindre. Ce qu’il fit en regardant tout de même dans la direction où se trouvait la meute. Son odorat était au moins aussi développé que celui de la chasseuse. Elle ne le savait que trop bien, mais elle devait l’emmener loin des loups, loin de l’appel de la nature.
La chasse ne fut pas fructueuse ce jour là.
***
Cela faisait maintenant un certain temps que la jeune archère se posait des questions sur sa relation avec le loup. Elle l’avait choisi lui plutôt que la personne qu’elle aimait, il l’avait accompagné dans les pires galères que la terre ai pu voir. Il avait surmonté sa peur de la magie et des humains pour rester avec elle, elle avait sacrifié sa vie Beorc pour rester avec lui. Elle ne s’était jamais plainte de cette situation car même si elle n’avait que peu d’amis humains, Jaf représentait tout ce dont elle avait besoin. Elle n’avait d’ailleurs jamais considérée sa situation comme un sacrifice mais elle ne pouvait pas en dire autant pour Jaf car même si elle le connaissait par cœur, elle n’était pas encore maitresse de ses pensées.
Jaf était son soutien, celui qui lui évitait de faire des erreurs, celui qui la protégeait durant son sommeil, celui qui prenait soin de ses blessures, celui qui défendait ses arrières… Quand elle avait rencontré Allen, celui-ci lui avait dit
*Tu n’as plus besoin de regarder derrière toi*
Cependant, c’était grâce à Jaf qu’elle avait compris cette phrase, car elle savait qu’elle pouvait compter sur lui, qu’il serait toujours là pour elle, que s’était son ami.
Alors qu’elle somnolait comme à son habitude après un repas même succinct, elle entendit Jaf s’éloigner. Elle ne devait habituellement pas s’inquiéter d’un tel phénomène, le loup était libre de ses mouvement, cependant, aujourd’hui était différent. Il était parti à pas feutrés comme s’il ne voulait pas que l’albinos sache qu’il s’esquivait. Il avait masqué son départ et avait même vérifié qu’elle dorme bien… En temps normal, elle n’aurait pas bougé mais ces petites cachoteries l’intriguaient. De plus, elle devait bien avouer qu’elle n’était pas rassurée de la présence de cette meute dans les parages, étrangement elle ne lui inspirait pas confiance.
Elle le suivit en sautant d’arbre en arbre avec l’agilité d’un chat ne laissant aucun son s’échapper à chacun de ses pas, ne touchant aucune feuille. Seul le vent contre ses vêtements laissait échapper des bruissements à peine audible et le loup ne les entendit pas. En tant que chasseuse, elle avait su camoufler son odeur pour ne pas se faire repérer. Le suivant à une certaine distance, elle avait l’impression de chasser un gros gibier particulièrement dangereux et intelligent. C’était une chasse, une poursuite plutôt excitante en un sens et elle se serait rapidement prise au jeu si la pression ambiante ne lui rappelait pas qu’elle filait son ami. Soudainement alors qu’elle avait relâché son attention, Il se retourna. Elle s’immobilisa aussitôt dans les branchages évitant même de respirer. Il resta quelques instant fixé sur sa position mais sa vue en noir et blanc ne pouvait la distinguer à travers la nuit sa cape était remontée haut sur son visage et seuls ses yeux flamboyant étaient visible sur son visage. Il repartit.
Après une quinzaine de minutes de course à travers les bois, elle arriva enfin près d’une clairière bien découverte où la nuit et les rayons lunaires éclairaient de nombreuses petites silhouettes sombres et effrayantes. Yue resta à l’orée du bois pour ne pas se découvrir, et observa la scène de loin. La meute de loups qu’elle avait repérée plus tôt dans la journée attendait son Jaf…
Il est dur de ne pas bouger quand on sent que l’on va perdre quelque chose de précieux. Pourtant, Yue était comme paralysée par un combat qui se menait en son sein. Son esprit lui disait de le laisser vivre sa vie, de le laisser partir s’il le souhaitait, qu’il serait plus heureux ainsi, qu’elle ne pouvait le priver de sa liberté mais son cœur… lui, il lui hurlait d’aller le récupérer…
Etait ce vraiment de l’amour que de vouloir enfermer, emprisonner quelqu’un pour l’aimer et être le seul à pouvoir le faire ou le véritable amour s’apercevait lorsqu’on acceptait de laisser partir l’être aimé quand il le souhaitait.
Yue était perdue dans ces pensées moroses quand soudain, l’un des loups gris se jeta sur Jaf.
Yue écarquilla les yeux devant la violence dont fit preuve le loup gris, il avait saisit Jaf par le cou et le maitrisait au sol comme un vulgaire chiot alors que les autres membres de la meute regardait sans bouger. Le rejetait-il à cause de son odeur Beorc ? C’était une possibilité qui effrayait la chasseuse… elle ne voulait pas être la cause du rejet de son ami par les siens.
Elle sauta de son arbre et se plongea dans la clairière pour rejoindre son ami. Si les loups n’étaient pas capables d’accepter parmi eux un être comme Jaf alors elle ne leur laisserait jamais. Prenant appuie sur ses jambes elle plongea arc à la main à travers la meute. Tel un éclair blanc, elle était arrivée parmi eux et se tenait droite au milieu de leur cercle. Sa capuche tomba lentement sur ses épaules découvrant un visage encore plus pâle que d’habitude à la lumière lunaire et ses yeux d’un rouge flamboyant et déformés par la colère en devinrent encore plus effrayants. Faisant un tour sur elle-même et laissant l’inertie l’emportait et la célérité la mouvoir, elle frappa celui qui avait attaqué son ami d’un revers de son arc dans les côtes le projetant en arrière avec violence.
- Disparaissez saleté !
Yue avait les yeux flamboyants de fureur contre ses êtres n’ayant su accepter son bien aimé Jaf mais surtout contre elle-même…
- Traitre à ton sang, tu as ramené l’humaine !
Yue resta quelques secondes interpellée par ce qu’elle venait d’entendre quand soudain tous les loups le poil dressés se mirent à l’entourer elle et Jaf. Leur façon de se déplacer cette voix qui ne pouvait être sortie de son imagination, leur organisation… Des Laguzs.
- Tu es comme ton père, un traitre à ton sang et à ta nature, tu suivras donc le même chemin que lui !
Jaf derrière elle se releva le cou ensanglanté. Ses crocs étaient découverts sur des dents plus tranchantes que jamais et il leva les yeux sur Yue avec une expression pleine de haine… Pourquoi ?
Le loup roux plongea à coté d’elle pour frapper l’un des loups gris qui s’apprêter à se jeter sur elle. L’albinos sentit un vent glacial au passage de son ami à coté d’elle mais elle ne s’y attarda pas voyant déjà deux autres carnassiers lui sauter à la gorge. Esquivant d’un puissant saut sur le coté, elle se retourna flèche à la main et frappa l’animal le plus proche qui poussa un hurlement entre le cri de douleur humaine et le grognement du loup.
Elle n’aimait pas ça, elle n’aimait pas l’idée de devoir se battre contre des Laguzs Loup.
Le deuxième se retourna plus rapidement qu’elle ne l’avait prévu et lui envoya un violent coup de patte dans le ventre l’envoyant s’écraser face contre terre entre les pattes d’un troisième qui saisit son bras entre ses crocs et la souleva à la force de sa mâchoire lui arrachant la chair.
Les combattre lui rappelait des souvenirs douloureux et difformes. Elle ne savait ce que c’était, elle n’arrivait pas à mettre de visage sur les silhouettes qu’elle distinguait mais elle se souvenait de ses hurlement à moitié humain, à moitié loup… Elle n’aimait pas ça…
Yue saisit une autre flèche de son carquois et l’enfonça profondément à travers la gorge de l’animal laissant une giclée de ce liquide écarlate éclabousser son visage d’une blancheur cadavérique. Il s’écrasa parterre gueule ouverte et reprit forme humaine dans un dernier soupir alors que l’herbe sous son corps se colorait d’une jolie couleur rougeoyante faisant échos à la flamboyance des yeux de l’albinos.
Yue regarda sa main, le nerf n’était pas sectionné et elle pouvait encore la refermer même si la douleur était à la limite du supportable, elle jeta un coup d’œil au corps inerte à ses pieds et se retourna pour voir son Jaf recouvert de cette même couleur énervante. Elle n’avait pas à avoir de pitié pour eux, ils n’en auraient pas ni pour elle, ni pour son loup. Elle reprit sa flèche et animée d’une colère fulgurante, elle arma son arc et tira ses flèche l’une après l’autre touchant avec précision chacune de ses cibles.
Trois d’entre eux furent abattus à distance comme des chiens avant que le loup gris, surement l’alpha du groupe ne décide de s’occuper d’elle personnellement. Le poil s’hérissant sur le haut de son dos l’animal plus grand que la normal, les crocs découvert et les muscles se contractant fonça sur la Beorc tête la première. Il était extrêmement rapide et évita les flèches de la chasseuse devenues lentes à cause de la douleur croissante que lui infligeait sa main. Elle n’avait pourtant pas le moindre temps à perdre avec cet animal, Jaf avait besoin d’elle. Elle le voyait chuter alors que l’éclair gris échappait encore et encore à ses amies pointues. Elle le vit tomber comme une masse sous l’assaut de deux loups et malgré qu’il se défende comme un beau diable, il ne faisait pas le poids.
L’alpha reprit forme humaine juste devant elle mesurant facilement deux tête de plus qu’elle et la saisit par le cou la faisant lâcher son arc.
- Eh bien, eh bien, petite humaine on ose s’en prendre aux miens.
Yue ne le regardait même pas, ses yeux se portait sur son ami qui se relevait une énième fois et infligeait un violent coup de dents à l’un de ses adversaires le tirant dans une longue trainée d’hémoglobine. Il n’en restait plus que deux face à lui.
- C’est étrange petite humaine, mais j’ai l’impression d’avoir déjà vécu une situation familière à celle-ci…
Yue redescendit ses yeux couleur sang sur l’homme qui l’étranglait et lui cracha au visage tout en saisissant son bras. Elle n’avait que faire de ses paroles, elle n’avait que faire de son existence. Elle serra sa poigne autour du bras musclé et déploya la force de tous ses muscles réunis. Elle avait déjà eu à faire à bien plus puissant que lui et sa main autour de son cou ne lui rappelait que trop bien celle du Croc Pourpre. Jamais elle ne se laisserait de nouveau défaillir sous une attaque si primitive.
Elle entendit les os craquer sous ses mains alors que l’animal l’envoyait voler à quelques mètres en hurlant de rage et de démence.
- Ses yeux je m’en souviens…Hahaha… comme c’est ironique ! _ le loup se saisit la tête de sa main valide en explosant d’un rire puissant._ Je ne sais pas ce que tu es mais apparemment tu arrives à détourner les membres de mon peuple sur plusieurs générations.
Yue ne le comprenait pas, de quoi parlait-il, elle ne l’avait jamais vu. Une tête aussi ignoble et bestiale elle s’en souviendrait… elle reprit son arc de la main gauche. La chair à vif de sa main droite la faisant que trop souffrir.
- Qui es-tu Laguz ?
- Oh alors tu n’utilises pas le terme de sous-humain j’en suis presque flatté _ un sourire carnassier se dessina sur son visage, alors qu’il s’inclinait pour se présenter_ Je suis Athanaël, capitaine de la garde d’Hatary et également l’ancien supérieur d’Eristoff tu dois t’en s…
Telle une flèche dont la vitesse était augmentée par Célérité, l’albinos passa à côté du loup alors qu’il se présentait. Une diversion si simple elle n’aurait jamais pensé que ça fonctionnerait. Bien sûr elle aurait voulu en savoir plus mais elle devait d’abord venir au secours de son ami. Récupérant ses flèches sur son passage, elle en arma une qu’elle tira entre les deux yeux de l’un des adversaires de Jaf. Plus qu’un…
Cependant, avant qu’elle ne réarme son arc, une main griffue la saisit par les cheveux et la ramena face contre terre en la bourrant de coups.
- J’aurais mieux fait de te tuer à cette époque où tu n’étais qu’une gamine… laisser cette tâche à un faible comme Eristoff… c’était une erreur de ma part. il était pourtant très intelligent et il aurait fait un bon soldat s’il n’avait eu pas tant d’idéaux et de fierté mal placée.
Ce rire presque sadique alors qu’il la frappait… elle s’en souvenait, c’était flou, mais elle pouvait reconstruire le contexte de leur rencontre et une nouvelle colère grimpa en elle alors qu’elle criait à l’unisson avec Jaf :
- Eristoff n’était pas faible !
- Mon père n’était pas faible !
Yue tourna sa tête au son de ce cri sur la silhouette juvénile d’un gamin de dix ans à peine et dont la couleur rousse presque rouge de ses cheveux lui rappelait incroyablement Jaffar. A ses pieds gisait un nouveau corps reprenant la forme d’une jeune femme. Les yeux bleus baigné de larmes et sa démarche tremblante alors qu’il s’approchait d’eux ne lui laissa pas de doute quant à l’identité de ce jeune garçon. Son odeur était celle de son meilleur ami, c’était celle de Jaf.[/i]
- Il est tellement dommage que tu n’ais pas voulu revenir avec nous gamin, tu as le même potentiel que ton père à l’époque, une telle force mise au service d’une humaine… c’est si triste.
- Je ne suis pas à son service ! Je me sers simplement d’elle. Et si vous m’aviez laissé plus de temps je serais revenu.
- Menteur, comme ton père, tu t’es amouraché de cette gamine. Moi qui pensait que tu ne désirais que la tuer… je suis étonné de te retrouver à ses cotés… ta mère en serait si triste.
Yue comprenait de moins en moins la situation, mais elle profita de ce relâchement pour repousser Athanaël d’un coup en pleine poitrine. Elle se releva d’un bond saisissant au passage son arme. Elle avait du mal à respirer et ressentait bien en elle la douleur sourde provoquée par les trop nombreux coups qu’elle avait reçus. Elle retourna auprès de Jaf, mue par une grande inquiétude.
- Mon Jaf tu vas…
- Ne me touche pas humaine !
Tant de mépris, tant de haine… ça faisait mal. Yue se recula de quelques pas devant tant de véhémence. Ses yeux reprirent une couleur plus ternes et elle se plaça à ses cotés sans pour autant l’approcher.
- Quant à toi disparais !
L’alpha regarda Jaf avec des yeux injectés de sang alors que son petit sourire mesquin laissé place à une rage à peine voilée.
- Comment oses-tu gamin… tu veux que je t’inflige le même sort qu’à ton père ?
- Eristoff est mort dans une tempête. C’était un simple accident, ne vous attribuez pas sa mort car Eristoff n’était pas faible au point de perdre contre vous. Seule la nature pouvait venir à bout de lui et c’est ce qu’elle a fait maintenant disparaissez avec vos rescapés.
Yue s’était relevée et avait bandé son arc. Elle se concentrait pour ne pas trembler malgré la douleur mais son regard agressif aurait fait baisser les yeux de bien des personnes. Le loup cracha au sol.
- Ta mère se sentira de nouveau trahie par le dernier mâle de sa famille mais ne t’inquiète pas je la réconforterais gamin.
Il se retourna et sans reprendre forme animal à cause de son bras broyé, il s’en alla sans un regard pour ses compagnons qui se relevaient avec peine pour le suivre. Plus rapidement qu’elle ne l’aurait cru capable, le loup gris disparu avec trois de ses comparses. Les autres restèrent au sol inerte. La femme blonde était morte, celui qu’elle avait égorgé de sa flèche également et d’autres avaient péri. Cependant, ils se tenaient tous les deux droits et sans fierté au milieu de ce carnage dont Yue ne comprenait même pas l’existence.
Laissant le silence s’installer, Yue ne bougea pas, ne sachant quoi dire… trop d’informations parcouraient son esprit dont la principale restait que son ami de toujours était un Laguz…
Un bruit sourd la fit se retourner alors que Jaf se tenait accroupie sur le sol. Il était recouvert de sang, de blessures et d’entailles en tout genre, elle devait les soigner. Elle se jeta sur lui faisant abstraction de sa propre douleur et…
- Ne me touche pas ! Je n’ai pas besoin de ton aide.
Il jeta ses paroles avec la même véhémence que lors du combat et ses yeux bleus se muèrent en deux points affreusement accusateurs avant de tourner dans leur orbite. Jaf s’évanouit sans qu’elle n’ose rattraper son petit corps de garçonnet.
***
Yue avait ramené le petit garçon dans l’abri de la forêt qu’ils avaient quitté précédemment et l’allongea dans sa cape. Elle devait faire vite. Avec les nombreux bandages qu’elle possédait elle soigna rapidement la plaie de sa main puis s’occupa du jeune garçon. Il avait des marques de morsures au niveau de la nuque et de l’épaule ainsi que sur ses bras et ses jambes. Des griffures imposantes rayaient ses flancs et son dos. Habituellement, toutes blessures étaient masquées par sa fourrure rousse. Mais là, la peau à nue et marquée ne laissé aucun doute sur la gravité des blessures. Elle avait du mal à voir dans ce petit garnement plein de haine son ami de toujours, celui sur qui elle se reposait et celui qui protégeait ses arrières. Il semblait si jeune et ses épaules si petites pour supporter tous ce qu’elle lui avait imposé…
De plus maintenant qu’elle le voyait ainsi, elle repensait à tout ce qu’elle avait fait avec lui et il n’y avait pas que les combat dans lesquels elle l’avait mené qui l’inquiétait mais aussi tous les bains qu’elle avait pris avec lui, les fois où elle l’avait emmené sans crainte dans les douches publiques, le nombre de fois où elle avait dormi entre ses pattes. Cet être qui l’avait depuis tant ce temps accompagné n’était qu’un enfant et quel enfant, celui d’Eristoff d’après ce qu’elle avait compris… son frère en un sens.
Elle repoussa les petites mèches de cheveux roux sur le visage innocent du jeune garçon et imagina quelques seconde ceux à quoi pouvait ressembler Eristoff dans sa jeunesse…
- Ne me touche pas humaine.
Encore cette appellation… elle ne l’aimait pas. Elle retira sa main et se retourna pour prendre une gourde remplie d’eau. Mais le gamin se recula et se releva, chancelant quelque peu sur ses fines petites jambes.
- Tu ne devrais pas te lever tout de suite tu n’es…
- Silence humaine !
Yue écarquilla les yeux avec stupéfaction devant cette véhémence. Elle ne laisserait pas passer un tel comportement même venant de son ami. Elle se leva et s’avança vers lui d’un pas déterminé. Il faisait presque sa taille mais elle était bien plus large que lui. D’une simple poussée elle l’envoya au sol et le plaqua méchamment s’asseyant sur son bassin. Il émit un gémissement de douleur.
- J’ai dit que tu devrais rester au sol. Tu n’es pas en état.
Elle s’écrasa de tout son poids sur le corps du gamin et le laissa se débattre comme un dément la mordant de ses petites quenottes de gosse et la griffant inutilement de ses ongles pointus. Elle avait l’impression de retrouver le petit louveteau roux dont elle avait du s’occuper alors qu’il se mourrait. Il avait la même façon de lutter contre son propre bien. Il avait la même expression et de la même façon que la première fois, il se calma de lui-même.
Se relevant un peu mais restant à califourchon sur le corps de Jaf, Yue lui demanda en lui caressant la joue :
- Tu vas mieux mon petit Jaf
- J’irai mieux quand tu ne seras plus sur moi à m’imposer ton poids, humaine !
La claque partit de manière fulgurante et le son aigue de sa main sur la joue de l’enfant résonna à travers la forêt faisant échos au son des oiseaux s’envolant.
- Je ne me retirerais que quand tu m’appelleras par mon prénom et que tu me feras ta demande poliment gamin.
Il tourna la tête en une moue tout à fait enfantine mais ne dit rien. Elle ne bougea donc pas.
Le silence s’installa entre eux alors qu’ils restaient toujours dans cette position quelque peu inhabituelle. Le gamin tournait la tête et regardait dans le vide sans vouloir croiser les yeux de l’albinos et elle, elle le regardait lui. Détaillant chaque partie de son visage retrouvant par endroit des traits caractéristiques de Jaf et parfois même des similitudes avec Eristoff. Yue ne se serait jamais doutée que celui qu’elle considérait comme son père ait pu avoir un fils ou même une famille… Pourtant ce n’était pas si extraordinaire. Après tout, il retournait toujours dans son village lorsqu’elle dormait durant la journée et parfois il s’absentait durant des semaines la laissant se débrouiller seule. Il pouvait donc tout à fait mener une vie de famille à coté de leur vie à eux. Ce n’était pas si étonnant. Ce qui l’était par contre était cet enfant qui avait vécu durant près d’un an sous la forme d’un loup et l’avait accompagnée partout. Etait-il au courant de sa relation avec son père ?... Oui, il l’était, le Gris l’avait dit, il désirait la tuer. Pourtant il aurait eu tant d’occasion de le faire.
- Ça fait longtemps que tu es comme ça ?
- Si tu parles de ma condition de Laguz, je le suis depuis que je suis né.
La question était stupide elle le savait bien et la réponse piquante comme elle s’y attendait.
- Si tu parles de mon état d’indécision perpétuel, c’est depuis que je t’ai rencontré. Maintenant pousse toi de moi… Yue.
Le ton était froid et la politesse n’y était pas mais la chasseuse savait qu’elle ne pourrait en obtenir plus. Elle se releva en s’appuyant sur sa main et regretta bien vite ce mouvement.
- Yue !
Le petit gamin roux se jeta sur sa main blessé dont le sang s’échappait des bandages qui l’entouraient. Avec un naturel digne de Jaf, il saisit la main entre ses petits doigts roses et défit le bandage pour le refaire en soupirant l’air navré. Chasser le naturel, il revient au galop.
- Tu n’es vraiment pas douée pour faire les bandages pour une momie ambulante…
Yue reconnut alors la bienveillance de son loup dans son regard. Elle décala sa main et d’un mouvement ample elle le prit dans ses bras et l’enlaça.
- Mon Jaf, j’avais cru t’avoir perdu à jamais…
- Je ne suis pas Jaf, je ne le suis plus et ne peux plus l’être. J’aurais réellement voulu rester pour toujours ce loup roux sur qui tu comptais. J’aurais voulu rester la bête puissante à tes yeux mais j’ai compris depuis cette mission pour Nevassa que je suis toujours aussi faible. Même à tes yeux. faible comme le gamin que je suis. _ il la repoussa gentiment et ses yeux ternes ne reflétaient désormais que de la souffrance et de la haine._ Je ne suis qu’un gamin rempli de colère trop faible pour tuer celle responsable de mon malheur.
Yue vit les mains de l’enfant s’approcher de sa gorge et sentit ses doigts se refermer autour d’elle. Il ne serrait pas et elle aurait rapidement pu se débarrasser d’une telle prise mais elle ne fit rien, ne bougea point. L’enfant avait une histoire à raconter et elle avait envie de l’écouter.
***
Celui qu’elle nommait Jaf était né dans un village d’Hatary de l’union d’une jeune louve nommé Aka entièrement rousse et d’un soldat aux poils gris nommé Eristoff. Les deux êtres s’étaient rencontrés par hasard dans une auberge où la jeune future mère était serveuse. Il n’y avait rien eu d’extraordinaire à leur rencontre, pas de bataille romanesque dans l’auberge pour protéger la vertu de la belle, pas de jeune femme à sauver d’un patron tortionnaire,… Juste une jeune serveuse s’amourachant d’un soldat. Ils ne prirent pas longtemps avant de se marier sachant que la jeune femme était enceinte du soldat et ils mirent au monde un jeune louveteau bien battit d’un poil magnifiquement rougeoyant comme celui de sa mère. Mais le jour de sa naissance, la jeune mère était seule, Eristoff n’étant jamais là une fois la nuit tombée.
Le louveteau roux avait vécu une vie familiale assez houleuse car bien que sa mère était au courant des allers et venues incessantes de son mari dans le village, celle-ci avait toujours pensé qu’une fois leur enfant né, il resterait auprès d’eux et se comporterait comme un vrai père de famille. Cependant, ce ne fut pas le cas. L’enfant grandit avec un père absent. Lorsqu’il était là, il semblait toujours ailleurs, il dormait la moitié du temps pour récupérer de ses nuits passées à l’extérieur et quand il était réveillé, il semblait toujours fixé sur un point lointain. Le jeune enfant avait pourtant tout fait pour attirer le regard de son père. A à peine 5 ans, il avait déjà intégré le corps militaire des jeunes loups et était le meilleur de sa section. A 6, il battait son supérieur dans un combat loyal, à la grande surprise de ses ainés. Il reçut même les félicitations de hauts gradés… mais sa mère était trop occupée à critiquer son père, à le critiquer lui, qui lui ressemblait de trop… Quand à son père il ne préférait même pas en parler.
Le jeune loup roux avait toujours tout fait pour briller aux yeux de ce dernier qui ne le voyait pas il avait vraiment fait de gros efforts et avait abandonné sa jeunesse ne se faisant jamais d’amis. Les autres n’étaient que des adversaires. La seule question qu’il se posait en voyant quelqu’un de son âge était :
*Est-ce que je suis capable de le battre ?*
Mais à l’aube de sa 7ème année, son père disparut en un claquement de doigt. Il partit comme à son habitude au crépuscule et ne revint point à l’aube. Il avait fini par l’abandonner lui et sa mère.
- Je le savais déjà mon tout petit, il est parti pour de bon, il a choisit cette sale humaine à nous, sa famille… je hais les humains. Je le hais lui tout est de sa faute.
Le jeune loup apprit alors que son père menait une seconde vie la nuit. Il s’occupait d’une enfant humaine, lui apprenait à chasser, lui enseignait l’art de la cuisine, il la bordait chaque soir,… il faisait avec elle ce qu’il n’avait jamais fait avec lui… Sa mère l’avait découvert des semaines plus tôt l’ayant suivi lors d’une de ses sorties après l’avoir vu disparaitre une semaine durant. Elle avait essayé d’imposer un choix à son mari mais la réponse fut si claire qu’elle ne retenta jamais l’expérience.
- Ce n’est qu’une humaine, elle ne mérite pas ton attention, elle n’a aucun rapport avec toi alors que nous sommes ta famille !
- Elle l’était avant vous et si tu n’étais pas tombée enceinte elle serait restée la seule.
Il n’avait rien ajouté de plus mais c’était la première fois qu’elle l’avait vu s’énerver. Elle le laissa donc continuer ses allers et venues jusqu’aux jours ou il ne revint plus.
La jalousie est un sentiment complètement humain se disait jusque là le jeune loup roux pourtant, il n’avait pu s’empêcher de l’éprouver à son niveau extrême en comprenant que son père ou celui qu’il considérait jusque là comme tel, celui qu’il idolâtrait comme un dieu vivant, un but,… En aimait une autre comme son enfant. Tout l’amour qu’il n’avait pas reçu, toute l’attention qu’il n’avait pas eu,… c’était elle qui l’avait obtenue.
La jalousie est un sentiment complexe et insidieux qui s’insinue en vous de manière vicieuse. Elle passe par une fausse acceptation et se mue en colère rageuse. Elle est désagréable et rapidement elle doit trouver une cible… Mais qui viser… celui qu’on à toujours aimé et dont on a toujours voulu la reconnaissance ou la sale humaine qui l’avait détourné de ses devoirs familiaux.
Il voulu alors se rendre dans la forêt et affronter son père ainsi que cette enfant mais sa mère tomba gravement malade avant qu’il ne se décide à partir. Elle plongea dans une dépression chronique où elle ne mangeait plus, ne dormait plus et passait son temps à maudire son époux. Elle ne le reconnaissait pas et ne voyait en lui que le fils de l’homme qui l’avait abandonnée. Sa vie devint particulièrement éprouvante. Devant rester auprès de sa mère il bouillait d’impatience à l’idée de revoir son père. Il ne maudit jamais ce dernier, ce n’était pas sa faute, non la responsable était cette Beorc, cette humaine, cette sale chienne qui avait osée duper son père.
Il devait le retrouver pour le remettre sur la bonne voie car en son absence sa réputation avait défaillie. Les chefs de la garde d’Hatary avaient révélés ses penchants pacifistes pour les Beorcs et sa mère avait dévoilé en partie ses activités nocturnes qui avaient été trop rapidement extrapolées au gout du jeune garçon. C’est alors qu’il confia la garde de sa mère à Athanaël capitaine de la garde d’Hatary et ancien supérieur de son père. Il semblait apprécier sa mère, un peu trop à son goût mais il ne pouvait la laisser seule dans son état.
Il se mit alors à la recherche de l’ordure, de l’humaine qui avait détournée son père mais ne trouva que la tombe de ce dernier…
Pouvez-vous comprendre la rage qui frappa le jeune loup à la vue de cette simple pierre gravée grossièrement du nom de son paternel… Pouvez-vous imaginer tous les liens logiques qui se formèrent dans son esprit pour expliquer comment son père avait pu mourir ?...Il était parti pour rejoindre cette fille et maintenant il était enterré sous terre comme un vulgaire objet.
Le fils, les yeux baignés de larme se promit de tuer la personne responsable de la mort de son père.
***
Ses mains se resserrèrent sur le cou de la jeune archère qui ne faisait toujours rien pour se défendre…
C’était une idiote, il allait la tuer et elle ne ferait rien pour se défendre, il le savait, il le sentait.
***
Le loup poursuivit la jeune fille durant des mois, elle restait toujours dans les même parages ne sortant que la nuit et venant toujours cuisiner et manger ce qu’elle avait chassé durant la nuit près de la tombe artisanale qu’elle avait montée pour son père. De nombreuse fois, il aurait simplement pu l’égorger mais il devait bien avouer que la dextérité de la gamine l’effrayait et autre chose le retenait d’agir.
Un jour, elle décida de quitter l’abri et s’en alla pour les terres Beorcs. Sans réellement réfléchir, le louveteau la suivit à travers les différentes contrées Beorcs et la trouva de plus en plus idiote. Cependant, les terres Beorcs regorgeaient de danger et il se fit capturer sur la route pour Criméa. Il perdit ainsi la trace de l’humaine pour ne la retrouver que deux mois plus tard à Mélior.
Cette rencontre si soudaine et impromptue lui apporta des milliers de sentiments contradictoires entre la haine et le soulagement, la colère et le bonheur… il est drôle comme on peut s’attacher à une personne en ne faisant que la regarder. Bien sûr il se devait toujours de la tuer mais savoir qu’il ne l’avait pas perdue le réconforta. Elle était devenue le but de son existence, il avait basé sa vie sur sa vengeance.
Cependant, rien ne se passa comme prévu, il ne réussit pas à la détester bien longtemps, il ne réussit pas à lui en vouloir et à voir en elle le démon qui avait détourné son père. Non. Dans tous ses gestes, tous ses mouvements, sa manière de prendre soin de lui, de le prendre dans ses bras… de l’aimer, le loup avait trouvé en elle une sœur, la mère qu’il n’avait jamais eu, une personne qui l’aimait sans rien demander en retour, qui le reconnaissait comme un être à part entière. Avec elle, il ne ressentait pas le poids que pouvait lui imposer sa mère. Il avait l’impression de pouvoir être libre, d’être libéré de cette haine qui l’habitait et qui lui avait été implanté par sa famille. Il aimait être Jaf.
Néanmoins, se retrouver face à sa faiblesse lors de leur mission pour le cercle arcanique lui avait rappelé tous ce qu’il n’avait pu réaliser par faiblesse comme dévoiler sa véritable nature à Yue, ses intentions premières vis-à-vis d’elle, son passé,…
***
Des larmes ruisselaient sur le visage juvénile du jeune garçon alors que sa poigne se resserrait sur la gorge sans réussir à l’obstruer. Yue l’avait attentivement écouté et n’avait pu s’empêcher de pousser un léger soupir à l’écoute de l’histoire de son ami. Elle n’avait jamais eu d’autre famille qu’Eristoff. Athanaël et ses hommes s’étaient chargés de ses parents et de son frère, elle ne pouvait donc comprendre la douleur de ce petit gamin. Elle posa une main sur sa joue et essuya une à une chaque larme.
- Tue moi si tu le souhaites, tu m’as sauvé tant de fois la vie que tu es bien en droit de la réclamer.
Le jeune garçon explosa d’un rire sonore alors que ses larmes se mêlaient à son rire.
- Je suis si faible… J’aurais dû comprendre depuis longtemps que tu n’y étais pour rien dans mon malheur, le seul responsable, c’est moi et cet idiot qui m’a servi de père… Le pire dans tout ça c’est que tu sais comment il m’a nommé ?... Non tu ne dois pas savoir… Yue… Il a poussé la perversion jusqu’à me donner le même nom que toi… Je le déteste tant…
La poigne se relâcha soudainement alors que le jeune garçon s’écroulait dans les bras de l’archère. Son corps était agité de tremblements irréguliers, de spasmes de rire et de pleurs. Elle l’enserra dans ses bras et lui caressa doucement le dos et derrière l’oreille.
- Je dois bien avouer qu’il a fait preuve de mauvais goût…
Les deux amis se mirent à rire d’un rire profond et éloignant toute lourdeur dans l’air.
Ils se relevèrent pour soigner tour à tour leurs blessures respectives tout en se racontant leur souvenir respectif de leur père. Yue avait l’impression que Jaf lui parlait d’une autre personne ne reconnaissant rien dans ce qu’il disait de son Eristoff. Elle ne l’avait toujours connu que taciturne, brutal et maladroit. Elle n’imaginait pas pire père… il détestait son métier, détestait les Beorcs et méprisait les Laguzs… c’était un être désagréable. Mais aux yeux de Jaf ou Yue elle ne savait plus comment le nommer, c’était un être puissant et respectable, une énigme …
L’aube arrivant ils se mirent à l’abri et se couchèrent, Jaf allongé sur Yue. La nuit avait été éprouvante et le rêve qu’elle fit quelque peu humide… A son réveil, Jaf n’était plus là et sur sa joue reposait son dernier adieu. |
|
