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 Entre démons et succubes

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MessageSujet: Entre démons et succubes   Entre démons et succubes I_icon_minitimeLun 20 Sep - 6:42

Le destin. Voilà une chose qui régit l'avenir, le présent et le passé des individus. De toutes évidences, il ne s'applique qu'aux êtres doués de réflexion. En effet, vu d'une manière généralement égocentrique par ceux qui le subisse, on le considère comme propre à soi même à cause de l'interaction que nous avons avec lui. Mais en réalité, le destin s'applique à tout. Toute chose, organique ou non, est sujette au destin. Qu'il soit bon, ou mauvais.
Cette fameuse notion reste à la fois claire et obscure, du fait de ses diverses représentations. On ne peut changer le destin, et la plupart du temps, il se joue de nous en nous affectant à des situations peu communes.
Et c'est ce même destin qui conduisait la jeune Naeliel sur les routes. Sans doute n'avait-elle jamais eu le choix, se disait-elle. Toutes ses actions étaient peut être dues à une volonté supérieure usant de la force pour conduire les choses. On ne peut pas changer les choses soit même, tout est couru d'avance. Voilà le genre de pensées qui lui traversaient l'esprit à l'heure actuelle. Sans doute ce genre de pensées sont viciées, mais cela lui permettait de ne pas ressentir la culpabilité des nombreuses vies qu'elle avait ôtées depuis le début de son voyage. Elle ne l'avait non pas fait par plaisir, mais simplement parce qu’elle ne supportait plus les autres, alors qu'elle avait cependant besoin de leur travail pour survivre. Or, les éliminer et récolter le fruit de leurs labeurs était une bonne solution: Personne à supporter, pas de risque de voir son secret dévoilé et aucun sentiment à devoir développer. Voilà ce qui lui faisait vraiment peur: ressentir. Cela avait suffit dans sa jeunesse. Elle savait très bien qu'elle se contiendrait si cela arrivait, que cela ne l'empêcherait pas de manipuler qui il faudrait à sa guise. Mais tout cela n'avait pas d'importance pour le moment. Elle n'avait pas de but, et errait dans ce jardin d'azur qu'était ce milieu d'après-midi, le long d'un petit chemin lui même longeant une vaste forêt. Le soleil inondait le paysage de chaleur et de lumière, ce qui ne gênait pas nécessairement Naeliel dans ses tenues très décontractées. Ses cheveux blonds cascadaient sur ses épaules, à défaut de voler grâce à un vent actuellement non présent. Le prochain manoir isolé qu'elle trouvera fera bien l'affaire pour un ou deux mois, avant de reprendre la route.
Mais si le destin nous fait des fois sortir des sentiers battus, il à tendance à ne pas nous laisser errer trop longtemps hors des chemins. Et même si cette fois ci, ce ne serait pas le "droit chemin".

Au bout de quelques minutes de marche, elle pu apercevoir au prochain détour du chemin un groupe d'hommes pauvrement habillés, enfin tout du moins dans ses goûts. Mais toutefois fortement armés pour faire face à un seul individu. Ce dernier, lui tournait le dos. Le fait était assez rare sur ce genre de chemin perdu. Sans doutes des brigands en train de détrousser un voyageur qui à eu le malheur de ne pas emprunter les routes commerciales. Elle continua de s'approcher, l'air nonchalante, l'évènement attirant son attention. En se rapprochant, la personne seule semblait elle aussi armée. Mais pas d'une vulgaire hache ou d'une épée de basse facture. Il s'agissait de plusieurs bouts de métal de taille conséquente assemblés ensemble. Maintenant qu'elle voyait l'arme, elle ne pouvait pas en détacher son regard avant de l'avoir analysé entièrement. Il s'agissait d'une longue lame blanche surmontée d'un pommeau noir, ce dernier se prolongeant sur tout le côté non tranchant de l'arme. L'épée semblait extrêmement effilée et aussi lourde à porter que sa taille l'indiquait. Mais le plus choquant était l'extrême impression de froid qu'elle dégageait, comme si la température baissait au fur et à mesure que Naeliel approchait du groupe. Cependant, elle était encore assez loin. Mais le silence inhérent aux alentours lui permettait d'entendre le dialogue entre ces deux groupes. Dont l'un qui, composé d'une seule personne, ne semblait subir aucun malaise face à cette situation. Même de dos:


"Aller, rend toi Faucheur! Nous sommes en supériorité numérique face à toi!
-Euuuh... Chef, je le sens pas trop ce coup là, il a rasé des villes pleines de gardes à lui seul il paraît..."

Naeliel s'arrêta à mi-chemin, se mettant en position derrière un arbre au bord du chemin, afin de mieux observer la scène. Face à ce voyageur mystérieux, il y avait une trentaine d'hommes armés. Les deux qui venaient de parler se situaient devant. Le plus grand avec sa hache et ses cicatrices devaient être le chef. Le deuxième plus petit était donc sans doute le sous chef. Ce dernier d'ailleurs, ne semblait pas rassuré. D'une manière peu habile, le chef de troupe reprit:

"Ce ne sont que des rumeurs, regarde ce gars! Il a l'air d'être aussi inoffensif qu'un bâton de bois vermoulu!
-C'est vrai chef, mais son épée..."

En effet, le dit voyageur ne bougeait pas. Il semblait presque inhumain. Il émanait de lui une froideur réelle, de sorte à ce que de la brume légère sortaient des bouches prenant leurs profondes inspirations précédentes à un combat déjà imminent. Du moins, du côté des bandits:

"Tss, calmez vous mes amis, ce type ne s'attaque aux villes que la nuit, personne ne l'attend, c'est un lâche et un fourbe!"

Le regard du second changea, comme rassuré par les paroles de son supérieur. Cependant, à bien observer les autres ne semblaient pas tous à l'aise. Le chef tendit sa hache vers le voyageur:

"Aller, rend toi Faucheur! Nous sommes prêts à nous battre jusqu'à la mort s’il le faut! La mission qui nous a été confiée ne stipule pas de te ramener vivant pour la prime!"

Plusieurs des mercenaires acquièrent à ces paroles. Cependant, ledit "Faucheur" ne répondit pas. Son corps n'oscilla pas d'un pouce.
De là où elle était, la dragonne ne pouvait apercevoir qu'un homme d'assez grande taille et de carrure un peu plus développée que la moyenne, recouvert tout le long d'un manteau en cuir et affublé d'une capuche provenant du même vêtement. "Le Faucheur", un nom que tout le monde connaît. Un criminel de la pire espèce, qui a commis les plus graves délits. Ceux-là allant du meurtre basique jusqu'à des villes incendiés, si ce n'est plus. On racontait qu'il était un monstre vivant, voir pire. A voir cet homme encapuchonné, elle ne pouvait pas non plus douter de qui il était. Il s'agit de quelqu'un de dangereux. Mais pour cette demoiselle camouflée, le seul danger existant serait d'éprouver des émotions.
La scène promettait d'être intéressante:


"Bon très bien, je vois que tu ne veux pas parler. Mais je ne suis pas un idiot! Même si tu ne réagis pas, je ne vais pas envoyer des hommes te ligoter. C'est sans doute ton plan, tu en profiterais pour les massacrer par surprise. C'est la solution de la mort que tu as choisis, et c'est avec grâce que je vais appliquer ta sentence!"

Rabaissant d'un coup sa hache vers le sol, il fit signe de l'autre main à sa troupe d'attaquer. La dragonne n'avait jamais vu quelqu'un se battre contre trente personnes. Surtout si ce quelqu'un a encore son arme dans sa gaine.
A l'unisson, les soldats à l'avant du peloton se jetèrent sur l'homme à l'épée géante tandis que ceux plus en arrière se déplaçaient pour venir l'encercler, afin de le frapper mortellement de toutes part.
Mais l'assaut s'arrêta bien vite.
La hache du chef s'abattit en un mouvement puissant vers son adversaire, avec toute la conviction qu'une victoire assurée peut prodiguer. Il poussa un cri d'effort rauque, dénotant une prouesse de force assez spectaculaire. De là où elle était, la jeune fille aux cheveux blonds pu voir le coup s'arrêter dans une souplesse remarquable:


"Que?..."

Surpris, le chef ne comprit pas ce qui lui arriva ensuite. La lame de la hache fut simplement arrêtée dans son mouvement par la main gantée du Faucheur, à bout de doigt. Son autre main vint d'un mouvement rapide saisir la gorge du chef. Ce qui eu pour effet d'arrêter tout les subalternes dans leurs mouvements actuels:

"Arg, tu es fort..."

Mais l'effet ne dura qu'une demi seconde, puis la troupe reprit son assaut. Il semblait que le voyageur ne s'attendait pas à ça. Sans doute pensait-il que s'occuper du supérieur aurait suffit à calmer tout le monde. Il recula rapidement, soulevant le chef à bout de bras toujours par la gorge et l'entrainant avec lui. Même si ses soldats allaient attaquer, ils ne passeront pas par dessus le corps de leur chef.
Grave erreur. Tout en reculant, le Faucheur détendit son bras gauche afin de ramener le chef vers lui. Il synchronisa son genou avec ce mouvement, le faisant monter rapidement et rencontrer avec puissance le plexus de son ennemi, le lâchant sur le coup. Le chef tomba lourdement au sol, suffoquant. Il allait rester là un moment, ce qui en faisait toujours un de moins.
Maintenant que la route était dégagée, les soldats de devant commencèrent une attaque groupée afin de donner la possibilité aux autres de contourner.
Les épées et les haches partir à l'unisson du haut vers le bas ou inversement. Pour riposter, le voyageur saisit à la hâte le pommeau de son arme et la dégaina dans un mouvement horizontal circulaire. La longueur de la lame força ses assaillants de gauche à se lancer au sol où à reculer afin de l'éviter. La lame vint s'intercaler entre les différentes épées, les arrêtant toutes à mi-chemin. Toujours en tenant son épée à l'envers, le Faucheur se pencha sur la gauche, remontant son genou vers son torse. Une fois presque à la verticale, il déplia d'un coup sec sa jambe. Son talon vint s'appuyer contre les côtes d'un de ceux qui tentaient de passer dans son dos. Les os ne tinrent pas le choc, et la victime s'écroula au sol dans des cris de douleurs atroces. Rapidement, le Faucheur se décala dans la brèche que sa lame avait créée en pivotant. Il se retrouva ainsi dos à un des arbres bordant le sentier, l'épée à la main, prêt à faire face à ses assaillants.
Naeliel était impressionnée. Il avait l'air d'un combattant robuste, ce serait dommage qu'il meurt. Mais si il avait choisit de combattre, l'avenir de sa vie était son problème. Tout de même, elle aimerait bien lui parler. Quelque chose l'intriguait, elle aurait bien voulu voir son visage, son expression. Ainsi, elle aurait pu comprendre ce que ce dernier ressentait à ce moment précis.
Son vœu fut réalisé assez vite, quand trois des soldats tentèrent de prendre le voyageur par estocade. Étant plus grand qu'eux, il savait qu'en se lançant sur un des deux côtés il prendrait les coups des autres soldats. Il n'eut donc d'autre choix que de se baisser tout en faisant remonter sa lame afin de dévier les armes pouvant éventuellement causer son décès. Ce ne fut pas une arme qui lui retira sa capuche, mais la vitesse de descente de son corps. En même temps que la lame emportait les armes de ses adversaires vers le haut, une longue chevelure d'un blanc tel le lait se rependit le long de ses épaules et de son dos. Elle aurait presque été jalouse, car ils étaient aussi longs que les siens.
Dès que les surfaces effilées touchèrent la lame de l'épée géante, le Faucheur décala deux de ses doigts tenant le pommeau vers l'intérieur de celui-ci. Ainsi, tout en tenant son épée, il tourna sur lui même accroupi en tendant la jambe droite. Il balaya de fait ses trois attaquants précédents tout en gardant son épée dans la même position, la reprenant en main de façon droite, tel que l'on tient une épée de manière normale. Il prit appui sur ses jambes afin de se remettre debout rapidement, toujours en position de défense. Voyant ce spectacle, plusieurs des mercenaires, et en outre les moins rassurés du départ, commencèrent à s'écarter du peloton:


"Euuh... Il ne tue pas, mais il va quand même tous nous battre!
-C'est un monstre! Il ne peut pas tenir tête à autant de personnes en même temps!"

Répondit un moins couard. Il est vrai qu'il semblait épargner leurs vies. Naeliel ne l'aurait pas fait, et n'aurait pas non plus cherché à avoir une position avantageuse. Elle aurait simplement attaqué de la façon la plus meurtrière possible, ce qui, compte tenue du niveau des mercenaires, aurait largement suffi. Les efforts déployés par ledit Faucheur afin de ne pas tuer étaient visible dans tout ses mouvements. Il était tel un guerrier possédant une telle expérience du combat qu'il serait obligé de limiter sa puissance afin d'avoir encore du plaisir à combattre. Pourtant, la dragonne aurait jurée qu'il ne faisait pas ça pour le plaisir. Sa façon de se battre était parfaite, mais semblait sans aucune intention mauvaise. Du moins c'est ce qu'elle voyait. Pour les personnes à l'intérieur du combat, la situation semblait différente.
Sur de lui, le Faucheur lança son épée sur le côté, envoyant sur ses adversaire une longue lame horizontale à l'air aussi tranchante que menaçante. Le coup était facile à arrêter, mais le premier à le recevoir, mettant son épée en travers afin de parer se fit emporter par la puissance de l'impact, atterrissant directement au sol. L'attaque eu le même effet sur les deux cibles suivantes, seulement les autres eurent la présence d'esprit de s'écarter. Il était plus fort que pouvait le prévoir sa carrure, mais il fallait s'y attendre de quelqu'un qui maniait une telle arme. Il fit un pas en avant, la lame toujours tendue à la fin de sa trajectoire, et se servit de ce pas pour pivoter et offrir un nouvel assaut de lame à ses adversaires. Cependant, il envoya sa lame du côté plat. Grâce à son allonge, il envoya valser cinq de ses adversaires, tous s'entrainant les uns contre les autres. Un craquement sonore signifia à la première victime que son épaule venait d'être réduite en miette. A la fin de son mouvement, le Faucheur fit revenir sa lame au bas de son pied droit.
Son visage était totalement inexpressif. Il était renfermé et d'un froid absolue. Avec un peu plus d'émotion affiché, il serait plutôt beau, pensa Naeliel. Mais elle était déçue, avec le Faucheur, elle s'attendait à un bain de sang. L'idée avait sans doute traversé de même l'esprit des assaillants qui prirent dans l'ensemble leurs jambes à leurs cous. Dans l'ensemble, car six d'entre eux se tordaient encore de douleur au sol, certains pour os brisés d'autres pour cause de rencontre violente avec le sol.
Mais l'un deux était resté. Le plus téméraire d'entre eux ou le plus fou sans doute. Ou alors, il ne s'agissait que d'un gamin. Âgé d'à peine seize ans, il tenait son épée tremblotante à deux mains devant lui, pointée vers le Faucheur. Son visage rongé par la peur et les genoux presque flanchant:


"R... Rend toi monstre! La... La justice te réclame!"

Sa voix était emprunte d'une terreur justifiée. Lentement, le Faucheur remit sa lame dans ses ceintures et, sans regarder le gamin, tourna les talons et reprit son chemin:

"Re... Reviens, couard!"

Le petit s'élança sur lui, tentant une estocade au milieu du dos. Dans un réflexe, le Faucheur se décala sur le côté, frappa du tranchant de sa main gauche le poignet du gamin tenant l'épée, la faisant lâcher l'arme et soulevant la main maintenant libre vers le haut. Il continua de tourner et envoya le tranchant de son autre main frapper la base du cou de l'enfant, le projetant au sol avec force dans un gargouillis de voix étouffée.
Le Faucheur soupira longuement, et toujours sans un mot, reprit sa route. Rien n'aurait pu surprendre Naeliel à ce moment, si ce n'est cet homme tout de noir habillé sortant discrètement et rapidement de derrière un arbre que l'homme aux cheveux blanc venait de dépasser. L'assassin se glissa dans son dos avec une agilité presque hors norme, et lui planta violemment une dague entre les deux omoplates. Un seul homme avait été plus efficace qu'une trentaine. Sans doute un chasseur de primes qui avait profité de la diversion de plusieurs de ses concurrents. Naeliel hésita, c'était manifestement la fin du Faucheur. Elle ne savait pas si elle devait s'en réjouir, le personnage semblait intéressant. Un jouet de qualité. Mais finalement, il n'avait pas l'air si solide. Au cas où, elle resta prudemment cachée à observer la suite.

Le Faucheur chuta vers l'avant tandis que l'assassin s'apprêtait silencieusement à lui envoyer un autre coup de dague dans le flanc gauche, de sa deuxième main ambidextre. La chute du Faucheur fut stoppée par son pied droit. S'interposant avec force à un angle suffisant pour le propulser en arrière. Il pivota son épaule et envoya son bras entier, poing serré, percuter le visage et le haut du torse de l'assassin. Ce dernier recula en titubant légèrement, se tenant un nez qui venait de se mettre à saigner sous l'impact:


"Oh!"

Lâcha Naeliel de surprise, qui ne le fut que plus de sa réaction.
Le Faucheur se remit droit, et vint tâter de sa main gauche l'arrière de son dos afin d'en déloger le couteau. Ce qu'il fit au moment où l'assassin réussit à sortir victorieux de sa lutte contre la douleur:


"Hmm, je ne m'y attendais pas, tu es bien plus résistant que tu devrais l'être.
-Désolé d'être un "monstre"."

Ça y est, il avait parlé. Sa voix était chargée d'ironie. Elle n'était même pas agacée ou énervée malgré la tentative de meurtre subie il y a quelques secondes. Sans relever, l'assassin se jeta sur le Faucheur, attaquant de deux fronts avec ses dagues. Le voyageur dont le sang perlait abondamment le long du dos lui attrapa les deux poignets, lui écarta les bras et envoya son front rencontrer violemment celui de son opposant. Cette fois, le nez explosa littéralement dans une gerbe de sang et un râle. Il lui faudra bien plusieurs mois pour se remettre de ça.
Le Faucheur tourna la tête vers Naeliel, une gerbe de sang ne lui appartenant pas étalée sur le front. Presque prise de cours par la froideur du regard, elle sortie de sa cachette. Mais elle n'évoqua aucun intérêt pour l'homme aux cheveux blanc. Ce dernier reprit directement sa route sans se préoccuper plus d'elle.
Il était un Beorc. Et elle adorait les Beorcs. Leur mental était pervertible à l'infini et donc contrôlable. Et même si ils étaient faibles, ils étaient beaucoup, donc chaque pion était remplaçable. Une fois une tâche prédéterminée réussite par celui qui a les capacités de la réaliser, on pouvait le jeter et en utiliser un autre. Mais lui, il faisait parti de ceux dont on n'a aucun intérêt à jeter. Et puis il était pas mal, de quoi s'occuper les soirées où des fois elle a envie d'une compagnie bien précise.

Il ne lui fallu que quelques secondes au pas de course pour le rattraper. Il n'était vraiment pas vindicatif, même si cela fait toujours un petit quelque chose de marcher à côté d'un des criminels les plus recherchés au monde. Même si à sa façon de combattre on dirait plutôt qu'il n'a rien du monstre que l'on décrit:


"Ce n'est pas très gentil de ne pas faire attention à une demoiselle traumatisée par la bataille qui vient d'avoir lieu à cause de vous!"

Peu importe sa réponse, la dragonne aux yeux pourpre avait du répondant. Elle savait s'y prendre, et ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle puisse lire en lui comme un livre ouvert. Pour elle, cela revenait au meilleur moyen de manipuler quelqu'un. Cependant, sans même la regarder, l'homme aux cheveux blanc continua son chemin. Un peu ennuyée et faignant le désespoir, Naeliel tenta un nouvel assaut:


"Mais, vous ne pouvez pas m'ignorer! Qu'est ce que je fais moi maintenant?
-Personne n'est jamais venu me dire que je n'étais pas "très gentil" de cette façon. Vos intentions ne sont pas nettes."

La phrase était sèche et froide. Elle reflétait bien là toute l'impassibilité dont était capable l'être humain si on poussait cette dernière à la limite. Il avait vu juste. Étonnant, car la plupart du temps, ce que les hommes voyaient était son décolleté:

"Ah, comment voulez-vous que j'ai peur en voyant que vous n'avez même pas tué ces hommes alors qu'ils vous surnomment "Le Faucheur"! Car soit c'est un mensonge, soit beaucoup de gens se trompent!"

Le Faucheur marchait imperturbablement dans la direction indiquée par la route, à une vitesse plutôt lente. Il trainait presque des pieds. Cela permettait à Naeliel de marcher à ses côtés tout en tournant son buste à moitié vers lui afin de pouvoir lui parler correctement, ce qu'elle semblait être la seule à vouloir. L'énergumène ne répondait pas, et elle sentait que prendre une marge d'avance sur lui allait être un travail fastidieux:


"En tout cas, voulez vous bien que je voyage avec vous un petit moment?
-Cela ne vous causerait que des ennuis.
-Mais non! Aux vues de votre puissance, je n'ai aucun soucis à me faire!
-Je ne sais pas protéger les autres.
-De toutes façons, ce n'est pas moi que l'on attaquera. C'est vous le Faucheur non?"

Il ne répondit pas. En tout cas, il devait savoir intérieurement que quelles que soit ses protestations, la demoiselle de court vêtu ne partirait pas. Cette dernière choisit de se taire dans le but d'analyser la situation. Ce qui la déstabilisait un peu était l'aptitude de cet homme à rester fermé. Pour la plupart, les gens avaient une démarche propre, une façon de répondre qui permettait de comprendre leur humeur actuelle. La, il n'y avait rien. Rien de plus que ce à quoi on pouvait s'attendre à comprendre sur le sens de la vie en fixant un bloc de marbre. Quelques minutes passèrent, où seul le silence propre à la campagne locale se fixait dans l'air. Elle se demandait quoi dire. Comment allait-elle pouvoir aborder correctement le Faucheur, ou tout du moins dans le sens où elle en tirerait profit? Sans vraiment trouver de réponse à cette question, ce fut lui qui fit le premier pas:

"Que me voulez-vous, exactement? La plupart des gens comme vous sont de simples personnes attirées par les risques. Et qui ont d'ailleurs tendance à décéder bien vite quand ils restent à mes côtés.
-Eh bien... Disons que je préférerais vous avoir comme allié que comme ennemi.
-Si vous me dîtes ça, c'est que vous avez quelque chose à vous reprocher.
-Comment?"

Quelle présomption avait-elle eut de penser qu'elle pourrait se servir de lui! Il avait l'air d'être une âme en peine, torturée et tourmentée à l'infini. Mais ce n'était pas le cas, ou seulement en partie. Mais comment osait-il? Elle ruminait de l'intérieur, ne laissant rien transparaître sur son physique. Elle ne savait certes pas grande chose de lui. Que ce que l'on en racontait: qu'il était un monstre, un tueur d'enfants, un psychopathe, le responsable de toute catastrophe et bien d'autres. Pourtant, il semblait en être autrement. Il la menaçait, il devait donc être le genre d'homme à propager sa justice personnelle. Ce qui pouvait fonder certaines rumeurs sur lui, surtout si sa notion de "justice" équivalait à celle d'un Chaman qu'elle avait rencontré il y a peu.
Mais il fallait se calmer, et essayer de reprendre le dessus:


"Qui voudrait avoir le soit disant "Faucheur" comme allié? Seulement le genre de personne qui est dans une situation loin d'être nette. Le type de personne dont les idées de massacre d'innocents n'effleure même pas la culpabilité. Ce sont les qualificatifs dont on m'impute, et que ce soit la vérité où non, je déteste ce genre de personnes."

Elle ne répondit pas dans un premier temps, l'arrogance du personnage mêlé à sa façon de rester mystérieux sur lui-même rendait Naeliel perplexe. A quel jeu jouait-il? Il se plaisait peut-être à passer pour un meurtrier, ou alors avait-il l'habitude que l'on ne le croit pas? La dragonne n'aimait pas ça. C'était elle qui était déstabilisée. Dérouter les gens, c'était son rôle habituel et non pas sa position:

"Non non! Vous vous trompez, je ne suis qu'une simple vagabonde. Je n'ai de problèmes avec personne, je ne recherche pas le risque!
-Quel intérêt de chercher à m'avoir comme allié, dans ce cas?
-Quand on vous voit vous battre comme ça, sans blesser personne malgré la réputation que vous avez et que l'on est une jeune fille sans défenses comme moi, forcément!... J'ai toujours peur sur les routes, il y a tellement de bandits qui pourrait essayer de profiter de moi après m'avoir capturée!"

Lui qui ne l'avait pas regardée continua à en faire autant. Naeliel, quand à elle, sentait avoir reprit le dessus:

"Alors établissez-vous. Si cela vous fait peur d'être une vagabonde.
-Ah? Mais je ne peux pas! Je n'ai... Nul par où aller..."

Elle feint brillamment un visage triste. Même si en réalité elle n'avait bel et bien nulle part où aller. Le Faucheur soupira légèrement:

"Je ne peux rien faire pour vous aider. J'ai mon propre destin à suivre. Vous devriez en faire autant.
-Alors peut-être que mon destin est de faire un bout de chemin avec vous? Je suis Naeliel, enchantée."

A ces mots il ne répondit rien, ce qui la fit sourire. Elle avait réussit à gagner le jeu, même si le résultat atteint n'était pas celui qu'elle espérait initialement. Mais il restait beaucoup de chemin jusqu'à la prochaine ville, et nul ne sait ce qu'il adviendra d'ici là. Sauf peut-être, le destin.
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