Mauvais, vraiment mauvais... On pouvait même dire que ça sentait fortement le roussi pour notre ménestrel préféré, il courait dans les rues du petit village de Clervy, dans le nord de Daien, pourchassé par un groupe d'hommes pas forcément contents après lui. Il fallait dire aussi qu'il n'avait pas été malin de la part de Jyrkain de conter haut et fort dans la taverne du coin ses aventures avec ses amis Laguz dans la forêt de Gallia, pas à l'approche d'un probable conflit entre les deux races, et surtout pas devant une assemblée plus ou moins raciste. Le narrateur ne pourra pas vraiment non plus expliquer comment le petit Barde avait fait pour réussir à sortir de la dite taverne sans trop de souci, mais il avait maintenant cinq hommes aux trousses.

Se faufilant de ruelles en ruelles, le hasard et la chance légendaire de Jyrkain le fit tomber dans une voie sans issue, une impasse. Affolé, il tenta désespérément de grimper la façade devant lui, mais sans succès. Et cette simple tentative fut suffisante à ce que les cinq types ne le rattrape et ne bloque la sortie de leurs corps.

" Ahem, enfin messieurs plutôt que de bêtement me tabasser ♫
Parlons et discutons, qu'en dites-vous, en toute amitié ? ♫ "

" Ravale tes paroles bouffon, t'es allé trop loin tout à l'heure...! Espère pas t'en tirer aussi facilement. Zieg ! Fred ! Choppez-moi ce nain ! "

Deux des types s'approchèrent de Jyrkain et prirent chacun un bras, histoire de l'immobiliser sur place. Le pauvre barde était à la merci de ces filous, et le plus bavard ne se gêna point pour lui administrer un coup de poing dans l'estomac. Coup qui arracha un cri de douleur au malheureux qui se retrouva sur le coup un peu groggy, mais qui reprit très vite ses esprits quand il remarqua que un des autres types lui avait subtiliser son Lute et, dans un sourire narquois, le plaça en sorte à ce qu'il puisse le casser directement avec son genou droit.

" Eh non...! Enfin je veux dire, ça serait injuste que de faire ça ♪ La perte de son instrument pour un artiste signifie son trépas ♪ et... "

" Dans ce cas crève, artiste à la noix ! Ah ! Ah ! Ah ! "

Son Lute, l'instrument qu'il possède depuis des années, avec lequel il avait bercé sa sœur dans sa jeunesse et avec qui il possède tellement de souvenirs tout au long de sa vie jusqu'à présent... allait être détruit ? Non c'était impossible, pourquoi cette tragédie arriverait, Jyrkain n'a toujours fait que ce qui lui bon, alors pourquoi la Déesse souhaitait le punir aussi sévèrement ? Non il ne pouvait pas le permettre, et du fond de son cœur il pria Ashera pour que d'une manière ou d'une autre, cette partie de son âme même puisse survivre.

Une fois tout blanc, une fois tout noir, puis deux fois tout blanc avant de revenir à la réalité. Mais cette dernière n'était pas si dure, à présent... Un homme coiffé d'un bandana noir et à l'air robuste venait de se joindre à la fête, et heureusement pour Jyrkain ce petit coup du sort était plutôt en sa faveur. L'homme salvateur récupérait le fameux Lute ô combien important pour le ménestrel, et cela sans vraiment regarder la trajectoire ce celui-ci. L'instinct et la précision de cet individu étaient redoutables, et nul ne laissait croire qu'il serait une proie facile pour la petite troupe saccageuse de barde à la langue pendue. Tous les regards étaient désormais portés vers lui, jusqu'à ce que l'homme ayant reçu le premier coup de poing se releva et fonça directement vers lui, poing tendu.

" Fais pas l'mariole, toi ! "

Il asséna d'un coup une droite phénoménale à l'inconnu, qui ne tituba pas le moins du monde, bien au contraire, il semblait avoir apprécié l'effet de style apportée par cette action, tandis que l'autre homme le regardait d'un air dégluti.

" Lâchez le mioche et tabassez-moi ce connard ! Allez qu'est-ce que vous attendez !? "

Aussitôt toute la smala se mirent en position de combat, lâchant Jyrkain qui n'était plus du tout le centre d'intérêt maintenant, loin de là. Il se jetèrent simultanément sur l'homme au bandana sans poser plus de questions, et tout ce que pu faire le ménestrel était de regarder la scène, ni plus ni moins. Dans un dernier relan de vivacité, il cria avant :

" Je vous en prie, faites tout votre possible mais je vous en conjure, n'abimez pas mon instrument ! "