Bonjour à vous, je me présente ici bas, je m'appelle Benoît H., je suis un simple garçon vivant dans la ville de
Le Havre, en Normandie
(donc je vis ailleurs, CQFD). J'ai actuellement vingt-cinq printemps à mon actif, ce qui je suppose fait de moi le doyen de ce forum, et pourtant... Tout le monde conviendra que l'âge physique ne fait pas souvent la maturité, dira-t-on.
Mon existence a été des plus banales, je n'ai vécu rien d'extraordinaire, pour le pire et pour le meilleur, et malgré les apparences que je vous donne quotidiennement je suis loin d'être à plaindre. J'ai vécu dans une famille souvent soudée en tant que benjamin de trois fils, j'ai toujours vécu selon les souhaits de mes parents, ayant grandi avec une éducation saine... Bien que ma mémoire est assez déficiente à ce niveau, et que je n'ai que de très vagues souvenirs de mon enfance, cela voulait au moins dire que je n'ai vécu aucun drame familial ni autre évènement choquant, traumatisant... En bref, j'ai toujours eu ce qu'il fallait, sans plus néanmoins. Formaté selon la famille et mes devoirs d'écolier, j'ai toujours été un enfant calme et timide, voir souvent naïf... J'ai existé selon la "norme" des enfants de mon âge, dans la norme du statut social de ma famille, et jamais je ne pouvais remettre quelque chose en question dans ma vie. Après tout, un enfant reste un enfant jusqu'à ce qu'il atteigne ce qu'on appelle la puberté, ou à défaut la crise d'adolescence...
La mienne a mis du temps à venir, je la situerais dans les alentours de l'année 2001, étrangement cette date coïncide avec l'informatisation du foyer, un certain début d'éloignement avec mes frères respectifs qui affinaient chacun de leur côté leur personnalité ou leur avenir... Un peu comme moi avant cette fameuse date, en somme. Pourquoi dis-je ça ? Avec du recul je me rends compte qu'avant mes 16 ans, j'étais resté un véritable enfant, agissant selon le bon vouloir de mes parents, et seulement ça. Les seuls amis que j'avais, les seules connaissances que je pouvais fréquenter étaient toujours affiliés à mes frères, ou à divers liens que mes parents entretenaient avec l'entourage familial. Je n'ai jamais vraiment eu d'amis à moi, je n'ai jamais vraiment eu de volonté propre, je n'ai jamais vraiment connu les affres de la société, non... On me disait simplement de faire telles ou telles choses, et je le faisais, par devoir et surtout par mon incapacité à refuser les faits, complètement impuissant à cause de ma timidité d'une part, et le pauvre développement de ma personnalité et de mon caractère d'autre part. Je n'étais bon qu'à suivre les directives sans vraiment broncher, ce qui faisait de moi un assez bon élève du coup, il fallait bien l'avouer. Mais malgré la tournure péjorative que je peux employer en ressassant ce passé presque lointain à mon sens, je sais aussi très bien que je n'ai vraiment manqué de rien et que je suis loin d'être à plaindre de ma condition de "
benjamin de famille française assez aisée". Mais je n'avais guère d'autre but que celui d'obéir à mes parents, ayant même suivi la voie 'scientifique' dans mes études au lycée parce que d'une part j'en avais les capacités, et parce que d'autre part mes parents avaient fait ce choix pour moi, surtout après avoir vu que mon grand frère avait réussi à décrocher son Baccalauréat sans souci par le biais de la même filière. Et au lycée finalement, c'était la même routine qu'avant: peu d'amis, des cours à étudier sans relâche car après tout je n'avais que ça à faire, et parfois tête de turc pour certains camarades... La vie se répétait toujours selon le même shéma, finalement.
Enfin la puberté arriva, avec son lot de complications. Bien que celle-ci aura finalement que peu d'influence sur mon caractère, il faut avouer aussi que la nature est mal faite en certains points: moi, le petit être passif, peu bavard et anodin que j'étais, était tombé amoureux d'une fille de ma classe de Seconde: mon premier coup de foudre, et mon premier amour
(à sens unique). Bien que peu représentatif des gros changements qui allaient opérer en moi, c'était quasiment la première fois que je me passionnais pour autrui, voir même que je me passionnais tout court. Bizarrement je commençais à distinguer le véritable sens des mots "
envie" , "
avenir" mais aussi "
espoir". Et bien que ma maturité intellectuelle retardée n'était pas censé jouer en ma faveur, je goûtais petit à petit à la découverte, aux joies et finalement au désespoir de ce que pouvait représenter le côté sentimental de l'existence humaine. Mais plus ça allait, et plus je découvrais aussi mes réelles faiblesses, et ma condition de
lycéen lambda.
Puis vint l'avènement d'une nouvelle personnalité, que l'on peut aussi appeler crise d'adolescence. Bizarrement elle remonte, aussi loin que je me souvienne, à la même année que l'acquisition du Saint-Graal dans le petit bourg où j'habitais: Internet. Au risque de passer pour un Nerd, c'est probablement ce nouveau paramètre dans ma vie qui m'a décoincé de la sorte ,si j'ose dire. Au fur et à mesure que je dcouvrais la toile, je me trouvais de nouveaux intérêts, des nouvelles informations, et surtout... de nouveaux liens sociaux. Les plus jeunes d'entre vous ne doivent pas connaître l'épopée
Caramail, un site de t'chat gratuit où énormément de personnes à l'époque s'y aventuraient, et ce fut également mon cas. Et, comment dire, je ne le réalise que maintenant en vérité, mais... Internet m'a plus ou moins ouvert l'esprit. Je venais de découvrir un 'nouveau monde' , et malgré le fait que tout comme dans la vie réelle on tombe souvent sur de véritables cons sur un t'chat comme Caramail, autant on peut trouver des gens bons et intéressants là-bas. Et aussi surprenant que ça pouvait l'être, je me sentais vivre. Moi, le timide et peureux lycéen que j'étais, j'avias la possibilité... Non, le droit de parler comme bon me le semblait. J'ai découvert au fur et à mesure que la "vie" sur Caramail, et par extension sur Internet était plus 'facile' et plus fructueuse pour moi. Je pouvais parler sans retenue, sans souci de gêne ou de mauvais jugement ou presque, je rencontrais des gens qui ici se souciaient peu du physique de la personne en face, et grâce au pseudo-anonymat d'Internet c'était comme si mes angoisses à discuter n'existaient plus. Désormais j'étais scindé en deux: Benoît le simple lycéen de base "bête et méchant" , mais maintenant aussi BigBeuBeu, le t'chatteur le plus mature et le plus rigolo du salon "
Mangas & Jeux Vidéo" de la plate-forme francophone Caramail. Et c'était dans ces conditions particulières que commençaient à tourner la roue de Dame Fortune.
Mais ce nouveau hobby particulier n'était pas sans conséquence. Autant ma vie sociale semblait à son paroxysme par le biais d'Internet, autant je me relâchais drastiquement dans ce que je pouvais faire avant: mes études. J'étais devenu absorbé par ce phénomène, au point de zapper en grandes parties mes révisions de cours à la maison, ainsi que pas mal de mes devoirs après coup. Mais je ne remarquais quasiment pas cette dégradation, car j'estimais à juste titre selon moi que je pouvais désormais vivre et occuper mon temps libre par moi-même. Peut-être était-ce pour moi la première fois que je pouvais parler de "Liberté". Je ne veux pas dire par là que je n'étais pas du tout libre durant mon enfance, loin de là, juste que... J'avais vraiment l'impression que ce que je faisais maintenant découlait de moi, et non plus de mes parents, de mes frères... Pour la première fois de ma vie, j'apprenais à être apprécié pour mon caractère, mon humour, ce que je suis au fond de moi et non pas seulement ce que je laissais transparaître, comme avant.
En y repensant désormais, c'est essentiellement cette période qui aura scellé mon existence, mais ça je ne pouvais pas encore le deviner à l'époque, car je pense que même ça, Nostradamus lui-même n'aura jamais pu le prédire. Néanmoins il existe un proverbe qui stipule que l'on n'a rien sans rien, sans non plus ignorer bêtement la loi maîtresse de la conservation de la matière:
Rien ne se perd, rien ne se créé. Mais j'étais encore jeune à l'époque, et insousciant... Jamais je n'aurais pu me douter que tout ce que je 'gagnais' à être sur Internet, je le 'perdais' autre part dans ma vie extérieure. Ma concentration en classe ainsi que mes notes baissèrent drastiquement, passant par exemple d'une moyenne de 12/20 à 06/20 en Mathématiques en à peine un trimestre. Mais aussi loin que je me souvienne encore, je m'en fichais royalement. Plus le temps passait au chevet d'Internet, et plus j'apprenais enfin après 17 ans de nonchalance ce qu'était pour moi le
véritable plaisir. Je sais que ça peut paraître un peu bête à vos yeux de voir une personne n'éprouver du plaisir que par le biais d'un ordinateur, mais c'était désormais ma réalité... Et l'année suivante s'annonçait différente de toutes celles que j'avais pu connaître par le passé. Pour la première fois de mon existence, je ressentais des émotions, pour la première fois de ma vie je pouvais bêtement sourire à cause d'une simple machine... Pour la toute première fois et pour ma dernière année en tant que mineur, il y avait des gens à qui je parlais sur Internet qui avaient de l'estime pour moi, et qui en retour je pouvais considérer comme de véritables amis.
Hélas Toutes ses impressions semblaient être mises à l'épreuve, lorsque la vie réelle revint à la charge pour essayer de me désarçonner cette année fatidique... L'année de cette fameuse épreuve, le fameux Baccalauréat. Et ce n'était pas tout, car l'autre épreuve digne de celles d'Hercules à mes yeux se profilait aussi derrière tout ça: mon futur. Et effectivement, là se tenait, devant moi, mon plus grand défaut: mon manque cruel de projet, d'envie de carrière, non... L'ironie du sort provenait maintenant de mes parents, en réalité. Je ne peux pas vraiment les blâmer, ils ont toujours été présents pour moi, donnant tout leur amour à leurs enfants et leur souhaitant évidemment tout le bonheur du monde, des personnes bienveillantes et un couple exemplaire. Non je serais un monstre si je devais commencer à blasphémer sur mes parents, et les blâmer de n'importe quoi, même la chose la plus bénine au monde, cependant... Même ça, je suis obligé de commencer à le renier, car en vérité je suis un monstre... Mes parents ont toujours été fier de moi, de mes résultats., et m'aimaient vraiment de tout leur coeur... Mais au fond de moi, je n'étais plus comme avant, non... Plus rien ne le sera jamais plus, hélas.
C'est bizarre, d'ailleurs... Malgré tout ce que j'ai pu dire auparavant sur comment j'estimais ma vie d'autrefois, j'arrive quand même à éprouver du regret. Mais en vérité ce regret est ce qui me reste de respect pour mes parents, rien de plus. Car non je ne regrette pas ma vie pré-informatique, si j'ose dire... La chose qui m'ennuie le plus dans le cas présent, c'est un potentiel retournement de situation affectif en ce qui les concerne. Car mes géniteurs doutaient désormais de moi, de mes capacités, et sûrement à juste titre. En un an et demi, je suis passé de l'élève presque modèle à un mauvais élève lambda, aux limites du cancre selon certains cas
(par exemple en maths, où ma moyenne en Terminale avait chutée à 02/20 à cause de ma démotivation à faire mes Devoirs-Maison notés). La déchéance était quasi-totale, et le doute installé par mes parents sur l'obtention de mon diplôme élémentaire croissait au fur et à mesure de l'approche des examens de fin d'année. C'est là qu'une nouvelle descente aux enfers a commencé, doucement mais sûrement... Mes parents ont commençé à me mettre en garde, puis à me donner des ordres, pour enfin me menacer ouvertement de la fermeture de la ligne Internet en cas de redoublement. Et tant bien même que malgré le fait qu'avec mon 11/20 global aux examens, obtenu sans quasiment aucune révision ni préparation, ils se sont mis à me féliciter gentiment en affirmant qu'en "vérité" ils ont toujours cru en moi et "savaient" que j'allais réussir, je... n'ai fait de mon côté que dénoter chez eux une certaine hypocrisie de leur part. C'était pour moi le début de la fin de notre ancienne relation parent-fils si spéciale auparavant. Ce jour-là, je pense avoir perdu une grande partie de mon âme dans le processus. Et au fur et à mesure, je devenais perfide, leur octroyant la responsabilité au fond de moi de leur 'mauvaise' éducation à mon égard... Car je me disais à ce moment que malgré le fait que mon éducation fut exemplaire, et aussi malgré le fait de m'avoir encouragé dans de nombreux domaines, je... Je n'arrivais pas à expliquer le pourquoi j'étais timide, le pourquoi j'avais du mal à apprécier telle ou telle chose, à trouver ma vocation, ma passion qui ferait de moi un homme véritable plus tard... Je ne pouvais à ce moment que mettre tous mes anciens problèmes connus sur le dos de mon éducation. Je crois que c'est à partir de ce moment qu'au fond de moi, la scission entre ma personne et ma famille allait commencer à se former.
La vie commençait à devenir intéressante, finalement. Je dois l'avouer, mais les deux années qui suivirent l'obtention du Bac et ma majorité comptent certainement parmi les plus sympathiques de ma vie. Certes deux ans peuvent passer lentement, et tout n'avait pas été que rose pendant ces 24 mois, cependant c'était de manière générale assez positif... pour le moment.
Dénué de passion actuellement, j'entrepris encore une fois de faire confiance en l'instinct parental, et continuer de suivre la voie logique de mon parcours lycéen: la Faculté des Sciences. Mais cette fois avec plus d'entrain que lors de mon orientation 'imposée' au lycée, car je désirais quand même en savoir plus sur les sciences de la Vie. DEUG SV, telle était l'appelation de ma section à la Faculté des Sciences du Havre, en première année, j'en étais limite content... Cependant ce fut le début de la fin, encore une fois... Bizarrement je commençais à m'énerver facilement sur certains points, alors que je m'étais auto-proclamé par le passé Homme le plus calme du monde, ce qui ne me ressemblait pas. Et j'ai également eu des excès de démotivation, surtout en voyant le soit-disant programme optimisé pour une promotion de jeunes biologistes bacheliers: de l'anglais, des maths, de la chimie, de la géographie, de la stratigraphie, et de la biochimie... En d'autres termes, il n'y avait QUE la biochimie qui se rapprochait de ce que j'espérais faire au niveau des études. Et je me suis retrouvé complètement largué au bout de seulement un mois de travail... C'était fini, car plus ça allait, plus je m'auto-courcircuitais mon avenir: je cessais d'aller en cours l'après-midi au bout du premier mois, pour ensuite prétendre aller en cours de 8 heures à 14 heures chaque jour de la semaine pour faire croire à mes parents que je travaillais dur, alorsqu'en vérité... je passais mes journées complètes à la Fnac. Après alors un long mois de mensonges et d'abus de confiance, j'ai officialisé mon départ de la Faculté au mois de Janvier. Ainsi était le début d'une longue série d'échecs à venir...
Un échec, certes, mais dans ce cas pourquoi avoir classé cette année comme faisant partie des deux meilleures de ma vie actuelle, et bien... Tout simplement parce qu'au mois de Janvier de cette même année, une ancienne amie de l'époque Caramail avait pris la peine de reprendre contact avec moi par MSN, ce qui me faisait plaisir à voir. Mais il s'avérait que deux semaines plus tard, la demoiselle avoua ses plus sincères sentiments à mon égard. Il faut savoir que depuis mon premier chagrin d'amour en classe de Seconde, je n'avais jamais réessayé de réitérer une approche audacieuse vers une personne du sexe opposée
(ni du même sexe ceci dit en passant). Moi que tout le monde évitait par ma nature coincée et timide, c'était la première fois que je recevais une... déclaration d'amour. Il était vrai que la fille en question m'était très sympathique à mon bon souvenir, et avait un bon fond malgré le fait que je ne l'ai jamais physiquement vu, mais qu'importe. L'émotion agrippa ma logique au point de l'étouffer, et bien que je ne nourissais aucun sentiment amoureux à son égard, j'étais un faible incapable de dire "non", totalement incapable de rendre triste quelqu'un volontairement... Et malgré la très longue distance nous séparant, nous réussimes à nous voir de temps à autre durant essentiellement les vacances scolaires, et avec le temps je m'étais entiché d'elle, avant de finir complètement amoureux d'elle, définitivement... Qui plus est, vu que mes loisirs étaient essentiellement concentrés autour d'Internet et de l'outil informatique, je m'étais réinscris pour la rentrée prochaine à la seule 'école' post-Bac proposant une formation en informatique: le DUT Informatique.
Et que ça soit moralement, physiquement et tout le tralala, je pouvais affirmer qu'il s'agit là de la plus belle année de ma vie actuelle. Malgré le fait qu'il s'agissait de programmation informatique pour le DUT, j'avais un moral de plomb et malgré mes maigres connaissances en la matière, je m'accrochais. Car j'avais désormais un but, sinon deux: le premier consistait à faire trois ans en études supérieures pour pouvoir passer le concours de l'IUFM, l'Institut Universitaire de Formation des Maîtres. Oui, effectivement, j'avais trouvé ma vocation, moi qui adorait les enfants, et tout ce qui touchait à l'éducation, je pensais qu'un poste d'instituteur en école primaire serait l'idéal. Mon deuxième but était déjà plus concret et surtout plus simple: fonder une famille avec la femme que j'aimais, tout simplement. Oui, pour la toute première fois de ma vie, j'avais des rêves, des aspirations, des buts purement personnels qui me tenaient à coeur. Voilà la vie que je souhaitais.
Hélas, le Destin est parfois cruel.C'était pourtant lui qui, quelques années auparavant, m'avait ouvert la voie de la raison et de mon indépendance mentale en m'initiant à Internet, et grâce à cet outil j'avais pu trouver ma fiancée et mon orientation de base pour l'IUFM. Vraiment, et c'est sûrement bête pour vous de lire ça, mais je devais beaucoup à Internet. Car même si Internet n'est pas une fin en soit, il permet de s'ouvrir à des horizons que même une vie entière ne permettrait pas de découvrir par des moyens standards. Hélas, c'est aussi Internet qui causa ma perte. Car j'avais désormais attaché beaucoup trop d'importance à cet outil, au point de posséder maintenant deux vies: d'un côté Benoît, étudiant heureux en couple, toussa... Et de l'autre côté, BigBeuBeu, qui malgré son nom stupide était presque aussi réel et plaisant à vivre que le premier. Grossière erreur en fait de vouloir en abuser, car vu la situation actuelle, Internet avait réussi son rôle à merveille et pouvait désormais redevenir une simple activité ludique pour Benoît... Les médias parlent souvent de la Cyber-dépendance, mais dans le cas présent le terme était plus qu'approprié. J'étais trop en confiance, je pensais que je vivais un rêve éveillé qui ne finira jamais, avec mes convictions inébranlables et mon amour plus fort que n'importe quoi. Je pensais même que je pouvais continuer de faire vivre à la fois Benoît et BigBeuBeu à la fois, au grand dam de ma fiancée... C'est lors de l'anniversaire
(un an) de notre première rencontre IRL que le verdict tomba: l'amour grandissant en moi chaque jour était propotionnellement inverse à la force de ses sentiments, jusqu'à ce que l'amour infini que je lui portais soit totalement contraire à la totale indifférence et la lassitude que je lui inspirais. J'avais été bien trop négligeant avec elle, car je croyais notre amour éternel... Et il aurait pu le rester si j'avais fait attention à ça, mais non... Ironiquement la raison de cette rupture était simple et formelle, bien que le mot soit extreêment pourri: geekage. Je n'arrivais pas à faire l'impasse sur ma vie sur Internet, au point de l'avoir négligé, elle qui... Et elle partit, pour ne plus jamais revenir... À partir de cet instant, et à jamais, je me suis considéré comme un monstre. Car c'était le mot juste, car seul un vrai monstre pouvait transformer un amour si fort, l'amour qu'elle me portait, en une complète aversion de mon être... Ce jour restera gravé dans ma mémoire comme la mort de Benoît H. autant que celle de BigBeuBeu. Anecdote rigolote, pour oublier cet incident je changeai de pseudonyme Internet: BBB était mort, Elthaim pouvait et devait reprendre la relève, seul... à tout jamais.
Pourtant, une lueur d'espoir continuait de scintiller non loin. C'était bien sûr, car malgré le fait d'avoir perdu ma source majeure de motivation à exister, il en restait une, mineure certes, mais c'était mieux que de devoir tout repartir à zéro: mon avenir professionnel. Et avec un peu de chance en réussissant dans ma vie grâce à ça, j'avais peut-être une chance de la retrouver plus tard. Mais encore une fois le Destin n'avait pas encore terminé son travail. Déjà que la qualité de mon travail suite à cette rupture était en très nette baisse, si je ne réussissais pas à passer la 1ère année de DUT, ça en était fini. J'avais un cours assez particulier qui n'entrait pas dans le programme standard d'Informatique: le cours d'Expression.
L'utilité dans ce cours résidait à apprendre les ficelles et les généralités sur le monde du travail. Vers la fin de l'année, et plus précisément près d'un mois après cette rupture, le professeur d'Expression, que j'estimais beaucoup de par ses conseils avisés et sa bonne humeur contagieuse, nous avais demandé comme exercice de faire une lettre de motivation pour un employeur. Devant la singularité de mon parcours, car après touit je n'étais là que pour faire mes 3 ans d'études pour l'IUFM, je demandai alors au professeur si je pouvais changer la fin du thème de l'exercice: au lieu d'envoyer cette lettre à un employeur lambda d'une entreprise quelconque, je lui demandais alors si je pouvais faire en sorte que ma lettre soit à destination du jury de l'IUFM, ce qu'il accepta. J'ai alors mis tout mon coeur et toute mon âme à faire cet exercice, comme pour prouver à moi-même qu'en ayant foi en moi, je pouvais encore réussir malgré ça. Lors de la correction des copies la semaine suivante, le petit commentaire du professeur fut le suivant:
"Sincèrement moi un professeur pareil, je ne lui confierais jamais mes enfants...!"
Cette remarque n'avait pas agi comme si quelqu'un avait remué le couteau dans la plaie, non... C'était une véritable mise à mort de tout ce à quoi j'aspirais. Je crois que j'ai manqué de pleurer en plein cours, tout comme j'aurais aimé avoir suffisamment de cran soit pour contester de vive voix cette remarque, soit pour partir de cete pièce dans la seconde qui suivit. Mais je ne put que rester silencieux en feignant l'approbation envers ce professeur... Non pas que sa réponse me convenait, mais que mon esprit venait d'être tué une nouvelle fois...
Finalement je ne suis pas retourné le lendemain en cours, et dès lors que je repris le même shéma tactique que l'année précédente: suivi d'un cours de 8h à 10h, avant de partir faire la tournée des magasins en ville jusqu'à midi... Comme quoi le passé aimait se répéter lors des tournures les plus blessantes pour nous. Finalement je ne me présentai qu'à même pas la moitié des examens de matière du second semestre, et je venais de perdre à nouveau une année... Non, je venais de perdre en vérité le but de mon existence, définitivement.
La Légende raconte qu'un jour, un jeune garçon avait héroïquement grimpé sur le toît de la maison familiale en plein jour comme pour se prouver que malgré tout, plusieurs mois après ces deux incidents, il vivait encore. Mais les Légendes sont faites pour ne jamais être prises au sérieux, et ainsi les spectateurs lambda à la scène prirent ça pour une tentative de suicide et appelèrent les Pompiers... Finalement après leur arrivée et une longue négociation entre le concerné, ses parents et les Forces de l'ordre, il fut recommandé que le sujet aille tout de même voir un médecin à l'hopital psychiatrique du coin. Cette Légende en vérité racontait la rencontre entre Elthaim et ses troubles psychiatriques, que du bonheur...
Schyzophrène, le verdict était tombé au bout de dix mois de consultations mensuelles avec une psychiatre reconnue. La nouvelle était vraiment dure à avaler, du moins pas autant que le lourd traitement que je me tapais depuis des mois. Paratrait-il que ça calmerait mes pulsions suicidaires et faisait baisser mes angoisses. Je ne peux pas rétorquer que la première option était éronnée, vu que j'ai finalement annulé mon plan d'aller la retrouver devant chez elle pour lui souhaiter un bon anniversaire avant de mettre fin à mes jours, mais passons... Pour les angoisses par contre, ça ne fonctionnait pas du tout, c'était une évidence. L'autre évidence était l'affirmation que dans mon état, il était clairement impossible pour moi de continuer mes études ou autres, à cause de la lourdeur du traitement sur mon organisme, ainsi que mon incapacité de mémorisation et de réflexion, étant donné que le flot de mes pensées était focalisé sur elle, et seulement elle... Enfin c'était le constat que je dus admettre quand j'ai échoué à entrer dans la vie active après six mois de programme de réinsertion au sein d'un organisme, ainsi que pas moins de quatre stages en entreprise informatique dans le pur style SAV d'arrière-boutique. En vérité à ce que j'ai pu constater, ce n'était pas que l'envie était inexistante, que j'en était incapable, non... Juste qu'en stage j'étais parfaitement dans l'impossibilité de me rappeler des informations importantes émises par mes tuteurs la veille, tellement ma mémoire était saturée, mes pensées profondes centrées sur rien d'autre qu'elle. Après un an de battement, j'ai même réessayé de repartir dans la Biologie, vers un nouveau cap, dans une nouvelle ville, dans une autre région: DUT Biologie à Caen, rien que ça. L'histoire raconte qu'après trois crises de nerfs, de pleurs, deux malaises vomitifs et toujours face à l'incompréhension totale du programme de première année, notre homme a abandonné après seulement quatre semaines en internat là-bas...
Encore un an de battement, où les consultations de psychiatre s'enchainaient et que le seul truc qui rythmait ma vie était désormais ma prise journalière de médicaments anti-anxyolitique, anti-dépresseur et hypnotique... Finalement dans cet état, la seule chose que j'étais encore capable de faire était de surfer sur Internet, encore et toujours, avec toute l'ironie du monde face à la célèbre toile mondiale qui m'avait arraché ma dulcinée. Mais grâce au soutien familial et amical restants, j'ai réussi à me mettre en tête de tout oublier, encore un fois un an plus tard. J'avais finalement tout jeté: photos, cadeaux en tout genre, tout objet dans ma chambre capable de me faire rappeler cette mésaventure y passait, sans exception aucune. À croire que la prise de traitement avait cette fois été bien dosée, et que j'avais su trouver les mots justes pour me convaincre moi-même, j'allais mieux, et c'était le principal. Trop d'abstinence était mauvais pour mon futur, et poussé par mes parents je faisais chaque jour de la semaine le voyage jusqu'à Rouen pour reprendre des cours d'informatique axés sur la programmation et la maintenance informatique. Malgré mes appréhensions et mes doutes toujours présents, je reprenais mine de rien du poil de la bête, m'acharnant à comprendre les cours malgré ma base logique théorique esquintée, et réussissant à faire ami-ami avec douze des quinzes autres apprentis de cet atelier de six mois, mes collègues en quelque sorte. Cela faisait trois ans suite à cette rupture douloureuse, il était temps de reprendre un nouveau départ...
Hélas, trois fois hélas, je pense me répéter une nouvelle fois, mais le Destin est définitivement une garçe. Sensiblement en pleine forme physique, mais à peine remis d'un trauma de trois ans, un beau jour de Février, l'outil du Diable MSN Messenger reçut un message pour le moins incroyable: cette femme, mon ancienne fiancée en vérité, avait osé reprendre contact avec moi... La vie n'est qu'un éternel recommencement, il faut croire. Trois ans. Trois longues années se sont écoulées depuis cette sentence horrible, depuis ces adieux forcés, et maintenant... Et maintenant ça. Et le pire dans tout ça, c'était que j'ai commençé à lui répondre comme si de rien n'était, comme si elle était une simple amie de longue date à qui je n'avait pas discuté depuis un petit moment. Et ce moment, il l'avait tant attendu, en vain. Alors pourquoi maintenant...? Apparemment son fiancé a rompu avec elle le jour de la Saint-Valentin, grosso modo il n'y avait même pas deux semaines de cela. On s'est remis à parler du coup comme au "bon vieux temps" , et finalement dans un accord commun nous avions décidés de retourner ensemble, car oui je l'aimais toujours, et sa subite réapparition ne pouvait me laisser indifférent... Mais en fait j'aurais du, car cette seconde relation ne dura qu'à peine un mois officieusement, car elle doutait d'elle, et était complètement dépressive à ce moment à cause de sa précédente rupture. Mais officiellement c'était autre chose, elle avait "juste" repoussé la date de notre rencontre, et à un moment a demandé une pause, ce que j'ai compris vu son état psychique. J'étais tout de même heureux, bien qu'inquiet, de savoir qu'elle était à nouveau mienne, et que je ferais tout cette fois pour la protéger et la garder. Erreur fatale, car trois mois plus tard, lorsque je lui ai un jour demandé bêtement jusqu'à quand elle comptait continuer cette "pause", elle rétorqua avec un:
"Pfff t'es bête toi, t'avais pas compris que par pause j'entendais évidemment par là qu'on sortait plus du tout ensemble ?"
J'étais... estomaqué... Encore une fois, tout ça pour rien, je m'étais fait avoir en beauté, de nouveau... Alors toutes les fois où j'ai chanté au téléphone pour la rassurer de ma présence et de mon soutien, toutes les fois où j'ai angoissé pour son état de santé, toutes les fois où j'ai uniquement pensé à elle au lieu de me concentrer sur le travail en cours, quitte même à foirer mon stage en entreprise d'un mois que mon propre père avait dégôté à son usine où il travaille, à foirer à nouveau ces six mois d'apprentissage dans l'informatique à cause de mon moral en chute libre vers la fin, tout ce souci pour... revivre exactement la même chose qu'il y a 3 ans... Tout perdre alors qu'on a l'impression que tout va à nouveau pour le mieux, tout perdre... Tout ça pour rien.
Après l'annonce officieusement officielle de cette rupture et vu le retour de mon état de zombie aux hormones, il en fallu que peu de temps pour décider à ma psychiatre pour m'octroyer le statut, officiel cette fois, de travailleur handicapé et ma reconnaissance comme quoi mon traitement est trop lourd pour apprendre et/ou travailler... Retour à la case Départ d'un côté, mais je suis quand même passé par le bonus "Touchez 20.000 Francs" bizarrement, ma psychiatre ayant reçu l'aval du conseil des médecins pour que je puisse recevoir une aide financière de l'État étant donné que j'allais sûrement remettre très longtemps avant de pouvoir travailler ou avoir une formation qualifiante adaptée à mon handicap sévère. Cerise sur le gâteau, pendant près de deux ans j'ai du fréquenter ce qu'on appelle un "Hôpital de Jour" , à savoir un endroit où des infirmières spécialisées reçoivent des patients tels que moi pour les aider à aller mieux, à trouver des moyens de s'en sortir, et aussi pour occuper leurs mornes journées à rien foutre. J'étais largement le moins atteints parmi les patients, ce qui me rendait souvent mal à l'aise quand on est obligé de fréquenter all day des
cas particuliers, si je puis dire... Entre temps, entre mon entrée à l'hopital de jour et le mois de Décembre dernier, la relation amicale que j'essayais en vain d'entretenir avec mon ex allait en s'amenuisant. Plus le temps assait, et moins elle accordait d'importance à ma personne, se reconstruisant une nouvelle vie, avec de nouveaux amis, dont je ne faisais potentionnellement pas partie. J'ai eu confirmation de ce doute quand l'année dernière, toute possibilité de contact internétique comme téléphonique entre elle et moi était désormais impossible, tout avait été rompu, à tout jamais... Jamais deux traumas sans trois, fallait-il conclure.
Néanmoins même si cette sensation de vide me pèse encore aujourd'hui, je sais très bien que tout comme je "fêterais" seul et moi-même ce drôle d'anniversaire d'ultime rupture, ça sera encore le cas les années suivante,s sans discontinuité. mais finalement, que s'est-il passé en un an, désormais ?