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| Griffin Adams, une lueur d'humanité | |
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| Sujet: Griffin Adams, une lueur d'humanité Lun 27 Sep - 9:42 | |
| Chapitre I - La faiblesse d'un homme - PARTIE I - BLANC CONTRE NOIR
Les préliminaires étaient bel et bien finis, il ne restait plus de place qu'à l'action brutale, sauvage. D'un geste vigoureux, Griffin déplaça sa tour vers l'avant afin de pénétrer les forces ennemies, qui démontraient néanmoins une belle résistance. La situation était tendue et pouvait craquer à tout moment, il fallait à la fois du tact, de la finesse et du savoir-faire. Connaître quand frapper et comment, pour faire mouche à coup sûr. Hélas ce style de jeu n'était pas le fort de Griffin, loin de là. Son adversaire se mit sur la défensive, ce qui était loin d'être le genre du Marqué. Son tour de réflexion était venu à nouveau, et fit débuter un véritable brain-storming au fond de sa tête.
Pour une personne extérieure à la scène présente, ce charabia sans queue ni tête pouvait paraître bien abstrait, voir douteux. Cependant ce qu'il se passait actuellement n'était autre que le quotidien du très nouveau duc de Persis, Griffin Adams. Comme tous les mercredis depuis maintenant quelques mois, il passait le plus clair de son temps en compagnie de l'impératrice Sanaki à Sienne, au palais impérial. Une fois de plus la dame venait de le défier, et c'est presque avec satisfaction qu'il acceptait ce duel amical. Car quand deux grands esprits se rencontrent, il y a forcément une synergie particulière, un climat intéressant entre ces fortes têtes que rien au monde ne pourrait expliquer.
Mais après un léger quart d'heure, la situation était déjà critique. Fallait-il avancer, ou conforter sa défense ? Tandis que l'un persistait dans la première option, l'autre ne pouvait que se placer dans ses retranchements. Griffin plaça stratégiquement et délicatement son vassal sur le plateau, puis plongea ses yeux plissés dans le regard doré de son adversaire, la rendant encore plus perplexe qu'elle ne l'était. Il affichait ce petit sourire maligne de l'homme confiant en ses capacités, intellectuelles dans le cas présent. Faisait-il cela pour détendre l'atmosphère, ou bien pour faire peser sa supériorité sur son opposant, nul ne le savait vraiment, car elle pouvait aussi bien prendre ça telle une taquinerie visant plus à la déconcentrer qu'autre chose. Et c'était là toute la dualité de l'affaire, et aussi celle dans l'esprit de Griffin. Sans le vouloir il se retrouvait troublé par sa propre démarche. Devait-il instaurer une barrière entre elle et lui afin de mieux la contrôler, ou bien cédera-t-il au réflexe primaire de se laisser aller à la sympathie...?
Griffin regardait la scène d'un air intrigué, lorsque le Premier Ministre de Begnion présenta la très jeune nouvelle impératrice au peuple de Sienne. Elle devait avoir encore trois ou quatre ans à peine, tandis que lui était déjà dans sa phase d'adolescent aigri. Une fois le bain de foule par-delà le balcon du palais impérial terminé, l'homme rendit l'enfant à une femme d'âge honorable, avant de s'avancer vers le rideau du fond où s'était à moitié caché Griffin tout le long.
"Alors voici celle qui dirigera Begnion à sa majorité, hein..."
"Ne la sous-estime pas de la sorte, je suis sûr qu'elle serait capable de s'en sortir déjà bien avant. Bon il se fait tard, il serait temps de retourner au duché."
"Je sais bien qu'elle est un peu de votre sang, mais ne risque-t-elle pas de nous nuire par le futur ?"
"C'est une possibilité, oui, mais j'attends beaucoup d'elle, tout comme j'attends aussi beaucoup de toi."
"Que voulez-vous dire par là, maître ?"
"Ce n'est rien, rentrons Griffin..."
"...Griffin...?...Griffin !"
Il sursauta. Devant lui se dressait toujours sa partenaire de jeu, légèrement outrée vu son faciès par quelque chose, mais le Marqué ne savait pas vraiment la cause.
"Qui y a-t-il votre Altesse ?"
"Rien, c'est juste que si vous ne vous réveillez pas votre tour de jeu va bientôt être dépassé."
Elle disait vrai, alors qu'il commençait à rêvasser sur le passé, le sablier continuait la descente infernale de son contenu. Mais que faire ? Se recentrant plus sur le jeu, il commença à évaluer la situation vis-à-vis des coups précédents, et jugea qu'il devait opérer une manœuvre défensive afin de conserver ses unités. Mais était-ce vraiment la meilleure chose à faire ainsi ? Non, ce n'était définitivement pas son style, ainsi il envoya au charnier son Cavalier pour ouvrir une brèche dans le ramassis de pions restants du côté des Blancs. Le ménagement était sûrement une meilleure alternative à cette partie, cependant la prudence amène à la prudence, également dans le camp opposé. Paraître le plus franc possible était plus dans les veines de Griffin par moments, afin de mieux discerner le vrai du faux. Car la subtilité du jeu ici était de paraître honnête alors qu'on ne l'est pas. Un faux-semblant remarquable. L'impératrice prit de ses doigts fins sa Reine, et la déplaça en diagonale de trois cases. Griffin, dans un réflexe, empoigna délicatement la main de Sanaki avant qu'elle ne relâche son unité, et la dirigea vers le Roi noir, après avoir bifurqué sur la droite, cognant ainsi le pauvre dynaste déchu pour le faire se renverser au sol.
"Mat après encore trois coups, bravo votre Altesse."
" ..... "
Il relâcha la main de l'impératrice avec douceur tandis que cette dernière détourna son regard, probablement un peu gênée. Griffin, imperturbable, affichait son éternel sourire qu'on ne pouvait distinguer s'il était narquois ou bienveillant. Il reflétait sur son visage toujours cette dualité impressionnante, ses yeux plissés dénotaient quant à eux à la fois une sympathie et une méfiance pour toute personne le regardant droit dedans. Sanaki redressa son regard vers le duc de Persis, rappela sa main au niveau de ses genoux et prit un ton presque vindicatif à son égard.
"Qu'est-ce qui vous a pris, duc ?"
"Que voulez vous dire par là, votre Majesté ?"
"Votre comportement, et... pourquoi m'avoir laissé gagner de la sorte ?"
"C'était un bluff à double tranchant, Majesté. Si vous n'aviez pas saisi cette manœuvre, je vous mettais Mat en deux coups par la suite. Mais force est de constater que son Altesse fait preuve d'une réflexion et d'une vision des choses qui dépassaient mes prévisions."
"Cessez vos compliments à double sens je vous prie duc, j'ai l'impression que vous m'aviez prise pour une imbécile l'espace d'un instant."
"Loin de moi l'idée de vous offenser de la sorte votre Altesse, simplement que je préfère être franc et direct avec les choses que j'entreprends. Car à un mouvement près, vous étiez toute à moi..."
L'impératrice se leva de table, posant ses mains dessus avec force afin d'afficher son mécontentement vis-à-vis de cette remarque plus ou moins déplacée.
"Arrêtez tout de suite vos sous-entendus duc, ou je vous fait révoquer."
"Oh ce n'est pas grave votre Majesté, je vais prendre congé pour cette fois, je m'excuse de vous avoir offensé de la sorte, ce n'était pas mon attention."
Cependant son sourire pouvait également exprimer qu'il n'avait pas une once de remords, voir même qu'il se sentait amusé de la situation. Il se leva également avant de faire volte-face pour partir en direction de la sortie de la pièce. On entendit une nouvelle fois un choc de poings sur la table qui stoppa net l'avancée du Marqué, mais qui ne prit pas la peine de se retourner, craignant cette fois pour son matricule.
"Veuillez rester je vous prie, duc. Il serait fort mal élevé de laisser une impératrice seule dans cette pièce. Ou bien je vous accompagne donc dehors, je meurs d'envie de sortir faire un tour. Et une dernière chose, duc..."
"Oui votre Altesse ?"
"Cessez ces formalités pompeuses, appelez-moi Sanaki... S'il vous plaît."
Elle commença donc à reculer sa chaise et à se diriger également vers la sortie, donc vers un Griffin qui affichait un sourire... différent, mais imperceptible pour l'impératrice le voyant toujours de dos. Peut-être une des seules fois où son sourire était réellement sincère. PARTIE I - FIN
Dernière édition par Griffin le Dim 3 Oct - 0:34, édité 5 fois |
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| Sujet: Re: Griffin Adams, une lueur d'humanité Lun 27 Sep - 10:21 | |
| - PARTIE II - HUMAIN APRÈS TOUT
"Vous avez vraiment de la chance d'avoir de si beaux jardins, votre Majes... dame Sanaki, je suis impressionné de voir de si belles étendues au sein même de Sienne."
"Ah ne m'en parlez pas duc, je suis exténuée par ces jardins et autant ils me revigorent quand j'y passe du temps, autant quand j'y pense ils m'inspirent une totale aversion envers moi-même."
"Comment ça ? Vous êtes l'apôtre de Begnion, il n'y a pas plus fier privilège et meilleure existence en ce continent."
"C'est ce que vous croyez, duc..."
Elle se mit subitement à presser le pas, dépassant Griffin de peu et s'éloignant petit à petit, le regard baissé. Griffin était dans l'incompréhension la plus totale, et tenta de la rattraper en accélérant aussi. Mais quelques secondes plus tard, Sanaki commença à courir. Le Marqué emboîta le pas pour la poursuivre, et voulut lui attraper le bras pour l'arrêter, ne comprenant définitivement pas son comportement. Cependant dans la précipitation et à cause des robes très amples et longues de l'apôtre, elle marcha sur son drapé rouge et plongea vers le sol. Chute qui aurait pu s'avérer douloureuse si Griffin, dans un réflexe pur, n'avait pas finalement réussi à attraper sa main, tirer et à sauter pour se placer sous elle afin d'amortir cette dégringolade avec son corps. Les gardes du jardin, du moins ceux ayant assisté à la scène, se pressèrent vers les deux protagonistes, qui se remettaient de cet accident. Griffin n'affichait plus du tout son sourire habituel, et était presque apeuré de la situation. L'impératrice elle-même recouvrait son corps de sa faible stature, et le duc pouvait sentir le moindre mouvement de la part de Sanaki qui l'avait enlacé dans sa chute pour se rattraper. Griffin sentait également la respiration de l'impératrice au niveau de son cou ainsi que sa poitrine au niveau de son torse. Il fixait le ciel, mais la vue ne lui était d'aucune utilité, tous les autres sens ou presque étaient en alerte: le toucher essentiellement, ressentant son entière présence sur lui ainsi que le battement de son cœur, mais aussi l'odorat qui sentait le doux parfum de la dame et de sa chevelure bleutée, l'ouïe qui entendait la respiration presque saccadée de l'impératrice. Mais bizarrement elle ne bougeait pas, ou presque par quelques sanglots dans ses expirations tandis que ses poings serraient fortement les vêtements de Griffin qu'elle avait agrippé en tombant. Ce n'est qu'au bout d'une éternité, soit en réalité vingt secondes qu'on sentit l'extirpation de son corps par une force inconnue, qui s'avérait être celle d'un garde qui la releva. Mais Griffin fit également le même constat sur son propre corps, mais lui était redressé par deux autres gardes qui, eux, ne le lâchèrent pas une fois debout, on sentait une certaine animosité de leur part. Leur prise sur les bras du duc de Persis était forte et douloureuse pour ce dernier, dont le visage se crispa de douleur et d'incompréhension. En face de lui, l'apôtre était aussi debout, elle passa ses mains sur ses yeux tandis que le garde d'à côté avait un air accusateur envers le Marqué, comme cela devait être également le cas de la part des deux autres sur ses côtés.
"Votre compte est bon, duc. Même avec tout le respect que nous vous devons, avoir tenté d'agresser l'apôtre de Begnion est un geste inconcevable !"
"Mais je..."
"Pas de 'mais', vous serez mis en cellule provisoire et vous...!"
"SILENCE !"
Et le silence fut. Ce qui n'était guère étonnant vu la tonalité de l'ordre strict et direct donné par l'impératrice elle-même. Son air précédemment triste était transformé en ton coléreux, et elle fusilla du regard en se retournant le garde l'ayant aidé à la ramasser.
"Moi, Sanaki Kirsch Altina, suis la plus grande autorité qui soit ici, ce n'est donc pas à vous de décider du sort du duc Adams ! De plus cet accident ne regarde que le duc et moi-même."
"Mais votre honneur, je ne faisais que..."
"Alors ne le faites plus. Apportez le duc devant mes appartements, je m'y retire et nous réglerons ce différend plus tard."
"Bien votre Altesse !"
Sanaki fit volte-face avant de partir dans un sens accompagné du premier garde, tandis que les deux autres lâchèrent Griffin mais lui ordonnèrent de les suivre en allant de l'autre côté. Ils firent le tour d'absolument tout le palais impérial pour finalement se retrouver devant une porte immense, gardée par deux soldats, un de chaque côté. La garde impériale se devait être irréprochable, ainsi ces derniers ne posèrent aucune question, voir n'oscillèrent pas d'un millimètre. Les deux autres partirent, laissant le jeune duc de Persis 'seul' face à cette porte, impressionné de la situation et hésitant. C'était une des rares fois où Griffin ne se sentait pas à l'aise, mais il s'approcha tout de même de la porte et tendit sa main vers elle, cependant on entendit un cliquetis venant de part et d'autre comme si les deux gardes étaient en alerte. Le stress monta d'un cran, mais un "Entrez !" étouffé par la porte se fit entendre, et les cliquetis s'arrêtèrent. Griffin respira un grand coup avant de pousser un battant de la porte, et d'entrer dans la pièce en la refermant derrière lui. La pièce en elle-même était sombre, aucune fenêtre n'était visible et le seul éclairage ambiant était constitué de la lueur de bougies superposées ça et là sur les meubles, les murs... La salle était assez grande, et on pouvait y apercevoir à droite une bibliothèque, une gigantesque armoire de chêne ainsi qu'un paravent à côté de cette dernière. À gauche un piano et un bureau standard mais ouvragé, et sur les murs des bougeoirs et des tableaux divers. Griffin se pencha un peu plus sur ces derniers pour constater qu'il s'agissait de portraits de femmes dont certaines étaient plus ou moins connues. Le jeune duc reconnut entre autres les apôtres Altina et Misaha, la première via les livres d'histoire, la seconde pour l'avoir vu directement dans un bain de foule vers ses dix ans. Il constata cependant l'absence du tableau de l'impératrice actuelle. Et pour finir, au fond de la pièce, centré par rapport à celle-ci cependant, un grand lit devant faire près de trois mètres sur quatre. La pièce était baignée dans une ambiance presque sombre et rougeâtre, due à la couleur des murs et de l'éclairage, et il fut un effort d'observation pour apercevoir par delà les rideaux du lit une forme humanoïde assise sur le rebord de la couche.
"Ex-excusez-moi votre grandeur, je ne voulais pas vous déranger si...!"
"Si je vous ai dit d'entrer duc, ce n'était pas pour rien... Venez vous asseoir s'il vous plaît..."
Griffin s'approcha, et pouvait apercevoir au fur et à mesure qu'au pied du lit se trouvait la grande robe rouge de l'apôtre. Il continuait malgré tout, et la vit assise à deux mètres de lui, sur le bord droit du lit. Elle était vêtue de son habituel pantalon ample de toile blanc, mais cette fois-ci plus aucune robe ne cachait son débardeur long blanc à bords pourpres, sans manches. Le jeune Adams chercha alors un siège du regard, et vit que l'unique place assise était devant le bureau, ce qui le blasa légèrement. Cependant l'impératrice se décala un peu sur sa gauche comme pour l'inviter à s'asseoir à côté d'elle. Il hésita en premier lieu, mais il se mit à fixer l'apôtre dans les yeux, pour se rendre compte que ces derniers étaient légèrement gonflés et humides. Il déglutit encore plus et se força à se placer à côté d'elle. Du moment où les deux protagonistes étaient côte à côte, Griffin se mit à regarder le visage de Sanaki, qui elle avait orienté son regard face à elle, comme imperturbable et comme si personne n'était à côté d'elle.
"Je suis désolé... Désolé pour vous avoir causé des soucis, ce n'était nullement mon intention."
"...Vous n'avez pas à vous excuser, vous n'avez rien fait de mal."
"Si ! Votre comportement a invraisemblablement changé, je ne pourrais dire que je suis réellement en face de mon impératrice en ce moment même. Ce changement est de ma faute, j'en suis certain."
"Suis-je... invraisemblable ? Est-ce si étonnant pour moi d'avoir... des regrets, du chagrin ?"
"...Ce... n'est pas ce que j'ai voulu exprimer, votre excellence, mais tout ceci était si soudain, et si impromptu que..."
"Je sais bien, cher duc de Persis, qu'une apôtre telle que moi, l'impératrice du plus grand empire de ce continent, se doit de respecter un certain standing, je vous l'accorde. Dans ce cas c'est à moi de m'excuser d'avoir montré mes émotions en public, je suis désolée."
Elle baissa le regard, et semblait maintenant fixer ses pieds, ou plutôt le vide complet en vérité. Sa mine exprimait tout le regret du monde, et son sourire était inexistant. Griffin se leva du lit, sans doute pour partir et la laisser seule, se disait-elle. C'était mieux ainsi, de la sorte elle cessera de l'ennuyer et pourra se lamenter seule, car tel était son devoir. Mais aussi improbable que cela puisse paraître, le Marqué s'agenouilla devant elle et empoigna ses frêles mains pour l'inciter à remonter son visage, ce qu'elle fit.
"Ma dame, vous êtes en ma présence certes, mais pas du sénateur Adams, ni du duc de Persis, je suis juste Griffin... Ne gardez pas simplement pour vous-même votre peine, car je suis l'héritier de feu le seigneur Sephiran, et je me montrerais digne de ses dernières volontés, à savoir pouvoir m'occuper de votre bonheur. Votre Majesté, je vous en prie, racontez-moi ce qui pèse sur votre cœur, qu'est-ce qui ne va pas ? Vous ai-je offensé à ce point dans la cour ? Si tel est le cas, je..."
"Monsieur le duc de P...! Je veux dire, Griffin... rasseyez-vous s'il vous plaît."
" ...Bien."
Il se remit debout, le cœur battant la chamade, et en quelques pas se rassit à côté d'elle, toujours en la regardant dans les yeux, tandis qu'elle continuait à fixer en face d'elle. Soudainement elle ferma les yeux l'espace d'une seconde, le temps de partir en arrière pour s'allonger dos sur le lit, les jambes restant à la verticale au bord. Griffin la regarda dans un premier temps, et finalement comprit la situation et se mit à regarder en face de lui, sans pour autant ignorer la présence de l'impératrice à ses côtés.
"C'est étrange, n'est-ce pas...?"
"De quoi voulez-vous parler ?"
"Une impératrice, apôtre aimée de son peuple et à la tête d'un empire puissant, se montrer si vulnérable et faible, n'est-ce pas pitoyable à voir."
"Pas du tout votre altesse !"
"Ne niez pas avec vos phrases pompeuses juste parce que mon rang social est supérieur au vôtre, s'il vous plaît..."
"Non, je vous l'ai dit juste avant, je ne suis pas le duc de Persis, je suis Griffin, et vous n'êtes pas mon impératrice entre ces murs, vous êtes... Une femme que je comprends, Sanaki..."
Le silence s'installa peu après la fin de la phrase, Griffin attendait une réponse à son éloquente phrase, qui aurait pu lui valoir son titre et sa tête même devant tant d'insolence, mais c'était son style dans un sens, que d'être franc et respectueux envers celle que Sephiran chérissait le plus au monde. Cependant rien ne se fit entendre pendant les trente premières secondes, pis un reniflement léger, et des sanglots. Les pleurs commencèrent à se firent entendre, et on pouvait sentir par le biais du contact avec le lit un décalage latéral de la part de l'apôtre, le temps de deux longues minutes. Griffin ferma les yeux durant tout ce temps, ne pouvant encore une fois ne fier à sa vue mais surtout à son oreille. Et ce qu'il entendait était le chagrin à l'état pur, et le Sans-parent face à ça réagit comme un enfant entendant un autre pleurnicher, il sentait une légère humidité monter à ses yeux, il ne supportait pas de constater qu'elle puisse souffrir, de par sa faute ou sa simple présence. Mais il resta impuissant, respectant la volonté de Sanaki à pleurer, tout ce qu'il fit est de placer sa main gauche en arrière, rien de plus. Dix secondes plus tard, il sentit les mains de l'apôtre s'emparer de cette main et de la serrer, tandis que s'amoindrissaient les pleurs. Au bout d'un certain temps, plus rien ne se fit entendre à part une respiration un peu plus forte que la normale de la part de l'impératrice, jusqu'à ce qu'elle se mette enfin à briser le silence.
"Merci, je... Je vous remercie de votre sollicitude, Griffin..."
"Ce n'est rien, je suis désolé pour tout votre altesse, vraiment."
"Je suis si égoïste, et nulle. Je ne mérite pas votre bonté, duc..."
"Allons, je ne suis pas comme tous les autres sénateurs non plus, nous faisons partie plus ou moins de la même génération après tout. Mais plus que cela, j'espère que vous allez mieux maintenant."
"Oui, je... Ça m'arrive de craquer mentalement, je suis désolée."
"Cela arrive à tout le monde, nous sommes tous humains. Vous comme moi."
"Pourtant c'est si difficile d'être comme je suis. Être apôtre amène à trop de responsabilités, et les citoyens attendent tellement de moi que je ne peux pas flancher devant quiconque. Personne sauf vous, depuis cet instant..."
"Vous m'en voyez... désolé et ravi à la fois, je ne sais que dire d'autre."
"Ce n'est rien, je... On attend tellement que je sois parfaite que personne ne se rend compte que je suis une femme, avec des envies et des désirs, même si ça doit faire de moi quelqu'un de terriblement égoïste. J'aimerais qu'on s'occupe de moi comme l'avait pu faire Sephiran autrefois, j'ai besoin de soutien... Vous avez tellement de chance, Griffin, d'être celui que vous êtes..."
"...Peuh, si vous saviez vous ne direz pas ça, votre altesse."
"Je sais plus de choses que vous ne le pensez, vous savez... Sephiran m'a quelquefois parler de vous, mais refusait que je vous rencontre. Mais je sais que vous êtes réellement un Marqué, bien que vous niez le contraire."
"...Il vous l'a dit ?"
"Oui, désolée de vous apprendre qu'il n'en a touché aucun mot avec vous..."
"Ce n'est rien, mais comment pouvez-vous affirmer préférer être à ma place en sachant le sort qu'on réserve aux sous-êtres de mon espèce ?"
"J'aurais aimé être Marquée, au moins cela aurait signifié que j'aurais été la véritable apôtre de Begnion, celle qui entend la voix de la déesse..."
"Vous voulez dire que... Cette histoire de sœur aînée est aussi vraie ?"
"...Oui, je vois que Sephiran aussi vous disait certaines choses... Le Sénat à l'époque me traitait comme une imposteur, ce que je suis réellement, et ça... je..."
Griffin soupira fortement pour la couper, puis s'allongea à son tour sur le lit, sur le dos. Il avait maintenant en face de lui non plus le mur, mais le plafond, différence peu flagrante en somme, mais il pouvait désormais sentir la respiration de Sanaki au creux de son cou, comme tout à l'heure. De son côté, elle resta sur son flanc droit, face contre le corps de Griffin et lui tenait toujours sa main gauche. Elle ferma les yeux, tandis que le jeune sénateur continuait à fixer droit devant lui.
"S'il y a imposture pour vous, il en va de même pour moi. Je n'ai aucun lien de parenté avec le seigneur Sephiran, je ne suis juste qu'un nom sur un testament après tout... Je suis comme vous, mais je vais outre ma crise d'identité et je fais tout pour que le mensonge devienne vérité. Et je ferais tout pour qu'un jour, je devienne le digne successeur de mon maître, tout comme vous je suis certain que vous mènerez cet empire vers les heures les plus glorieuses de son histoire."
"...Merci, Griffin. Vous me comprenez, au moins, et je vous en remercie."
Elle se décala légèrement sur sa droite, en somme vers Griffin, plaçant son corps contre le sien et la tête sur la poitrine du Marqué. Ce dernier sursauta légèrement et se mit à bégayer.
"M-m-mais que... que faites-vous vo-votre altesse ?"
"Chuuuuuuuut, taisez-vous duc, ceci est un ordre de votre impératrice."
" ...Je... "
"Hi hi, votre rythme cardiaque accélère. Seriez-vous embarrassé, monsieur Griffin ?"
"Évidemment ! Sauf votre respect vous faites honte à votre statut d'impératrice à agir de la sorte !"
"Je ne suis pas une impératrice dans cette chambre, pas plus que je ne suis votre supérieur en vérité, je ne suis... qu'une femme, avec des envies et des désirs, ne vous l'avais-je pas dit déjà plus tôt ?"
"En-enfin dame Sanaki, le duc de Gaddos vous a déjà formellement présenté son fils aîné pour vos fiançailles, et..."
"Et je m'en fiche, je l'ai déjà officieusement révoqué la dernière fois que je l'ai vu. Seul le duc de Gaddos est au courant de cette rupture."
"Mais pourquoi cela ?! Il est pourtant de bonne famille et je ne... suis qu'un Marqué, ainsi qu'un..."
"Ce n'est rien, après tout... Je suis l'impératrice et je fais ce que je veux, ma parole est indiscutable, ne le saviez-vous pas ? Alors obéissez-moi et cessez de contester je vous prie."
"...Oui, votre altesse..."
La confusion la plus complète régnait au sein du cortex cérébral de Griffin Adams, duc de Persis et Sénateur de Begnion. L'homme qu'il était ne pouvait pas réfléchir comme il en avait l'habitude. Il était entièrement dépassé par les événements présents, et lui si manipulateur est désormais le manipulé. Son envie de détruire ce 'foutu monde de merde' était maintenant surpassée par l'envie de rester immobile, sentant pendant sa respiration le poids de la tête de l'apôtre sur son torse. Rouge, telle était la couleur dominante dans le champ de vision du Marqué, toujours en train de fixer le plafond, mais au fur et à mesure la respiration de la jeune femme se faisait plus forte, plus longue, tandis qu'aucun autre mouvement n'était perceptible. Et lentement le noir remplaçait le rouge, et les ténèbres tombèrent sur le jeune Griffin, jusqu'à ce que plus aucun geste ne soit possible. PARTIE II - FIN
Dernière édition par Griffin le Lun 27 Sep - 13:22, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: Griffin Adams, une lueur d'humanité Lun 27 Sep - 11:14 | |
| - PARTIE III - VOYAGE SALVATEUR
La calèche dévalait les routes de terre à travers les plaines de Begnion à toute allure, tirée par quatre puissants étalons blancs, qui n'étaient pas sans cacher la nature noble et fortunée des passagers à bord. Cependant comme on dit, l'argent ne fait pas le bonheur, et malgré la richesse évidente des deux protagonistes ils étaient effectivement loin d'être heureux en ce moment même. Griffin était assis dans la partie avant du véhicule, les coudes sur les genoux et se tenant la tête de sa main droite, le bras gauche étant pour sa part enchevêtré dans un bandage épais et soutenu par une écharpe. En face de lui, une jeune femme méconnaissable à première vue. Elle devait avoir l'âge adulte de peu, son regard doré exprimait toute la noblesse de son caractère et la beauté qui la caractérisait. Cependant c'était là les seuls indices pouvant aider à reconnaître l'apôtre Sanaki, ses longs cheveux bleutés étaient attachés à l'arrière par un léger chignon rouge, et elle n'avait pas son habituel bandeau sur le front, dévoilant pour une des rares fois de son existence ses sourcils fins et froncés actuellement, démontrant la mauvaise humeur de la demoiselle. Ses habits n'avaient rien d'extraordinaire, elle possédait une longue robe blanche descendant jusqu'aux genoux, ainsi qu'une cape brune de mauvaise fortune. Il n'y avait que sa prestance qui pouvait désormais la faire passer pour une noble, le reste étant clairement des signes distinctifs de simple roturier. Le silence était pesant dans la cabine, et rien ne semblait vouloir empêcher cela. L'impératrice ne faisait que regarder par la fenêtre du carrosse, tandis que Griffin regardait le sol, désemparé. Tout à coup, le véhicule roula maladroitement sur un rocher, ce qui fit sursauter leurs passagers et Griffin grimaça de douleur à cause de la secousse sur son bras cassé. Sanaki quant à elle, en entendant le râle de son compagnon de voyage, ne fit qu'orienter l'espace de deux secondes sa pupille vers lui, avant de recommencer à fixer l'horizon. Là c'était trop tard pour l'esprit de Griffin, qui repartit sur une tentative désespérée de dialogue.
"Votre Altesse ?"
Aucune réaction.
"Majesté ?"
Toujours rien, mis à part une nouvelle orientation de la pupille visible par Griffin avant de se recentrer sur l'extérieur.
"...Sanaki..."
"Je vous défends de m'appeler de la sorte, Duc de Persis ! Vous n'avez aucune familiarité à avoir avec moi, vous entendez !? Aucune !"
Elle s'était relevée d'un bond pour crier ces mots au Marqué, stupéfait par le manque de tact évident de l'impératrice. Il faut dire que l'incident de la semaine dernière avec le dénommé Samael Graveyard avait réellement envenimé les choses. Tout l'esprit fleur bleue instauré difficilement entre eux avait volé en éclats le jour où ce sinistre individu avait dénoncé le duc Adams à l'apôtre. Leur relation ne s'était jamais aussi mal portée, et Griffin en était conscient. Son envie de vengeance et de soulagement de sa frustration pourrait s'étendre sur le continent entier s'il en avait le pouvoir, mais patience... Bientôt ces misérables connaîtront le Jugement. Peut-être même elle, s'il le fallait. Si lui ne pouvait l'avoir, alors personne en ce monde ne le pourra, dusse doit-il plonger des civilisations entières dans le chaos. L'esprit de Griffin ne faisait que broyer du noir, il aurait aimé mourir plutôt que de vivre ces événements, mais il avait avant tout un devoir à remplir, accomplir la volonté de son maître. Il esquissa un léger sourire, mais qui s'estompa quand il remarqua que l'impératrice assise en face lui faisait maintenant les gros yeux.
"Et ça vous amuse, on dirait !"
"Non... Non ! Loin de moi cette idée Majesté, je vous ai déjà dit que j'étais sincèrement désolé de mon comportement, je... Ne savais pas quoi faire d'autre..."
"Ne cherchez pas d'excuse, Duc, vous avez trahi ma confiance, ma sincérité, mes sentim..... Vous m'avez trompé, un point c'est tout ! C'est impardonnable !"
"...Et bien même si le pardon est impossible, je continuerais à vous supplier de me l'accorder."
"Pff, c'est peine perdu Duc. Vous perdez votre temps en justification, jamais je ne l'oublierais."
Elle détourna son regard à nouveau vers l'extérieur, considérant que la discussion était terminée. Mais c'était sans compter l'entêtement de Griffin.
"J'étais... obligé d'agir ainsi, je ne pouvais pas faire autrement..."
"Que me chantez-vous là ? C'est grotesque ! Vous ne pouviez pas faire autrement que de me trahir de la sorte ?! J'ai tout découvert suite à l'intrusion de l'homme de la semaine dernière, les Sénateurs ont parlé ! Vous vouliez m'arracher une autorisation, une déclaration officielle de guerre envers le peuple Laguz pour avoir le soutien de la population, et mener à la mort nos soldats pour entretenir votre soif de pouvoir ! Tout a été dit, je ne vous ferais plus jamais confiance !"
"...Dans ce cas que faites-vous dans ce carrosse en ma compagnie, si je peux me permettre ?"
"Simple coïncidence, je comptais prendre la même direction. Je vous abandonnerais une fois arrivés au duché de Persis, c'est tout."
"Je refuse."
"Vous n'en avez pas le pouvoir, ni même la volonté, car je sais bien que maintenant que j'ai découvert votre manège à mon égard vous n'aurez pas la force mentale de me suivre et de me regarder en face !"
"...Sanaki, je..."
Un claquement retentit dans la cabine, et la gifle reçue par le Duc de Persis lui fit dévisser sa tête sur le côté, tellement il ne s'y attendait pas et tellement il y avait de la conviction dans le geste.
"Je vous ai formellement interdit de prononcer mon nom ! C'en est trop, Cocher ! Arrêtez ce véhicule, je descend !"
Et l'ordre fut respectée, et le carrosse stabilisé. L'apôtre descendit les deux marches, furieuse, et commença à marcher le long de la route. Griffin sortit de même, avant de demander au conducteur le les attendre sur le côté. Mais une fois qu'elle constata l'arrivée du Duc dans sa direction, elle bifurqua à droite pour 'couper' à travers champ. Le réflexe du Sans-parent fut de la rattraper rapidement en courant presque, et une fois arrivé à son niveau, réessaya de débuter les pour-parlers.
"Votre Majesté, ce n'est pas très conseillé de partir seule, vous..."
"Laissez-moi tranquille, et sachez que vous êtes un très mauvais conseiller doublé d'un traître, monsieur."
Elle se mit à enjamber les hautes herbes pour avancer au fur et à mesure, et accélérait son rythme à travers la flore. Griffin quant à lui tentait de la suivre tant bien que de mal, son bras immobilisé dans son attelle lui offrant une balance moins évidente à vitesse accélérée. Il tenta d'attraper de son bras valide la main de l'apôtre Sanaki, qui au contact de ce dernier se retourna brusquement pour le repousser de ses deux mains.
"Arrêtez de me suivre !"
Cependant à cause des hautes herbes ses pieds s'emmêlèrent, et en poussant le Duc elle fut prise dans un mouvement de recul qu'elle n'avait pas anticipé. Elle tomba lourdement au sol.
"Attention ! Sanaki ! Sanakiiiii...!"
Elle commençait à dégriser lentement, et par réflexe auditif elle bougonna.
"Je vous ai dit... de ne pas m'appeler comme..... Mais où sommes-nous ?"
Elle voyait de plus en plus clair, et du coup pouvait constater les faits: elle se trouvait sur un véhicule quelconque, car voyait le paysage défiler au gré des balancements à droite et à gauche, avant de voir qu'en réalité le dit-véhicule n'était autre que Griffin, qui la portait sur son dos. Elle voulut protester directement, mais un mal de crâne lui vint sans prévenir, la tiraillant de toute part.
"Doucement votre Altesse, le choc que vous avez reçu était peut-être bénin, mais veillez à ne pas forcer sur vous-même s'il vous plaît."
"Mais... Que faites-vous avec moi, je..."
"Le cocher semble être parti bien vite quand il a cessé de nous voir dans les hautes herbes, du coup nous sommes hélas à pieds mademoiselle."
"Je suis... tombée ?"
"Oui, j'ai eu peur au début à cause du sang, mais la blessure était superficielle, localisée derrière le crâne, ce qui explique le saignement exagéré. De plus vous vous êtes foulé la cheville en tombant, prise par les herbes. Mais ne vous inquiétez pas, je m'en suis occupé, et laissez-moi me charger de votre confort jusqu'à la prochaine ville."
Sanaki était perplexe, mais la douleur à la tête était bien réelle. Elle tâta sa blessure pour constater qu'un bandeau de fortune avait été placé autour de son crâne. Et un drapé improbable entourait sa cheville gauche. Il s'agissait, car elle le remarqua aussitôt, d'une part de l'écharpe de maintien de Griffin pour son bras cassé, ainsi que la manche gauche de la chemise du Duc, qu'il a probablement du déchirer lui-même pour faire ce bandage de fortune, ayant le bras maintenant à nu.
"Duc, vous n'aviez pas à faire ça. Et puis, aaaah... Votre bras, vous me portez de la sorte avec un bras fissuré ? Êtes-vous tombé sur la tête ?! Laissez-moi descendre immédiatement !"
"Désolé mais même avec tout le respect que je dois à mon impératrice, c'est un ordre auquel je ne peux obéir..."
L'homme aux cheveux gris, et l'apôtre pouvait maintenant le remarquer, était en sueur et son bras tremblait. La souffrance devait être insupportable pour le commun des mortels, et l'impératrice ne put s'empêcher de poser une de ses mains sur le front de Griffin, pour constater qu'il était bouillant.
"Arrêtez ça sur-le-champ Duc !"
"Je ne peux pas, désolé... En tant qu'homme, si je flanchais maintenant, je m'en voudrais toute ma vie..."
"Cessez cette folie s'il vous plaît."
"Ma conscience, mon devoir et... mes sentiments me l'interdisent, ma dame... J'ai beau être... impardonnable, je peux au moins encore... me rendre utile... Et je crois que je vois un bourg au loin, nous... y sommes presque."
"Je vous en prie... Griffin, arrêtez, je vous en prie..."
Sa voix se faisait toute petite, au fur et à mesure comme si ses propres mots étaient étouffés par un léger sanglot. Elle tapotait machinalement la tête du Duc de Persis, frappant sans force apparente avec une régularité sans faille, symbole de son impuissance face à la situation. Cette dernière ne bougea guère durant ces trois derniers kilomètres, mais une chose était sûre: Griffin ne s'en rappelait pas, ni de la fin du chemin, ni de la suite.
"Ne vous en faites pas, avec un peu de repos monsieur le Duc ira beaucoup mieux demain. Une chance que je sois un prêtre spécialisé dans les blessures osseuses, son bras gauche pourra bouger comme avant d'ici trois jours. Sur ce, je laisse mes honoraires habituels à monsieur le Duc et je vais prendre congé. Bonne journée mademoiselle."
"Merci docteur..."
On entendit des bruits de pas descendre les marches, sûrement ceux du médecin repartant chez lui. On l'entendit saluer les domestiques au loin, puis les bruits s'estompèrent lorsque Sanaki ferma la porte de la chambre. Elle alla s'asseoir près du lit, au niveau du Duc de Persis, endormi à cause de la fièvre. Mais le docteur a dit qu'il redeviendrait très vite conscient, c'était une bonne chose... Inquiète, elle repassa sa main sur son front, constatant que la température n'était pas comparable avec celle de tout à l'heure, sur la route. Puis sa main descendit légèrement, comme si elle était hypnotisée par le visage de Griffin, elle caressa avec une douceur extrême la joue du Duc de son index, lâchant en même temps un petit sourire, amusé ou je ne sais quoi encore...
"Ah, ça va mieux... Ohw, je... suis désolé votre Altesse, vous avez du vous faire du souci pour rien."
"...Pas du tout."
Griffin déglutit sur le coup, il n'avait vraiment pas l'habitude de ce genre de répliques, lui à qui on a du mal à ne pas céder à tous ses caprices. Mais il se remémora la gifle, l'embrouille avant qu'elle ne tombe, sa remontrance envers lui. Oui, même avec ces circonstances, elle ne pouvait lui avoir pardonné, c'était impossible.
"Dites, Griffin, pourquoi... m'avez-vous trahi ?"
Le Duc de Persis ravala sa salive d'un coup, mais fut étonné que pour une fois l'impératrice posait elle-même la question, sans qu'il n'en fasse mention. Il se mit en position assise avec une mine interrogatrice, regardant vers Sanaki qui semblait elle aussi troublée.
"Que... Comment ça ?"
"Je suis désolée, je... J'ai réfuté vos explications tout le long sans vous octroyer un quelconque moyen de défense. J'étais inspirée par la colère et l'indignation, mais là ça va mieux, vous... êtes un peu remonté dans mon estime, Duc."
Elle sourit, et Griffin se sentit presque revivre. Presque, car il reste toujours cette explication à fournir à sa dame, et il serait difficile de le faire vu les circonstances.
"Pourquoi cher Griffin, pourquoi avoir fait ça ? J'ai l'impression que... que vous vous êtes rapproché de moi dans l'unique but de me manipuler et de me prendre par les sentiments pour justifier une guerre stupide. Si vous saviez comme j'ai mal..."
"...Excusez-moi, chère apôtre, mais j'étais... obligé... L'attitude des sénateurs est absolument immonde, c'est pourquoi j'ai fait ceci... pour vous protéger."
"Me protéger ? Que voulez-vous dire !? Parlez s'il vous plaît !"
"J'imagine que vous vous souvenez de votre emprisonnement dans la Sainte Cathédrale de Mainal ? Le Sénat avait effectué cette manœuvre pour faire croire que vous étiez pour l'effort de guerre, afin de contrôler le pays à votre place. Nous... nous retrouvons dans le même cas de figure, aujourd'hui."
"Vous voulez dire... le Sénat...?"
"Oui, la plupart des Sénateurs voulaient voter une notion de censure vis-à-vis de l'apôtre, à savoir votre personne. Mais je ne voulais pas, je ne pouvais pas accepter qu'on puisse faire cela à vous, pas une nouvelle fois. Alors j'ai joué le jeu et je leur ai promis votre soutien pour qu'ils puissent vous laisser tranquille."
"Mais la guerre aurait éclaté..."
"Qu'importe que la guerre éclate ! Vous ne pouvez pas comprendre ! Je préférerais encore que le pays soit à feu et à sang plutôt qu'on ne vous fasse du mal !"
" ..... "
"...Enfin je veux dire... Je ne souhaite évidemment pas que le continent s'englue à nouveau dans une guerre meurtrière, ce n'est pas ce que je voulais dire, ah..."
"Je comprend votre point de vue, sir Griffin. Et merci, merci de votre soutien, je ne sais que dire."
"Moi non plus, c'est pour cela que, après les événements du cas Graveyard, j'ai... démissionné de mon poste de Sénateur."
"Griffin !"
"Désolé votre Majesté, mais après toutes mes erreurs je ne pouvais pas faire autrement. Plutôt perdre mes propriétés et mon statut plutôt que de perdre votre confiance."
"Finalement on dirait que vous allez mieux, Duc, que diriez-vous d'une balade ?"
"...Oui, volontiers."
Persis était un vaste duché où s'harmonisaient plaines, forêts et côtes maritimes, offrant la prospérité à tout type d'agriculture et de commerce. Le seul point faible de cette région est qu'elle se trouvait assez éloignée de Sienne, la capitale de Begnion. De plus, seule une brèche au nord du comté de Salmo permettait un passage vers Persis, entre la Grande Mer et le gigantesque lac de Semper. La ville la plus importante du duché portait le même nom que ce dernier, et en est en quelque sorte sa capitale, néanmoins la demeure du Duc ne se trouvait pas directement au cœur de la cité, mais à sa périphérie. Ainsi il pouvait jouir de la tranquillité de la campagne avec les privilègues de la proximité avec la ville. La promenade en calèche jusqu'à Persis fut silencieuse, mais contrairement à la première fois on sentait que la tension avait disparu. Arrivé en ville, le duo commença à vagabonder à droite et à gauche en faisant les boutiques, comme des personnes normales. Le seul hic était qu'au fur et à mesure de leur promenade des enfants au début, puis quelques adultes par la suite se mirent à accompagner le Duc dans ses emplettes. La bonne humeur était de la partie, les citadins accueillaient Griffin comme il se le devait, lui offrant parfois des dégustations gratuites pour lui et sa compagne du moment. Bizarrement personne ne reconnut l'impératrice dans cette tenue, faisant du Duc l'attraction de la journée. Beaucoup s'inquiétèrent sur son état de santé, son bras cassé, d'autres demandaient des nouvelles de la capitale. Griffin et Sanaki furent même emmenés de force à l'école élémentaire de Persis pour une simple visite devant une classe d'enfants. Mais bien que personne ne reconnu la jeune femme, les habitants de la cité montrèrent leur plus sincères salutations à ce qu'il leur semblait être la nouvelle compagne du Duc. Finalement en fin de journée, le 'couple' décida de ne pas repartir avec la calèche et se mirent à marcher jusqu'à la demeure de Griffin, mais en ayant préalablement rangé les diverses courses dans le véhicule pour ne pas s'encombrer inutilement pour la route.
"Ah, j'ai passé une journée mer-veil-leuse, merci à vous Duc de m'avoir accompagné."
"Et bien jusqu'à preuve du contraire, c'est vous qui êtes venu avec moi, et non l'inverse. D'ailleurs sans vouloir remuer le couteau dans une plaie cicatrisée, comment se fait-il que vous avez quitté Sienne sans prévenir personne en vous infiltrant dans mon carrosse, alors qu'à ce moment même vous me détestiez pour vous-savez-quoi ?"
"Ne vous fâchez pas, s'il vous plaît..."
"Ah ? Pourquoi ça ?"
"Jurez-le !"
"Je le jure mademoiselle, continuez..."
"J'avouerais que je ne savais pas si je devais avoir foi en vous ou non... Alors j'ai organisé cette mascarade."
"Mascarade ?"
"Oui, je vous ai accompagné à la base parce que je doutais de vous, et je voulais être sûre... En vous suivant, j'aurais eu forcément des preuves de votre mauvaise foi, de votre perfidie, de votre méchanceté."
" ..... "
"Mais votre peuple vous adore, et ils ne vivent pas dans le besoin ou la guerre, il n'y avait aucune animosité. Vraiment, je n'arrive pas à croire que j'étais encore au sein de l'empire de Begnion."
"Persis a le privilège de se situer loin des frontières Laguz, et l'ancien Duc Sephiran était un homme bon et aimé de la populace, je ne fais que profiter de son héritage, c'est tout..."
"Mais pourtant vous qui vivez dans une contrée paisible, je ne comprends toujours pas en quoi vous vouliez cautionné la guerre, si ce n'était que pour me protéger du Sénat ?"
"Hmm, disons que mes origines de Marqué font que j'ai une petite animosité envers le peuple Laguz, mais je pense que votre sagesse me permettra de surmonter ceci et que je puisse oeuvrer pour un monde meilleur... Oui, j'en fait le serment."
"Griffin..."
"Avec vous je sais que nous pourrons reconstruire ce monde à la perfection, nous pourrons faire régner l'égalité parfaite entre les trois genres, sans racisme ni haine. Il suffit simplement d'y croire."
"Duc de Persis, comment pourrais-je un jour vous remercier de votre soutien..."
"Hum et bien pourquoi pas en me donnant votre main, simplement pour le chemin du retour ?"
Sanaki fit une moue surprise, puis rigola légèrement. Son regard dévora celui de Griffin et leurs sourires mutuels, face à face, rendaient la scène des plus harmonieuses. La main droite du Duc de Persis glissa le long du bras de l'apôtre de Begnion jusqu'à arriver à la paume de sa main, pour enfin s'enlacer les doigts entre eux.
*Je ne pense pas qu'un jour, je puisse pardonner aux hommes, Beorc comme Laguz, leurs crimes commis contre leur propre humanité. Cependant désormais je me rends compte que certaines âmes méritent de vivre dans un monde meilleur, orchestré par l'Ordre lui-même. Je surpasserais un jour Ashera et je rendrais moi-même le Jugement sur qui doit vivre ou mourir, j'en fais le serment et aussi longtemps que je vivrais, je ferais tout pour créer cette idylle.* PARTIE III - FIN
Dernière édition par Griffin le Dim 24 Oct - 3:37, édité 7 fois |
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| Sujet: Re: Griffin Adams, une lueur d'humanité Lun 27 Sep - 13:21 | |
| La nuit était tombée à nouveau, et le bleu azur avait laissé sa place à une tapisserie d'étoiles sur fond noirâtre. La Lune inondait faiblement la terre de son voile lumineux, laissant entrevoir, marchant au milieu de la plaine, une silhouette humaine aux premiers abords. Il marchait lentement, comme s'il ne restait qu'un soupçon d'espoir dans sa cause, sans presque ne plus y croire, cette étincelle de vie que tout le monde possède quand il ne nous reste plus rien. Mais les apparences étaient trompeuses...
C'était le grand jour. Près de la cathédrale de Mainal, à Sienne, une grande foule s'était rassemblée pour le grand événement. Il ne manquait plus que les protagonistes principaux, et la foule fit une ovation dès l'entrée en scène de l'apôtre Sanaki sur le balcon de la masure impériale, surplombant de toute sa prestance l'assemblée venue en ce jour unique. Entre le palais et la cathédrale, une immense place publique avec en son centre, une grande estrade simple. Et tout à coup, ce fut l'effervescence. Griffin Adams, le duc de Persis, fit son apparition, entouré de gardes impériaux, et s'avançait vers la dite estrade avec toute la dignité qu'il lui restait. Arrivé dessus, il faisait face à la foule, qui de son côté scandait à l'unisson "À mort !". Le Duc avait les mains attachées dans le dos, et les deux gardes derrière lui tapèrent simultanément sur l'arrière de ses genoux pour le faire tomber. L'impératrice observait ce spectacle d'un air neutre. Et enfin, le moment était venu. Elle pointa son pouce vers le bas, signe approbateur de procéder à l'exécution. Griffin, à genoux et la tête vers le sol, n'attendait plus qu'on lui administre son châtiment, commençant imperceptiblement à pleurer à chaudes larmes, en pensant à ce qu'aurait pu être sa vie dans d'autres circonstances. Mais cette dernière allait cesser d'exister, à présent...
Il ne pouvait s'imaginer autre scénario que celui-là. L'homme assis en position fœtale dans le coin de sa cellule ne pouvait admettre qu'il a été trahi, sa confiance même et ses désirs, si facilement... Ses genoux masquant la majorité de son visage, on ne pouvait voir son faciès actuel, et ni le silence de la pièce ni la luminosité ambiante ne permettaient de constater son état psychologique visible. Non, en vérité il était complètement déboussolé, perdu. Ses actes ne méritaient-ils que ce sort ? N'était-il pas sur la voix divine ? Ses prétentions étaient-elles si infondées ? Où était le bien, où était le mal, il ne pouvait plus distinguer ces éléments, elle avait réussi à remettre en doute tout ce pourquoi il vivait, toutes ses envies, tous ses projets. Elle l'avait détruit, il ne restait plus rien de l'individu que nous observons encore en ce moment, juste une coquille vide et larmoyante.
La journée avait pourtant bien commencé. Griffin Adams, duc de Persis, préparait cette soirée avec impatience, et s'était habillé de ses plus beaux atouts et effets personnels à l'occasion. Et pas n'importe laquelle, il s'agissait du bal annuel organisé par les nobles des différents comtés de Begnion, en hommage à la nouvelle année qui s'annonçait, ainsi qu'une fête en honneur à l'apôtre de l'empire. À cette occasion les différents ducs et comtes se devaient de faire un présent symbolique à l'impératrice, en témoignage de leur bonne foi ou, quelquefois, de leurs sentiments envers la demoiselle. C'était ce que craignait hélas Griffin devant l'insistance du fils du duc de Gaddos pour conquérir le coeur de la dynaste. Cette pensée écœurait le noble de Persis, et il se rendit compte en allant à cette magnifique soirée que beaucoup de personnes de la cour ne semblaient pas être au courant de leur séparation, beaucoup d'entre eux faisant divers commentaires sur le futur mariage entre Sanaki et Raül de Gaddos. Le nom même de cet individu suffisait à mettre le duc de Persis de mauvaise humeur, surtout en sa présence. Vantard, prétentieux et menteur, il n'avait que pour lui un jolis minois et une trop grosse assurance envers lui-même, s'assurant que cette soirée serait la bonne.
Toute la haute noblesse se trouvait dans cette immense pièce de bal du palais impérial de Sienne, la plupart bavassait entre eux, les autres devaient sans doute manger au buffet ou boire à leur propre santé. Dans un coin de la pièce, assis sur un grand siège de velours, Griffin faisait tournoyer légèrement son verre de vin dans sa main droite en observant la scène, seul. Les relations humaines n'étaient pas le point fort du Duc dans ces moments là, surtout après les événements passés dernièrement, il ne tolérait qu'une seule personne en sa présence, et seulement cette personne. Et quand on parlait du loup... Les violons qui faisaient office d'ambiance se stoppèrent, et un air quelconque de trompette se fit entendre, annonçant l'arrivée imminente de la personnalité de la soirée, l'apôtre et impératrice de Begnion, Sanaki Kirsch Altina en personne. Escortée par dame Tanith de la Sainte Garde ainsi que d'autres soldats impériaux, le silence se fit à son arrivée et ce jusqu'à ce qu'elle n'aille s'asseoir sur le siège central surplombant la pièce du haut de ses deux marches, plaçant la dame bien en valeur face à l'ensemble de la salle. Beaucoup firent leurs salutations à ce moment précis, à l'exception de quelques nobles qui semblaient de bonne famille, représentant chacun la maison principale de leur région de Begnion. Ces derniers se mirent presque en file indienne devant l'impératrice, et Griffin était dans le tas, illustrant le duché de Persis par sa simple présence. Chaque noble de cette file avait en sa possession un présent à remettre à l'impératrice, et le premier à passer fut le plus populaire de la salle, le duc Raül de Gaddos. Celui-ci s'avança, salua l'apôtre avec la plus grande grâce du monde, avant d'offrir un livre à Sanaki. Il était vrai que cette dernière aimait beaucoup lire à ses heures perdues, ce qui faisait que Raül marquait un bon point vis-à-vis d'elle, ce qui déplut fortement à Griffin intérieurement. Une fois la salutation finie et le présent offert, le duc s'esquiva, ravi de son action. Ce qu'il ne vit pas cependant était le regard de mépris que lui lançait Griffin, qui essayait de masquer sa frustration par un sourire forcé. L'attraction de la soirée venait de se terminer, car le chouchou du public avait fait sa bonne action, et du coup la moitié des nobles présents dans l'assistance ne prêtèrent que peu attention aux autres personnes à passer devant sa majesté. Les salutations défilèrent, les présents également, qui étaient à chaque fois immédiatement confiés à un intendant et rangés précieusement dans le coin droit de la salle afin de les conserver à vue des nobles. Et enfin arriva le tour du Duc de Persis, qu'on annonça à son altesse. Bizarrement la popularité du duc Adams dans l'aristocratie n'était pas bien folichonne, à cause de ses origines inconnues. Ce qui fit que l'attention revint légèrement en direction de l'impératrice et du salutaire, qui se sentit sur le coup horriblement gêné. Mais après tout, le jeu de la noblesse reposait sur la pression et les impressions. Il fallait faire preuve de sang-froid. Et c'est avec toute l'impassibilité du monde qu'il s'avança vers Sanaki, et posa un genou à terre devant elle. Et au même moment, on put entendre une voix s'exclamer.
"Ah ah ! On dirait que le Duc de Persis a oublié d'apporter un présent à notre apôtre bien-aimée...!"
Et là, ce fut magique, car en un quart de seconde tous les regards se tournèrent vers Griffin. Ce dernier avait facilement reconnu le timbre du fils du Duc de Gaddos, évidemment... Et les badauds débutèrent une série de commentaires à voix basse, évidemment... Pourtant, sans se lever, Sanaki leva la main en avant, pour que le silence se fasse dans la pièce. Mais la scène se figea littéralement quand en une seconde à peine, le Duc à genou attrapa doucement la main tendue de l'apôtre, tourna la paume de celle-ci vers le bas, et lui baisa subtilement. Il relâcha lentement la main, se releva avec calme et dignité, avant de se retourner vers l'assistance, pantois devant ce spectacle.
"Voici mon présent à son altesse, n'en vous déplaise."
Le seul son audible durant les cinq secondes qui suivirent fut le bruit sourd et percutant d'une dame tombant au sol suite à un évanouissement. Griffin fit deux pas en avant, et bizarrement les nobles d'en face commencèrent à s'écarter sur son chemin, tel un lépreux dans des thermes publiques. Il affichait un sourire ravi et fier, c'est-à-dire en parfait contraste avec les rictus d'affront et de dégoût qu'exprimait le faciès général d'en face. Le plus fin des observateurs aurait pu distinguer le monocle du Duc de Culbert sauter pour finalement se balancer au bout du cordon tandis que son possesseur ne bougeait pas plus que cela. Cependant Griffin continua tout droit, pour arriver devant une porte-fenêtre, qu'il ouvrit pour partir s'aventurer sur le balcon. L'impératrice fit un signe vers les violonistes qui reprirent leur musique afin que se close ce chapitre quelque peu spécial de la soirée.
C'était une mauvaise idée. Définitivement. Lui qui aimait la tranquillité, il se fit harceler durant la moitié de la soirée par des gens tantôt surpris par son geste, tantôt scandalisés tel que le Duc de Gaddos, pour ne citer que lui. Et vers le milieu de la veillée, s'annonçait le début des réjouissances, à savoir l'ouverture du bal. La politesse et la coutume voulaient que ça soit l'impératrice elle-même qui ouvre ce dernier, et ainsi un grand demi-cercle se forma autour du siège central. Et bizarrement l'Assemblée dans un accord commun se disposa en mesure de positionner Raül de Gaddos juste en face de Sanaki, tel un tête-à-tête annoncé d'avance. L'apôtre sourit et se leva doucement, tandis que le fils du Duc, ravi, fit un pas en avant pour se démarquer. Il plaça son bras droit à l'horizontale comme pour attendre qu'elle vienne poser sa main si délicate dessus, et avança d'un pas supplémentaire. Son père devait être fier de lui, futur empereur de Begnion et époux officiel de sa sainteté l'apôtre, lui apportant gloire et fortune comme il n'en avait encore jamais vu. Plongé dans son délire, il avança vers elle d'un pas sûr, et elle en fit autant de son côté, le fixant du regard. Le moment était venu, et il ne restait qu'une enjambée à faire pour rejoindre l'apôtre, la richesse, la renommée. Tandis qu'il cessa son avancée pour accueillir dignement son élue, l'impératrice n'avait plus qu'un pas à faire pour s'offrir entier à cet homme. Et elle fit ce pas.
Et encore un autre, puis un autre... Les pas se succédèrent finalement pour que le corps de l'impératrice se mit au niveau de celui de Raül, et pour enfin le dépasser, en toute ignorance. Raide comme un piqué et stoïque comme un mur, le concerné ne comprit que trop tard qu'il n'y avait plus personne dans son champ de vision actuel. Il se retourna avec toute la disgrâce du monde, complètement dépassé et outré sur le coup, tandis que désormais en face de lui, l'impératrice avançait et se mit à forcer le passage légèrement, faisant comprendre aux nobles devant elle qu'il vaudrait mieux pour leur matricule de lui ouvrir la voie. Les aristocrates, bien qu'un peu choqués, s'écartèrent, et l'apôtre put ainsi se mouvoir tranquillement jusqu'à son élu : le Duc de Persis, Griffin Adams. Ce dernier afficha au début une mine surprise, puis après deux secondes de battement, mit sa main devant lui, paume vers le plafond, en guise de présent. Main que Sanaki prit de ses doigts délicats avant de se retourner légèrement en arrière pour emmener le Marqué au centre de la pièce, et accessoirement de l'assistance. On entendit un léger esclaffement dans le silence terne de la pièce, qui fut étouffé presque aussitôt. Et d'un signe de la main, l'impératrice ordonna le début des festivités. Un air lent de violon débuta, tandis que Griffin se plaça face à la dame, la paume de sa main gauche exposée au niveau de la tête, sur le côté, vers elle. Elle fit le même geste, afin que les doigts se frôlent dans un premier temps telle une caresse, puis se collent l'un à l'autre. Et sans aucune retenue et dans un mouvement commun, l'autre main de Sanaki passa par-dessus l'épaule de Griffin, tandis que celle de ce dernier se plaça au niveau des hanches de la demoiselle. Et la danse pu commencer, ainsi que les festivités de la soirée. Langoureuse, classique mais tellement significative, finalement cette danse se termina sous les applaudissements certes réservés du public, mais tout aussi sincères envers l'impératrice. Le bal pouvait officiellement débuter, et les divers couples dans ce public de nobles se prirent par la main pour inviter leurs partenaires sur la piste, tandis que les violonistes se préparèrent pour une longue soirée en perspective.
Sanaki s'ennuyait un peu, seule assise sur son siège, ou pouvons-nous parler ici de trône. Elle supervisait les danses, applaudissait à chaque fin d'air de musique et lorgnant de temps en temps sur les différents groupes de discussion formés çà et là. Cependant quelques uns étaient déjà partis, la soirée était déjà bien avancée. Mais tout à coup, un claquement de porte se fit entendre, et toute l'attention se fixa dans la direction de la source de ce bruit suspect. Raül avait apparemment fermé brusquement la porte-fenêtre de toutes ses forces, et on pouvait voir un excès de rage dans son regard, qu'il contenait difficilement. Et sans adresser un regard à l'impératrice, il quitta la salle dans l'animosité la plus complète. La plupart des nobles restants s'étaient tournés vers le balcon, imperceptible certes à cause de la nuit malgré la transparence du verre. La porte se rouvrit une seconde fois, pour laisser passer dans le suspens le plus profond Griffin, avec sous son œil gauche sa Marque habituelle, mais sous l'œil droit on pouvait apercevoir une rougeur flagrante. Le Duc fit quelques pas avant de refermer la porte, puis se figea dans la pièce. Il toisa du regard chaque individu présent dans l'assistance, puis prit également la poudre d'escampette, mais pas furieux à l'inverse du fils du Duc de Gaddos non, juste légèrement blasé. Au moment où il sortit de la pièce pour se diriger vers les escaliers, l'impératrice se leva, lança une excuse générale à l'attention de tous pour une éventuelle absence de cinq minutes. Puis elle emboîta le pas de la sortie, sous le regard perplexe de la comtesse d'Americh.
"...Finalement je trouve qu'ils vont bien ensemble, pas vous ?"
Et la discussion reprit son cours.
"Duc, attendez-moi !"
Il continua sa marche, lente et pendante, sortant dans les jardins du palais, jusqu'à ce qu'il se fasse rattraper, dépasser et arrêter par Sanaki, maintenant face à lui. L'impératrice pouvait constater que le Duc inspirait un sentiment qu'elle vit pour la première fois chez lui : la colère.
"Griffin, que s'est-il passé ?"
"...Disons que Raül m'a prit à part et m'a exposé son point de vue vis-à-vis de votre 'choix' lors de l'ouverture du bal."
"Je suis confuse, tout est de ma faute... Avez-vous mal ?"
"Ça passera, ne vous en faites pas, ce n'est pas de votre faute... Il ne voulait pas admettre la vérité, donc j'ai insisté sur ce point, et il a dérapé, va-t-on dire."
"La vérité ?"
"Je lui ai annoncé clairement et honnêtement mes sentiments à votre égard, du coup voilà comment cela a fini..."
"Vos sentiments..."
"Ça me fait penser qu'avec l'écart de tout à l'heure, j'ai oublié de vous offrir votre présent... Mais pouvons-nous avant cela marcher un petit peu ? L'air frais me fait du bien."
Elle accepta avec un léger sourire, et le duo commença sa marche dans l'herbe humide, sans mot dire l'espace d'une minute, jusqu'à ce que Sanaki brise ce léger silence.
"Je suis... désolée du comportement de Raül, je ferais mander une lettre d'excuse pour..."
"Ce n'est pas la peine, cette vermine ne vaut même pas la peine que je m'attarde sur son cas à présent. Non, il recevra bientôt le Jugement et cette terre pourra redevenir digne de la Création elle-même."
"...Quoi ?!"
Griffin retrouva le sourire, et leva la tête vers le ciel, admirant l'infini.
"Je suis un homme de foi, et en tant que tel je crois en un monde meilleur... Bien meilleur que celui-ci. J'aspire à créer un monde où toute tromperie sera balayée, tout pêché sera impossible devant l'infini sagesse des Élus. C'est mon rêve le plus cher, c'est pourquoi je me confie à vous de la sorte."
"Mais... Qui sont ces Élus ?"
"Ils sont l'élite, ils représentent l'espoir de ce monde, le cœur pur de la Création qui durant tout ce temps a été contrôlé et bafoué au plus offrant. Mais avec votre soutien et celui de la Déesse je saurais recréer ce monde idéalement."
"Le Jugement, la Déesse... Non... Ce n'est pas possible..."
"Qu'y a-t-il, très chère ?"
"Vous... Ne songez pas à faire appel à la Déesse dans le but de rendre son Jugement comme ça a été le cas il y a cinq ans ? Est-ce pour ça que vous aviez cautionné la guerre ?"
"Ohw, vous êtes maligne... Et bien oui c'est exact, mais là où maître Sephiran a échoué, je réussirais, et je le surpasserais. Je surpasserais la Déesse et je pourrais reformer ce monde selon mon souhait, selon les vrais principes d'égalité et de justice. Les Élus vivront, les impurs seront supprimés par le courroux divin d'Ashera. Un monde que nous fonderons, vous et moi."
L'apôtre fut horriblement choquée, jusqu'à perdre la force de ses jambes et tomba lentement à terre. Griffin paniqua sur le coup et s'accroupit alors pour l'aider à se relever et à tenir debout par la suite.
"Votre altesse, vous allez bien ? Vous avez une mine pâle."
"V... Vous... Non, ce n'est pas... Pas vous, je..."
Elle n'arrivait plus à parler correctement, un sanglot se fit entendre dans le fond de sa voix, puis il disparut aussi vite qu'il n'était venu. Et suite à une grande inspiration, rassemblant tout son cœur et son courage, elle appela la garde, qui rappliqua immédiatement.
"Sanaki, que...?"
"Messieurs... Mettez le Duc en détention pour... crime contre l'humanité, je vous prie... Ordre de votre... impératrice..."
Deux des gardes empoignèrent Griffin au niveau des avant-bras, douloureusement ceci dit en passant. Il tenta désespérément de passer sa main dans l'intérieur de sa veste, mais fut contrôler in-extremis par Tanith, qui se mit à tordre à moitié la main du Duc. Il cria de douleur tout en lâchant une petite boîte en forme de cube parfait, entourée par un quelconque papier de couleur ocre, qui alla glisser jusqu'aux pieds de la demoiselle.
"Ah non, mon cadeau, je... Attendez ! Je voudrais encore parler à l'apôtre, je vous en prie !"
"... Emmenez-le."
"Non, vous ne pouvez... Non ! Lâchez-moi ! Pour l'amour de la Déesse, je... Sanaki !"
Impardonnable. Inqualifiable. Improbable, mais pourtant véridique. Griffin se retrouvait assis par terre, adossé contre le mur du cachot principal, ironiquement la même cellule -réparée depuis- que lors de l'attentat sur l'impératrice il y a un mois. Mais cette fois-ci, le Duc se retrouvait de l'autre côté des barreaux. Quelle belle farce. Dans sa tête, il se sentait trahi, berné, déçu... Mais dans son cœur, ce n'était pas lui la victime, mais elle... Il avait pourtant été sincère avec celle à qui il pouvait se confier, celle qui lui donnait confiance et force dans sa tâche, celle... Pour qui il aurait donné sa vie, sacrifié son rêve, brisé son destin. Mais il s'avérait que ce dernier en avait décidé autrement, et bientôt la nouvelle allait se répandre à vive allure, au point que le peuple réclamera la tête du noble déchu. Telle était la défaite, au final l'apôtre Sanaki aurait été sa plus grande faiblesse, celle qui l'aura mené à sa perte, ironiquement... Maître Lehran, votre disciple vous rejoindra bientôt.
Il passa une journée entière en position fœtale, ne souhaitant voir personne, ne souhaitant rien d'autre que la Mort elle-même. Le soir arriva, puis l'aube commençait à se montrer légèrement, Griffin n'avait pas vu la nuit passer. Ce qui n'était pas le cas du garde de faction en face de la cellule du Duc qui tout à coup s'écroula de sommeil, et commença à ronfler à travers son casque. Le bruit alerta le prisonnier qui releva la tête, et pouvait voir vers la droite un bras tendu vers la position du garde, un bâton à la main. Une silhouette plutôt grande, masquée et portant des vêtements de roturier amples se présenta devant la cage, toute encapuchonnée. L'individu fouilla le garde endormi afin d'y trouver les clés ouvrant le cachot, ce qu'il fit par la suite. Griffin avait la mine la plus interrogatrice du monde, mais ne put dire un mot car l'inconnu avait pointé son index devant sa potentielle bouche, masquée par un foulard. Bizarrement le chemin emprunté par son sauveur lui rappelait vaguement celui que les agresseurs de l'impératrice prirent il y a de cela plus d'un mois. Le duo louche bifurqua à droite, à gauche, puis deux fois à droite, pour finalement mener dans la cave minuscule d'une maisonnette de campagne, du moins à ce qu'il semblait être. Ils se pressèrent de sortir de la petite battisse, puis l'individu masqué tendit les affaires personnelles du Duc qu'il prit, et rangea dans un sac qui les attendait dans la maison, avec de quoi survivre pendant deux semaines. L'inconnu pointa l'horizon du doigt, comme pour lui indiquer de partir. Griffin eut un doute l'espace d'une seconde, et se mit à inspirer longuement, pour au moment de l'expiration, plus discrète déjà, se jeter dans les bras de son sauveur, l'enlaçant chaleureusement.
"Vous pouvez changer votre démarche, porter des talons, vous déguiser de la tête aux pieds, mais jamais je ne pourrais oublier votre parfum... Majesté."
L'inconnu soupira légèrement, avant de retirer finalement le foulard de son visage et la capuche de sa tête, dévoilant une cascade de magnifiques cheveux bleutés propre à l'apôtre Sanaki, car c'était effectivement elle. Cependant le fait d'avoir été reconnu l'embarrassa au plus haut point, ne sachant que dire à l'homme lui faisant face. Son regard se perdait sur le côté, tandis que ses mains se joignirent au niveau des hanches, comme un signe de culpabilité.
"Mais, pourquoi avoir... Non, excusez-moi, je suis désolé..."
"Oh cher Griffin, vous ne pouvez pas être aussi désolé que moi, je... J'ai trahi votre confiance..."
"...Je sais, mais vous ne pouviez pas trahir votre peuple..."
"Je suis désolée, mais..."
Elle reprit tout d'un coup un air plus solennel, comme si elle s'était rendu compte subitement qu'elle le dominait de son statut social, chose qu'elle a pourtant horreur de faire.
"Je vous exile officiellement de la cour de Begnion, Griffin Adams, et je placerais votre duché sous responsabilité impériale... Mais officieusement je signalerais à la noblesse la disparition du Duc de Persis... C'est le moins que je puisse faire."
"Que...? Sanaki..."
"Je prierais chaque jour pour que vous puissiez revenir, cher Griffin, je prierais pour que vous puissiez retrouver la lumière qui vous a quitté pour le moment, je l'espère..."
"Je... Vous suis reconnaissant de votre gratitude votre excellence, je ne pouvais espérer meilleur accompagnement dans cet exil que vos prières, je... reviendrais, je vous le promets."
"Griffin..."
Le futur ex-Duc de Persis, dans ce qui sera sûrement officiellement son dernier acte de noblesse, s'empara des mains de l'impératrice pour les lever à hauteur de cou, et les deux protagonistes fermèrent les yeux l'espace de dix secondes, soit une éternité de leur point de vue, front contre front. La chose amusante fut que Griffin sentit quelque chose d'inhabituel au niveau de la main gauche de Sanaki, mais n'y prêta pas plus attention que ça en ce moment.
Finalement après cet acte, ils reculèrent tour à tour d'un pas, se regardèrent dans les yeux, et ne purent s'empêcher de se sourire, presque naïvement, avec un léger hochement de tête. Mais finalement c'est Griffin qui fit le premier pas et fit un mouvement en arrière sans mot dire à sa précieuse impératrice. Mais au bout de trois mètres, il se retourna vers elle, en souriant amicalement.
"Je suis content de voir que mon cadeau vous convient votre altesse... Adieu ! Nous nous reverrons...!"
"C'est une promesse...! Adieu !"
C'est ainsi que disparut mystérieusement le Duc de Persis suite au bal annuel de Sienne, tandis que non loin de la capitale partait un homme vers l'horizon, le cœur battant et le regard déterminé. Il était salué par une jeune femme au sourire radieux agitant sa main gauche, bizarrement, pour lui faire des signes, tandis que la lumière de l'aube se reflétait sur sa bague à l'annulaire gauche. PARTIE IV - FIN CHAPITRE I - TERMINÉ
Dernière édition par Griffin le Dim 3 Oct - 17:25, édité 44 fois |
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| Sujet: Re: Griffin Adams, une lueur d'humanité Sam 2 Oct - 9:37 | |
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| Sujet: Re: Griffin Adams, une lueur d'humanité Jeu 28 Oct - 11:30 | |
| Langue 5/5Les pleurs commencèrent à se firent entendre « faire »... Sephiran m'a quelquefois parler de vous « parlé » dusse doit-il plonger « dusse-il » N'était-il pas sur la voix divine Heu... c'est « voie », plutôt, non ? Comme peut-on fouler du pied la voix d'une personne ? C'est tout ce que j'ai relevé. Vu la taille de la rééval, ça ne te retirera absolument rien ^^. Style 5/5Eh bien... tout est correct, j'ai envie de dire Caractère 2,5/2.5
C'est bon, le caractère de chacun est parfaitement respecté (quoique, je doute que Sanaki soit du genre à libérer quelqu'un même si elle l'aime mais bon, fallait bien que tu sortes de cette prison). RolePlay 9/10C'est bien mené, sans aucune anicroche mais, comme je te l'ai fait remarqué sur skype, la fin de l'acte II prête à confusion, surtout après l'intro louche de l'acte I Et puis, comme je l'ai fait remarqué dans le caractère, je doute que Sanaki soit du genre à passer outre ses devoirs pour libérer un prisonnier qui lui a ouvertement fait part de son désir de « purifier le monde », qu'elle l'aime ou non... bon au moins je sais que quelqu'un va prendre la relève de Shiko, même si nos méthodes divergent xD NIVEAU FINAL :19/20
NIVEAU PRECEDENT : 15/20
On voit que t'as bien bossé dessus et tes efforts sont récompensés. Congratulations ! |
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| Sujet: Re: Griffin Adams, une lueur d'humanité | |
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| | | | Griffin Adams, une lueur d'humanité | |
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