Retour au turbin [PV : Samael]

Alan entrouvrit les yeux, allongé sur son lit à côté de Kwendal. L'heure était déjà bien avancée. De toute façons, pour un prisonnier à vie, le temps n'avait plus d'importance. Plus rien n'avait d'importance...

Il soupira puis se leva et descendit l'étage non sans une certaine lassitude. Il n'était dans cette maison que depuis trois jours et déjà il n'avait plus aucune motivation. Il était prisonnier de cette maison. Sortir était risqué car si on découvrait qu'il était Beorc, il serait exécuté sur le champ. Et quand bien même il parviendrait à quitter Goldoa, il devrait traverser Gallia (ce qui était tout aussi risquer) pour arriver en territoire Beorc où il serait accueilli par un mage pété de pouvoirs qui l'enverraient chez les nobles corrompu où il serait accueilli avec en guise de présent une magnifique cravate.

Eve l'a déposé dans cette maison où il vit avec Kwendal et deux autres dragons qui sont le frère et l'ami d'enfance de celle-ci. Et il n'était aimé d'aucun des deux hommes. Il ne devait sa vie sauve qu'à Kwendal qui a clairement affiché avoir besoin de ce pauvre Beorc qui ne valait plus rien, mais ça s’arrêtait là. Dès le premier jour, Alan s'était retrouvé avec une belle blessure à la jambe. C'était guéri désormais, mais le message était passé. Bon après tout, il n'avait rien fait pour éviter de se faire estropier ainsi : il s'était laissé faire et avait même demandé la mort.

Mais finalement, il ne pouvait pas partir comme ça : Kwendal ne le supporterait pas. Seule solution, donc, rester en vie et passer ses journées avec pour seule occupation l'entretien des armes et de la maison. Il était redevenu esclave en quelque sorte, la différence étant qu'au lieu de coup de fouets, il avait des calins et bisous de Kwendal et des regards assassins des deux autres.

Le déjeuner était prêt, Alan posa le plat sur la table et prit sa part de viande cuite apporté par son amour.

Quand il y réfléchissait, c'est depuis sa rencontre avec Kratos, et donc son insertion au sein d'Aurora, que tout a dérapé. A chaque combat il perdait quelque chose. Pour commencer son arme, son amour et la moitié de son âme, puis il a réussi à retrouver Kwendal, mais celle-ci n'était plus vraiment la même : l'ancienne elle refaisait surface. Et récemment, un coup dur : il perd son statut de Beorc innocent et se retrouve en quelque sorte banni de ses terres, loin de sa maison. Il a perdu sa vie...

Voici donc la situation : Alan ne pouvait plus sortir et donc se battre et il était dépendant de Kwendal et des deux dragons. Pour ce qui était d'Aurora, il ne pouvait plus leur servir désormais... de toutes façons, il n'avait plus la motivation de se battre : qui sait ce qu'il risquait de perdre la prochaine fois ? De toutes façons, c'était soit la vie, soit Kwendal et l'un comme l'autre du résultat les perdrait tous les deux : si Alan mourrait, Kwendal ne le supporterait pas et se suiciderait et vice versa.

Et bien sur, étant prisonnier, il ne pouvait pas tenir la promesse faite à Armedor. Alan sortit Alondite et regarda ses yeux verts de chien battu dans le reflet de la lame.

<< Je suis vraiment qu'un incapable. Qu'est ce que je fous avec une arme que je ne mérite pas en main ? >>

Il rengaina l'arme et regarda son assiette sans y toucher. Il avait perdu l'appétit depuis qu'il était ici. Il ne mangeait guère plus qu'une demi-bouchée par jour. S'il prenait plus, il rendait tout dans la seconde qui suivait. Cet état n'était pas sans inquiéter Kwendal. Elle dormait encore dans le lit qu'Alan occupait il y a quelques minutes. Quand aux deux autres, l'épéiste ne voulait pas savoir où ils étaient...

-Pardon? Tu veux que j'aille à Goldoa? Dois-je te rappeler que je suis un marqué et ce que cela implique?
-Je suis désolé Samael, mais tu es le seul qui serait capable d'y aller présentement.
-Cela fait trois ans que j'ai abandonné la voie de l'épée je te rappel, je me contente de sauver à présent.
-Justement, je pense que tu serais le seul capable de ramener Reflet d'Argent...

le silence s'installa subitement dans la pièce, Samael, un verre d'alcool à la main avait subitement une envie de rire monstrueuse. Aller sauver quelqu'un à Goldoa? Cela était du suicide, de plus l'homme en question ne donnait plus de nouvelles de son propre chef. Il bu une gorgée d'alcool et reprit avec calme.

-Je ne sais pas ce qui t'est passé par la tête ces quatre dernière années Eve mais il est hors de question que j'aille récupérer quelqu'un qui a fuit son devoir. Je ne suis pas une nourrice, mon rôle n'est pas d'aller chercher les enfants égarés. De plus à ce que je sais de lui il a été assez doué pour céder à ses pulsion de destruction...
-N'as tu pas toi aussi obéis à tes pulsions par le passé?
-Ne me compare pas à un mercenaire, je n'ai jamais tué sans raison valable, je n'ai jamais cédé à mes pulsion destructrices.
-Alors qu'est-ce qui est arrivé à l'ancienne impératrice?
-Par amour... de toute façon cette discussion est stérile, et j'ai besoin de prendre quelques risque donc bon... j'aurais juste besoin d'indications et d'un bâton de téléportations, après tout pendant quatre ans je ne t'ai pas aidé...
-Le bâton est dans le coffra à l'angle de la pièce et les documents sont sur le bureau. Je pense que je vais te laisser à présent. Et au fait... Merci.

Elle s'était retourné avant de lui adresser un remerciement auquel il répondit d'un grognement bourru. A vrai dire, des remerciement ne lui étaient pas particulièrement utiles dans ce genre de cas, il n'en avait même jamais voulu mais il se devait bien d'agir ainsi. Après tout n'avait-il pas créé le rève d'Aurora avec elle? Encore une fois il devait reconnaitre qu'elle avait tout prévu, à présent qu'il était lancé il ne souhaitait pas s'attarder et il tenait à s'occuper de cette affaire le plus vite possible. Le prêtre avait d'autre préoccupations qui lui semblaient bien plus importantes qu'un simple individu. Le sénat de Beignion l'inquiétait, Tellius lui semblait une fois de plus sur le point de basculer dans le chaos. Et cette histoire de Black Fang était des moins sympathiques. Prenant son verre ainsi que la bouteille quasiment pleine, il se posa au bureau et commença son étude des lieux. Rien de bien étonnant, mais les dragons resteraient toujours un problème de... taille. S'il avait eu Anoroer avec lui il ne se serait pas fait de souci, cette lame en ses main accomplissait des miracles que même les lames sacré Alondite et Ragnell ne pouvaient faire... C'était une lame de templier après tout...
Mais il n'était pas question d'user de la violence, cela serait proche du suicide à vrai dire... Cela était proche du suicide. Il vida son verre tout en continuant d'analyser la situation. A vrai dire cela dura environ une heure avant qu'il ne décide de la marche à suivre. Le déploiement de magie serait forcément repéré par les dragon, son sang aussi. De plus un humain parmi les dragons... Avec un peu d'audace et de culot il arriverait à parvenir à son but si la chance ne lui en voulait pas. Un petit sourire se dessina sur son visage tandis qu'il passait sa main dans les poils drus qui commençait à lui faire un barbe discrète mais remarquable. Cela devait bien faire une semaine qu'il ne s'était pas rasé...

Il se leva et se dirigeât au centre de la pièce, la sphère ajouté à son bâton qu'il tenait dans sa main droite tandis que dans sa main gauche il tenait le bouteille d'alcool. Il récita d'abord une prière de puissance adressé à Yune, les filaments noirs typiques de sa nature magique se déployèrent alors le rendant plus vif, plus agile et fort. Il n'avait pas de temps à perdre et récita une prière de voyage. la magie l'envahit alors et quelques instant plus tard il avait disparu.

**

Il apparu dans un village de Goldoa, un regard rapide lui permit de voir que l'endroit n'était pas particulièrement grand pour un village de dragon, plutôt l'inverse même. Il remarqua aussitôt que tous les regards étaient braqués sur lui mais son entrée en scène avait eu l'effet escompté. 2tait-il fou ou bien ivre ou alors était-il dans son droit? A par lui nul n'aurait pu le dire. D'un pas décidé il se dirigea alors vers l'endroit que lui avait indiqué Eve, il bu une gorgée d'alcool pour lui donner du courage, car même s'il n'en avait pas l'air il était particulièrement inquiet. Il aurait presque regretté ses acte si la mort n'avait pas été une vieille amie pour lui. Il arriva au bon endroit, il se trouvait pret à ouvrir la boite de pandore lorsqu'un dragon s'adressa à lui.

-Qui êtes vous pour être venu ici?
-Pardonnez moi mais vous êtes Nämir?
-Oui c'est... Comment!?
-Quelle chance que le premier nom que je donne soit le bon!
-Vous... qui êtes...

Samael n'avait laissé le temps au dragon que de dire quelques mots, juste le temps pour boire encore une gorgée d'alcool. Déjà son bâton volait dans le ventre du laguz avec une vitesse et une force inhumaine c'était le cas de le dire. Il avait frappé de toute sa puissance, étant sur qu'il ne blesserais pas mortellement le dragon. Son coup était parfait, son "adversaire" vola immédiatement contre la porte et la fracassa en s'écrasant contre celle ci. La tension était monté d'un cran, à présent il n'avait plus beaucoup de temps avant de mourir. Flirter avec la mort, voilà quelque chose qui lui manquait.
Ne se préoccupant pas de ce qui se passait dans son dos il pénétra dans la maison. Après un coup d'œil bref à l'intérieur, il pu voir qu'il n'y avait que deux personnes. Le fameux Nämir qui était complètement sonné et un humain, "son" humain. Il s'accouda dans l'embrasure de ce qui il y avait encore quelques minutes était une porte, bu encore une gorgée d'alcool et s'exprima d'un ton désinvolte à l'adresse de l'épéiste.

-Plies tes bagages gamin, la cavalerie est arrivé pour te récupérer. Donc prend tes clics et tes clacs qu'on parte d'ici avant que le templier éternel soit renommé le rôti éternel.

Après toutes ces années passées au calme et à l'ascèse, Samael reprenait son énergie d'antan, à cinquante sept ans il était encore jeune...

Un gargouillis se fit entendre de mieux en mieux tandis que son estomac se contractait. L'instant d'après, le sol fut inondé de glaire dans laquelle macérait un morceau de viande. Il n'y arrivait pas, même en se forçant, il ne pouvait pas manger, signe qu'il n'allait vraiment pas bien psychologiquement. Après tout, il avait tout perdu. Il ne restait de lui qu'un corps, une âme torturée, deux armes dont il ne se servirait peut être plus jamais et son amour torturé pour Kwendal. Tout le reste à volé en éclat, petit à petit : les Beorcs le considèrent comme un criminel traitre à sa race, il ne pouvait plus rentrer chez lui et il n'avait plus de « Beorc » que sa race.

Alan resta ainsi à regarder le répugnant liquide dont l'odeur donnait un nouvel haut de coeur, mais comme il avait déjà tout rendu ce n'était guère grave.

Derrière lui, un bruit de casse se fit entendre et Nämir tomba en défonçant la porte. Il était complètement out.

Alan remonta la tête pour voir qui était l'agresseur. Il portait un bâton de prêtre, une tenue noire et n'était pas rasé Dans son autre main, on voyait une bouteille d'alcool. Par réflexe, Alan posa ses mains sur les gardes de ses épées, mais il n'avait nulle envie de dégainer : il avait perdu le goût du combat depuis qu'Eve l'avait abandonné dans cette baraque en le laissant se morfondre.

<< Plies tes bagages gamin, la cavalerie est arrivé pour te récupérer. Donc prend tes clics et tes clacs qu'on parte d'ici avant que le templier éternel soit renommé le rôti éternel. >>

« Le templier éternel » ? Ce poivrot ? Nan mais il se foutait de sa gueule ! Comment un type comme lui pourrait être le co-fondateur d'Aurora ? D'ailleurs, où était son épée ? Un templier se bat avec une lame, pas avec un bout de bois dont la principale fonction est de soigner !

Quoi qu'il en soit, un coup d'oeil derrière l'individu fit comprendre à l'épéiste que le « rôti éternel » finirait en compagnie du « reflet cendré » s'il ne se bougeait pas.

<< Ah bah bravo. Et où je vais aller maintenant que mon dernier refuge n'est plus ? >>

Alan se leva et contourna la flaque de gerbe pour grimper à l'étage. Kwendal était réveillée et elle semblait avoir deviné ce qui se passait car elle avait son sac sur le dos et celui d'Alan dans ses bras.

<< J'ai tout entendu.
- Tant mieux, ça nous fera gagner un peu de temps. >>

Il prit son sac et réfléchit à la vitesse de l'éclair. La fenêtre n'était pas une bonne issue : il n'y avait rien en bas pour amortir la chute et Kwendal ne pourra pas se transformer. Il n'y avait donc pas le choix : redescendre en bas et prier pour que le templier aie un plan.

Mais pourquoi venaient-ils le chercher ? Alan ne servait plus à rien : il ne pouvait plus se déplacer librement en territoire Beorc et il n'avait plus la motivation nécessaire pour combattre. Il n'était plus rien désormais...

C'est donc lentement qu'il redescendit les marche, le bras tenu par Kwendal qui était inquiète, dans son dos. Alan regarda le templier avec un air blasé.

<< Vous venez pour m'achever ou bien y a-il une raison particulière pour que vous détruisiez mon dernier refuge ? >>

Si cet homme était assez bien informé sur la situation, il savait qu'Alan ne pouvait pas retourner en territoire Beorc sans se retrouver face au mage pêté de pouvoir de l'autre fois. En quoi une tour encerclée par diverses pièces adverses et auquel le moindre mouvement sera fatal pouvait servir ?

Ou il irait une fois son dernier refuge détruit? Lui n'aurait pas appelé ça un refuge mais plutôt une prison, le genre d'endroit ou l'on finissait à croupir sans rêves, sans espoirs, sans volonté... Bref le genre d'endroit qui détruisait un homme bien plus efficacement que tout autre chose. Décidément, quel homme ennuyeux. Il lâchât un soupir alors que celui ci montait en haut, sans doute afin de prendre ses affaires. Décidément, la situation était des plus gênantes. Heureusement qu'il avait la possibilité de se téléporter. Les dragons du village commençaient à se rassembler autour de la maison, juste devant l'embrasure de la porte. Samael commençait à penser que s'ils enflammaient la maison il pourrait fuir avec l'autre idiot sans trop de peine. Mais il doutait que ces laguzs soient assez stupide pour provoquer une telle destruction dans leur propre village. Non, leur action la plus logique et efficace serait de les prendre vivants. L'épéiste avait perdu son énergie au combat et lui... n'était pas dans sa meilleurs condition pour combattre.
Un coup d'œil rapide au laguz gisant à terre lui donna la solution. En trois secondes il s'était jeté sur lui et l'avait redressé. Le ceinturant d'un ras ferme pour l'empêcher de bouger ou de s'effondrer, il plaçait l'extrémité de son bâton sou la gorge dans un geste clairement menaçant, signalant à quiconque approcherait que le dragon aurait de graves problèmes de santé à l'avenir. Un sourire navré se dessina sur son visage tandis que ses yeux pétillaient de malice.

-Désolé très chères camarde, mais afin d'assurer ma sécurité ainsi que celle de celui que je suis venu chercher je me dois d'agir ainsi... Mais rassurez vous, je n'emmène que ceux qui désirent me suivre.

L'épéiste venait de descendre avec son "amie". Une pointe naquis alors dans les yeux du prêtre alors qu'il constatait cela. Emmener une personne sans aucune préparation n'était pas des plus difficile. En emmener deux serait une autre pair de manche, il allait devoir faire une pause dans un endroit calme car il ne pourrait aller bien loin autrement. Le discours de l'épéiste eu encore une fois le don de l'exaspérer, s'il avait pu se le permettre il lui aurait collé une droite afin de lui remettre les idées en place. A ce qu'il savait de lui l'homme en question n'avait rien fait de véritablement problématique. Il poussa un sourire tandis qu'il se rapprochait des deux protagonistes, observant toujours les dragons d'un air méfiant, menaçant.

-Si ça ne tenait qu'à moi je t'aurais laissé crever dans ce trou... Mais trêves de bavardage, ça va être difficile pour moi d'aller bien loin avec cette donzelle en plus.

"Au déesse discordant du chaos, vous qui incarnez la fortune du destin, permettez à votre humble serviteur de voyager par delà les limites physiques en emportant avec lui deux voyageurs, permettez leur de se retrouver en une terre isolé..."

Une prière sans véritable formule, récité en ancien langage. Il était clair que nombre de dragons l'avaient compris et qu'à présent Samael avait vraiment de quoi se faire un sang d'encre s'il s'éternisait trop longtemps ici. Des filament de magie pure, sombre et tentaculaire apparurent alors, enveloppèrent les trois individus qui commencèrent à se dématérialiser. D'un coup de botte il dégagea son otage tandis qu'il disparaissaient.

**
Goldoa, cinquante kilomètre plus loin, en pleine foret.
Tout à coup, dans la pénombre touffue des arbres, une magie sombre se fit sentir, tous les animaux proches prirent la fuite tandis que trois silhouette apparurent. L'une d'elle tenait un bâton et la magie provenait de lui. Il fit quelques pas, s'étira quelques secondes tandis qu'un large sourire se dessinait sur ses lèvre. Samael posa alors son bâton se retournant vers l'autre homme.

-Au fait Alan...

Faisant preuve d'une détente hallucinant il envoya un uppercut dans la tête de l'homme.

-Le corps tout comme l'esprit est faible chez toi...

Le prêtre se servait de Nämir comme bouclier afin de s'assurer la vie sauve. Kwendal avait inspiré de surprise et serrait le bras d'Alan devant cette scène.

<< Si ça ne tenait qu'à moi je t'aurais laissé crever dans ce trou... Mais trêves de bavardage, ça va être difficile pour moi d'aller bien loin avec cette donzelle en plus. >>

Justement, il aurait été préférable qu'il le laisse « crever dans ce trou », ça aurait évité bien des emmerdes.

Des liens sombres surgirent autour du prêtre, Alan et Kwendal. Etouffant une exclamation de surprise, il se sentit se décomposer. Ca empestait le chaos à plein nez, comme si un truc maléfique avait lancé le sort. Petit à petit il sentit son étreinte sur Kwendal se refermer sur du vide avant que son bras ne disparaisse à son tour.

Puis ce fut les ténèbres...

Une grande bouffée d'air accueilli son retour à l'air pur. L'épéiste retrouva l'usage de son corps et sentit le bras de Kwendal dans sa main.

<< Au fait Alan... >>

Un violent choc au menton lui fit voir des étoiles tandis qu'il vola au loin, lâchant Kwendal sur le coup. L'épéiste atterrit sur un sol dur tapis de feuilles mortes.

<< Le corps tout comme l'esprit est faible chez toi... >>

Le jeune homme tourna sa tête sur le côté et cracha un peu de sang dans laquelle baignait une dent. Il sentit Kwendal courir vers lui. Alan s'assit par terre et lança un regarde venimeux au prêtre noir.

<< C'est justement pour ça que je me demande pourquoi vous êtes venu me chercher. Je ne vaux plus rien pour Aurora. A quoi sert un chien une fois qu'il est entravé par une laisse et une muselière ? Même si je le voulais, je ne pourrais plus vous aider ! Il suffira que je me montre en territoire Beorc pour que ce mage feu se jette sur moi pour me rôtir ! Quitte à finir en tas de cendres, j'aurais préféré que ça soit de mon plein gré ! Alors, qu'est ce que vous attendez d'un homme inutile comme moi, hein ? >>

S'il avait encore la force de se battre, Alan se serait probablement relevé et aurait dégainé ses armes pour foutre une rouste au prêtre. Mais là, ça lui semblait aussi utile que de cogner un mur à mains nues.

Le regard que l’épéiste lui jeta était meurtrier, le genre de regard qui avait tendance à amuser Samael. Après toutes ces années il avait été habitué à ce genre de regards et, ceux-ci n’étaient pas les pires loins de là ; le regard plein de haine de celui qui voit l’un de ses proches mourir par cotre faute était bien plus douloureux, le regard de l’homme qui vous supplie tout autant. Ce n’était pas le regard de l’homme mécontent qui allait embêter Samael. Il se demandait pourquoi Eve tenait à le récupérer, mais si elle lui faisait confiance, il se devait d’en faire de même. Mais il allait d’abord remettre les idées en place à ce jeune idiot.
Une fois le monologue du garçon terminé il lâcha un soupir exaspéré tandis qu’il avait commencé après avoir ramassé son bâton à tracer un cercle de prière sur le sol.

-Voilà pourquoi je dit que l’esprit et le corps son faibles chez toi. Tu te laisses aller et t’enfonce dans l’autosatisfaction de celui qui est malheureux, tu refuses de continuer à combattre l’absurdité de ta vie. C’est de la complaisance que de se conduire ainsi. Après tout, tu as juste ta tête mise à prix et un mage décidé à te tuer. Ce n’est pas comme si tout un continent en voulait à ta peau.

Il ne pu s’empêcher de ricaner à ses paroles car lui, était un homme que la majeure partie du continent aurait souhaité voir mort, lui-même aurait préféré être mort plutôt que vivant. Mais il ne pouvait se le permettre.

-Tu n’es pas encore mort, de plus ce n’est pas à toi de choisir l’heure de la mort. Personnellement, je n’attend strictement rien de toi, je n’attend rien des autres. Mais voir quelqu’un plein de d’autosatisfaction m’insupporte, comment peux tu dire que tu aurais préféré mourir la bas plutôt qu’ici ? Ne pense tu pas que c’est trop facile ? Que se laisser ainsi faire est particulièrement pitoyable ?

Il délaissa alors son ouvrage et plaqua au sol Alan d’un coup de botte tandis qu’il appuyait la pointe de son bâton sur la gorge de l’épéiste. Son regard était devenu meurtrier, ce qui contrastait avec sa voix doucereuse.

-Si tu veux mourir très bien, étant prêtre je m’en occuperais, je pourrais même accueillir ta confession. Par contre ce sera douloureux… Ca te tente ?

Le prêtre avait commencé à tracer un cercle sur le sol. Alan ne bougeait pas, toujours avec Kwendal à ses côtés.

<< Voilà pourquoi je dit que l’esprit et le corps son faibles chez toi. Tu te laisses aller et t’enfonce dans l’autosatisfaction de celui qui est malheureux, tu refuses de continuer à combattre l’absurdité de ta vie. C’est de la complaisance que de se conduire ainsi. Après tout, tu as juste ta tête mise à prix et un mage décidé à te tuer. Ce n’est pas comme si tout un continent en voulait à ta peau.
- Tu n'as pas du voir la prime sur ma tête. N'importe qui en manque d'argent, voire avec une situation stable, irait aiguiser sa fourche pour me pourchasser exprès pour la somme que je rapporte. Et puis, ce mage feu semble capable de savoir où je suis et s'il peut venir m'abattre sans se faire déranger... >>

Samael avait ricané une fois sa phrase achevée. Un rire plein d'ironie...

<< Tu n’es pas encore mort, de plus ce n’est pas à toi de choisir l’heure de la mort. Personnellement, je n’attend strictement rien de toi, je n’attend rien des autres. Mais voir quelqu’un plein de d’autosatisfaction m’insupporte, comment peux tu dire que tu aurais préféré mourir la bas plutôt qu’ici ? Ne pense tu pas que c’est trop facile ? Que se laisser ainsi faire est particulièrement pitoyable ?
- Des actes pitoyables pour un être pitoyable, n'est ce pas normal ? >>

Le prêtre noir interrompit son oeuvre et plaqua Alan au sol avant de pointer son bâton sur sa gorge. Kwendal regarda, terrifiée.

<< Si tu veux mourir très bien, étant prêtre je m’en occuperais, je pourrais même accueillir ta confession. Par contre ce sera douloureux… Ca te tente ? >>

Gardant son calme, Alan tourna les yeux vers Kwendal puis les reporta sur Samael.

<< Ca aurait été avec plaisir mais je peux pas, j'ai une promesse à tenir... et puis, c'est pas contre les règles d'Aurora de tuer les gens ? >>

La dernière partie de la phrase était teintée de cynisme tandis que la première était plutôt axée sur un ton neutre, calme. C'est vrai que la mort lui semblait acceptable tout à coup, mais le fait est qu'il s'était résigné à une promesse faite à Kwendal : il devait rester auprès d'elle et la protéger aussi longtemps qu'il le pourrait, donc la mort ne devra pas venir à sa demande.

<< Je suis fatigué de me battre et de tout perdre petit à petit. A chaque bataille je perd un peu plus. Ca a commencé par l'épée de mon père, puis la raison, j'ai failli perdre Kwendal, je viens de perdre ma maison, ce qu'elle contenait et au passage un statut d'innocent. Mourir me dérange pas, sinon je n'aurais jamais été mercenaire, mais je refuse qu'il arrive malheur à Kwendal par ma faute. Perdre Alondite me semble bien risible à côté de ça. Enfin, retourne tracer ton cercle qu'on en finisse. >>

De toute façons, Alondite ne risque plus de lui servir. Il s'est engagé à tenir sa promesse envers Armédor et voilà qu'il est dans l'incapacité de finir son enquête. Il a tout fait pour résoudre le mystère de la soeur de ce noble, mais sans succès malgré tout. Il aurait pu y arriver s'il pouvait encore se déplacer librement. Mais avec son statut de criminel, même s'il parvenait à se rendre sur place, son contrat passe-partout n'est plus valide...

-Pfff... Tu parles de tête mise à prix? Que ferais tu si plus de la moitié du continent désirait ardemment ta mort dis moi? Car vois tu j'ai cette chance même si personne ne connait mon identité... Quand aux actes pitoyables, il ne tient qu'à toi de redresser la tête et de faire face à ceux qui te jettent la pierre. Mais trêve de bavardages.

Samael retourna à son cercle de magie, terminant de le tracer. Au final il dépenserait moins d'énergie de prévu car, après réflexion il resterait en Goldoa pour régler une petite affaire. Il enverrais donc les deux tourtereaux au quartier général d'Aurora.

-Au final vous ne me verrez pas une fois sortis de Goldoa, je dois rester ici pour régler quelques affaires .

Il récita alors sa prière et alors que les filaments de magie noir s'emparaient des deux, il jeta un regard sombre à Alan avant de s'exprimer avec une voix neutre.

-Sache que si Eve dicte les règles d'Aurora, il en est de même pour moi...

Une fois de plus, il sentit son corps se décomposer et l'aura de chaos empester l'environnement. Les ténèbres s’emparaient de lui puis le quittèrent.

Tout comme le prêtre noir l'avait prévenu, il n'y avait que lui et Kwendal qui étaient du voyage. A présent, ils étaient dans une salle bien éclairée aux murs de marbres blancs. Le sol en bois était recouvert d'un tapis fort confortable et l'ambiance imposait une quiétude presque réconfortante.

<< Bon retour en terre Beorc, Alan, Kwendal. >>

Les amants se retournaient d'un même geste, leurs joues se frôlant au final. Eve se tenait assise derrière eux, un service à thé disposé pour trois sur la table. D'un geste, elle les invita à prendre place ailleurs que sur le tapis. Ca restait une simple invitation, mais même la personne éprouvant la pire répulsion pour le thé aurait accepté d'en ingurgité s'il y était invité par Eve.

<< Votre séjour a Goldoa s'est bien passé ?
- Disons que les frères de Kwendal ont un sens de l'hospitalité peu plaisant et que votre ami a détruit le seul refuge qui me restait.
- Tu comprendras que je ne pouvais pas te laisser là-bas.
- Vous avez un meilleur refuge à me proposer ?
- Tu n'as pas besoin de refuge, Alan. Vos tête sont mises à prix, mais tu sauras gérer ça.
- Je ne peux pas imposer ce genre de risques à Kwendal ! Le travail que je dois faire pour vous impose bien trop de risques pour elle. Si on plus on se fait agresser à cause de nos avis de rech...
- Trouvez-vous une demeure à l'écart de la civilisation et installez-vous y le temps que les choses s'arrangent. En attendant, tout se déroulera comme d'habitude. Vu que tu ne pourras pas reprendre tes activités de mercenaire avant un très long moment, je te verserais une rémunération équivalente pour que vous puissiez vivre. >>

Alan soupira et but une gorgée de thé. Comme toujours, Kwendal restait le plus proche d'Alan et le plus loin d'Eve. Tous savaient pourquoi elle agissait ainsi, mais personne ne s'en offusquait.

<< Comme toujours je n'ai pas le choix... >>

Ca n'aurait servi à rien de discuter de toutes façons, ça devait finir ainsi depuis que Samael a posé les pieds en Goldoa.

La main de Kwendal alla chercher celle d'Alan et la serra. Il allait encore devoir travailler et sacrifier un peu de temps libre qu'il aurait pu passer à ses côtés. Tous deux attendaient avec impatience le moment où tout sera fini, où ils pourront passer TOUT leur temps ensemble...

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