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 [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.

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MessageSujet: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeMar 8 Mar - 19:29




CdC - Mysti de Méline
L'amour est un champ de bataille



La journée était lumineuse à Criméa. Mélior, sa capitale, résonnait des bruits du début de la journée. Les marchands sortaient leurs étales, les soldats faisaient leurs rondes sur les remparts... Mais ce jour était un jour très particulier pour une certaine personne. Un général. Car aujourd'hui, il avait décidé de déclarer sa flamme à l'élue de son cœur, l'inaccessible Elincia.

Elincia qui, en cet instant, ne profitait pas de la matinée pour faire la grasse-matinée ou autre badinerie... Elle avait un royaume à faire tourner, et en cette matinée ensoleillée, elle recevait dans la salle du trône des gens issus de tous les milieux qui venaient lui exposer leurs problèmes, dans les cas où la justice locale ne suffisait plus. Ou en tout cas elle allait les recevoir... Car pour l'instant, étaient présents dans la salle du trône avec elle Bastian et Lucia, chacun à un pas derrière le trône, et Geoffrey qui rendait un rapport à sa reine. Cette dernière était élégante dans une robe de soie blanche, assise avec dignité dans le fauteuil de sa fonction.


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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeMar 8 Mar - 21:10





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Voulez-vous m'épouser ?








"C'est aujourd'hui. Il faut que je me lance aujourd'hui."

Debout face à son miroir, Mysti s'observait dans les moindres détails, surtout la flamme dans ses yeux. Au-dehors, le temps était parfait pour enlever sa dulcinée et l'emmener chevaucher dans le bois, une fois qu'elle aurait dit oui. La veille, il avait demandé à se refaire recouper les cheveux, usés depuis quelques temps. Il avait respecté un jeûne d'une nuit complète et prié longuement. Son esprit était vide de pensées négatives et il se répétait en boucle tout ce qu'il allait lui dire, tout ce qui pourrait tourner en sa faveur.

Il procéda à une toilette minutieuse, non sans un dernier regard à la cicatrice dans son dos qui partait de l'épaule, longeait le flanc et mourait sur la hanche. Il enfila ses plus beaux vêtements, qu'il n'avait jamais eu l'arrogance de porter en public : des bottes du cuir le plus raffiné et travaillé, confortables, durables et terriblement onéreuses qu'il avait reçues jadis en cadeau d'un seigneur dont il avait protégé la forteresse. Un ensemble pantalon-chemise blanc léger, dont le col ouvrait sur un jabot de soie fine brodée, ainsi que l'ouverture des manches. Sa tunique en velours rouge à liserés dorés venait le recouvrir, ses armes visibles avec majesté sur sa poitrine droite et sculptée par la guerre. Enfin sa cape de même consistance et aux mêmes couleurs venait l'auréoler d'un halo de légèreté. Il choisit de porter des bijoux sobres : un anneau doré, sans gravures ainsi qu'un pendentif d'argent qui rappelait les reflets de son épée de verre à son côté. Il réunit ses longs cheveux noisettes en un catogan qui lui descendait malgré la coupe jusqu'au milieu du dos, avec un ruban de velours bleu pour donner une petite touche d'une autre couleur.

Fin prêt, son regard noisette s'examina une fois de plus : il n'avait jamais plus eu l'air noble et digne. Fils de haute famille, sa lignée empêchait les conseillers royaux de refuser sa demande à la reine et son état de service en faisait un soldat exemplaire. Il préférait séjourner au palais que dans sa véritable demeure, sur les terres que ses parents lui lègueraient à sa mort et qui complétaient ce qu'il possédait déjà, afin de parer à toute urgence au palais et de veiller sur sa reine, ce qui jouait en sa faveur. Les serviteurs qui s'occupaient de son domaine en son absence ne s'étaient jamais plaints et semblaient, à chaque visite, prompts à le remercier avec zèle. Ses animaux se portaient bien et tout le monde connaissait l'attachement qu'il nourrissait envers Fraise. En fin de compte, seul le cœur d'Elincia demeurait un obstacle incertain. Toutefois, ils se connaissaient depuis tout jeune. Sa nature n'avait aucun secret pour elle et il savait interpréter ses gestes aussi bien que ses paroles, réagissant ainsi avant bien des gens lorsqu'elle ordonnait. Non, il n'y avait aucune raison qu'elle refuse.


"Je dois me détendre..."

Il prit quelques minutes pour méditer et laisser son anxiété s'échapper. Il s'agissait de ne pas perdre ses moyens devant la reine. Lorsqu'il se sentit enfin suffisamment audacieux pour se rendre au palais -il imaginait la tête de Blaze en apprenant cela s'il était resté plus longtemps-, il marcha d'un pas assuré qui le mena rapidement vers le lieu désiré, sans toutefois trahir son empressement. L'effet de son apparence inhabituelle fut immédiat : serviteurs et courtisans se retournaient sur son passage et se mirent, plutôt que de reprendre leurs occupations, à le suivre, de sorte que presque tout le palais se tenait derrière lui lorsqu'il se présenta dans la salle d'audience.

Les portes s'ouvrirent en grand et il avança quand vint son tour, digne. Il remarqua ses amis aux côtés de la reine, dont les regards exprimaient l'étonnement et l'intrigue, puis Elincia elle-même sur son trône... Son cœur chavira aussitôt et accéléra dans sa poitrine. Il oublia tout le discours qu'il avait préparé depuis des jours et se retrouva comme nu devant sa beauté, sa douceur, la bienveillance dans ses yeux et le sourire amusé qu'elle lui lança. Fort heureusement il était chevalier, et le Code ordonnait qu'il avance jusqu'à elle, prenne sa main pour l'embrasser du bout des lèvres et pose genou à terre, puis baisse la tête humblement jusqu'à ce qu'elle lui permette de parler. Il profita de ce laps de temps pour se ressaisir.

Enfin, la voix de sa belle lui enjoignit de soumettre sa requête et il darda dans ses iris un regard plein d'amour qui la fit frémir.


"Grande reine Elincia", lança-t-il d'une voix claire afin que tous entendent, et il laissa parler son cœur puisque sa raison ne lui obéissait plus. Selon nos lois et celles des chevaliers tant chéris de Criméa, je me présente devant vous afin de demander la faveur que j'ai jadis refusé de formuler. Tu sais quel homme se tient devant toi puisque nous avons partagé tant d'années ensemble. J'ai des terres, un rang, des faits d'armes, mais je sais que cela ne t'intéresse pas. Tu es une personne remplie de la beauté du monde, tant sur tes traits qu'en ton cœur, et c'est pourquoi je t'offrir le mien : je suis un fervent défenseur de la justice et de la tolérance. J'ai des défauts, mais je les souhaite éclipsés par ma dévotion, mon courage et mon abnégation, ma droiture et mes mœurs, par mon amour pour mon pays... et pour toi. C'est pourquoi, devant toute la Cour je demande, ma reine adorée, si tu partages mes sentiments et mes valeurs, ta main. Unissons nos vies. Deviens mon épouse."

Une vague de murmures tomba aussitôt sur l'assemblée, tantôt réjouis, tantôt suspendus à la réponse de la reine. Si les esprits se doutaient qu'un tel lien existait, le voir éclater au grand jour en émut plus d'un, et le silence succéda bientôt aux premières effusions afin de ne perdre aucune miette de ce qui allait suivre.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeDim 13 Mar - 17:24




CdC - Mysti de Méline
L'amour est un champ de bataille



La cour était suspendue aux lèvres de la reine, et chacun retenait son souffle dans l'attente de sa réponse. Pour sa part, Elincia n'en menait pas large. Elle avait été totalement prise de court par la demande du général, qui avait de très bons arguments à faire valoir... Mais elle ne voulait pas l'épouser. Elle l'aimait sincèrement, comme une sœur aime son frère. Pas comme une femme aime un homme. Elle aurait aimé qu'il ne fasse pas sa demande ainsi, en publique, qu'il ne la mette pas au pied du mur, et ne l'oblige pas à répondre ainsi, devant des centaines de gens, sans lui laisser le temps de la réflexion. Mais le mal était fait à présent, et la reine était sincèrement désolée du mal qu'elle allait faire à son ami d'enfance.

- Écoutes, Mysti... Je...

Dans le silence de la pièce, un pas résonna avec force sur le carrelage. Puis un autre. Un homme, couvert d'une lourde armure, venait de sortir de l'ombre et s'approchait du général, l'air mortellement sérieux. Geoffrey. Le général en chef de Criméa, qui avait très mal vécu la demande en mariage du chevalier. Cela faisait longtemps qu'il nourrissait de tendres sentiments pour la reine, et voir Mysti faire sa demande l'avait mis hors de lui. Il exerçait un contrôle de fer sur ses nerfs, mais on voyait les coins de sa bouche crispés par la colère.

- Mysti de Méline. Si vous voulez la main de la reine, il va falloir la mériter !

Dans sa main, on pouvait sa lance, prête à combattre.

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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeDim 13 Mar - 20:15









Je te défie !






S'il n'avait pas été habitué à garder son sang-froid en situation de crise, Mysti aurait bien pu sursauter. Le silence, paradoxalement assourdissant, qui avait suivi ses paroles, fut troublé par les balbutiements de la reine, comme une ride sur une onde d'eau claire, puis par le chevalier qui venait de s'avancer à son côté. Geoffrey. C'était Geoffrey ! Le jeune général releva la tête pour voir l'expression déterminée et possessive sur son visage, puis celle, stupéfaite et pâle, de sa bien-aimée. Elincia ne bougeait plus, le souffle coupé, visiblement toute aussi surprise que le reste de l'assemblée.

Puisque la reine ne semblait pas vouloir, ou pouvoir intervenir, Mysti se releva en fixant son ami droit dans les yeux. Les deux hommes savaient qu'ils ne s'attaqueraient pas, pas maintenant, pas ainsi, pas comme de vulgaires chiffonniers, et surtout pas si près de la femme qu'ils aimaient tous les deux. Pour cette raison, le mage ne chercha ni à fuir, ni à attaquer. Il lisait dans le regard de Geoffrey un mélange entre la trahison d'avoir ainsi été devancé, la peur de perdre Elincia, la colère devant l'audace d'un si jeune rival, un chaos bouillonnant qui se disputait entre l'amitié et une rivalité nouvelle.


"Est-ce un duel que tu veux ?" S'entendit-il dire.

Le lancier demeura muet un instant, comme s'il considérait la chose, comme s'il s'était simplement interposé entre Mysti et Elincia sans réfléchir à ce qu'il ferait après. Toujours froid, bouleversé, sa lance était levée en signe de dissuasion mais rien de plus.

"Ne fais pas cela, Mysti... Tu n'as...
-EST-CE UN DUEL QUE TU VEUX, GEOFFREY ?"

Des flammes dansaient dans les iris noisettes du cadet. Ce simple constat venait de jeter le trouble dans ses pensées : son fidèle ami aimait la même femme que lui. Ils allaient devoir se départager pour lui plaire. Et il n'avait aucune chance de l'emporter, car Geoffrey était plus expérimenté, de plus haut rang, plus fort physiquement, de haute lignée lui aussi. Et peut-être mieux placé dans le cœur de la reine. Se rendant compte lui aussi de sa position dans la chaîne alimentaire, Geoffrey baissa la voix. Certes il souhaitait épouser Elincia, mais pas humilier son ami, ni le détruire.

"Le relèverais-tu si j'acquiesçais, Mysti ?"

S'il fallait faire preuve d'audace, pour une fois dans sa vie le jeune homme s'était lancé. Et cette seule fois allait lui garantir l'échec sentimental le plus désastreux qui soit. Mais malgré cela, il était homme d'honneur, et un chevalier. Même perdu d'avance, relever le défi vaudrait toujours mieux que de fuir la queue entre les jambes.

"S'il faut en passer par là pour démontrer mon amour... Je te défie en combat singulier Geoffrey ! Ce soir au crépuscule, dans la cour du château ! Nous nous affronterons jusqu'à ce que l'un de nous demande grâce, et celui qui remportera l'affrontement aura le droit de demander la main d'Elincia. Tu peux prendre ton cheval et toutes les armes que tu souhaites. Ne sois pas en retard !"

Et sur ces mots qui sonnaient son propre glas, le général se détourna, toujours digne et le buste droit face à la Cour figée. Même Geoffrey, pourtant en position de supériorité, venait de perdre de sa superbe pour admirer le courage, même vain, de ce héros de la Résistance.


Une fois de retour dans ses quartiers, Mysti sentit ses nerfs lâcher brutalement. Il verrouilla sa porte, ne put faire qu'une dizaine de pas en direction de son lit avant que ses genoux ne se dérobent sous lui, un flot de larmes silencieuses abreuvant son visage trop crispé. Peut-être venait-il de perdre deux amis chers par orgueil, par imprudence, par amour... Et Elincia qui n'avait pas bronché. Il ne lui en voulait pas bien sûr, mais un mot de sa part aurait désamorcé le conflit.

De longues heures plus tard, son calme retrouvé tant bien que mal, le mage s'était alors relevé. Ses yeux rougis ne reflétaient plus qu'une infime part du déchaînement de passion à l'intérieur de son âme. Ce combat, il le livrerait jusqu'à la dernière seconde comme un véritable chevalier. C'était une chose qu'il pouvait faire pour Elincia : pour que deux hommes se battent ainsi pour elle, il fallait que ce soient deux grands combattants, loyaux, solides, sûrs. Peu importe qui des deux tomberait, tant que la reine n'en prenait pas ombrage de quelque manière que ce soit.

Avec la même minutie qu'auparavant, Mysti se dévêtit, se lava de nouveau. Il entoura ses bras et ses jambes de bandages pour minimiser les frottements des mailles sur sa peau et enfila sa côte légère, ainsi que la tunique à ses armes. Sur ses vêtements étaient brodés le fameux sceau élémentaire qui éviterait qu'ils partent en fumée sous l'action de ses pouvoirs. A sa ceinture il arma les deux tomes les plus puissants qu'il possédait. Il n'avait pas l'intention de rendre la tâche facile à Geoffrey. Il se para de nouveau de sa cape, qui bien de décorative pourrait lui servir à d'autres fins, puis alla se regarder dans la glace. Cette fois, il y vit un guerrier plein de sentiments qui n'attendaient qu'un signe pour sortir de lui sous forme de flammes et dévaster tout ce qui trouverait sur leur passage.

*

Il parut le premier dans la grand cour. Un grand espace de combat avait été délimité de façon à laisser un maximum de possibilités de mouvements aux deux excellents combattants, tout en permettant aux spectateurs de voir à leur gré. Des torches étaient allumées en prévision de la nuit, car le duel pourrait bien se poursuivre jusque-là si les paris étaient justes. Certains ne se privaient pas pour faire de l'argent sur une affaire aussi solennelle.

Le général repéra sans mal sa reine de cœur, entourée de Lucia, Bastian et d'une garde solide, au point le plus sûr et le plus élevé de la place. En pieux chevalier, il alla se placer devant son estrade et posa un genou en terre, tête basse, sans prononcer un mot, puis se releva et attendit son adversaire. Geoffrey ne le déçut pas et arriva harnaché de pied en cape, monté sur son destrier de combat avec hache attachée dans le dos, épée au côté, et lance à la main. Lui non plus ne laissait aucune chance à son adversaire. De la même manière que son cadet, le général en chef vint saluer sa dame, s'inclina sur sa selle, puis alla se placer à l'autre bout du terrain.

Un héraut s'avança alors et rappela à voix haute les règles énoncées plus tôt par Mysti, afin d'être à même de dissiper tout éventuel litige et que chacun puisse juger en son âme et conscience du bon déroulement du combat.


"VOUS POUVEZ COMMENCER !"


Le cavalier s'élança le premier, désirant mettre un terme rapide à ce combat insensé et gagné d'avance. Sa monture, entraînée à répondre à un sifflement ou un simple mouvement de genoux, chargea aussitôt. Toutefois Mysti n'avait pas l'intention de se laisser empaler au bout d'une lance sans rien faire. Bien campé sur ses pieds, il psalmodia une incantation rapide et de faible intensité. Sa cible n'était pas Geoffrey, mais le cheval, qui se cabra de terreur en voyant surgir une wyvern enflammée qui se dirigeait droit vers lui. Pour plus de réalisme, Mysti lui fit même pousser un rugissement draconique et étendre les ailes bien en grand. Même excellent cavalier, Geoffrey ne put conserver son équilibre et fut entraîné à terre par le poids de ses armes. Le temps qu'il se relève, le mage bombardait la pauvre bête de rayons incandescents, jusqu'à ce qu'elle juge plus sage de quitter tout simplement l'aire de combat.

"Si tu n'y vois pas d'inconvénient, je préfère m'attaquer à quelqu'un de ma taille !"

Ni lui, ni Geoffrey n'avaient envie de rire, mais par ce geste tactique le général prenait un avantage psychologique profitable sur son adversaire. Toutefois, le bras droit de la reine n'avait pas dit son dernier mot pour si peu. Il empoigna sa lance et prit de l'élan pour charger à son tour. Mysti fit un bond de côté, seulement pour remarquer l'incroyable vivacité dont fit preuve son ami pour pivoter sur son pied d'appui et rediriger la lance au dernier moment. Mysti se jeta à plat ventre pour l'éviter et roula au sol, puis se releva face à face avec son adversaire. Ce n'était que l'échauffement, mais il suait déjà en pressentant combien Geoffrey était meilleur que lui. Sa masse musculaire aurait pu l'handicaper, mais au contraire il s'en servait pour maîtriser le moindre élan et faire plier la force de ses coups à son avantage.
Usant des torches comme combustibles et point de départ à ses sorts, le jeune mage tint son confrère à distance par des flammes concentrées sur les interstices de son armure. Geoffrey écopa de brûlures peu gênantes, mais cela suffisait pour le moment à le tenir en respect, le temps de trouver un meilleur plan.


"Depuis combien de temps ?
-Quoi donc ?
-Depuis combien de temps l'aimes-tu ! Qu'est-ce qui t'empêchait de lui dire ?!
-Je peux te poser la même question !
-Je ne suis pas un soldat aguerri comme toi, et il m'a fallu rassembler mon courage pour me présenter au palais ce matin. C'est tout ce qu'il me manquait ! Et maintenant... Maintenant je dois te vaincre ! Me libérer des entraves que je porte depuis trop longtemps !
-Je ne te laisserai pas faire ! Je voulais attendre le bon moment, l'occasion parfaite, et tu as tout gâché ! Tu as pressé ma décision mais ce n'est pas plus mal. Tout Criméa sera témoin de ma force et de ma capacité à la protéger, ainsi qu'à protéger le peuple ! En cela je te remercie, vieil ami."

Piqué au vif, Mysti serra les dents et les torches flamboyèrent tout à coup plus fort. Une larme glissa sur sa joue à ce regain de clarté et ce fut son tour de lancer l'offensive. Dans un hurlement rageur, il profita de toute l'amplitude de ses pouvoirs pour faire pleuvoir sur Geoffrey un déluge de feu, le forçant à reculer pour ne pas découvrir ses points faibles. Mais ses sorts semblaient particulièrement faibles comparés au précédent. Pourquoi déployer tant d'efforts pour le désarçonner si c'était pour épuiser son énergie du même coup ? Geoffrey le regarda s'acharner comme un forcené pendant de longues minutes. L'amour ou... autre chose ? Il ne fut pas dupe.

Sur son piédestal, Elincia retenait des sanglots, à voir ainsi le déchirement sur le visage de son ami d'enfance et celui de Geoffrey. Personne n'avait jamais vu Mysti dans un tel état, pas même l'officier lorsqu'il avait perdu son self-control face à Blaze.

Répliquant avec hargne, l'aîné dégaina son épée et chargea de nouveau. La lance ricocha sur la cotte de mailles, une fois, une seconde, l'épée trouva le chemin de l'épaule et arracha un cri à Mysti, puis celui-ci riposta en chargeant sa paume de flammes qu'il abattit sans merci sur la gorge, à l'endroit précis où s'arrêtait le gorgerin. Il replia le bras pour garder l'épée dans sa chair et s'accroupit au lieu de reculer. Une torche derrière lui déploya ses flammes et le courant d'air ainsi déplacé envoya poussière et gravillons dans les yeux de Geoffrey. Faisant fi de la prudence, Mysti poussa sur ses cuisses et se projeta sur le torse du cavalier pour le déséquilibrer. Ce dernier s'écrasa au sol mais perça la cuisse de sa lance. Un mouvement inquiet parcourut la foule alors que Mysti rétablissait une distance de sécurité entre eux. Il devait avoir un musclé déchiré mais sa jambe était encore utilisable, et l'épée avait déboité son épaule trop peu protégée. Il la retira dans un cri de douleur et la jeta hors de portée, tout en sentant une coulée de sang chaud se répandre le long de son bras.

Au corps à corps Geoffrey l'emportait sans mal, même à pied, et le tenir à distance ne lui laissait pas le temps d'incanter quelque chose de plus puissant. Du temps. Il lui fallait gagner du temps. D'un geste sec, il remit son épaule en place et cautérisa rapidement ses plaies. Point positif : il n'y avait plus ni cheval, ni épée. L'homme aux cheveux bleus était déjà debout, la gorge en feu et prêt à en découdre de nouveau. Il se munit de sa hache dans une main, sa lance dans l'autre. Mysti sut qu'il devenait encore plus dangereux ainsi car le poids en moins sur son dos lui permettait de gagner en agilité.

L'hypothèse du mage se confirma en voyant le manieur de lance repartir à l'assaut, ses armes lancées en avant grâce à son impulsion physique. Il évita tout ce qu'il put pendant une vingtaine de minutes, roulant, sautant, se contorsionnant, se baissant. Sa cotte perdit un certain nombre de mailles, réduites en charpies par la hache qui lacérait tout ce qu'elle pouvait. Son tome eut moins de chance quand il dut s'en servir pour bloquer la lance à plusieurs reprises, et le chevalier échappa de justesse à un coup particulièrement violent en dégrafant sa cape au dernier moment pour la laisser se faire embrocher et recouvrir le visage de Geoffrey avec. Profitant de la confusion, il courut à l'opposée du terrain et reprit son souffle.


"Allez ! Cesse de fuir ! Gagner du temps est inutile !
-Tu te trompes Geoffrey ! Tu ne t'es pas demandé pourquoi le combat avait lieu au crépuscule ?"

Une intonation victorieuse dans la voix, Mysti envoya son pouvoir sur la dernière torche allumée et fit prendre aux flammes la forme d'un aigle qui piqua directement sur le prétentieux. Contraint de se protéger pour ne pas subir de blessure importante, Geoffrey perdit de vue son adversaire, et la nuit tombée offrit un manteau de camouflage parfait au mage. Plus personne n'y voyait rien, et c'était là l'occasion de mettre en pratique ce qu'il avait enseigné à Blaze : la concentration sur l'environnement alentour avec ses sens spirituels. A l'aide des esprits et de sa pratique régulière de l'exercice en question, Mysti pouvait sentir avec une précision accrue la présence de tous ceux qui se trouvaient dans un rayon d'environ dix mètres autour. Il avait besoin pour cela d'être immobile, mais s'il ne voulait pas être repéré à la voix ou au bruit de ses pas, le cavalier aussi.

Pendant un long moment, il ne parut rien se passer, et des murmures commençaient à s'élever chez les spectateurs. Et tout à coup, comme sorti de nulle part, un mur de flammes jaillit devant Geoffrey, d'une puissance bien supérieure aux sorts précédents. De plus, les extrémités se refermaient autour de lui comme un piège à loup, le forçant à réagir. A force de jouer au voleur, Mysti avait également appris à se déplacer si lentement que ses pas ne produisaient aucun son, et il possédait le pouvoir tout particulier, quasiment unique au sein de l'armée, de pouvoir incanter sans prononcer un seul mot. Il suffisait qu'un rayon de lune éclaire quelques secondes son tome pour qu'il lise les mots qu'il connaissait par cœur et les déchaîne.

Obligé de réagir s'il ne voulait pas griller, Geoffrey décida d'abandonner sa garde. Il franchit le mur de flammes en serrant les dents et balança sa hache en avant. Mysti fut trop lent pour esquiver toute l'amplitude du geste et sentit l'argent défoncer ce qu'il restait de sa cotte et tailler une large plaie dans son torse à l'horizontal. Le coup fut si dur que le mage en lâcha son arme et sentit sa respiration être coupée plusieurs secondes. Ne souhaitant pas tuer son ami, le bras droit de la reine s'immobilisa pour entendre un râle de douleur et une toux de mauvais augure. Pourtant, le jeune homme se releva.


"Ne me demande pas... si je souhaite abandonner... Jamais... !
-C'est ce que je craignais. Pardonne-moi les souffrances que je vais t'infliger alors. Et survis ! Criméa aura besoin d'un général comme toi !"

Sans défense ni arme, Mysti esquissa un pas de recul, mais la lance s'enfonçait déjà dans le bras qui protégeait son torse, transperça le biceps et sa pointe se ficha entre deux côtes. Sentant de la résistance dans le retrait de son arme, Geoffrey préféra ne pas la retirer trop vivement et frappa du plat de la hache. Le coup frappa le jeune général en pleine tête et il recula en vacillant, les oreilles pleines de bourdonnements et la vue neutralisée complètement par un voile de couleurs confuses.

*Je vais m'évanouir... Je perds trop de sang...*

Loin d'abandonner, il retira lui-même la lance de sa chair avec un effroyable cri de douleur. Il la retourna et l'empoigna à deux mains, prêt à s'en servir contre son propriétaire


"Ne fais pas l'idiot, tu...
-ELINCIA ! JE T'AIME !"

Geoffrey retrouva subitement la luminosité qui lui manquait, grâce à une véritable torche humaine qui fonçait sur lui. La lance-héros ricocha sur son armure et il l'écarta avec sa hache. Il prit ensuite ses appuis et attendit que Mysti se trouve assez près pour lui décocher un coup de poing en armure directement dans la mâchoire. Le général fut complètement dévié de sa trajectoire et son oreille interne ne trouva plus les points cardinaux. Fatalement, il ralentit sur ses appuis, tituba encore, jusqu'à se rendre devant l'estrade où il avait plus ou moins localisé la reine, puis s'effondra dans un bruit mat. Les flammes sur son corps s'éteignirent alors, de même que sa conscience.

Il était vaincu et ses projets partaient en fumée.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeDim 13 Mar - 21:19




CdC - Mysti de Méline
L'amour est un champ de bataille



Le général avait été sérieusement blessé dans son combat contre Geoffrey, qui n'avait pour sa part écoper que quelques brûlures. Et un peu de culpabilité et d'agacement. Il avait détesté avoir à blesser aussi sérieusement son ami, mais pour le cœur d'Elincia il n'avait eu aucune pitié, aucun regret. Il avait fait ce qu'il avait à faire. Elincia avait eu de longues conversations avec lui à la suite du désastreux duel, et la reine, qui malgré tout appréciait sincèrement Mysti, était encore mortifiée de ce que les deux hommes avaient fait pour ses beaux yeux. Elle tenait à ce que tout soit parfaitement claire entre eux deux, et entre Mysti et Geoffrey. Aussi, lorsque le médecin royale lui avait dit que Mysti avait repris conscience, était-elle allé le trouver pour lui parler.

Accompagnée de deux gardes, qui la suivaient partout, elle se présenta à l'infirmerie pour voir le général mal en point. Elle laissa les gardes devant la porte et pénétra dans la pièce pour aller au chevet de l'homme brisé qui gisait, éveillé mais mal en point, sur un lit confortable et pratique pour les médecins. Elle avait mal au cœur rien que de le voir dans cet état.

- Bonjour, Mysti. Tu as l'air d'aller mieux. Au moins, tu es éveillé...

Elle prit place sur une chaise rembourrée qu'elle rapprocha du lit et prit les doigts du général dans sa main.

- Écoutes... Nous nous connaissons depuis très longtemps, toi et moi... Et je veux que tout soit claire entre nous.

Elle retint son souffle, hésitante au début, puis elle réunit en elle la volonté et la fermeté nécessaire pour les paroles qu'elle allait prononcer.

- Même sans l'intervention de Geoffrey, je n'aurais pas dit oui... Je t'aime, mais pas comme un amant. Je t'aime comme un frère. Je suis désolée.

La vérité était dure, mais elle était énoncée. Elle espérait que le chevalier encaisserait le choc... Il était solide, mais il avait déjà beaucoup souffert.

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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeMar 15 Mar - 15:55









Je pars.





L'Amour. Ce maître aveugle d'une puissance formidable. Jusque-là Mysti s'était abstenu de se laisser entraîner par lui et pourtant, il avait fallu quelques jours, quelques heures à peine pour que le bel avenir auquel il rêvait s'effrite comme statue de sel par un jour de pluie.

Le général en était là de ses réflexions, ranimé après plusieurs jours de coma suite à ses blessures, quand les guérisseurs laissèrent entrer une personne à la voix et à la démarche trop familières. Docile pour une fois, le chevalier ne chercha pas à se lever et à partir. Son regard était perdu sur le plafond, puis dans le sien lorsqu'elle parut. Il y vit de l'inquiétude et de la tendresse. Une affection seulement fraternelle. Il avait cru pouvoir la changer un peu, mais s'était heurté à plus persuasif que lui.
La Princesse Cachée s'assit à son côté et ses doigts provoquèrent un curieux mélange d'apaisement et de brûlure aux siens. Un regard triste accueillit son visage tendu et il écouta sans broncher jusqu'à la fin. Mysti accepta la cinglante vérité, de nouvelles larmes traçant le contour de ses joues sans qu'il n'essaie de les retenir.


« J'ignore à quel instant j'ai cessé de te voir comme une sœur... »

Pendant un moment ce fut tout, mais il serra légèrement ses doigts entre les siens. Si elle lui autorisait au moins cela...

« Dès que je serai en état de marcher, je quitterai Criméa, lâcha-t-il. Je ne déserte pas mais j'ai besoin de temps pour soigner la douleur que j'éprouve. Et je ne pourrai pas le faire auprès de toi ou de Geoffrey. J'ignore combien de temps cela prendra alors tu peux me trouver un remplaçant si tu le souhaites... »


Conscient à son tour que son brusque départ pourrait faire de la peine à son amie, il ne recula cependant pas. Il lui expliqua sans jamais hausser la voix qu'il ne sentait plus à sa place pour le moment dans les hautes sphères de Mélior. Geoffrey avait obéi à son cœur, il avait triomphé, et même s'ils restaient miraculeusement amis, il savait que sa présence l'indisposerait plus que tout autre chose.

« As-tu accepté sa demande ? » Chercha-t-il à savoir.

Il y avait beaucoup d'enjeux à épouser Elincia, notamment le titre de roi et un certains nombre de droits et privilèges qui l'accompagnaient. Mysti n'en avait cure bien évidemment, mais pour toutes ces choses, la reine devait aussi penser au bien du royaume, à la personnalité de son futur roi vis-à-vis du peuple, à son assurance, aux décisions qu'il prendrait... Le profond silence qui suivit sa question fit comprendre au jeune homme qu'elle n'avait toujours pas rendu son jugement, même en son propre cœur. Son combat n'avait servi à rien d'autre qu'exhiber deux hommes fourbus d'amour contenu et de patience.

« Laisse-moi seul. J'ai besoin de repos. »

Il aurait préféré une réponse franche et directe, quitte à recevoir un nouveau coup de poignard dans la poitrine, mais non, ce silence, encore et toujours. Il n'en pouvait plus. Le silence, les tabous, le silence, les décisions lourdes de conséquence, et encore le silence !

Le chevalier n'avait aucune raison d'éprouver de la culpabilité, mais c'est pourtant la tête basse et les épaules pesantes qu'il partit le lendemain. Il emporta des potions et des onguents que les guérisseurs tenaient à ce qu'il avale pour son bon rétablissement, quand il avait refusé toute escorte, les aux revoir et les distinctions de quelque sorte que ce soit. Il essaya de ne prendre que l'essentiel : vêtements de voyage et de rechange, tomes, armure -on ne savait jamais-, carte, vivres, eau... et son épée qu'il n'avait pas le courage de laisser sur un présentoir. Sur ses ordres, Fraise était déjà sellée et équipée lorsqu'il se rendit à l'écurie. Il ajouta à son paquetage de l'avoine frais et du maïs pour sa monture, qui piaffait déjà d'impatience. Hormis Elincia, il n'avait dit à personne où il se rendait, ni combien de temps. Les regards sur son passage étaient inquiets, les passants interrogeaient leurs voisins. On héla même le général pour lui poser des questions, mais il resta muet et parcourut la cité sans se laisser accoster. Ce ne fut qu'en passant les dernières portes, là où il était certain qu'elle ne le verrait pas, qu'il se retourna pour jeter un dernier coup d’œil au château. Il soupira et siffla brièvement. La jument partit au petit trot, passa le pont-levis et se laissa conduire en direction du nord, vers la trouée dans les montagnes. Le début du voyage jusqu'à Begnion commençait.

Pendant cinquante jours, le général alterna la marche à pieds et le balancement sur sa selle. Il tenta en terrain découvert de galoper un peu, mais sa blessure au torse se rouvrit plusieurs fois, l'empêchant de poursuivre à la vitesse qu'il désirait. Il dormait à la belle étoile, emmitouflé dans une chaude couverture avec un bon feu allumé près de lui pour repousser les prédateurs. Le trajet en montagne fut long et difficile, il ne connaissait pas le terrain aussi bien que les laguz de Gallia. La forêt qui suivit ne rendit pas la progression plus aisée, mais au moins pas besoin de surveiller les glissements de terrain en permanence.

Le plus pénible pendant cette progression s'avéra de garder le moral. Tout en suivant sa route, il s'était senti de plus en plus mal, énumérant mentalement ce qu'il venait de perdre et combien cela le faisait souffrir. Il ne parvenait pas à dormir plus de deux ou trois heures par nuit. Ses vivres tenaient bon plus longtemps que prévu à cause de son manque d'appétit, et plus d'une fois Fraise dut réclamer pour avoir une vraie part quand il oubliait qu'elle ne subissait pas la même déprime que lui.

A quelques lieues de sa destination, il repéra un nuage de poussière qui venait à sa rencontre. Cela le maintint éveillé, mais pas sur ses gardes pour autant. Qu'on vienne le mettre à terre si son heure était venue. Nul sort pouvait être plus cruel que ce qu'il endurait. Mais la déesse devait avoir pitié de lui, car il reconnut les armoiries de l'homme qui venait à sa rencontre, tout comme celui-ci reconnaissait les siennes. Le cavalier fit ralentir sa monture à une vingtaine de mètres, puis approcha au pas.


« Sieur De Méline, nous vous attendions il y a quatre jours déjà ! Je me réjouis d'avoir été envoyé à votre rencontre, vous m'avez l'air fort las !
-Suis-je attendu?
-Bien évidemment ! Vous savez comment vont les nouvelles : bien plus vite que le flot des rivières ! Je vais vous accompagner pour le restant du trajet si vous le voulez bien. »

L'accueil d'Azelian fut, comme de coutume, chaleureux et plein d'attentions. Il décela tout de suite chez son ami la lassitude, le chagrin et la souffrance. Le cueillant à la descente de sa selle, il donna tous les ordres nécessaires pour qu'on s'occupe de sa jument et ses bagages, mit une chambre à sa disposition et tout le confort possible. Ce soir-là, malgré un bain chaud et une longue sieste, Mysti ne mangea rien et resta obstinément muet.

Le repas terminé, le maître des lieux s'occupa personnellement de reconduire son ami. Arrivés devant sa chambre, ils virent surgir une silhouette à la crinière rousse, qui se jeta sur le chevalier pour l'étreindre tendrement.


« Mysti ! Vous m'avez tant manquée! »

La voix d'Aker tira Mysti de ses sombres pensées. La jeune femme était plus radieuse que jamais avec sa chevelure rousse éparpillée en tous sens et de multiples voiles qui cachaient son corps tout en le suggérant.

« Aker... ? Tu es... Ouaw... »

Il la repoussa en douceur, effaçant le sourire qui ensoleillait son visage, et Azelian lui indiqua d'un geste de se retirer. Sans attendre de la voir disparaître à l'angle du couloir, il ouvrit la porte de ses appartements temporaires et ne fut pas surpris de trouver à l'intérieur ses affaires déjà rangées, comme le guérisseur l'avait prévu. A peine ce dernier eut-il refermé la porte qu'il entendit les sanglots de Mysti, assis sur le lit, comme si ses sentiments s'étaient soudain ravivés. Le souvenir de l'espoir qu'il avait puisé en ces lieux était d'autant plus pénible que tout n'avait servi à rien.

« C'est la femme de ma vie Azelian ! Éclata-t-il. Et j'ai tout... fichu... en l'air... »

Malgré tout ce qu'il avait déjà versé, le général fondit une fois de plus en larmes, ses nerfs enfin relâchés après avoir parcouru tout ce chemin et trouvé ce havre de paix sur lequel il pouvait compter. Azelian s'assit à son côté et l'attira pour pleurer sur son épaule. Leur relation s'était bien espacée depuis le temps de leur jeunesse, mais toujours ils finissaient par se retrouver comme au bon vieux temps.

« Tu me reviens à chaque fois dans un état lamentable... Vais-je passer ma vie à réparer tes souffrances ?
-Au moins, snif... dis-toi... que je reviens, snif, toujours... vers toi...
-C'est vrai. Et j'en suis flatté. Pleure donc mon ami, tu en as bien besoin. Laisse ton cœur d'enfant s'exprimer. »

Obéissant malgré lui, les gouttes dévalant son visage de plus en plus rapidement, le chevalier releva un visage intrigué vers le seigneur du château qui le regardait avec bienveillance.

« Ton innocence me fascine, Mysti. Au fond de toi tu crois encore de toutes tes forces à la paix, à la  justice, à la tolérance... et à l'Amour vrai. »

Azelian cueillit quelques larmes des doigts et caressa la joue de Mysti en signe d'apaisement. Si Mysti avait été un instrument de musique, toutes ses cordes auraient vibré, dans une magnifique et tragique sérénade. Le seigneur songea que cela le rendait à la fois pathétique et incroyablement séduisant, mais retint tout commentaire. Le moment était bien mal choisi. Le chevalier s'épancha pendant un temps qu'il ne compta pas, avant de finir terrassé par la fatigue et l'accablement.

Le lendemain et les jours suivants, il préféra rester seul. On le voyait faire un effort de présence pour les repas, auxquels il ne touchait presque pas, puis il s'en allait en promenade avec Fraise qui le suivait sans selle ni bride. Azelian avait insisté pour refermer les dernières traces de blessures et le tenait simplement à l’œil sans l'importuner.


« Tu devrais faire ce que les mages savent faire de mieux si tu veux mon avis, lança-t-il un jour. Apprendre quelque chose de nouveau. N'as-tu pas envie de te dégourdir un peu ?
-J'apprends à éliminer des sentiments que j'ai nourris pendant des années, cela me suffit largement. Et je vais m'entraîner de temps en temps quand je n'arrive pas à dormir.
-Résultat : tu ne dors pas, tu ne manges pas, tu te morfonds et tu agis par automatisme. Grandiose. Moi je te parle d'entrer dans un domaine véritablement inconnu ! Et je vais t'en donner les moyens... »

Il prit la main de son ami et déposa dans sa paume un bijou finement ciselé qui émit une légère lueur au contact de sa peau.

« Mais c'est...!
-Une Sage bague. J'ai longtemps hésité à l'utiliser, mais je pense que tu en as plus besoin que moi, et tes compétences sont plus avancées dans ton domaine que les miennes. Elle peut augmenter ton potentiel magique jusqu'à te permettre de côtoyer deux éléments couramment. Il n'y a pas de magicien suffisamment expérimenté ici pour t'enseigner cela, mais le moment venu, tu trouveras bien un maître. Souviens-toi de ce cadeau alors, et tu auras un peu de la puissance que tu recherches pour aller au bout de tes idées.
-Non c'est trop. Je ne peux pas accepter...
-Moi je pense que tu veux et tu vas accepter ! Je te regarde tourner en rond depuis ton arrivée, comme un spectre vidé de toute substance, et cela me rend furieux après toi ! Je comprends que cet... échec soit pénible, mais Mysti, tu n'as que 24 ans, la vie est encore devant toi, et des choses à accomplir ! Comment Criméa va-t-elle devenir l'exemple à suivre de Tellius si elle ne compte pas un homme aussi dévoué que toi dans ses rangs ? Tu trouveras quelqu'un d'autre. C'est triste, et probablement injuste, mais Elincia ne t'a pas choisi, et le temps finira par te faire accepter sa décision tout simplement. Puisque tu as préféré prendre des « vacances », profites-en pour savourer un peu la vie au lieu de t'enfoncer dans tes pensées noires ! Nous sommes tous là autour de toi, prêts à exaucer le moindre de tes vœux pour adoucir l'exil que tu t'es toi-même infligé. Laisse-nous t'aider. »

Le guérisseur referma la paume de Mysti sur la Sage bague, le regard directement planté dans le sien avec insistance. Un sourire se forma sur ses lèvres, coquin, et il ajouta :

« Si tu veux je peux même te présenter mes dernières recrues : une chatte et un faucon en mal d'amour. Ils seront ravis de te détendre. »

Le chevalier sursauta, provoquant le rire de son hôte. Mysti finit par se laisser convaincre de sourire timidement et d'essayer de s'occuper un peu plus de façon plus constructive. Il soupirait encore et ses pensées se perdaient dans le vide, mais il se joignait plus volontiers aux groupes. Pendant des réunions qu'affectionnait particulièrement le maître des lieux, il se retrouva à jouer aux cartes, aux dés, aux échecs avec Aker, à lire ou écouter de la poésie, à arbitrer un débat philosophique. Quand il ne s'entraînait pas à l'extérieur, il partait en randonnée avec sa jument et quelques compagnons. Il se surprenait à se laisser bronzer par les rayons du soleil et à apprécier la caresse du vent dans ses longues mèches noisettes. Ce n'était qu'un début, quelques pas seulement dans sa reconstruction, mais on veillait sur lui avec une rigueur qui le touchait.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeMar 15 Mar - 18:14









Mieux vaut tard que jamais !





« Encore gagné. Tu n'es vraiment pas concentré aujourd'hui.
-Hum.
-Mysti ? Je suis un laguz-éléphant rose à pois jaunes.
-Comme tu voudras.
-Et j'ai mangé Criméa.
-D'accord. »

Un soupir gagna l'homme aux cheveux pâles. Depuis plus de trois semaines que le général se trouvait en sa demeure, il avait semblé aller de mieux en mieux, même si c'était à petits pas et à grands renforts de persuasion. Et tout à coup, Azelian soupçonnait une rechute. Il était si facile de retomber dans les méandres du doute et de la mésestime de soi lorsqu'on venait à peine d'en sortir. Le guérisseur écarta le plateau sans percevoir de réelle réaction de la part de son patient, puis il s'assit près de lui.

« Mysti... Veux-tu parler un peu ? Tu n'as pas l'air dans ton assiette.
-Ce n'est rien.
-Je viens de te dire que j'étais un laguz-éléphant rose à pois jaune et que j'ai mangé Criméa !
-Quoi ? Qu'est-ce qui te prend tout à coup ?
-Je te retourne la question. Tu n'as eu aucune réaction la première fois. Qu'est-ce il y a ?
-Je ne veux pas en parler...
-Je suis ton médecin, jeune sacripant. Dis-moi tout.
-C'est juste que... cela ne te concerne pas. »

Déterminé à comprendre l'humeur sombre du chevalier, Azelian tenta une approche un peu moins subtile : il chercha à capter le regard noisette à l'aide d'une caresse sur son visage, puis se pencha dans son cou et y déposa un baiser doux et chaud. Il sentit le chevalier frémir, mais à sa grande surprise il ne le repoussa pas. Interloqué, il recula vivement, mais Mysti ne manifesta pas son mécontentement de quelque manière que ce soit.

« Tu ne peux pas être dans ton état normal... Tu n'as jamais été aussi docile, ni apprécié mes avances...
-Alors c'est de cette façon que tu juges si je vais bien ?
-Ce n'est pas drôle Mysti ! Je veux, et tant que guérisseur, je DOIS t'aider ! Mais si tu ne dis rien je ne peux pas t'offrir de solution à ton problème ! Est-ce... à propos d'Elincia ? »

Sur le moment, le mage sentit son cœur se serrer et aurait presque préféré que ce soit le cas. Azelian était peut-être trop entreprenant ou libertin par moments, mais il savait rester sérieux quand il le fallait vraiment. Il se résigna à sortir de sa poche un anneau monté d'une pierre de Begnion qu'il tendit à son ami.

« Ceci appartenait au sénateur Griffin Adams de Begnion...
-Le Marqué ? Voilà plusieurs mois qu'on ne l'a plus vu.
-Je sais. Parce que... c'est moi qui l'ai tué...
-QUOI ? »

Patiemment, Mysti lui expliqua comment il avait rencontré War et les trois autres personnes à sa recherche, l'affrontement qu'il y avait eu, l'état critique dans lequel il s'était retrouvé, comment il avait ramené le corps pourrissant de Griffin à la frontière avant de s'effondrer, comment on l'avait ramené et sauvé de justesse. Et cet anneau, qu'il s'était juré de remettre à Sanaki en expliquant tout cela, il avait fini par l'oublier à cause de son cœur en morceaux. Le matin même, il avait posé le doigt dessus en fouillant dans ses bagages, et le douloureux souvenir de la sorcière lui était remonté à la gorge, comme de la bile nauséabonde à évacuer.

« Je comprends mieux ton absence d'enthousiasme. Tu as encore trouvé une raison de te torturer. Mais si j'en crois ton récit, tu n'es pour rien et...
-Voilà près de trois mois que Sanaki doit attendre de ses nouvelles ! Pendant que je me prélassais à Criméa et ici ! Et je me sens tout bonnement incapable de me présenter devant elle maintenant...
-Je peux aller la voir pour toi si tu veux.
-Non ! C'est ma responsabilité.
-Je sais ce que tu vas faire alors. Prépare tes affaires, et nous partons pour Begnion.
-Nous ?
-Tu penses que je vais encore te laisser t'écrouler ? Tu n'auras qu'à me dire quand tu te sentiras prêt. Je veillerai à ce que tu ailles au bout de tes engagements, et au passage nous te trouverons un maître-magicien capable de te redonner la vitalité que tu as perdue en t'entraînant comme il se doit ! Ce dont tu as besoin Mysti, c'est d'un but, un stimulant. Pas d'un plongeon dans la culpabilité. Je ne te laisserai pas tomber. J'ai trop d'estime pour toi pour te regarder simplement gâcher ta vie.
-Merci pour tout. »

Les deux complices se sourirent.


*


Six jours plus tard, sept cavaliers se présentaient au palais de Sienne. Azelian et sa garde s'occupèrent d'aller trouver une auberge décente où séjourner pendant que le général demandait une audience privée à l'impératrice de Begnion, en précisant ses titres, et le fait qu'il voulait la voir en privée. Il connaissait suffisamment Sanaki pour savoir qu'elle comprendrait que l'affaire était délicate -surtout pour elle-, et qu'il valait mieux organiser une petite réunion informelle qu'une tribune publique où la Cour aurait le loisir de le juger avant qu'il n'arrive à la fin de son discours.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeSam 16 Avr - 12:59









Tristes nouvelles





En raison de la disparition du sénateur Adams au siège du Conseil de Begnion, des tensions avaient pris place dans les hautes instances de la capitale. Certains avaient saisi l'occasion pour souligner le manque de fiabilité du Marqué, et par extension, de tous les Marqués en général, puis avaient réclamé son remplacement. Sanaki, exerçant toute l'autorité possible dont elle disposait et devenue de plus en plus crédible alors que sa silhouette se paraît des atours de l'adolescence et d'une victoire passée, avait refusé net, préférant attendre aussi longtemps que possible d'avoir des nouvelles. Griffin représentait un immense défi pour le plus grand territoire de Tellius : prouver que les laguz et les Marqués pouvaient être aussi méritants que les beorcs, que ce soit en tant que haut fonctionnaire ou dans divers corps de métier. Mysti avait pris conscience de cette terrible vérité en entendant certaines discussions dans les couloirs du palais tandis qu'on le conviait, après plusieurs jours de patience, à rejoindre l'Impératrice. Azelian avait eu raison de l'exhorter à se reprendre en main et à ne pas attendre davantage, même s'il n'avait pas mentionné pourquoi.

Laissant son ami dans l'antichambre, le chevalier sentit son cœur revigoré en apercevant un visage amical qu'il ne côtoyait malheureusement pas souvent. Ils passèrent rapidement les formules d'usage et enfin Sanaki l'invita à parler, visiblement lasse d'une journée chargée. S'efforçant de ménager la jeune femme, Mysti s'attarda principalement sur les faits dans le désert, War, son pouvoir de confusion... et la mort du sénateur. D'une main qui n'avait plus la force de trembler, il lui tendit l'anneau en guise de preuve et s'agenouilla, le regard pénitent attendant son jugement. Il savait que, si elle n'en montrait rien, la souveraine venait d'encaisser un coup dur. Le Marqué tombé, la discrimination pouvait regagner en force à Begnion, et surtout cela démontrait une puissance certaine de la sorcière du désert. Griffin n'était pas un amateur en matière d'envoûtements. Après un long silence, le chevalier baissa la tête et se força à narrer la suite. Il n'aimait pas cette partie de l'histoire, trop personnelle, mais il se devait d'être honnête jusqu'à la fin et de justifier le retard de la nouvelle. Encore jeune, Sanaki considérerait sans doute que toute l'histoire relevait d'une broutille sentimentale, que son devoir primait avant tout et que la faute lui revenait entièrement. Elle ne lui fit pourtant aucun reproche.


« Merci d'être finalement venu. Begnion... va enfin pouvoir avancer. Je dispose enfin des morceaux du puzzle qu'il me manquait, tant au sujet du sénateur que de la sorcière. Même si votre arrivée fut tardive, tout cela s'avère fort utile.
-J'ai failli à mon devoir, ne me remerciez pas Altesse... »

Elle fit quelques pas, s'immobilisa à son côté alors qu'il se tenait toujours genou à terre, et posa une main sur son épaule.

« Cessez de vous tourmenter chevalier. Pour l'avoir vu jadis et encore aujourd'hui, je connais votre dévotion envers non seulement Criméa et Elincia, mais aussi Tellius tout entier et l'harmonie entre tous les peuples, toutes les races. Cette dévotion s'accompagne, hélas !, de sacrifices et d'erreurs. Bien des êtres ont fini brisés par ces conflits... L'important pour vous, est de demeurer vaillant et garder courage. Pensez-vous en être capable Mysti ? Pour réussir à devenir dignes des déesses, il faut des gens comme vous, comme les reines d'Hatary, de Daein et de Criméa, comme les hérons survivants de Serenes et Tibarn, comme Naesala aussi...
-Et comme vous qui parvenez à régner sur un empire dans lequel on a longtemps douté de vous, à cause votre âge ou de votre ascendance faussée. J'admire votre incroyable sang-froid. »

Il releva la tête pour lui adresser un sourire légèrement moqueur, et fut surpris de rencontrer le même sur le visage de Sanaki.

« Qu'un mage de feu déclare cela est une ironie particulièrement appréciable. »

Ne s'attendant pas du tout à la plaisanterie, Mysti éclata de rire. Sur un signe de son hôte, il se releva et savoura le son de sa propre joie avec elle.

« Qu'allez-vous faire maintenant ? J'ai cru comprendre que vous souhaitiez vous échapper un temps de Criméa.
-Eh bien... mon ami Azelian m'a conseillé de trouver un maître-magicien afin de poursuivre mon entraînement magique et de penser à des faits plus légers que ceux de la Cour et de l'armée, le temps de retrouver ma sérénité. Je suis un peu sceptique sur la méthode, mais il est vrai que je ne suis d'humeur à rien ces temps-ci.
-Je puis peut-être vous aider.
-Vraiment ? Mais, et l'empire?
-Je n'ai pas dit que je vous aiderais personnellement mais en tant qu'Impératrice et mage anima moi-même, je connais beaucoup de monde, l'oublieriez-vous ?
-Mes excuses. Vous me feriez une immense faveur, surtout après les sombres nouvelles que je vous apporte.
-Quelle discipline vous attirerait? »

Jamais questionné jusque-là, Mysti laissa son regard errer dans la pièce un moment en repassant ce qu'il savait des autres domaines de magie dans son esprit. Étrangement, l'image de Kaze s'imposa dans sa tête et ne voulut plus en sentir. Le sabre recelait une énergie qui complétait parfaitement la sienne, le feu et le vent étant deux éléments fluctuants, tantôt insaisissable et destructeurs, tantôt dociles et bénéfiques. La glace était froide, dure, ne conviendrait pas à un caractère passionné comme celui du chevalier, pas encore. Quand à la foudre, sa complexité et sa dangerosité en faisaient une arme dangereuse. Une arme avant tout.

« Le vent. J'ai découvert récemment que mes flammes s'accorderaient parfaitement avec.
-Bon choix, en effet. Malheureusement la plupart des maîtres du vent vivent au sud, vers les ports qui mènent à Kilvas et Phoenicis. Il s'agit de pirates et d'anciens chasseurs d'esclaves qui traquaient les oiseaux de ce que je sais. Ou alors... certaines rumeurs, peu répandues, parlent d'un vieux fou qui vivrait en ermite dans les montagnes bordant la Tour de Lumière. Vous pourriez aller ressasser ces anciens jours de silence et de peur que nous avons partagés là-bas.
-Charmant...
-Allons, il en faut plus pour effrayer le général des armées royales, non ? Essayez donc de le rencontrer. Et ne tardez pas à envoyer au moins un coursier pour m'assurer que vous n'avez affronté aucune sorcière maudite durant votre périple. Il me faudrait pouvoir informer Elincia à mon tour.
-Oui, vous avez raison. Je vous remercie, Altesse. Puissent les déesses toujours vous prêter main-forte. »

Sur un dernier sourire, Sanaki referma son visage et mit fin d'un signe à l'audience. Le poids des aveux en moins sur le cœur, Mysti retrouva Azelian et lui raconta l'entrevue tandis qu'ils sortaient de la ville pour aller chevaucher tranquillement. Le guérisseur parut ravi que ses conseils aient si bien servis. Évidemment, il entendait suivre le Criméan dans son avancée -afin de jouer le coursier en question si besoin- et ce jusqu'à savoir son ami aussi bien remis dans sa tête que sur ses pieds. Question d'éthique.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeSam 16 Avr - 22:44









La montagne du solitaire





Les chevaux approchèrent enfin d'une vieille bicoque branlante et menaçant de s'effondrer. Sur les indications de Sanaki, étrangement vagues au premier abord et pourtant on ne pouvait plus précises, le libertin, le chevalier et leur escorte atteignirent un peu moins de huit jours plus tard ce qui semblait être un baraquement abandonné, en haut d'une montagne. Un silence religieux régnait sur les lieux et les hommes posèrent pieds à terre, fatigués par la concentration qu'ils avaient dû déployer pour éviter à leurs montures les accidents de l'escarpement.

"Sires ? Que devons-nous faire ?
-Attendez pour le moment. J'ai la nette impression que ce lieu n'est pas aussi inhabité qu'on pourrait s'y attendre.
-Tu le sens aussi ? Il y a de la magie ici..."

Un brusque vent leur parvint de face, portant à leurs visages les gouttelettes d'une immense cascade qui se perdait en-dessous du piton rocheux sur lequel ils attendaient. Le lieu avait des airs de paradis naturel : on pouvait admirer des dizaines de nichées d'oiseaux perchées sur de hauts pics rocailleux de chaque côté de la chute, l'eau douce ne manquait ainsi pas, le bruit assourdissant permettait de ne pas être entendu d'éventuels pillards et, à force d'écoute, promettait même quelques moments de relaxation. Quelques arbres laissaient tomber leurs fruits sans efforts sur un bout de corniche inondé de lierre et de plantes grimpantes, à portée de main. Pour la viande c'était une autre histoire, mais cela ne ternissait pas la beauté de l'endroit.

Mysti tendit les rênes à son ami, s'apprêtant à avancer seul vers la maison, mais Azelian le retint, l'air grave.


"Je viens avec toi.
-Si c'est un maître, il a peut-être posé des pièges, je ne veux pas risquer...
-Mysti, regarde ce que tu es en train de faire. Encore une fois tu pars seul au-devant d'un possible danger. N'est-ce pas ainsi que War t'a mis en déroute ? N'est-ce pas ainsi que Geoffrey t'a fait mordre la poussière ? Non ! Ne dis rien ! Je sais que tu veux nous protéger, mais nous voulons aussi te protéger toi. Nous sommes là pour toi. Laisse-nous t'aider.
-Azelian, tu es un guérisseur, ta place n'est pas au-devant du danger. Si tu tombes, aucun de nous n'aura les pouvoirs suffisants pour sauver les autres. Pour te sauver ! Et je crois bien t'avoir entendu dire que tu informerais Sanaki en cas de périls. Mais soit, je vais t'écouter. Je prends deux hommes avec moi, mais pas toi. D'accord ?
-Enfin une preuve de sagesse. Merci."

Le mage échangea un sourire complice avec son ami, puis fit signe à deux soldats de s'avancer avec lui. Ils partirent d'un pas résolu vers la cabane, quand le mur de roches qu'ils longeaient fut derrière eux. A ce moment-là le vent gagna en intensité, les balayant presque de sa force extrême. C'était à se demander comment la structure de bois vers laquelle ils se dirigeaient continuait de tenir debout, avec un tel couloir d'air.

"Je suis le chevalier Mysti de Méline et je manie la magie incendiaire ! Tenta Mysti. Je cherche un maître du vent ! Y a-t-il quelqu'un ?!"

Comme si le vent avait entendu, sa force sembla se décupler une nouvelle fois et plusieurs débris se détachèrent de l'habitation rudimentaire. Le général ne voulut pas se laisser décourager et posa la main sur la poignée, mais la porte se sépara de ses gonds totalement. Surpris, le mage vacilla sur ses appuis. Le bric et broc de planches et de tôles fut soufflé aussitôt, s'abattant sur les trois soldats. L'un d'eux glissa sur le rebord de la roche et bascula dans le vide, rattrapé de justesse par Mysti qui fut entraîné avec lui. Il se raccrocha à une racine qui courait sur le sol et se retrouva à demi suspendu dans le vide. Les autres ne pouvaient rien faire pour leur venir en aide, au risque de tomber eux-mêmes ou de perdre les chevaux.

"Ah... Tiens bon !"

Il y eut alors une sorte de grondement qui tétanisa les pauvres soldats. Cela ressemblait au rugissement d'un dragon. Affamé. Se sentant perdre prise, Mysti tenta de ramener son camarade au niveau de la roche sans lâcher sa racine, pendant que le troisième d'entre eux s'assurait une prise solide pour le réceptionner.

"Général ! Lâchez-moi ! Je vais nous entraîner tous les deux !
-Ne dis pas... d'âneries... Je... n'abandonne pas... mes hommes !"

En une fraction de seconde les rôles s'inversèrent : le soldat se saisit de la main de son homologue, mais la racine que tenait Mysti craqua et il sentit le rocher lui écorcher le bras tandis qu'il plongeait dans l'abîme. Le soldat tenta de le rattraper mais une nouvelle rafale lui fit rater sa prise et le chevalier allait disparaître de la brume, avant de s'immobiliser net. Des cris fusèrent de part et d'autre du piton rocheux, de peur, de soulagement, de surprise : un homme venait de surgir comme de nulle part, grand, élancé, des cheveux blancs lui tombant sur l'épaule et des yeux d'un vert saisissant. Le vent s'était tu comme si un mur l'avait empêché de passer et il tenait le poignet entaillé du général fermement. Ce dernier sentit que le vent le poussait vers le haut comme une main et l'homme le remonta sans mal sur ses appuis. Il tourna ensuite la tête vers les cavaliers restés à l'abri, le regard neutre et scrutateur.

"Vous... merci. Tout le monde va bien ?
-Oui général !
-Moi de même. Votre bras ?
-Des écorchures, rien de grave. Nous avons eu de la chance... Merci encore... messire ?
-Les mages qui s'aventurent jusqu'ici n'y amènent pas leurs proches. Ils savent que cela pourrait leur coûter la vie."

Une douche froide se déversa sur le dos du jeune général. Il tourna la tête vers Azelian d'un air de reproche, puis vers les deux hommes encore tremblants de frayeur. Ils scrutaient de toutes parts en cherchant l'origine du bruit terrible qui avait retenti avant la chute.

"Il n'y a pas de dragon ici. Calmez-vous et rejoignez le groupe."

Les hommes acquiescèrent et rejoignirent lentement le groupe, tandis qu'Azelian arrivait à son tour, stoppé d'un geste par Mysti dont le regard rencontrait celui de l'inconnu, ses prunelles émeraudes sévères vissées au regard noisette.

"Je suppose que vous êtes le fameux ermite. Votre maîtrise est impressionnante. Un écho d'éboulement ?"

Un simple hochement de tête, tout en restant dévisagé par cet intrigant personnage. Il portait d'amples vêtements, ouverts par endroits comme pour laisser le vent gonfler des poches de tissu et des fils et rubans pendaient un peu partout sur son corps, indiquant la force et la puissance de l'élément invisible. Il devait connaître son sujet. C'était lui, à n'en pas douter. Son visage semblait jeune, et en même sans âge. Comme si son corps avait vieilli sans en laisser deviner l'apparence.

"Je suis venu pour...
-Je sais pourquoi. La petite m'a envoyé un oiseau. La vraie question est, pourquoi devrais-je vous enseigner ?
-La petite ? ... Sanaki ? Je..."

Sentant que ses mots allaient déterminer la suite de l'entretien, et surtout que s'il le voulait cet homme pouvait lui faire subir une chute mortelle sur un simple mouvement de doigt, Mysti prit le parti d'agir en chevalier et posa genou à terre, poing droit sur le cœur. La résolution dans ses yeux lui donna le courage de tenir tête et il lui expliqua en quelques mots la sorcière dans le désert, la menace qui planait sur Tellius, et sa quête personnelle de retrouver la paix.
Sans un mot, l'individu à la peau mate qui contrastait fortement avec ses yeux releva Mysti sur ses pieds, puis le poussa simplement en arrière avant qu'il ne puisse réagir. Un cri suivit la descente du général dans la brume. Les soldats horrifiés s'approchèrent du rebord mais ne virent plus rien. Leur supérieur s'était sûrement écrasé plus bas... Du moins c’est ce qu'il serait advenu si l'étranger ne l'avait pas remonté à l'aide de puissantes bourrasques pour le déposer de nouveau sur le sol. L'estomac retourné en tous sens, le chevalier se laissa tomber à genoux et inspira longuement. Le reste de la troupe était tellement scandalisé que personne n'eut la force de prononcer un mot.


"Me détestes-tu, chevalier ?
-... Quoi ?
-Je t'ai poussé dans le vide deux fois, au risque de te rompre le cou. Me détestes-tu ?
-Ce vent... c'était vous ?! Et la cabane en guise de leurre !
-Perspicace. Et les tripes solides.
-Qu'attendez-vous de moi... ?"

Un sourire malicieux synonyme de mauvais présage s'inscrivit sur le visage de l'homme. Sans un mot il se dirigea vers la pointe du pic rocheux et désigna la cascade en face qui plongeait sans qu'on en voie le fond. Leste et sûr de lui, il étendit les bras et s'y laissa tomber. Mysti écarquilla les yeux alors que personne ne le vit revenir. Le guérisseur s'approcha alors et soigna rapidement le bras écorché du général.

"Tu penses que c'est vraiment lui ?
-Aucun doute mais... je ne sais pas ce que signifie tout cela. La nuit va bientôt tomber, établissons un campement à l'abri avec les chevaux. Nous verrons bien s'il revient demain. Mais je ne suis pas décidé à abandonner.
-Bien parlé !"




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeMar 19 Avr - 18:50









Conviction





Les heures puis les jours passèrent sans que l'inconnu reparaisse. Les gardes d'Azelian commençaient à se lasser de ne rien faire d'autre que promener les chevaux et attendre, pendant que les deux mages sondaient les alentours à l'aide de toute l'étendue de leurs perceptions, mais le bruit ambiant et l'énervement des hommes les empêchaient de se concentrer. Les vivres s'épuisaient et le moral baissait peu à peu.

"Je songe à leur donner leur solde et les libérer. Après tout, nous ne savons pas combien de temps nous allons passer ici, ni même s'il y aura une issue à cette situation.
-Je comprends, mais n'oublie pas que je ne pourrais pas forcément de protéger de tous les périls à moi seul.
-Le péril le plus menaçant en ce moment est la mutinerie, mon ami.
-Certes, oui...
-Mysti, essaie d'avoir un peu plus confiance en toi. C'est toi qui nous faisais remporter nos batailles autrefois. Ton astuce nous a sortis de maintes embûches, et notre volonté a fait le reste, ce qu'il manquait. Tu es maintenant bien plus fort et moi de même. Nous viendrons à bout de cet étrange maître. Tu es ici par ma faute, alors je t'y aiderai, d'accord ?
-Bien. Renvoie-les. Je suis désolé de ce contre-temps.
-Peu importe."

Les gardes engagés à Sienne s'en retournèrent donc, avec un dernier message pour Sanaki qui expliquait leur situation et confirmait leur arrivée sur le mystérieux lieu de rendez-vous. Le temps passant, le chevalier réfléchissait au comportement de ce maître inconnu, à première vue hautain, et redoutable.

"Je me demande si ce n'est pas une première épreuve. Il m'a posé une unique question, pourquoi il devrait m'enseigner, et je n'ai apporté aucune réponse à cela.
-Donc, lui répondre pourrait t'aider à prouver que tu es digne d'apprendre ? Admettons, comment vas-tu le lui dire s'il ne vient pas te parler ?"

Machinalement, le général fixa la cascade vers laquelle l'étranger avait disparu. Elle longeait la roche de façon si étroite que le vent pouvait bien s'enfoncer sa suite, et venait ainsi leur cingler le visage à tout moment de la journée.

"Nous avons affaire à un maître du vent. Peut-être qu'il suffit simplement de s'adresser à lui avec le vent...
-Qu'aucun de nous ne contrôle.
-Le contrôler non... mais s'en servir, nous pouvons. Rappelle-toi l'écho. A mon avis ce n'est pas un hasard s'il habite en montagne. Les passages d'air y sont fréquents et l'agencement de la roche parfait pour percevoir le moindre bruit, malgré la cascade.
-Il nous écouterait en ce moment même ?
-Je n'en sais rien. C'est possible. Nous ne perdons rien à essayer de toute façon."

Azelian acquiesça, toujours assuré des idées de son ami. Mysti l'avait rarement déçu en terme de stratégie, et les fois où cela s'était produit, bien souvent les circonstances ne dépendaient pas de sa volonté. Ils se rendirent donc là où le vent soufflait le plus aisément et le chevalier plaça ses mains en porte-voix :

"Qui que vous soyez, écoutez-moi, je vous en conjure ! Je ne cherche pas ce pouvoir pour tuer des hommes ou des laguz ! Je ne veux pas la guerre mais la puissance pour protéger mon peuple de toute menace avérée ! Les guerres récentes m'ont prouvé que plus que tout je tenais à mon pays et à la paix, mais qu'il fallait parfois prendre les armes pour que l'un comme l'autre continuent d'exister ! Aujourd'hui, en plus de cela, j'ai compris que la magie peut aussi ouvrir un homme à d'autres façons de penser, d'autres points de vue que j'aurais négligés ! Je souhaite les connaître, les comprendre et les expliquer à mon tour au peuple, afin que la tolérance gagne enfin la place qu'elle mérite !"

L'écho se répercuta effectivement plusieurs fois sans que rien ne se passe. Les deux hommes se regardèrent avec découragement mais le Criméan refusa de se laisser abattre.

"Si vous avez eu l'impératrice Sanaki comme élève, vous devriez comprendre !"

Toujours aucun signe de réponse ne leur vint. Dépité le chevalier dirigea son regard vers la chute de la cascade, incapable d'en voir le fond tant le remous créait de brume en s'étendant sur les rochers.

"Il ne peut pas être mort... Pas si bêtement. Pourtant il a sauté sans hésiter et il n'y a eu aucun manifestation de magie après cela... Comme s'il savait sur quoi il allait atterrir.
-Je n'aime pas ce que je viens d'entendre... Ne me dis pas que tu vas... MYSTIIII !"

Sous les yeux horrifiés du guérisseur, le mage de feu se laissa tomber dans le vide et disparut en quelques secondes. Choqué d'une telle folie, il resta immobile, attendant un signe, un son, quelque chose qui prouverait que son ami allait bien. Son cœur se mit à battre à tout rompre dans sa poitrine et, au fur et à mesure des secondes, les larmes lui vinrent.

"MYSTI ! RÉPONDS ! JE T'EN SUPPLIE ! MYSTI !
-Je vais vous mener à lui."

Azelian sursauta si violemment qu'il faillit tomber dans le vide lui aussi. L'inconnu se trouvait à trois pas de lui et il n'avait absolument pas perçu son arrivée de quelque manière que ce soit. D'une ferme et sûre, il s'empara du bras du Begnionnais et plongea avec lui au fin fond des chutes. Un cri d'effroi étrangla Azelian tandis qu'ils atterrissaient avec beaucoup plus de douceur qu'il ne l'aurait cru sur un filet tendu entre deux roches, extrêmement solides et imperméables à l'humidité. En réalité, ceux qui sautaient ne risquaient rien d'autre que ce que la peur leur suggérait. Et il n'y avait pas besoin de magie pour survivre, évitant ainsi à l'homme d'être repéré.

"Ce jeune sot a vite compris qu'aucun son ne pourrait parvenir là-haut. Il voulait vous rassurer en envoyant une flamme, mais dans ces montagnes il y a des poches de gaz qui n'attendent que cela pour exploser. Le pic se serait effondré, vous avec, et l'aurait enseveli au passage. Je l'ai assommé pour éviter cela."

En effet, se remettant de ses émotions, Azelian découvrit le corps inanimé du général qui gisait à l'entrée d'une grotte aménagée directement dans la paroi : une alvéole protégée de l'humidité par le vent et assez grande pour abriter des meubles. Un mince filet de sang coulait sur sa tempe, synonyme d'un choc assez sec contre la roche. Il sortit aussitôt son sceptre pour guérir la blessure, l'esprit encore tout en émoi et le visage décomposé. L'homme le regarda procéder sans remuer un cil ni cacher qu'il observait attentivement la scène.

"Vous auriez pu frapper moins fort tout de même !
-Ou plus. J'ai évité à deux vies de s'éteindre inutilement, c'est l'essentiel.
-...
-Vous avez l'air de tenir à lui. Un bon point selon moi. Les mages solitaires finissent bien souvent par perdre la tête et devenir aigris."

S'il y avait une chose difficile à faire avec Azelian, c'était de s'attirer son antipathie. En quelques mots pourtant tout son mépris transparut dans son regard. L'ermite était bien mal placé pour parler d'aigreur si l'on regardait ses manières.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeJeu 21 Avr - 0:35









L'apprentissage commence





A son réveil, le général trouva Azelian à ses côtés, ainsi qu'un mal de crâne cinglant. Le guérisseur lui résuma en quelques mots ce qui s'était passé après sa chute du haut de la cascade, puis mentionna le départ de l'ermite depuis un bon moment sans donner de nouvelles.

"Il semblerait que ton intuition ait encore fonctionné. Nous sommes dans son repaire. Mais je ne sais pas si cela signifie qu'il va t'entraîner. Au moins je peux rester.
-Restons optimistes, c'est un premier pas de fait en avant. Et crois bien que je ne m'arrêterai pas avant d'avoir obtenu une réponse claire.
-Ta volonté me fait peur parfois...
-Azel... Plus j'y pense et plus je me dis que j'en ai besoin. Tu avais raison, je ne serai pas en paix tant que je ne pourrais pas me concentrer sur quelque chose. Je rêve constamment de ma défaite face à Geoffrey, et de ce que sera mon retour à Criméa... Peu glorieux je dois dire.
-Si c'est pour de bonnes raisons, alors tu as tout mon soutien. Je préfère te voir ainsi."

Ils bavardèrent encore un moment puis explorèrent les lieux. L'alvéole comportait trois couloirs creusés dans la roche. L'un menait à ce qui ressemblait à une salle de bain avec une source souterraine naturelle. Le deuxième contenait une réserve conséquente d'or et d'herbes en tous genres, probablement médicinales si on prenait les odeurs qu'elles dégageaient en compte. Le dernier s'arrêtait sur une corniche exposée aux vents si haute que le simple fait de regarder en bas donnait le vertige.
A leur retour dans la niche principale, aménagée comme un bureau, salon, cuisine, atelier, le maître des vents était de retour, un large panier de fruits à la main accompagné de pain frais, de quelques pièces de viande et d'eau douce. Son regard était sévère et son visage fermé, mais il divisa tout de même la nourriture en trois tas égaux et les invita d'un signe à s'asseoir sur des roches plates en guise de chaises. Les deux amis ne se firent pas prier et se souhaitèrent mutuellement un bon appétit.

Le soir tombant, Azelian fit savoir qu'il allait chercher un coin où dormir, et spontanément l'ermite lui indiqua une natte roulée dans un creux de la roche, ainsi qu'une couverture. Mysti fut assez surpris de la diligence du personnage, alors que tout son comportement tenait plus de l'indifférence cinglante que de l'accueil chaleureux.


"J'ai comme l'impression que vous ne m'appréciez pas beaucoup...
-Encore une fois votre perspicacité fait ses preuves.
-... Je suppose que l'amabilité n'a rien à voir avec la maîtrise après tout. Mais j'aimerais bien savoir pourquoi.
-Non.
-Acceptez-vous tout de même de m'entraîner ?
-Cela dépendra de vous. Je ne fais pas cours aux petits enfants capricieux.
-Capricieux ? Je vous trouve plutôt mal placé pour avancer cela ! Depuis que nous sommes ici, vous ne daignez répondre clairement à aucune de nos questions et votre bonne humeur semble mieux cachée que cette grotte !
-Pauvre enfant."

Mysti souffla bruyamment par les narines et contint du mieux que possible sa désapprobation. Ce n'était pas le moment d'exploser et de lui dire ce qu'il pensait de lui. La partie se gagnerait peu à peu, avec de la patience... qualité qui faisait parfois défaut au dompteur des flammes. L'homme se leva, débarrassa les restes de pelures et autres déchets puis darda un œil impitoyable sur le chevalier, qui ne put s'empêcher de craindre un nouveau traitement injuste et gratuit.

"Vous êtes libre de circuler, mais oubliez dès maintenant votre pouvoir. La moindre flammèche nous tuerait tous dans cet endroit. Alors tenez-vous tranquille."

Et sans un mot de plus, il s'envola comme un oiseau jusqu'à un autre creux dans la roche, en hauteur, où il s'installa pour dormir. Mysti soupira et alla s'installer à l'entrée de la grotte, les jambes étendues sur le filet, le regard levé vers la hauteur vertigineuse d'où ils venaient. Impossible d'escalader si par hasard il voulait envoyer un message à Sanaki ou qui que ce soit d'autre désormais. Ils étaient coincés ici. En un sens ce n'était pas plus mal, cela le décourageait de vouloir faire demi-tour.

Le lendemain, le réveil fut des plus brutaux : le général reçut en guise de bonjour un seau d'eau glaciale sur le corps et poussa un cri à réveiller toute la montagne alentour. Sans avoir le temps de réagir, Mysti se retrouva poussé à baigner dans la source du deuxième tunnel, gelé, et sans la moindre explication. Il finit par comprendre en avisant le savon et la serviette posés sur le côté, mais la présence de l'ermite le dérangeait.


"Je suis prêt à me laver, fit-il en sortant de la source pour se dévêtir, mais je préférerais un peu d'intimité si ce n'est pas trop demandé...
-Tss."

Et la même scène se reproduisit chaque matin, sous le regard médusé de l'impuissant guérisseur. Au bout du troisième jour, le soldat finit par esquiver l'attaque, son sommeil rendu léger par la méfiance. Au bout du huitième, il se réveillait même suffisamment tôt pour que le maître n'ait pas la possibilité de remplir son seau. Au seizième, fulminant d'être ainsi traité sans même savoir pourquoi, il finit par attraper l'ermite avant que celui-ci ne sorte de la source.

"J'aimerais comprendre ce que vous attendez de moi à la fin ! J'estime avoir été patient jusque-là, je me conforme à toutes vos indications, vos caprices, vos humeurs ! Vous m'avez poussé du haut d'une falaise, aspergé d'eau froide, je suis obligé de vous demander chaque fois de vous éloigner lorsqu'il est temps que je me lave, et vous ne dites rien, vous ne faites rien, vous semblez attendre que je sois à bout ! Eh bien voilà vous avez gagné ! J'en ai assez de subir sans au moins comprendre ! "

Se sentant prêt à exploser, Mysti fit un effort immense pour garder son pouvoir sous contrôle. Il ne prétendait pas avoir droit à tous les honneurs parce qu'il était noble, ou général, ou bien intentionné, mais au moins savoir pour quelle raison tout ceci se déroulait de façon aussi déplorable. A côté de cela, Azelian avait toujours droit à la courtoisie la plus élémentaire et ne recevait aucun ordre. Gêné d'un tel favoritisme, le libertin se faisait discret et cherchait un moyen d'épauler son ami, en interrogeant parfois discrètement l'ermite. Le mage de feu incendiait du regard ce maître qu'il avait recherché tandis que sa voix se répercutait dans toute la grotte, et c'est alors que, de façon tout à fait inattendue, celui-ci sourit pour la première fois. Le fait était suffisamment rare pour que l'incrédulité s'empare du général et que sa colère retombe aussitôt. Il observa cet étrange individu sans bouger, se demandant s'il était encore l'objet d'une farce ou s'il avait dit quelque chose d'amusant malgré lui.

"Vous progressez enfin."

D'un geste doux, il passa dans le dos de Mysti qui se raidit tel un chat sauvage, puis le fit asseoir en appuyant sur ses épaules.

"J'avais besoin de connaître la limite, de voir le véritable visage de cette flamme qui brûle en vous. Votre première leçon, sieur de Méline, est la suivante : l'air est changeant, indocile, insaisissable. Comme les flammes, mais différemment d'elles. Le vent fait preuve de souplesse là où le feu exige de la résistance. L'abandon de soi, de ses tabous, de ses peurs, fait partie de la maîtrise du vent. Quelle a été la première épreuve que vous avez surmontée ?
-L'attente... L'arrivée par la cascade.
-Exact. A ce moment-là, vous avez ignoré la peur du vide et de l'inconnu, vous avez simplement sauté. Et ensuite ?
-Votre insupportable silence !
-Oui. Je vous ai poussé à abandonner vos manières pour découvrir jusqu'où elles vous étreignent. Malgré tout, vous conservez votre contrôle sur le feu et ne laissez pas votre maîtrise prendre le pas sur vous. La petite avait raison, vous êtes digne d'apprendre. Et le fait que des hommes tiennent à vous, et que vous teniez à ces hommes, m'a permis également de mesurer votre valeur. A ce titre, j'accepte de vous enseigner."

Abasourdi, tant par le soudain débit de paroles de l'ermite que par son discours, Mysti ne trouva pas la force de répondre et se contenta de le suivre des yeux. L'homme se plaçait alors devant lui et lui tendait la main amicalement.

"Vous devrez apprendre à vous défaire de vos manières obtuses, de cette étiquette de noblesse et de société qu'on vous a appris à respecter. Lorsque l'on veut manipuler le vent, il ne faut pas résister mais plier sans rompre, il ne faut pas s'énerver mais laisser les émotions couler sur soi. Accepter, endurer plutôt que réprimer, résister. Vous êtes une feuille et il est votre transport, vous êtes un pantin et il est votre fil, vous êtes un mage et il deviendra votre outil. Ainsi est le vent. Mais avant de passer à la magie en elle-même, il faudra renforcer votre corps, lui permettre de contenir deux magies aussi avancées sans s'auto-détruire. Et vous devrez apprendre sa théorie : les forces qui le régissent, la création du vent, les faiblesses et les forces, les faits à la place des rumeurs. Cela sera long et pénible. Et il n'y a pas de retour en arrière possible. Lorsque j'ai un élève, je ne le laisse pas repartir vivant tant qu'il n'a pas tout appris. Et si vous décidez d'abandonner... je vous tuerai. Est-ce clair ?
-Limpide."




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeJeu 21 Avr - 16:29









Et le vent souffla





La première altercation passée, Mysti put enfin reconnaître les bienfaits de l'entrée en matière de l'ermite. Il posait sur les effets du vent un œil neuf, plus objectif, plus imaginatif. Peu disposé à faire de la pédagogie avec son élève, le maître lui donna plusieurs livres anciens à déchiffrer. Dans le même temps, il lui conseilla la méditation -chose peu aisée quand on n'était pas habitué au bruit continu et à l'absence d'encens favorisant l'extension de l'énergie- tout en le frappant régulièrement. L'exercice consistait à renforcer la souplesse et l'esquive du chevalier, mais leur relation avait si mal commencé que Mysti ne pouvait s'empêcher de plutôt bloquer les coups et chercher à les renvoyer. Son ascendance sur le feu était son réflexe le plus instinctif, et le modifier prendrait bien du temps. Pour lui donner une bonne leçon, l'étranger le bardait alors de coups si vifs qu'il finissait souvent sonné et couvert de bleus.

De temps en temps, Azelian disparaissait afin d'aller s'occuper des chevaux et d'envoyer des messages à la capitale depuis un village proche. Il informait Sanaki, puis Criméa, de la bonne santé du chevalier et de ses progrès, de sorte qu'on ne l'oublie pas et pour prouver qu'il allait bien qu'à son départ. Mysti ne se doutait pas du contenu des lettres, et avec la complicité du maître avec qui il avait sympathisé, il ne racontait que les faits évidents.

Au fur et à mesure du temps, le Criméan s'habituait à ce style de vie particulier. Après les livres vinrent les premières formules magiques destinées à l'habituer au vent. Les coups faisaient moins mal, et il parvenait même à se mouvoir plus facilement pour les éviter, se rappelant surtout la gestuelle de Blaze et des autres mages éoliens qu'il connaissait. Suivant également le principe de "l'abandon de soi", il s'efforçait de ne pas tenir compte des innombrables insultes que le maître lançait à son encontre dans le but de le faire enrager. Un jour même, pendant le petit rituel de la source, il planta son regard dans le sien avec un air de défi et se dévêtit sans lui demander de sortir. L'expression de l'homme sembla ne pas changer, pourtant il ne sortit pas de la pièce et observa sans se cacher.


"Pour un jeune général trop vite nommé à son poste, vous avez plutôt une belle carrure.
-Je vous arrête immédiatement, je veux bien me passer de pudeur et d'étiquette, mais je n'accepterai pas les avances d'un homme. Adressez-vous à Azelian pour cela, il a un penchant pour... tout le monde.
-Je sais.
-Qu... ? Il vous l'a dit ?"

Un de ses rares sourires naquit sur le visage mat de l'ermite et Mysti en laissa tomber ses vêtements au sol.

"Mon charme redoutable a encore frappé !" Fit la voix de l'intéressé alors qu'il entrait à son tour dans la pièce.

Il se colla chaleureusement dans le dos du maître aux yeux d'émeraude et posa la tête sur son épaule, visiblement bien plus loin sur le chemin d'une relation amicale que Mysti ne l'aurait cru. A quel moment avaient-ils... ?

A partir de ce jour et sans plus de façons, les trois hommes se mirent à se laver ensemble et à discuter un peu plus ouvertement. Le soldat rougissait encore de tenir la chandelle à cette liaison bien étrange, mais tant qu'on ne le forçait pas à y prendre part après tout, Azelian était libre de faire comme bon lui semblait. Il sursauta cependant la fois ou une main se posa sur son dos, pendant l'un de ces matins. L'intention de l'ermite était seulement de voir de plus près la remarquable cicatrice qui striait son dos depuis si longtemps, cachée le plus souvent par ses longs cheveux noisettes. L'expression du guérisseur à côté d'eux s'assombrit alors.



"Cette marque... Je comprends enfin pourquoi vous avez du mal à ouvrir votre énergie au vent. Qu'est-ce ?
-Une cicatrice que je n'ai pas le pouvoir de soigner.
-Le souvenir d'une bataille. Elle m'empêche de manier l'épée comme je le faisais autrefois. Votre savoir vous permettrait-il de la guérir ?
-Je suis un maître du vent, pas un soigneur. Je peux seulement contourner le problème en ce qui concerne la magie. Nous ferons cela tout à l'heure.
-Faire quoi ?"

Ses cris de douleur résonnèrent dans toute la montagne tandis que l'ermite, perché avec lui sur un haut plateau suffisamment haut pour que son feu ne soit dangereux pour personne, insufflait lui-même du pouvoir dans son corps pour combattre la magie noire et contourner son influence. A la suite de cette délicate opération, Mysti déchaîna pendant plusieurs jours sa puissance magique, tant incendiaire que liée au vent, avec tant de hargne pour se soulager qu'il était inapprochable.

Mettant à profit tout ce qu'il savait, le chevalier régula sa force en méditant, longuement, indifférent à la pluie, au vent, aux esquisses de tempêtes qui sévissaient même. Laissé seul sur son rocher, c'était à lui de se dompter, de plier sans rompre, d'endurer sans résister, de laisser les éléments l'effleurer sans céder. Quand l'épuisement le gagnait, il trouvait à son réveil ce qu'il fallait de nourriture et d'eau déposé pour lui sur le bord du plateau, ainsi qu'un tome magique dont il pouvait essayer de se servir.

De cette manière, il ajouta l'expérience aux savoirs qu'il avait accumulés et réussit à réfréner l'énergie puissante qui le dévorait peu à peu. Azelian et l'ermite le regardaient de loin, confiants en sa victoire. Le héros de la Résistance criméane ne périrait pas ainsi, pas maintenant.

***Voilà pourquoi il a dit qu'il tuerait ceux qui abandonnaient... Ils deviennent trop dangereux s'ils ne se contrôlent pas...***

A force de persévérance et grâce aux nouvelles visites du maître, Mysti fit des progrès bien plus rapides une fois cette transformation de son être terminée. Il avait gagné en vitesse et en agilité, pouvait mieux alterner les styles de combat du feu et du vent, et même lancer des sorts liés à ce dernier.

Neuf mois s'étaient écoulés depuis son départ de Begnion avec Azelian et la garde, et il se sentait revivre, un homme neuf et à la fois attaché au passé pour mieux avancer.


"Il me reste une dernière épreuve à te soumettre jeune apprenti, et après cela je pourrais dire que l'élève a dépassé le maître, car tu seras l'heureux possesseur de deux types de magie différentes."

Il le conduisit ainsi qu'Azelian au troisième tunnel de sa caverne, celui qui s'arrêtait brusquement dans le vide, à une telle hauteur que la chute serait irrémédiablement fatale à n'importe qui. Mysti sut alors ce qui l'attendait et sourit aux deux autres. C'était de cette manière que l'entraînement avait commencé, et de cette manière qu'il prenait fin. Depuis le temps, le maître s'était montré de plus en plus conciliant, encourageant son élève plutôt que de chercher à le décourager. Le général savait maintenant qu'il n'avait jamais eu l'intention de le malmener gratuitement, que tout cela était une méthode pensée avec précision pour pousser un mage dans ses retranchements et le faire avancer dans la voie de la sagesse, sans laquelle le pouvoir n'était qu'oppression et tyrannie. Aucun doute qu'avec ce type de mentor Sanaki avait beaucoup appris, et que son gouvernement y était quelque peu lié, d'une certaine façon.

"Allez va, jeune oiseau. Prends ton envol.
-Merci... maître. Je n'oublierai pas tout ce que je vous dois.
-Tu es sûr de pouvoir le faire Mysti ? Rien ne nous oblige à partir maintenant.
-Je sais.
-Maintenant, abandonne-toi. Je ne viendrai pas te chercher."

Le chevalier acquiesça, fixa le vide un moment puis, sans avoir besoin d'une impulsion extérieure, se laissa tomber dans le vide. Azelian retint son souffle en le voyant chuter une vitesse vertigineuse.

Ce fut comme une renaissance, merveilleuse incroyable. Tout d'abord, le Criméan eut le souffle coupé. Il voyait les cascades se succéder dans un formidable grondement, l'eau en pleine cavalcade, libre et inopposable. Son cœur cognait dans sa poitrine comme le tonnerre dans les cieux, mais la terre, le sol, l'écrasement se rapprochaient. Il devait agir, communier avec ce vent qu'il avait cherché à apprivoiser pendant des mois. Il laissa sa puissance se déployer autour de lui, envahir les falaises, se disperser en tous sens. Et sans qu'il ne se l'explique, un incroyable sentiment de paix envahit tout son être. Comme si des mains invisibles le soulevaient, il perdit en vitesse. Orienté comme l'ermite lui avait appris, il se dirigea vers le côté et se superposa à un vent ascendant. En quelques minutes il réalisa qu'il volait, que sa maîtrise élémentaire pliait le vent à sa volonté, même s'il n'était qu'une feuille entre ses doigts. En riant, il accéléra, slaloma entre les falaises comme dans un dédale de pierres et d'eau. Une silhouette apparut devant lui, comme un autre oiseau aux grandes ailes déployées. Pour la première fois depuis qu'il le connaissait, il entendit l'écho lui rapportait le rire de son maître, et vit le visage de celui-ci exprimer une joie pleine et entière.

Tout ce temps, cette sévérité feinte cachait un homme tellement libre et heureux de vivre dans un tel endroit qu'il devait se faire violence pour rester indifférent. Les hommes qui cherchaient son enseignement se succédaient et se ressemblaient presque tous, et les quelques élus qui parvenaient à passer la première étape abandonnaient et mouraient.

Depuis Sanaki, aucun d'entre eux n'avait tenu bon, aucun sauf le général des armées royales de Criméa, dont la vaillance et les rumeurs clamaient la bonté et la ténacité.


"Voilà longtemps que j'attendais quelqu'un comme toi, Mysti de Méline ! Rapporta lécho. Je suis heureux d'avoir été ton maître sur cette route difficile ! Tu peux aller à présent ! Utilise cette magie à bon escient et rends-moi fier de toi !"

Pendant des heures encore, ils parcoururent l'immensité de la montagne, avant de revenir à leur point de départ. Le guérisseur, laissé là en sûreté, fut rassuré de voir arriver un chevalier épuisé et un ermite riant aux éclats. Ils fêtèrent cette victoire en s'offrant une virée dans un des villages proches, à la taverne. Si Mysti ne tolérait toujours pas de boire, sa fonction militaire encore présente dans son esprit, il participa volontiers au festin que leur offrit le maître. Les villageois n'avaient plus connu de semblables commémorations depuis bien des années, ce qui les amenait à se demander quel âge pouvait bien avoir l'homme à la chevelure immaculée.

La remise sur pieds le lendemain fut assez rude, notamment pour Azelian qui avait bu sans modération et profité allègrement de quelques dernières heures de plaisir en cette compagnie. Au moment des adieux, les regards irradiaient d'un nouvel éclat et ils eurent bien du mal à se séparer.


"J'imagine que vous allez rentrer chez vous maintenant ?
-Oui. Voilà bien longtemps que nous sommes partis, mon pays me manque... J'ignore comment tu fais pour vivre aussi seul...
-C'est une question de tempérament. En attendant si l'un de vous repasse par ici, il sera le bienvenu.
-Encore merci pour tout.
-Nous allons faire un détour par la Tour de Lumière. Avec tous les récits qu'on m'en a fait, et pour une fois que je suis dans cette région, je ne me pardonnerais pas si j'évitais d'y aller. Et quand cela sera accompli, je regagnerai mon manoir.
-Les caprices des admirateurs..."

Un rire rassembla les trois hommes une dernière fois, avant que les deux cavaliers ne se mettent en route vers de nouvelles aventures.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeSam 23 Avr - 20:48









La Tour de Lumière





La tour se dressait à l'horizon, si haute qu'on pouvait imaginer son sommet qui touchait le ciel et le reliait à la terre. Ce lieu autrefois rarement fréquenté était devenu, par le biais de la guerre et des événements extraordinaires survenus en son temps, une destination de pèlerinages et d'absolution de la conscience. Un endroit si imposant et majestueux que sa seule vue remplissait le spectateur d'une incroyable sensation de petitesse et de médiocrité.

Pendant que les chevaux avançaient au pas, respectueux aussi de la solennité des lieux, Azelian affichait un air époustouflé, le même qui avait guidé ce qu'il restait des armées de Dain, de Criméa, de Begnion, de Gallia, de Kilvas et de Phoenicis, les laguz-loups et les hérons, les humbles comme les rois, quand tous s'étaient rendus ici même pour empêcher Ashera de pétrifier tout Tellius. Pour sa part, Mysti demeurait silencieux et gardait les yeux rivés sur la structure géante, se demandant qui avait pu l'ériger, dans quel but originellement, et comment elle avait pu être ignorée si longtemps.

A mesure qu'ils approchaient, de plus en plus de silhouettes apparaissaient à leurs yeux. Il y avait des beorcs de tous les pays, des oiseaux haut perchés, des félins. Tous semblaient enfin pouvoir se côtoyer dans la paix et la tolérance, au moins le temps de leur passage sur les traces de leur passé, de leurs erreurs. Étrangement, les grandes portes du lieu demeuraient ouvertes, mais personne n'y montait, peut-être de peur de découvrir la noirceur dans son cœur et de ne plus jamais en ressortir. De par sa nature de mage, le général pouvait également ressentir une puissante force encore bien présente : une suggestion puissante qui indiquait à ceux qui souhaitaient entrer de faire demi-tour. Un subterfuge probablement instauré par l'influence divine qui avait dormi là si longtemps.

Les deux hommes passèrent plusieurs heures sur le site, à défiler devant les tombes et les tertres commémoratifs. Il y avait ici de nombreux souvenirs, de nombreux morts, une douleur flottant dans l'air comme le spectre d'un passé lourd de sens.

Lorsque les deux cavaliers s'approchèrent du pont qui permettait d'accéder à la tour, un silence assourdissant tomba autour d'eux. Il était évident qu'il y avait si peu de personnes qui s'y risquaient que les regards s'y tournaient bien vite lorsque c'était le cas. Le guérisseur hésita. Il n'était pas à sa place ici, il n'était pas digne. Il stoppa le pas à la moitié du pont, incapable de supporter la pression pesante qui le dissuadait d'entrer. Mysti ne fléchit pas et ne se retourna qu'en atteignant les grandes portes. Fraise était nerveuse près de lui, confiante, mais refusant d'aller plus loin. Le mage s'aperçut alors que son armure brillait. Une douce lueur dorée comparable à celle qui avait gagné les soldats lorsque la bénédiction de Yune les aidait à vaincre les soldats d'Ashera, eux-mêmes envoûtés. Il comprit alors que cette bénédiction ne l'avait jamais quitté, qu'elle lui permettait de passer outre l'avertissement implicite que tous subissaient en approchant de trop près.


"C'est un héros de la guerre ! Murmurait-on.
-Il est revenu rendre hommage à la déesse.
-Mais laquelle ?!
-Il va monter dans la tour !"

Indifférent aux rumeurs qui commençaient à parcourir les rangs, le Criméan posa un regard sur son ami qui tremblait désormais comme une feuille. Il lui adressa un sourire bienveillant et renvoya Fraise auprès de lui d'une caresse sur le flanc. Ce n'était pas un endroit sûr pour une jument après tout.

"Azelian, je vais y monter.
-Tu es sûr ?
-Il le faut. Après tout, j'étais là... J'ai gardé cette tour sans me soucier de ma mort. J'ai besoin de prier en son sein.
-Je... Je t'attendrai là. Je ne suis pas... Je ne peux pas...
-Je comprends. Tu n'as pas à avoir honte. Cependant, je n'y suis jamais monté... Je ne sais pas ce qu'il y a là-haut. Et je vais probablement y méditer de longues heures, alors ne t'inquiète pas trop vite.
-Entendu."


Tous retinrent leur souffle alors qu'il franchissait les portes sacrées, le froissement du velours de sa cape l'accompagnant comme un ronronnement apaisant. Il se mouvait tout à coup comme paré de la grâce d'un félin, associée à l'ampleur d'un oiseau et à la puissance d'un dragon. Effet de la bénédiction ou de sa simple humilité face au sortilège, personne ne sut le dire, mais les regards s'accrochaient à ces mailles dorées, aux armoiries brodées dans le rouge éclatant du feu et l'or triomphant de la justice. Sa tête disparut la première dans l'escalier en colimaçon, puis ses longs cheveux noisettes, son épée forgée dans le verre et la subtile ondulation du tissu aussi doux qu'élégant. Enfin ses pas s'estompèrent lentement, à mesure qu'il grimpait les marches, sans empressements ni lenteur.

C'était comme monter les marches de l'Histoire elle-même : longer les murs qu'Elincia et Ike avaient longé auparavant, écouter l'écho que leurs oreilles avaient perçu, respirer le souffle qu'ils avaient laissé échapper. Plusieurs paliers se succédèrent ainsi, menant à des pièces vastes et vides, où peut-être des affrontements s'étaient déroulés. Mysti se souvint des récits de ses compagnons : comment le roi-dragon et ses bras droits avaient défendu la déesse, comment Kurtnaga s'était imposé face à lui pour la première fois.

Plus haut encore, le général fut saisi. Quelqu'un avait gravé dans la pierre, sous forme de scènes-clefs, l'ascension de la troupe choisie pour aller défaire Ashera. Un homme en armure s'était dressé sur leur route, que le général Ike avait tenu à affronter en personne.


"Le Chevalier Noir... Zelgius."

Il y avait eu également l'un des plus proches amis de Sanaki, l'un des sénateurs les plus célèbres de Begnion, révélé sous le nom de Lehran. Le créateur du médaillon qui avait libéré Ashera de son sommeil séculaire...
Pris dans le déchiffrage de ces dessins incroyables, Mysti hâta le pas. Les détails étaient incroyablement précis, riches, comme si les images provenaient des mains d'une de ces personnes ayant gravi les marches. Il y avait tout ce que les compagnons décrivaient dans leurs récits quand on leur demandait de raconter. La prise de conscience que les pouvoirs d'Ashera dépassaient les leurs, la transformation partielle de la reine Micaiah sous l'égide de Yune, un simple oiseau au départ... La bénédiction des armes et, par extension, des soldats qui gardaient la tour, afin que nul ne vienne déranger le combat final, Ashera et ses serviteurs dragons, et puis...

Avant même de s'en rendre compte, le jeune homme posa le pied à l'intérieur de la dernière pièce. Un dais aux multiples voiles tendus dans toutes les directions était suspendu au-dessus d'une sorte d'autel rempli de plumes immaculées. Une énergie conséquente hantait les lieux, hiératique.


"Le Sanctuaire d'Ashera."

Tout semblait intact, comme à l'origine. Pourtant il y avait eu une bataille ici... Il y aurait dû avoir des dégâts, des ruines. A moins que quelqu'un n'ait reconstruit. Peut-être la même personne qui avait gravé les murs.
Ébranlé, le chevalier posa un genou à terre, puis le second, s'imprégnant de l'énergie comme du rappel de la miséricorde accordée à Tellius, grâce aux héros.

***

"Elincia... !"

Je veux venir, je veux me battre à tes côtés.

Non, ce n'était pas possible. Pas assez forts. Pas assez expérimentés. La reine devait accomplir son devoir, car tel était son rôle, et eux n'étaient rien dans cette équation, rien que les défenseurs de l'arrière-gardes, ceux à qui l'on confiait le soin -l'honneur !- d'empêcher quiconque de les rattraper !

"Criméans ! Saluez votre reine ! Saluons nos sauveurs !"

La troupe avait posé genou à terre, l'esprit accablé et à la fois remplis d'espoir. Leur rôle était moindre et pourtant, tellement important aussi. Ils n'étaient que des grains de poussière dans l'équation, mais leurs vies aussi infimes soient-elles permettraient de gagner le temps désespérément manquant. Ils mourraient, sans arrière-pensée, pour leur pays, pour le continent tout entier, pour l'avenir, pour les héros.

Et toutes les tombes qui jonchaient le parvis de la tour étaient ces personnes, sacrifiées pour le bien commun, pour la victoire de la déesse du Chaos.

***
En redescendant, Mysti se trouva devant une porte qu'il n'avait pas remarquée auparavant. Entrouverte, il en poussa le battant et tomba nez à nez avec une statue surélevée qui représentait une enfant aux traits joyeux. La sculpture paraissait bien plus récente que le lieu en lui-même. Des cierges neufs étaient alignés devant elle, prêts à être allumé par les audacieux qui auraient le courage de monter les marches de la tour.


"Yune ? Dans la tour d'Ashera ?"

Quelqu'un avait probablement installé ce Sanctuaire peu après la guerre. Peut-être encore et toujours le même "quelqu'un". Peu importait qui. Mysti décida que, puisqu'il était là, puisque son intention était le recueillement, il allait le faire dans cet endroit. Avec révérence il s'empara de l'un des cierges et le plaça sur le chandelier prévu à cet usage devant la statue. A l'aide de son pouvoir il enflamma la mèche puis attendit un moment. Yune semblait sourire un peu plus.
Il s'agenouilla finalement et joignit les mains.


"La déesse un jour se scinda en deux.
La terre s'ouvrit, les cieux rugirent,
le feu jaillit, les flots s'épandirent.
Et en ce monde les peuples s'affrontèrent.
Ô Ashera, déesse Justice, guide notre bras pour pourfendre le tyran et laver de son sang le déshonneur.
Ô Yune, déesse de sang, oppose-lui la fureur nécessaire à l'expression de la liberté.
Ô toute-puissante Ashunera, Équilibre primordiale, veille sur nous et sur nos enfants après nous, afin qu'ils vivent longtemps et dans le meilleur monde possible.
Loués soient vos noms !

Je prie en ce jour car je souhaite vous remercier de vos bienfaits et ai besoin de vos conseils...
"

Longuement, le général s'épancha sur ce qui s'était produit depuis la dernière guerre. Sa vie, autant que celle du continent de ce qu'il en savait, l'évolution des relations entre beorcs et laguz, les efforts de chaque nation pour mériter leur droit d'existence en ce monde. Sans compter son temps il parla de tout, mesurant à chaque mot combien de chemin avait été parcouru depuis ce jour-là. Ils avaient mûri, tous. Grandi. Le chemin était long vers l'harmonie parfaite, mais ils s'engageaient dessus peu à peu. Les grandes nations comme les simples individus. Pas après pas.

"... Pour moi-même je ne demande que la paix de l'âme et la guérison, afin de continuer à vous servir fidèlement. De corps, d'esprit et de cœur, je sers Tellius, je sers les déesses. Puissent vos idées se compléter plutôt que s'affronter. Puissent notre Foi nous éclairer et vous rendre honneur. Merci."

Au fil du récit, il avait fermé les yeux afin de se replonger dans sa mémoire, la retraçant fidèlement. Certaines blessures saignaient toujours, au point que quelques larmes dévalaient à présent son visage, mais parler le faisait tout à coup se sentir bien mieux. Il observa encore un moment l'idole puis lui renvoya son sourire.

Tout à coup, il se rendit compte d'une présence derrière. Azelian ?

Le temps de se retourner, et ce fut le néant.




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeDim 24 Avr - 14:48









Le Sage





Il y eut diverses sensations.

Pendant un instant, la douleur, aiguë, vive. Vint ensuite le froid. Un engourdissement progressif, mordant. L'impression et d'être déchiré de l'intérieur, son corps le théâtre d'un affrontement entre deux meutes de loups déchaînés pour la conquête d'un territoire, avec le tonnerre sonné par le battement de son cœur affolé.

La vision fragmentaire d'un visage ami, incapable pourtant de le reconnaître. Des mains sur son visage, sans chaleur, dans son dos, effroyable souffrance.

***Que se passe-t-il ?***

Pendant des heures, pendant une infinité, il eut l'impression de tomber dans le vide, sans rien pour se rattraper, le besoin de crier alors qu'un étau emprisonnait sa gorge, juste assez pour empêcher ses cordes vocales de vibrer, juste pour qu'un souffle insuffisant parvienne à ses poumons. Il était à la limite, au seuil entre la suffocation et la vie. Il voulait se débattre sans en avoir les moyens.

***Est-ce la mort ?***

Comment en était-il arrivé là ? L'esprit brûlant de questions et de signaux contradictoires, il chercha à faire le vide, à s'arrêter. L'isolation à l'intérieur de son esprit esprit aurait le mérite d'atténuer quelque peu la torture physique que son corps lui infligeait. Quelqu'un l'avait-il surpris et agressé lors de sa méditation devant l'autel de la déesse ? Cela aurait été bien surprenant quand on savait combien les pèlerins craignaient d'entrer dans la tour. Et pourquoi mettre à terre l'un des héros de jadis ? Non, ce devait être autre chose. A bien y réfléchir, ce chaos lui rappelait une chose. Il n'y avait qu'à un seul moment de sa vie qu'il se souvenait avoir subi une douleur aussi insupportable.


"Comment va le héros ?
-Il délire encore.
-Voici l'eau chaude que vous avez demandée.
-Merci. Je fais de mon mieux."

Azelian se maudissait de l'avoir encore laissé partir seul devant. Il n'y avait, a priori, pas de raison de craindre quoi que ce soit dans cette tour abandonnée et que personne n'osait gravir. Pourtant, lorsque la nuit avait étendu son manteau de ténèbres au-dessus d'eux, il n'avait pu s'empêcher de redouter le pire. Il avait alors pris son courage à deux mains, pour son ami, franchi la frontière invisible, et grimpé les escaliers quatre à quatre, sans prendre le temps de s'attarder sur les gravures, sur les lieux mythiques, sur l'influence des déesses. Mysti gisait, écroulé dans la statue d'une enfant devant laquelle s'achevait de brûler un cierge, tremblant et en sueur, fiévreux comme rarement.
Sans demander son reste, le guérisseur s'empressa de le hisser sur son dos et de fuir l'endroit qui manifestement ne voulait pas de visiteurs. L'émoi gagna les pèlerins encore présents devant les tombes quand ils aperçurent le soldat dont l'armure cessa de briller à l'instant où il passa de nouveaux les hautes portes. Comment devait-on interpréter le message ?

Pire encore, en auscultant son ami, le Begnionnais localisa un bouleversement magique à l'endroit où sa cicatrice le hantait. La magie noire se réveillait. Il essaya de multiples onguents ne serait-ce que pour calmer la grimace évidente de crispation sur son visage mais rien n'y fit. C'était un combat que Mysti devait mener seul, comme lorsque l'ermite avait détourné sa puissance de la marque afin qu'il puisse mieux l'utiliser. Coïncidence ou conséquence ?

Toute la nuit durant, Azelian veilla. Il revit avec horreur cette fameuse nuit, lorsque le sortilège scella le bras d'épée du général, le tordant de spasmes plus épouvantables les uns que les autres. Il devait s'assurer que pendant ses crises, le général ne s'étouffe pas dans son oreiller, ne se morde pas la langue et ne l'avale pas, qu'il respirait bien, que son cœur battait, qu'il était hydraté... L'éventail pléthorique des examens qu'il se devait de pratiquer lui permettait de ne pas voir, crue et glaciale, la douleur qui empirait, mais c'était un combat de tous les instants qui usait ses nerfs comme jamais autre chose n'en avait été capable.

Fort heureusement, quelques laguz-médecins avaient eu vent de la nouvelle et interrompu leur voyage pour venir le seconder dans sa tâche. Le beorc les remercia de leur aide avec chaleur quand il tombait de fatigue, pendant que les chats se relayaient au chevet du soldat hors de combat. Allongé sur le ventre, Mysty alternait les phases de froid intense, son corps aussi gelé que s'il était mort, avec d'autres de chaleur excessive. On pouvait même voir après plusieurs jours la magiques qui coulait dans ses veines, tellement accumulée par le repos forcé qu'elle en devenait discernable à l’œil nu.

Un combat de titan opposait Mysti à ses vieux démons. Il avait fini par comprendre qu'il n'était ni mort, ni vivant. La magie noire qui sommeillait en lui depuis des années luttait pour sa survie, car on l'avait tirée de sa torpeur et sommée de se retirer. C'est ainsi que, sous forme d'esprit, le mage prit en main l'affrontement. Les quatre animas qui constituaient son essence s'attaquaient sans relâche au spectre, tandis que la bénédiction de Yune protégeait le cœur d'une fin certaine. A la fois irréelle et cruellement réaliste, la scène prenait des allures de fiction à chaque heure qui passait. Le général tenait Iridescence en main, comme une vieille camarade relevée de ses blessures. A l'aide de l'épée, il prêtait main forte au Feu, au Vent, à la Foudre et à la Glace, chacun épuisant ses réserves autant qu'il le pouvait. Jour après jour, ils gagnaient du terrain, perdaient parfois une bataille et se retranchaient en arrière, car après si longtemps le spectre connaissait les recoins où se cacher, où puiser sa force.

Dix-neuf jours passèrent ainsi, la rumeur s'étendant aux alentours qu'un mal mystérieux cherchait à abattre un Élu de la déesse. Pour l'aider à se remettre, on tentait fumigations, acupuncture, crèmes médicinales, régulation des énergies, des méthodes plus occultes les unes que les autres. Rien ne semblait avoir d'effet convaincant, jusqu'à ce que le matin du vingtième jour se lève.


L'un des chats dodelinait de la tête en observant le visage inanimé du chevalier. Trop épuisé, il ne vit pas l'énergie qui débordait de plus en plus dangereusement autour du mage. Il entendit à peine le son de ses pas quand il se leva et sortit de la tente dressée pour lui. Ses yeux luisaient de pouvoir, l'un rouge comme les flammes aux reflets changeant, l'autre brillant de la magie verte du vent. Il s'éloigna vers un endroit dégagé, où personne ne dormait, où personne ne serait blessé, plongé dans une transe qu'il peinait à maîtriser lui-même. Le temps de la délivrance était arrivé, et cette fois, il vaincrait.

Le chat sursauta en captant les crépitements sonores et la chaleur des flammes. Un feulement s'échappa de ses babines, qui réveilla les autres laguz et Azelian au passage. Le guérisseur se tourna immédiatement vers le lit improvisé de vêtements et de feuilles. Il ne prit pas le temps de réprimander le chat et bondit dehors sur ses pieds, à la recherche du général.

Celui-ci irradiait d'une puissance trop longtemps contenue. Son regard se porta alors vers la Tour de Lumière et il tendit une main dans sa direction, comme si celle de Yune, sa statue s'animant tout à coup, allait franchir les murs et le saisir.


"Mère du Chaos, guide mon bras.
Mère de l'Ordre, rétablis ce qui était autrefois.
"

Il défit son fourreau de la boucle qui le retenait à sa ceinture : Iridescence brillait de mille feux, baignée des quatre magies élémentaires qui habitaient son propriétaire ainsi que du spectre. Elle était le reflet même du combat intérieur auquel il se livrait, la passerelle vers la délivrance. Mysti la tendit à l'horizontale devant lui, tandis qu'un sceau élémentaire se dessinait sous ses pieds. Quand le premier rayon de l'aube illumina sa silhouette, il fit jouer ses muscles et toute sa puissance magique pour séparer la lame de son fourreau, brisant ainsi le sceau de magie noire qui l'emprisonnait.

Toute la plaine fut réveillée par le hurlement strident du spectre qui sentait son pouvoir se dissoudre à chaque centimètre supplémentaire que la lame gagnait à l'air libre. Cette opération, si ordinaire pour n'importe quel bretteur, revêtait la plus difficile des formes présentement. Les flammes entourèrent le jeune homme, brûlant de leur ardeur la magie impie. Le vent se joignit à elles pour trancher tous les liens qui la retenaient à l'épée et la volonté de Mysti continuait à accomplir son œuvre. Parvenu à la moitié du chemin, le général eut même la surprise de constater qu'on l'aidait. Cherchant qui, comment, il constata que la Sage Bague à son doigt rayonnait de mille nuances. Ce phénomène décrit par Azelian avait alors bien lieu. Il devenait plus fort. Tous ses efforts aboutissaient enfin.

Tout à coup, toute résistance céda, Irisdescence était enfin libre et aveugla tous ceux qui posaient les yeux sur elle. Le spectre tenta de s'échapper, d'aller infecter quelqu'un d'autre, mais le sceau élémentaire lui bloqua le passage. Il chercha alors à s'échapper par les airs, comme un corbeau promettant de revenir plus tard chercher sa proie. Ce fut sans compter l'incroyable colonne de feu et de vent mêlés qui le prit en chasse et le réduisit en charpies sans attendre. Un rugissement de victoire plus tard et le calme réinvestissait les lieux. Les pèlerins n'en crurent pas leurs yeux. Rêvaient-ils ? Qu'était-ce que tout cela ?

Un long silence suivit, pendant lequel le général n'eut que le temps de se retourner avant qu'une tornade aux cheveux argentés ne se jette sur lui, la mine épuisée et rongée d'inquiétude.


"VAS-TU ENFIN CESSER DE ME TOURMENTER ??
-Tout est fini, Azelian...
-Comment ça fini ?! Tu n'as aucune idée de la peur que tu m'as fichue tout ce temps ! J'espère que tu as une excellente explication à fournir parce que... je... n'en peux plus..."

Le guérisseur craqua et fondit en larmes, alors que son ami lui souriait comme jamais auparavant. Mysti le serra contre son cœur, attendant qu'il se calme un peu avant de répondre d'une voix sereine :

"J'ai vaincu le sort qui m'emprisonnait. Mon bras est de nouveau libre, et la menace sur mon cœur n'est plus. Tu n'auras plus à redouter cela, Azelian. Merci d'avori là fidèlement, sans faillir. Ton soutien m'a été fort précieux.
-V-Vraiment... ?
-Oui. Notre voyage est terminé. Nous pouvons rentrer."

Soulagé, le libertin s'autorisa pour une fois à se montrer faible et à laisser Mysti le soutenir. Il était si fatigué qu'il se laissa reconduire à la tente, où il dormit plusieurs heures d'une traite. Mysti se chargea pendant ce temps de rassurer tous ceux qui s'inquiétaient, et surtout les chats dévoués à chevet.
Les deux hommes se permirent encore une journée de repos près de la Tour de Lumière, avant de préparer leurs bagages pour repartir.

Le voyage de retour sembla infiniment plus rapide : nulle embûche sur leur route, du baume au cœur et l'esprit en fête. D'un commun accord, les deux nobles s'arrêtèrent une dernière fois à Sienne, pour envoyer des messages, passer un jour ou deux ensemble encore, puis ils se séparèrent là, avec la promesse de se revoir prochainement.

*
Quand le Criméan aperçut enfin le château de Mélior, il réalisa que cela faisait exactement un an qu'il était parti en quête de sa guérison. Comment l'accueillerait-on après tout ce temps ? Il se souvint de ce qui l'avait poussé à partir : la demande en mariage, le duel contre Geoffrey, Elincia qui lui aurait refusé sa main de toute façon, et un abattement profond qui s'était conjugué à son combat contre la sorcière War. Un sourire amer étira ses lèvres.


"J'ai été stupide, hein Fraise ? Il est temps de rentrer à la maison. Et tu auras tout l'avoine que tu veux pour te remercier de cette longue marche."

La jument piaffa de contentement, provoquant le rire de son cavalier. Poussés tous les deux par la perspective de se retrouver dans leur foyer, ils pressèrent le pas en direction des grandes portes de la capitale. En les apercevant, les gardes hésitèrent tout d'abord sur les armoiries qu'ils apercevaient, mais les experts furent formels : le Général des Armées Royales revenait, galopant fièrement sur son destrier blanc comme neige. Un messager partit aussitôt annoncer la nouvelle au palais, tandis que Mysti faisait cabrer Fraise à l'entrée en guise de salutations. Il bavarda quelques instants avec les gardes, prenant note que, si des officiers exerçaient sa charge en son absence, personne n'avait été nommé officiellement à sa place. Ainsi Elincia l'attendait, et peut-être aussi son ami et supérieur.

Le cœur gonflé d'émotions, il reprit sa route au petit trot jusqu'au palais. Il rentra lui-même Fraise dans sa stalle et lui enleva selle et bride, la brossa, la lava, l'abreuva, la dorlota longuement, puis il prit ses quelques affaires de voyage et gagna ses quartiers. Rien ne semblait avoir vraiment changé, aussi prit-il le temps d'enfiler une tenue plus décontractée et de se reposer un peu.

A la fin de la journée, il frappa à la porte du bras droit d'Elincia, revêtu de son humilité et de sa nouvelle légèreté.


"Mysti ? Alors c'est bien vrai, tu es de retour ? Je n'osais pas y croire.
-J'ai besoin de m'excuser auprès d'un vieil ami. Est-ce que tu as un peu de temps ?
-Bon retour à la maison. Entre."

Et c'est ainsi que la nouvelle se répandit comme une traînée de poudre : un héros revenait de son long voyage, fit pénitence auprès de ses amis, et reprit sa vie comme avant. Il semblait toujours le même et différent à la fois, plus mûr, plus fort. La reine fut soulagée de voir que, malgré ses sentiments amoureux, il n'avait pas dépéri à petit feu. Mysti renouvela son serment d'allégeance et promit de l'aimer comme un frère, libéré du poids du secret qui l'avait tant accablé. Ce qu'il fit sans faillir.



FIN




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MessageSujet: Re: [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille.   [Changement de classe - Mysti de Méline] L'amour est un champ de bataille. I_icon_minitimeVen 29 Avr - 18:53

Ton CdC est donc terminé !
Un CdC que tu as très bien mené, les PNJ sont très bien manipulés, rien à redire !

Tu es donc validé Classe II - Sage, niveau 1 avec 64 points d'exp datant de ton RP avec Blaze !
Je te laisse appliquer tes nouvelles compétences, puis tu connais la suite!

N'hésite pas si tu as une question à nous poser !
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