Sujet: La Danse venue des steppes [PV Maëlly] Mer 12 Juil - 23:51
De retour du monastère de Belogor, le spectre du vent qui hantait les lieux en ruine s'était apaisé. Dans la descente des sommets septentrionaux de l'Est de Begnion, un silence serein imprégnait les sentiers sinueux. Le ciel était plus clément, alors que la végétation reprenait ses droits au lieu des monts de pierre.
Ainsi guidé par l'azur souverain, le tandem de mercenaires reprenait la route. Une nouvelle fois, ils devaient traverser dans sa longueur le sous-continent que représentait en taille la théocratie de Begnion. Leur but se trouvait au sein de la capitale de Criméa. Isaak avait récemment envoyé un courrier destiné à un cadre de l'armée criméane, qui n'était nul autre que le général des armées royales: Mysti de Méline. Suite aux récents évènements ayant frappés Tellius, et plus particulièrement les capitales Beorcs, le survivant de Belogor désirait s'impliquer du côté des protecteurs du continent. Une entrevue était nécessaire, et plus encore, mais pour l'heure, Isaak préféra se concentrer sur son voyage.
À présent qu'il s'était occupé de ses affaires personnelles, en se mettant en paix avec lui-même et les âmes des fidèles de Belogor, le jeune homme tâcha d'être attentif à sa camarade de route. La Laguz pouvait compter sur la vigilance d'Isaak, qui veillait d'un œil attentif les environs et suivait sans jamais se plaindre. Il s'adonnait même à cuisiner les repas. Essentiellement composée de gibiers et de légumes, plantes et autres herbes comestibles, sa cuisine à base de ragoût bien que peu alléchante à première vue était plutôt bonne.
Mais malgré leur aventure commune, les forçant à se côtoyer chaque jour, une certaine distance continuait de séparer les deux êtres. Le souvenir de Maëlly que s'était constitué le blondin au gré des années tenait plus d'un concept, d'une énergie que d'une personne. À ses yeux, elle incarnait un espoir, un foyer spirituel qui lui offrait le confort alors qu'il vivait en solitaire. Difficile encore donc pour le quidam de s'accoutumer à vivre avec une personne qu'il avait littéralement jusqu'ici idéalisée. Néanmoins, Isaak s'efforça de redoubler d'efforts, tant pour affiner sa maitrise de l'épée que pour se rapprocher de Maëlly au nom du pacte qu'ils avaient mutuellement scellés à proximité du lieu de la tragédie de Famine.
* * *
Les sommets de Begnion, en barrières et frontières naturelles, continuaient de cerner le paysage. Le duo de voyageurs avait bien progressé dans leur descente, approchant des vallées. Les rais de chaleur du soleil dardaient de toute part sur le sentier qu'empruntaient Isaak et Maëlly, alors qu'ils longeaient une des montagnes. L'air alpin ne parvenait à masquer cette chaleur tantôt agréable, tantôt exténuante. Les deux compères n'étaient guère habitués à pareille condition, eux qui luttaient d'ordinaire contre la bise et le froid des hauteurs. Le chemin était étroit, cerné par les falaises escarpées et le vide de l'autre côté. Au rythme d'une cadence prudente mais dynamique, Isaak menait la marche, appréciant le cliquettement de son fourreau contre sa jambe.
Au loin, devant eux, une silhouette se dessinait. L’épéiste esquissa un bref sourire. Jusqu'ici, ils n'avaient croisé que de rares voyageurs, et fait halte peu de fois dans des villages de montagne. La vue d'une nouvelle tête le rassurait alors, s'imaginant ainsi retrouver la civilisation au plus vite. Quand bien même son rapport à la société était complexe, il n'était nul besoin de préciser qu'Isaak en dépendait, comme pour ces villageois qui tantôt louaient ses services, tantôt le chassaient en tant que menace potentielle. Et c'est justement en menace que la silhouette se présenta promptement, l'épée tirée face à Isaak, avec un air manquant de détermination.
❖ Filez-moi tout ce que vous avez ! Or, bijoux, hm… tout ce qui est de valeur. Donnez-moi tout !
Sans s'attarder sur le teint mat inhabituel du brigand ou de la courbe étrangère de son sabre, Isaak dégaina à son tour et chargea à toute vitesse sur son assaillant. Une lueur belliqueuse de jade semblait fumer de ses pupilles, alors que ses deux mains manipulèrent le legs d'Uriel avec une dextérité redoutable. Les lames s'entrechoquèrent, et celle d'Isaak glissa jusqu'à ce que la pointe se retrouve face à la gorge du pillard. Une goutte de sueur du dit voleur manqua de se loger sur l'apex de l'arme.
❖ Tu vas ranger cette épée, oublier ton plan et déguerpir en vitesse avant que l'idée de te faire un joli trou dans la gorge et ensuite de te filer à manger aux vautours me démange. Est-ce qu'on s'est bien compris ?
Curieusement, le voleur resta fier, et ne sembla pas apeuré par l'impératif imposé par Isaak. Néanmoins il resta paralysé sur place, tant la situation était à son désavantage. Son opposant lisait brièvement la surprise sur son visage. Il avait sans doute sous-estimé les deux pélerins qui lui faisaient face, les prenant comme des proies faciles. Au même moment, de nouvelles silhouettes se dessinèrent derrière le voleur. Ce fut au tour d'Isaak de faire preuve d'un certain immobilisme. Il ne désirait prendre aucun risque. Qu'il s'agisse de simples voyageurs, et voilà qu'il relâchait sur eux un voleur qui pourrait peut-être avoir l'avantage cette fois-ci. Au bien pouvait-il s'agir encore de renforts, venus épauler le maladroit malandrin ? Dans tous les cas, le prendre en otage restait encore la meilleure solution, en attendant que la situation soit clarifiée.
Au loin, ce fut un cortège de quelques caravanes tirées par des chevaux qui débarqua péniblement au dos du voleur. La pression gagna peu à peu l'escrimeur qui n'aurait peut-être plus l'avantage dans quelques instants. Il y avait certes Maëlly à ses côtés, mais à part fuir, que pourraient-ils faire à la longue si des brigands descendaient de ces étranges carrioles ?
Finalement, ce fut une vieille dame qui apparut la première. Elle partageait la même peau basanée que le lupin, des rides en plus. Mais surtout des traits plus fermes, gonflés par une certaine colère. Peu menacé par la présence de la vieillarde, Isaak préféra maintenir le statu quo en observant la réaction de la vénérable qui… choisit de frapper de son soul la tête du voleur d'un vif poing contrastant avec son physique sénescent. Curieusement l'ambiance devint moins tendue, ainsi le blondin décida de retirer son épée tandis que son opposant accusait le coup à la tête avec douleur.
❖ Tu attends que je laisse un creux gros comme un bol dans ton crâne à force de te cogner pour que tu arrêtes de fuguer dès que j'ai le dos tourné ou quoi ? En plus d'être un mauvais marchand, il faut que tu sois un mauvais voleur !
La sermonneuse se tourna vers Isaak. Au-delà des rides, se cachait un regard affuté, d'un vert de serpent. Mais malgré cet iris intimidant, les traits de son visage, son air de grand-mère lui donnait un côté rassurant, presque chaleureux. Ses vêtements aussi exprimaient aussi quelque chose de singulier. Il ne s'agissait que de tissu, pas d'or ou de velours. Mais des broderies exhalaient un artisanat ancestral et inestimable qui donnaient un attrait exotique à la tenue de la vieille dame. Les faucons de fil noir semblaient prendre leur envol, les lys brodés s'agiter au gré du vent de montagne. Toute tension guerrière s'était alors dissipée à la rencontre de cette venue d'ailleurs.
❖ Braves gens, au nom de mon petit-fils et de notre clan, je m'excuse pour le comportement de Temur. Ce jeune n'a encore rien dans le crâne et préfère jouer au bandit plutôt que d'aider sa famille !
Puis son regard perça une nouvelle fois à travers les saphirs d'Isaak. Un instant de silence manqua de mettre mal à l'aise le bretteur novice.
❖ Pour la peine, acceptez de venir avec nous pour la soirée, nous organisons un festin avec le reste du clan. Et je suis certaine jeune homme que vous y trouverez votre compte si vous êtes amateur d'épée…
Intrigué par une telle proposition, Isaak préféra s'en remettre à sa partenaire d'aventure avant toute prise de décision. L'offre était alléchante, surtout la dernière partie qui semblait avoir éveillé son intérêt envers l'escrime sous toutes ses variantes. Mais le blondin faisait partie d'un duo. Son corps se tourna vers la Laguz, ignorant de ce fait le susnommé Temur tout en fuyant les iris médusants de la vieillarde. En sécurité, son œillade toisa dès lors la délicate mais redoutable Maëlly, veillant une réaction de sa part.